SOMMAIRE
Présidence de Mme Sandrine Mazetier
1. Accès au logement et urbanisme rénové
Discussion générale (suite)
Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement
M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques
Amendements nos 16 , 58 , 147 , 59 , 19 , 384 , 427 rectifié , 549 , 441 , 446 , 550 , 123 , 457 , 46 rectifié , 383 , 148 , 17 , 163 , 609, 582 et 610 , 282 , 508
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques
Amendements nos 102 , 186 , 197 , 125 , 459 , 60 , 165 , 75 , 199 , 61 , 167 , 469 , 201 , 647 rectifié , 648 , 611 , 649 , 650 , 126 et 127 , 614 et 615 , 478 , 551 , 616 à 618 , 665 , 619 à 622 et 624 , 483, 484 et 500 , 479
Mme la présidente. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (nos 1499, 1670).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de quatre heures sept minutes pour le groupe SRC, dont deux cent trente-neuf amendements sont en discussion ; cinq heures trente-sept minutes pour le groupe UMP, dont deux cent vingt-quatre amendements sont en discussion ; une heure trente-six minutes pour le groupe UDI, dont soixante-quatre amendements sont en discussion ; quarante-huit minutes pour le groupe écologiste, dont cinquante-quatre amendements sont en discussion ; trente-huit minutes pour le groupe RRDP, dont trente-cinq amendements sont en discussion ; trente-neuf minutes pour le groupe GDR, dont quarante-cinq amendements sont en discussion et vingt minutes pour les députés non inscrits.
Mme la présidente. Cet après-midi, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à M. Martial Saddier.
M. Martial Saddier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nos rentrées parlementaires se suivent et se ressemblent. Après avoir débuté l’année 2014 sur les chapeaux de roue, en examinant pendant plus de trente heures la semaine dernière le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, nous voici à nouveau réunis en séance publique pour l’examen en deuxième lecture du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. Je tiens à saluer les fonctionnaires de la commission, qui ont été sur le pont jour et nuit la semaine dernière et qui continuent d’être extrêmement sollicités, comme vous-même, madame la présidente.
Initialement prévu au mois de janvier, l’examen en deuxième lecture de ce monstre législatif de quatre-vingt-quatre articles par la commission des affaires économiques a été avancé à la mi-décembre, précipitant un calendrier législatif déjà extrêmement chargé en fin d’année. Nous devons donc, une fois encore, travailler dans l’urgence, ce qui n’est absolument pas selon moi, et je crois que cet avis est très largement partagé sur les bancs de l’UMP, le gage d’un travail parlementaire efficace et de qualité. Rappelons-nous les paroles prononcées par le Président du Conseil constitutionnel à l’occasion de ses vœux il y a quelques jours.
M. Guillaume Chevrollier. Absolument !
M. Martial Saddier. D’autant qu’à l’issue de la navette parlementaire, le projet de loi a été profondément remanié – c’est le moins que l’on puisse dire. En effet, de nombreuses dispositions, dont certaines parmi les plus emblématiques, qui avaient été longuement discutées par notre assemblée et finalement adoptées en première lecture, ont été totalement réécrites par nos collègues sénateurs.
À ce calendrier resserré, il faut ajouter les six cents amendements déposés en commission des affaires économiques, dont environ cinq cents sont issus de votre majorité. Cinq cents amendements déposés par la majorité en deuxième lecture : rendez-vous compte, chers collègues !
M. Jean-Marie Tetart. C’est incroyable !
M. Martial Saddier. C’est du jamais vu ! Et cela en dit long sur la qualité du texte initial.
Les quelque sept cents amendements que nous allons examiner à partir d’aujourd’hui sont la preuve irréfutable, et je l’avais déjà souligné dans ma motion de renvoi en commission en première lecture, que ce projet de loi aurait mérité davantage de concertation au sein de votre majorité parlementaire. C’est la preuve aussi que ce texte aurait nécessité une meilleure préparation en amont. Pour un projet qualifié d’historique sur le site internet du Gouvernement, et même d’acte II de la politique du logement de votre majorité, il est bien dommage que nous ayons à travailler dans une telle précipitation.
En outre, j’ai bien peur que nous ne soyons prochainement confrontés à un réel manque de coordination et de cohérence entre les différents textes qui nous ont déjà été soumis sur les thématiques du logement et de l’urbanisme, qui se sont multipliés depuis le début de cette législature : l’encadrement par décret de l’évolution des loyers à la relocation dans les trente-huit plus grandes agglomérations ; la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, texte que nous avons examiné à deux reprises, la première loi ayant été déclarée inconstitutionnelle ; le plan d’investissement pour le logement du 21 mars 2013 ; la loi du 1er juillet 2013 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction ; le Plan Campus, enfin, pour le logement étudiant. Sans compter que ces thématiques seront également reprises dans les différents volets de la réforme de la décentralisation, dont nous poursuivrons l’examen, ainsi que dans la future loi de programmation sur la transition énergétique.
Quelle sera donc, madame la ministre, la réelle articulation entre toutes ces mesures, une fois qu’elles seront adoptées ? Ne court-on pas le risque – en réalité, nous le courons, c’est certain – de les voir se gêner les unes les autres ? Autant de questions déjà soulevées au moment de la première lecture, et qui demeurent sans réponse aujourd’hui encore. Un autre exemple : je crois que l’on discute actuellement au Sénat, avec M. Lamy, de la politique de la ville. Madame la ministre, vous qui êtes responsable de ce grand ministère, rappelez à M. Lamy si vous le croisez que nous souhaiterions avoir la liste des quartiers éligibles à la politique de la ville d’ici le vote définitif.
Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Vous recommencez ? Ne me demandez pas cela à moi !
M. Julien Aubert. Vous êtes sympathique, nous espérons que vous nous la donnerez !
M. Martial Saddier. Cette loi a été votée en première lecture sans que nous ait été transmise la liste des quartiers potentiellement éligibles dans nos collectivités. C’est la première fois qu’en telle chose se produit, aussi bien en première qu’en deuxième lecture. C’est, je le répète, du jamais vu. Si vous croisez M. Lamy, merci de lui renouveler notre demande, madame la ministre !
S’agissant de la majoration obligatoire de la valeur locative cadastrale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, cette taxe aurait eu des conséquences désastreuses pour nos agriculteurs, pour les terrains verts, pour les zones humides et pour la biodiversité de notre pays. Sur ce point, et je vous en remercie, madame la ministre, vous avez fait un début de marche arrière, en soustrayant à cette majoration les terrains constructibles pourvus d’un bail agricole.
Mme Cécile Duflot, ministre. Oui !
M. Martial Saddier. La mesure est suspendue pour une année et je souhaite vraiment que nous puissions, avec l’Association des maires de France, trouver l’équilibre que votre décret de l’été dernier n’a pas permis d’instaurer.
Sur le fond, madame la ministre, votre projet de loi reste insatisfaisant et en deçà de nos attentes comme de celles des professionnels. Concernant le volet logement, il est nécessaire de prévoir des mesures plus contraignantes pour lutter contre l’habitat indigne et les abus relevant de certaines pratiques, telles que celles des marchands de liste. Toutefois, les moyens que vous préconisez ne nous semblent absolument pas indiqués pour y parvenir. Malgré les nombreuses mesures qui amélioreront la situation des locataires, l’examen au Sénat n’a pas permis de rééquilibrer les relations entre ces derniers et leurs propriétaires. Ce texte jette par ailleurs le discrédit sur l’ensemble des professionnels de l’immobilier, alors que les pratiques abusives et illégales ne sont l’apanage, il faut bien le reconnaître, que d’une faible minorité.
Pourquoi faire le pari d’une complexification croissante de ce secteur en augmentant les contraintes qui pèsent sur les professionnels – tous les professionnels, y compris sur ceux qui sont exemplaires ? Et il y en a !
M. Julien Aubert. Très bien !
M. Martial Saddier. Pourquoi imposer la rédaction d’un bail type alors que certaines mentions obligatoires préalablement définies pourraient suffire ? Alors que le Président de la République a présenté jeudi dernier ses mesures en faveur du choc de simplification, ce que vous nous proposez, madame la ministre, va nous mener inévitablement vers un choc de complexification, dans un secteur qui rencontre actuellement de graves difficultés. Je vous pose la même question qu’à M. Le Foll la semaine dernière : seriez-vous capable de présenter votre texte au fameux comité des douze sages, chargés de simplifier la vie des Français ? Je crois qu’après l’avoir passé au crible, ils supprimeraient un certain nombre de dispositions !
Autre mesure dont la mise en œuvre s’avérera, je n’en doute pas, particulièrement complexe : la garantie universelle des loyers. Après la réécriture complète du dispositif, nous sommes bien loin aujourd’hui de l’ambition initialement affichée par votre Gouvernement. Il est par ailleurs à craindre que les conditions très restrictives attachées à cette garantie universelle ne la rendent en partie inapplicable. Il est dommage aussi qu’à ce stade de l’examen du projet de loi nous n’ayons toujours pas pu avoir de réponses claires concernant le coût du dispositif et son financement.
Par ailleurs, et je sais que vous êtes de mon avis sur ce point, madame la ministre, je défendrai tout à l’heure en ma qualité de président du Conseil national de l’air un amendement demandant la publication d’un rapport gouvernemental sur les modalités de prise en compte de la qualité de l’air intérieur dans les informations obligatoires à destination des acquéreurs et des locataires. Près de 40 % des logements présentent au moins un problème de qualité de l’air intérieur. Or c’est de l’air intérieur que nous respirons les trois quarts de notre temps – et nous respirons 26 000 mètres cubes d’air par jour !
M. Julien Aubert. Et certains davantage, car ils pompent l’air des autres !
M. Martial Saddier. Or la pollution de l’air intérieur est beaucoup plus nocive que la pollution extérieure. L’inscription de la qualité de l’air dans ce projet de loi relatif au logement sera donc un signal fort envoyé par votre gouvernement sur ce nouvel enjeu de santé public.
Tout comme sur le volet logement, les dispositions relatives à la modernisation des documents de planification et d’urbanisme sont très décevantes. Elles auront inévitablement pour conséquence de réduire de façon considérable les moyens des maires dans ce domaine. Il suffit de prendre l’exemple des articles 63 et 64, qui donneront aux EPCI une compétence de principe en matière d’élaboration des plans locaux d’urbanisme, et qui renforceront le PLU intercommunal. Je ne suis pas, à titre personnel, défavorable au PLU intercommunal, mais jusqu’à présent, l’initiative en a toujours été laissée au maire. Avec ce texte, vous allez à l’encontre du principe de libre administration des collectivités territoriales et du principe séculaire cher à l’Association des maires de France qui veut qu’on leur laisse l’initiative.
Sur tous ces bancs, nous sommes conscients que le PLU est la traduction d’un projet politique validé lors des élections municipales et qu’il nécessite donc une adhésion forte des élus. Or, avec de telles dispositions, la compétence du maire en matière d’urbanisme sera liée : il pourra certes continuer de délivrer les permis de construire, mais il devra impérativement le faire dans le cadre d’un PLUI et d’un schéma de cohérence territoriale. Inutile de vous dire qu’il sera tout juste là pour signer les parapheurs le dimanche.
M. Michel Piron. C’est excessif ! (Sourire)
M. Martial Saddier. Or, c’est le maire qui est le premier interlocuteur des habitants de son territoire. C’est le maire, monsieur Piron, qui est l’acteur principal de la démocratie locale. C’est encore le maire qui connaît le mieux l’histoire de sa commune, de chaque rue, de chaque ruelle, de chaque intersection et de chaque habitation, pour ne pas dire de chacune et chacun de ses habitants. C’est donc le maire qui est le plus à même de comprendre les défis auxquels sa commune est ou pourra être confrontée. C’est enfin le maire qui peut efficacement définir la politique urbanistique adaptée à son territoire.
Certes, ces dispositions ont été assouplies au Sénat. Mais en les adoptant en l’état, ne risquons-nous pas d’ouvrir la porte à des modifications encore plus larges des pouvoirs attribués aux maires ? Pourquoi ne pas avoir inscrit la mise en place du PLU intercommunal dans une vaste réflexion sur les missions et les moyens dévolus à chaque échelon local ? Était-il vraiment judicieux d’introduire les articles 63 et 64 dans un texte déjà très dense et d’une grande technicité, au moment même où le Président de la République vient à nouveau d’annoncer un grand choc sur la réforme territoriale ? C’est tout de même incroyable : vous avez abrogé le conseiller territorial, sauf que le Président de la République nous a dit le contraire cet après-midi ! Nous ne savons plus où nous en sommes. De grâce, éclairez-nous sur votre vraie vision de l’organisation territoriale.
Supprimées au Sénat, les mesures concernant l’urbanisme commercial et l’obligation pour un SCOT d’inclure au moins deux EPCI ont été rétablies en commission des affaires économiques. Madame la ministre, vous avez le Conseil national de la montagne sous votre coupe et vous êtes responsable de l’aménagement du territoire. Vous devez savoir qu’imposer qu’un SCOT inclue au moins deux EPCI à fiscalité propre revient à faire fi de 25 % à 30 % du territoire national ainsi que de la spécificité de la loi montagne.
Par ailleurs, malgré la réintroduction des dispositions issues de nos travaux après leur suppression au Sénat, une réforme de l’urbanisme commercial s’avère impérativement nécessaire. Nous attendrons donc avec beaucoup d’impatience l’examen des mesures qui figureront dans le projet de loi sur le commerce de Mme Pinel.
Enfin, le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové réforme le régime des zones à urbaniser en permettant leur évolution tous les neuf ans. L’objectif poursuivi par l’article 65 est plus que légitime car il cherche à encourager la construction de logements. Une nouvelle fois, sa rédaction, bien qu’elle ait été assouplie suite à son passage au Sénat et à l’introduction de l’automaticité du passage en zone naturelle, reste très contraignante. Les pouvoirs du maire seront strictement encadrés pour ce qui est de la maîtrise de son territoire. Des conséquences non négligeables pour la valeur des terrains en termes de déclassement, de risques financiers pour la collectivité, de contentieux et en matière de successions pourraient également être générées par le changement de nature des terrains situés en zone à urbaniser.
Pour conclure sur une notre plutôt positive, je tiens tout de même à saluer les avancées obtenues au Sénat dans la prise en compte de la spécificité des territoires de montagne et des zones rurales où le contrôle de l’urbanisation doit être mieux encadré que sur d’autres territoires. Ces mesures devront être pérennisées à l’issue de nos débats.
Comme je viens de le démontrer, le texte que notre assemblée s’apprête à examiner reste encore trop technique et beaucoup trop dense. Sa mise en œuvre sur le terrain découragera inévitablement les professionnels du secteur de l’immobilier et les propriétaires, et là est le fond du débat. Il ne répondra sans doute pas à la crise que traversent actuellement le logement et le bâtiment. Il ne permettra pas non plus d’atteindre l’objectif de 500 000 logements par an fixé par le Président de la République, madame la ministre, et je pense qu’au fond de vous, vous l’avez compris. Il ne va pas non plus dans le sens du choc de simplification que défend ardemment votre majorité ces dernières semaines car il rendra les documents de planification et les procédures beaucoup trop complexes. Enfin, il réduira considérablement les moyens des maires en matière d’urbanisme.
Madame la ministre, je vous connais bien maintenant et je pense sincèrement qu’au fond de vous, vous souhaitez un texte qui contribue à régler la crise du logement et qui permette d’en construire plus dans notre pays. Et je vous dis sincèrement, après vingt ans de mandat local, que le présent texte, s’il est voté en l’état, en dépit de votre bonne foi, aura l’effet strictement inverse. Vous allez geler la construction des logements dans notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Mathis.
M. Jean-Claude Mathis. Le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové est le cinquième texte relatif au logement qui nous est présenté.
M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques. Et ce n’est pas le dernier !
M. Jean-Claude Mathis. Plus que les textes qui l’ont précédé, propose-t-il de vraies solutions pour mettre fin à la grave crise du logement qui nous frappe ? Son objectif est d’œuvrer contre la fracture résidentielle et de favoriser l’accès de tous à un logement digne et abordable. Beau et vaste programme. Ce projet de loi se veut également une réponse à la tension que subit le secteur locatif.
L’intention est bonne, évidemment, et nous ne pouvons qu’y souscrire. Mais le moins que l’on puisse dire est que ce texte se trompe d’objectif en s’attaquant certes à des sujets sensibles, tels que les rapports entre locataires et bailleurs, les copropriétés ou l’habitat participatif, mais en omettant le problème essentiel, urgent et prioritaire, qui est l’effondrement de la construction.
Ce constat est d’ailleurs partagé, puisque pour pallier la crise du logement, l’objectif du Président de la République pendant la campagne présidentielle était de passer de 430 000 logements construits chaque année à 500 000. Or, seulement 337 000 logements ont été mis en chantier en 2013, soit une baisse de 6,2 % sur les douze derniers mois. Tous les segments du marché, logements collectifs ou individuels, sont touchés. En outre, aucun redressement n’est attendu, selon les économistes, au premier semestre 2014.
L’enjeu essentiel est donc de produire des logements en plus grande quantité, en mettant fin à la crise de confiance, à l’instabilité juridique et fiscale chronique et à la défiance manifestée à l’égard des investisseurs. Je regrette vivement que, s’empêtrant dans des considérations dogmatiques, le projet de loi passe à côté de cet objectif.
Ce projet réforme ainsi les rapports locatifs en instaurant un dispositif général d’encadrement des loyers. Or les loyers élevés ne sont que les conséquences de la situation de tension que nous déplorons tous. La rareté des logements fait que les loyers ne baissent pas, ne baisseront pas et deviennent insupportables pour de très nombreux locataires.
Par ailleurs les dispositifs fiscaux ne sont pas suffisamment incitatifs pour les investisseurs. En outre, il est à craindre que l’encadrement des loyers ne décourage de nombreux propriétaires et investisseurs et entraîne le retrait du marché de trop nombreux logements, l’abaissement des prestations d’aménagement et la perte de confiance dans l’investissement locatif. L’encadrement des loyers risque de précipiter la dégradation du parc existant, de porter un nouveau coup d’arrêt à la construction et de pousser définitivement les investisseurs institutionnels à sortir de ce marché, entraînant une diminution encore plus importante de l’offre.
Le Gouvernement a également souhaité créer une garantie universelle des loyers pour lutter contre les impayés. Après bien des imprécisions, des attaques de la presse, des lobbies et des groupes de pression ont eu raison de cette idée forte. En effet, après avoir été amendé par le Gouvernement, l’article 8 du texte initial est désormais vidé de son contenu. La garantie universelle des loyers n’a maintenant plus rien d’universel puisqu’elle n’est plus obligatoire. Elle ne se substitue ni à la caution, ni à la garantie des loyers impayés. Certains sur ces bancs l’ont qualifiée de nouvelle version de la garantie des risques locatifs, à ceci près qu’elle serait financée par l’État par le biais d’un impôt supplémentaire, et non plus par les propriétaires.
Il est vrai que les dispositions permettant de lutter contre les copropriétés dégradées et l’habitat indigne, celles qui tendent à améliorer la prise de décision en copropriété ou celles qui prévoient la constitution de provisions destinées à financer d’importants travaux de rénovation ou de modernisation sont très intéressantes. Mais en tant que président d’un office départemental, j’aurais souhaité que ces mesures soient complétées par d’autres visant à fluidifier le marché et favoriser la création de nouveaux logements publics et privés, à accompagner les bailleurs sociaux pour renouveler l’offre par la démolition des logements vétustes ou obsolètes et à proposer une offre neuve, cohérente en volume et en prix avec le marché. Il est aussi nécessaire de prendre des mesures pour la gestion du dossier de l’amiante dans le parc social, dont le coût accentuera de fait la baisse de la production neuve. En effet, les coûts de désamiantage ne sont pas compatibles avec les moyens financiers des bailleurs sociaux. Ils obéreront donc leurs finances, et cela entraînera encore une baisse de la production neuve.
Pour toutes ces raisons, je ne voterai pas ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton.
M. Gilles Lurton. Comme l’emploi, l’éducation, la santé et la sécurité, le logement est pour nos concitoyens une priorité. C’est d’ailleurs le premier poste de dépenses des ménages, particulièrement pour les plus modestes et les classes moyennes. Mais pour nombre d’entre eux, c’est aussi un problème du quotidien, accentué par la crise économique et financière. Cette crise du logement porte atteinte au pouvoir d’achat des Français et à leur mobilité professionnelle.
Construire plus est la seule réponse efficace et juste pour endiguer la crise du logement. Or, notre pays ne construit pas assez de logements. Il en construit moins que les années précédentes : l’objectif de 500 000 constructions annuelles fixé par le Président de la République ne sera pas atteint, vous le savez, madame la ministre. Vous-même avez parlé de 300 000 logements cette année, et je doute que vous les atteigniez.
Il manquerait 3,7 millions de logements en France pour atteindre un taux d’équipement équivalant à celui que connaissent nos voisins allemands. Or, entre mars 2012 et avril 2013, seuls 336 000 logements ont été mis en chantier, soit une baisse de 18 % par rapport aux douze mois précédents, et les permis de construire accusent un net repli. Ce gel des transactions et de la construction est la cause majeure de la grogne des entreprises du secteur du bâtiment qui souffrent d’une baisse générale et sévère de leur activité et ne voient pas la reprise poindre à l’horizon.
Aussi, permettez-moi de revenir sur certains points qui me semblent importants. Le premier est l’encadrement des loyers. Cette mesure consiste à encadrer les loyers pratiqués par les propriétaires privés, dont le montant ne pourra être supérieur au loyer médian de référence fixé chaque année par le préfet. Résultat : dans les zones tendues, les loyers ne pourront plus dépasser 20 % du loyer médian du quartier à type de bien équivalent.
C’est une intention louable, madame la ministre, mais l’application de cette mesure sera extrêmement difficile, vous le savez. En effet, la carte des zones tendues me paraît finalement difficile à réviser. Pour la Bretagne, vous m’avez fait savoir que compte tenu des éléments que nous avions défendus auprès de vous, cette carte ne serait finalement publiée qu’au 1er janvier 2015. En outre, une telle mesure cumule tous les inconvénients d’un droit rigide et de l’insécurité juridique. Et les arrêtés préfectoraux qui devront être pris en application de la loi sur des périmètres à définir me paraissent reposer sur des critères particulièrement flous. Dans la pratique, ils feront naître de nombreuses incertitudes chez les propriétaires et amplifieront l’insécurité juridique. Ceci me semble être particulièrement préjudiciable à l’investissement dans le secteur du logement locatif.
Pour être réellement efficace, ce dispositif doit s’appuyer sur des observatoires locaux des loyers. Comment ces observatoires vont-ils être alimentés ? Comment seront-ils mis en place ? Dans quel délai ? Nous savons tous qu’en province il faut un minimum de cinq ans pour parvenir à disposer d’un outil fiable. Cette mesure est en fait une véritable usine à gaz. Elle risque encore une fois de créer des charges nouvelles pour nos collectivités territoriales sans transfert parallèle des ressources compensatoires, comme c’est malheureusement trop souvent le cas.
Certes, comme vous l’avez rappelé en réponse à la motion de rejet qui a été discutée cet après-midi, l’Allemagne a mis en place une telle mesure. Mais ce pays connaît un équilibre entre l’offre et la demande et la gestion de ces questions n’est pas centralisée, mais se fait au niveau des Länder.
Ce dispositif ne me parait pas de nature à atteindre vos objectifs. Je crains même qu’il ne soit tout à fait contre-productif. Je suis convaincu que le mécanisme créé par l’article 3 entraînera une augmentation des loyers inférieurs au loyer médian, mais pas des loyers supérieurs. Alors, vous allez abaisser le loyer des plus aisés et augmenter le loyer de ceux qui ont le moins de moyens.
Cette accumulation de réglementations visant à développer le nombre de logements locatifs risque d’aboutir au résultat inverse : les investisseurs privés ne mettront plus de nouveaux logements sur le marché locatif, et nous ne ferons qu’accentuer la baisse de production de logements.
Je veux également m’arrêter sur la garantie universelle des loyers qui sera mise en place à compter du 1er janvier 2016. Particulièrement décriée, votre mesure a subi de nombreuses modifications, à commencer par son mode de financement.
À l’origine, la garantie universelle des loyers devait être financée à 50 % par le locataire et à 50 % par le propriétaire, par le biais d’une cotisation de 1 % à 2 % sur le loyer. Finalement, après nos débats à l’Assemblée nationale et ceux du Sénat, vous avez décidé un financement différent. Mon expérience locale m’a montré à de nombreuses reprises combien il peut être difficile de recourir à une expulsion, notamment quand les locataires sont de bonne foi.
Comme vous, je souhaite que ces locataires puissent être protégés. Je m’interroge cependant sur le financement de cette garantie universelle à partir du moment où elle devient optionnelle et qu’elle n’a plus rien d’universel, puisqu’elle ne se substitue ni à la caution, ni à la garantie des loyers impayés. Je souhaiterais notamment savoir à quel montant vous estimez son financement, et aussi, comme l’a demandé M. Chassaigne tout à l’heure, pourquoi le logement social est exclu de ce dispositif.
Dans les quelques minutes qui me sont imparties, je souhaite également évoquer devant vous une mesure de ce projet de loi qui me semble particulièrement grave : je veux bien entendu parler du plan local d’urbanisme intercommunal. L’article 63 vise au transfert de l’élaboration des plans locaux d’urbanisme des communes aux communautés de communes ou aux communautés d’agglomération.
Je ne partage pas votre opinion à ce sujet. En retirant aux communes les plans locaux d’urbanisme, vous leur retirez une grande partie de ce qui fait leur substance : c’est un pas de plus vers la suppression des communes au profit de l’intercommunalité. Or je suis de ceux qui considèrent que la commune doit rester la collectivité de base de notre démocratie. C’est au sein même de cette structure que se reconnaissent les citoyens : c’est à elle qu’ils s’adressent quand ils rencontrent une difficulté. Cette collectivité est, pour moi, le premier acteur de la démocratie locale et les manifestations qui se déroulent actuellement dans les communes à l’occasion des cérémonies de vœux le démontrent encore tous les jours.
Le PLU détermine la physionomie de la commune. Dans des métropoles très denses et sans spécificité communale, le PLU peut effectivement être intercommunal, mais le plan local d’urbanisme intercommunal ne saurait être une règle générale. Un PLU d’en haut produira un urbanisme distancié, indifférencié. Je comprends la nécessité de mutualiser les moyens quand il s’agit de mieux faire ensemble ce que nous faisons moins bien tout seul, mais le plan local d’urbanisme est, pour moi, un acte fondateur, démocratique et politique pour la commune.
Il n’est pas acceptable que les maires soient privés de cette compétence. Les élus doivent rester maîtres de la construction de leurs villes et villages, car ils ont aussi la charge des équipements publics et des infrastructures qui bénéficient aux nouveaux habitants. Ils ont aussi la charge de délivrer les permis de construire, et je ne peux imaginer, madame la ministre, qu’ils exercent cette compétence sans pouvoir décider librement de la stratégie d’urbanisme qui doit être menée dans leur commune.
Complexification à travers la procédure du loyer médian, instauration d’une garantie universelle des loyers de nature à déresponsabiliser les locataires de mauvaise foi, mise en place de plans locaux d’urbanisme intercommunaux : autant d’éléments qui ne peuvent recueillir mon approbation, et qui me conduiront à voter contre ce projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.
M. Jean-Claude Mathis. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. Madame le président,…
Mme la présidente. « La » présidente !
M. Julien Aubert. …madame le ministre, monsieur et madame les rapporteurs, chers collègues, je ne reviendrai pas sur l’ensemble du texte, ni sur son impact sur la démocratie, puisque vous retirez aux maires une partie de leurs compétences, ni sur les contraintes qu’il imposera aux zones rurales et aux zones montagneuses. Non, je veux aujourd’hui me concentrer sur la philosophie de ce projet de loi que nous examinons en deuxième lecture. Il s’agit, à mon sens, d’une fausse bonne idée du Gouvernement.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est déjà une bonne idée !
M. Julien Aubert. L’idée qui sous-tend ce texte, mais peut-être que je la résume mal, c’est qu’il n’y a pas assez d’offres à la location et qu’il faudrait donc garantir les loyers pour les propriétaires, protéger les locataires et ainsi fluidifier le marché.
Permettez-moi, madame le ministre, de raconter une anecdote qui remonte à quelques années. Un contribuable de ma circonscription possédait un bien occupé par un locataire qui ne payait pas son loyer. Ce locataire a non seulement passé de nombreuses années sans payer son loyer, mais il a également poussé le vice jusqu’à téléphoner à son bailleur à des heures perdues de la nuit pour lui expliquer dans le détail comment il avait détourné le droit, jusqu’à quel point il continuerait ainsi et combien de temps il pourrait continuer à ne pas payer son loyer.
M. Michel Piron. Tout se passe la nuit ! (Sourires.)
M. Julien Aubert. Au bout de trois années de procédures, le propriétaire était en pleine crise nerveuse. Non seulement il se trouvait dans une situation de fragilité économique, mais il recevait tous les soirs une leçon de droit, par une personne animée de mauvaises intentions !
Je me demande donc, madame le ministre, si votre projet de loi permettra de rééquilibrer les relations entre propriétaires et locataires et de résoudre ce type de situation. La réponse est non. Cela ne signifie pas que votre texte ne répond pas à d’autres objectifs tout à fait louables. Cependant, sur ce point précis, vous avez totalement raté le coche.
En réalité, votre texte repose sur une vision statique de l’économie, un peu identique, d’ailleurs, à celle du Gouvernement concernant le marché de l’emploi, comme il a pu le démontrer s’agissant des 35 heures.
Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques. Ça faisait longtemps !
M. Julien Aubert. Vous vous appuyez sur un rapport de force existant, que vous considérez comme le périmètre intangible de la réflexion, et vous essayez de déplacer le curseur au sein de cet ensemble. En d’autres termes, votre vision du marché locatif est figée.
Poursuivons, si vous le voulez bien, la comparaison économique entre la dynamique de l’emploi et celle du marché locatif. Après tout, et même si je vois vos signes de dénégation, madame le ministre, ces deux marchés se ressemblent puisqu’ils voient tous les deux se rencontrer l’offre et la demande. À chaque fois qu’un gouvernement a voulu surprotéger les salariés, au prétexte de lutter contre le chômage, en alourdissant le code du travail, le chômage s’est aggravé. Pire, il s’est solidifié, devenant structurellement élevé dans ce pays. Les entreprises hésitent à embaucher car elles ont peur de licencier.
M. Christophe Borgel. Votre vision n’est pas du tout dogmatique !
M. Julien Aubert. Votre approche du marché locatif est exactement la même que pour le marché de l’emploi : les locataires sont les salariés et les propriétaires sont les employeurs. En sanctuarisant la situation des locataires, comme vous le faites par exemple en étendant la trêve hivernale, on asséchera mécaniquement le nombre de biens disponibles. On ne crée pas la prospérité en dissuadant ceux qui créent de l’emploi ; de même, on ne crée pas du logement en euthanasiant ceux qui peuvent en proposer. L’encadrement des loyers est au marché locatif ce que l’encadrement des salaires est au marché de l’emploi.
Au lieu d’ajouter des règles, il faut, au contraire, libéraliser le marché en allégeant les contraintes administratives et en laissant l’État à sa juste place. Or, madame le ministre, votre projet fait tout l’inverse.
S’agissant tout d’abord de la garantie universelle obligatoire des loyers, celle-ci aurait eu pour conséquence – je parle au conditionnel, puisque cette mesure a été modifiée dans le texte qui nous est soumis en deuxième lecture – de fragiliser un marché locatif sous tension et de faire supporter par un fonds les loyers à payer, incitant ainsi certains locataires malveillants à ne pas remplir leurs obligations. C’est l’équivalent, sur le marché du travail, de la garantie de l’emploi à vie, sans sanction en cas de triche. Vous n’éviterez pas les phénomènes de passager clandestin.
Si l’on y ajoute les délais bien souvent très longs pour faire expulser un locataire mal intentionné, on risque de voir le marché de la location se comprimer. Regardez ce qui se passe sur le marché du travail, lorsqu’un patron ne peut pas se défaire d’un salarié, même si celui-ci nuit à l’entreprise, et que tout conflit se termine invariablement par une décision prud’homale défavorable à l’employeur ! Est-ce un hasard si, au cours des deux dernières années, un grand nombre de PME ayant licencié des salariés à cause de la crise hésitent à embaucher de nouveau ? Je me réjouis donc que la garantie universelle des loyers soit devenue facultative : c’est un moyen d’atténuer sa nocivité profonde.
S’agissant ensuite de l’impossibilité d’occuper un bien immobilier nouvellement acheté mais déjà loué avant la fin du renouvellement du bail en cours, qui fait l’objet du 4° du I de l’article 2, on ne peut que demeurer dubitatif. Comment, et surtout pourquoi acheter un bien déjà occupé ? Quelles conséquences pour le propriétaire, qui se retrouvera avec un bien dont il ne pourra pas disposer librement ? L’une d’entre elles sera la diminution mécanique du prix du bien. Lorsqu’on achète un bien pour investir, ce n’est pas pour effectuer une moins-value parce qu’il est occupé au moins jusqu’à la fin du renouvellement du bail en cours !
En réalité, le système que vous proposez consiste tout simplement en un viager revu et corrigé. Et de la même façon, lorsque le bien sera acheté pour y vivre, les nouveaux propriétaires seront dans l’obligation d’attendre avant de pouvoir emménager. Comment feront-ils ? Devront-ils aussi demeurer locataires le temps du bail ? Une fois le délai d’occupation légale dépassé, compte tenu des nombreux renforcements de normes en matière d’expulsion, le locataire présent sera en droit de rester dans l’appartement occupé, en attendant une hypothétique décision de justice d’expulsion et le recours à la force publique.
M. Lionel Tardy. Eh oui !
M. Julien Aubert. Les propriétaires sont déjà très craintifs à l’idée de louer leur bien, compte tenu des règles actuelles. L’une des explications de la paralysie du marché locatif, mais non la seule, est à trouver dans cette situation.
M. Lionel Tardy. Bien sûr !
M. Julien Aubert. Votre texte va, hélas, renforcer cette crainte : les propriétaires seront encore plus attentifs aux conditions du choix de leurs locataires. Une nouvelle fois, vous allez donc faire peser sur les locataires les plus modestes, sur ceux qui ont les revenus les plus faibles, le poids de votre nouvelle réglementation.
M. Alain Fauré. Et cela vous tracasse !
M. Julien Aubert. Les dindons de la farce seront inévitablement les locataires ayant de faibles revenus. Compte tenu du renforcement des règles, un propriétaire effectuera une sélection extrêmement élaborée pour choisir les locataires les plus riches.
Ce que je reproche à la vision économique du Gouvernement, c’est l’idée sous-jacente que l’employeur est employeur par nature, tout comme le salarié, de même que le propriétaire serait toujours propriétaire face à des personnes qui seraient naturellement locataires. Jamais vous n’envisagez la possibilité que l’employeur puisse être un ancien salarié, et ne soit donc pas forcément un grand capitaliste sauvage qui licencie pour son plaisir. De la même manière, dans ma vision sociale, les locataires ont le droit d’espérer devenir un jour propriétaires. Le propriétaire d’un petit appartement, qui vit chichement et devra attendre de longues années avant de récupérer un bien dévalué, ne me semble pas forcément être celui qui doit payer les pots cassés du fameux rééquilibrage social voulu par le Gouvernement.
Plutôt que d’opposer et de solidifier les relations entre les deux groupes, l’État devrait avoir à cœur de favoriser la migration des locataires vers le statut de propriétaire.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cela a marché, aux États-Unis !
M. Julien Aubert. Ce n’est pas en appauvrissant les propriétaires que vous donnerez aux locataires l’envie de le devenir, dans le contexte de dégradation considérable des conditions d’emprunt que nous connaissons aujourd’hui.
La République des droits et des devoirs, madame le ministre,…
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Madame « la » ministre !
M. Julien Aubert. …ce serait sanctionner ceux qui abusent de la protection accordée aux locataires. La République des droits et des devoirs, ce serait lutter contre la spéculation immobilière par des moyens beaucoup plus directs. La République des droits et des devoirs, enfin, ce serait protéger les locataires face à des marchands de sommeil ou à des propriétaires qui utilisent la raréfaction des biens sur le marché locatif pour obtenir un rapport de force plus favorable.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Avez-vous bien lu le projet de loi ? C’est ce que nous faisons !
M. Julien Aubert. Mais ce n’est que l’un des trois éléments de la justice sociale, que vous cherchez inlassablement mais que vous n’atteignez jamais parce que vous plaquez sur l’économie une vision rigide et idéologique.
Si votre projet de loi a été totalement remanié, c’est qu’il est devenu perpendiculaire aux nouvelles orientations définies par le Président de la République lui-même. Celui-ci a proposé une simplification des règles. Or ce projet de loi, que vous faites passer en urgence – je devrais dire « à toute allure » –…
M. Guy Delcourt. Elle est bien bonne !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. On voit que vous avez suivi tous les débats, monsieur Aubert !
M. Julien Aubert. …est l’inverse de la simplification. Je vois que certains se sont réveillés : cela fait toujours plaisir, en fin de journée !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous suivons les débats depuis le mois de juin !
M. Julien Aubert. En outre, le Président de la République a annoncé un virage social-libéral. Dans « social-libéral », il y a l’idée de libéralisation : je souhaite donc qu’un vent de liberté souffle quelque peu sur cet hémicycle. L’égalité ne doit pas restreindre la liberté, qui doit exister aussi dans les rapports entre propriétaires et locataires.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Après cette intervention, vous avez la liberté de rentrer chez vous !
M. Julien Aubert. Je souhaite que cet hémicycle, dans sa sagesse, vienne un jour rééquilibrer les rapports de force et permettre à la France de devenir un pays de propriétaires.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ça, même Nicolas Sarkozy ne le dit plus !
Mme la présidente. Monsieur « la » députée, vous étiez la dernière oratrice inscrite. La discussion générale est donc close. (Rires sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Bravo, madame la présidente !
M. Julien Aubert. Oh ! On a les blagues qu’on peut !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. M. Aubert s’en va !
Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement. Mesdames et messieurs les députés, je veux répondre à chacune de vos interventions, de manière assez concise.
Madame Bonneton, vous avez évoqué les innovations de la loi ALUR. Je vous en remercie, et j’en profite pour faire le lien avec les propos de M. Falorni et d’autres sur la dimension de ce texte, sur ce « colosse législatif ». Il est certain que ce projet de loi est très complet et qu’il contient de nombreux chapitres qui, si nous l’avions voulu, auraient pu faire l’objet d’une loi à eux seuls. Cependant, je me rappelle les propos assez émouvants du sénateur Dilain en première lecture au Sénat : alors que, depuis un peu plus de quinze ans, il appelle l’attention des différents ministres, de toutes couleurs politiques, sur les difficultés qu’il rencontre pour résorber les copropriétés dégradées dans sa ville de Clichy et sur la nécessité d’adopter des modifications législatives indispensables, on lui donne systématiquement raison mais on lui explique que le sujet est lourd, complexe et qu’on attend une fenêtre parlementaire !
Aurait-il fallu renoncer à traiter la question des copropriétés dégradées, du logement indigne, des droits de vote en copropriété – question décisive, du logement coopératif, de l’habitat démontable ? Nous avons fait le choix d’aborder l’ensemble des sujets à l’ordre du jour et d’avoir une vision complète de cette réforme structurelle que nous souhaitons pour le secteur du logement. Je le répète, nous ne créons pas de nouveaux dispositifs, mais modifions trois lois importantes : la loi de 1967 sur les copropriétés, celle de 1970, dite loi Hoguet, sur les professionnels de l’immobilier et celle de 1989 sur les relations entre propriétaires et locataires. Nous sommes dans un travail de modification de lois existantes et animés d’une vraie volonté de modernité, comme vous l’avez noté, madame Bonneton, qui parliez d’innovation. Nous ne procédons pas par petites touches.
Quant à M. Serville, j’accepte volontiers son invitation et je suis très attentive à la situation guyanaise, même si mon collègue Victorin Lurel est en charge du logement comme de toutes les autres dimensions de l’outre-mer. En ce qui concerne l’encadrement des loyers, le décret qui fixera le périmètre des zones tendues tiendra compte de la situation des régions ultramarines.
Madame Maquet, vous avez insisté sur la durée du travail et les différentes étapes qu’il a connues. Je profite de l’occasion pour vous remercier, car vous êtes une fidèle de longue date de ces questions, pour la loi Alur comme pour les précédentes. Je remercie également les députés qui sont présents depuis le premier texte, dont nous avons débattu deux fois, qui était relatif à la mobilisation du foncier public et à l’augmentation des seuils de réalisation des logements sociaux dans les communes de plus de 3 500 habitants. Je suis bien consciente qu’il s’agit d’un travail de longue haleine mais, telle qu’elle sera votée à l’issue de nos débats, la loi sera meilleure que le texte qui a été présenté par le Gouvernement. Je le répéterai inlassablement, c’est une bonne chose. Faire croire que les lois sont uniquement le fruit du travail des ministères et de leurs cabinets est une erreur. Les lois sont de la responsabilité des parlementaires. C’est du reste l’intelligence collective qui se déploie dans le débat parlementaire qui leur confère leur robustesse. Je n’ai aucun état d’âme à dire qu’il a été très utile que ces lois aient fait l’objet non d’un traitement en urgence, comme l’affirmait M. Aubert avant de partir, mais d’un débat approfondi au cours de la navette.
M. Lionel Tardy. Le Président veut tout faire par ordonnances !
Mme Cécile Duflot, ministre. Certains sujets, monsieur Tardy, peuvent être très utilement traités par ordonnance ! Nous l’avons fait. Quand il s’agit de réformer en profondeur des lois structurantes pour le secteur, cela doit faire l’objet de travaux législatifs approfondis. Mais sur des questions dont chacun connaît les enjeux et où les dispositions techniques sont relativement simples à mettre en œuvre, cela peut relever de l’ordonnance. C’est ce que nous avons fait avec le projet de loi d’habilitation que la majorité a eu le plaisir de voter il y a quelques mois.
Monsieur Tetart, je ne reviendrai pas sur vos critiques, j’y ai répondu dans le cadre de ma réponse à M. Apparu tout à l’heure. En revanche, je saluerai votre propos sur l’unanimité qui s’est dégagée tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat autour de la question de la lutte contre l’habitat indigne. Les élus locaux sont concernés quelle que soit leur étiquette politique.
M. Benoist Apparu. Ce que vous n’êtes plus.
Mme Cécile Duflot, ministre. On peut exercer des responsabilités successivement, monsieur le député-maire ! (Sourires.)
M. Benoist Apparu. Pas maire !
Mme Cécile Duflot, ministre. Vous avez compris ce que je voulais dire ! Quoi qu’il en soit, on peut tout à fait avoir connaissance de ce qui se passe sur le terrain et avoir une réelle expertise technique sur ces sujets. À cet égard, je salue les deux rapporteurs de ce texte, qui ont déployé une énergie considérable et ont fait preuve d’une grande précision dans leur travail.
Monsieur Piron, comme d’autres, a déploré que le texte ne contribuerait pas à faire construire des logements, sauf à empiler chaque document pour en faire des murs.
M. Jean-Marie Tetart. Il régule de l’existant.
Mme Cécile Duflot, ministre. J’avais pourtant été très claire en présentant ce texte ! Il s’inscrit dans un triptyque. Premier point : des mesures d’urgence, avec le plan d’investissement pour le logement annoncé le 21 mars dernier, vingt mesures toutes mises en œuvre à l’issue de l’année 2013, donc en quelques mois. Deuxième point : une réforme structurelle sur les rapports entre les propriétaires et les locataires, nous y reviendrons. Selon M. Mathis, l’encadrement des loyers ne peut pas développer l’offre. Je constate pour ma part que l’envolée des loyers n’a pas eu non plus cette conséquence ! Nous avons eu ce débat à de nombreuses reprises. Sur cette question, il peut y avoir, et cela ne me choque pas, un positionnement idéologique. Je défends ici une loi de gauche, une loi favorable à la régulation. Je peux tout à fait concevoir que sur les bancs de la droite, on s’y oppose. Cela s’appelle la démocratie, c’est très sain et l’engagement 22 du Président de la République…
M. Benoist Apparu. Social démocrate, maintenant.
Mme Cécile Duflot, ministre. …sera tenu.
Troisième point, monsieur Piron : le lancement d’« Objectifs 500 000 ». Dans ce domaine, certains sujets sont du domaine réglementaire et d’autres ne sont d’ailleurs ni du domaine législatif, ni du domaine réglementaire. Comme l’a dit Yves Lion, qui m’a fait l’immense plaisir d’accepter la présidence du comité stratégique, les coûts de construction en France sont largement supérieurs à ceux de la Belgique. Il n’y a pas de raison objective à ce que la construction d’un immeuble coûte plus cher en France qu’en Belgique.
M. Michel Piron. Non.
Mme Cécile Duflot, ministre. Certes, il y a les normes, mais cela ne suffit pas.
M. Michel Piron. Il y a le foncier.
Mme Cécile Duflot, ministre. Il y a aussi des questions relatives aux matériaux et aux coûts de construction. Cette question ne doit pas occuper les députés dans l’hémicycle, mais être prise en charge par l’exécutif, les professionnels. C’est tout le sens du groupe de travail, dont le premier objectif est fixé à court terme, pour le 21 février. Dans les trente dernières années, monsieur Piron, trois fois seulement on a vu franchir les 375 000 logements mis en chantier par an, et jamais on ne s’est approché des 400 000.
M. Benoist Apparu. Quelles années ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Celles qui ont suivi une mobilisation considérable d’argent public que nous payons aujourd’hui dans le PLF 2013 : plus de 4 milliards d’euros sont consacrés aux conséquences de la loi TEPA ! Puisque vous me cherchez, monsieur Apparu, j’aurai le plaisir de rappeler que lorsque vous étiez ministre du logement, vous avez mis fin à certains de ces dispositifs extrêmement consommateurs d’argent public et qui avaient pour seules conséquences de construire là où il n’y avait pas de besoins…
M. Benoist Apparu. Ça, c’est faux.
Mme Cécile Duflot, ministre. …et d’augmenter de manière significative le prix de l’immobilier. Telle est la réalité des chiffres. Les deux courbes sont parfaitement corrélées, sans compter les conséquences très importantes, plus de 4 milliards d’euros je le rappelle, sur les dépenses publiques.
Monsieur Bies, vous avez insisté sur la dimension de la transition écologique et la prise en compte de la biodiversité. Sur cette question et dans un esprit de simplification, nous avons travaillé à des dispositifs simples. La question des normes est souvent mal abordée. On considère que le nombre de normes est préjudiciable. Pour être confrontée à l’application des normes issues du Grenelle et de la RT 2012, c’est-à-dire la réglementation thermique, je sais à quel point elles sont complexes, pas seulement parce qu’elles permettent d’avancer vers des bâtiments moins énergivores et mieux isolés, ce qui est une très bonne chose, mais parce que cela implique des calculs d’efficacité très complexes.
M. Michel Piron. Ce n’est pas encore au point.
Mme Cécile Duflot, ministre. Cela nécessite de faire appel à des cabinets d’ingénierie qui sont souvent hors de portée, notamment pour les extensions de maisons individuelles. Il faut avoir le courage de reconnaître que travailler sur des débords de toit plus importants pour accueillir des chauves-souris, c’est extrêmement simple à partir du moment où cela est connu. Par ailleurs, sur un certain nombre de sujets, il s’agit de mobiliser l’ensemble de la profession et non de créer des normes supplémentaires, car les professionnels sont très ouverts sur ces questions.
Vous avez exprimé votre position sur le PLUI. D’ailleurs, si l’on prend l’ensemble des quinze interventions, sans considération de famille politique, on constate qu’il y a autant de positions sur ce sujet ! Vous le savez, cette question est décisive. Que le PLUI devienne la règle, tout en souffrant quelques exceptions, est un grand pas en avant. Cela ne dépossède personne et est utile à tout le monde. Je suis convaincue que chacun en conviendra dans quelques mois ou années.
Monsieur Tardy, vous avez reproché de manière assez nette à ce texte de souffrir d’un manque criant de libéralisme. Je peux l’entendre et votre position se défend. Cela n’est effectivement pas celle du Gouvernement. Je l’interpréterai comme la reconnaissance que ce texte veuille faire intervenir la puissance publique, dans la mesure où il s’agit d’un bien de première nécessité, l’accès à un toit.
M. Benoist Apparu. Je croyais qu’il y avait un virage idéologique en ce moment ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Ce secteur en a besoin car l’absence de régulation a montré un certain nombre d’effets pervers qu’il nous faut corriger.
Monsieur Saddier, vous avez repris un certain nombre de critiques, mais je n’y reviendrai pas.
M. Martial Saddier. Ce n’était pas des critiques.
Mme Cécile Duflot, ministre. Soit, vous avez repris un certain nombre d’analyses politiques de ce texte. Vous avez aussi, et je vous en remercie, indiqué, étant donné vos fonctions à la tête du Conseil national de la montagne, que, comme je m’y étais engagée devant l’Assemblée, des amendements qui prennent en compte la situation spécifique des territoires de montagne ont bel et bien été intégrés dans la loi au cours de la navette parlementaire. Le travail a été sérieux.
M. Martial Saddier. Même les SCOT ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Nous pouvons travailler de manière transversale, et cela a été fait.
Monsieur Mathis, vous avez dit que l’encadrement des loyers ne pouvait pas permettre de développer l’offre de logements. En fait, les derniers chiffres montrent que l’un des objectifs du Gouvernement est atteint, à savoir que nous en avons fini avec l’envolée du prix des loyers. Nous étions dans une situation de thrombose du marché. La rente immobilière avait été maximisée. Les chiffres le montrent, l’immobilier a été plus rentable que n’importe lequel des placements ces vingt dernières années en France. C’est l’une des difficultés, car cette très haute rentabilité a entraîné un comportement encore plus spéculateur qu’actionnarial. Nous souhaitons, si je fais le parallèle avec le marché, entrer dans une logique obligataire, avec une rentabilité inférieure certes, mais un niveau de risque inférieur aussi.
C’est tout le sens de la création de la garantie universelle et de l’encadrement des loyers qui, je le redis, est un dispositif de marché, avec un loyer médian et un dépassement plafonné à 20 %, et non un loyer fixé de manière administrative, ce qui est le cas pour les dispositifs fiscaux. Vous avez déclaré que les dispositifs fiscaux n’étaient pas assez incitatifs. Je ne connais pas encore les résultats de celui qui porte mon nom, mais ils ne sont pas du tout aussi mauvais que certains ont bien voulu le dire. Nous dépasserons sans doute les 30 000 logements au titre de ce dispositif. Nous l’avons dimensionné pour que l’argent public investi par la défiscalisation soit utile socialement puisque ces logements font l’objet d’une conditionnalité sociale en termes de plafond de ressources des locataires et de plafond de loyer.
Monsieur Chassaigne, j’ai été un peu déçue, et ensuite un peu surprise. Mais, maintenant que nous nous connaissons, je vous comprends. J’ai été un peu déçue car sur des sujets dont nous avons longuement débattu, comme l’encadrement des loyers, vous avez repris des critiques dont j’espérais, au vu de votre réponse lors de notre dernier débat, que vous aviez compris qu’elles étaient sans doute exagérées.
En répondant à l’ensemble des intervenants de la discussion générale, et c’est d’ailleurs tout le plaisir de présenter cette loi, je suis obligée de répondre que non, elle ne va pas bloquer le marché dans une vision bolchevique…
M. Benoist Apparu. Vous êtes bolchevique ?
M. Michel Piron. Cela dépend des jours.
Mme Cécile Duflot, ministre. …avant de dire à M. Chassaigne qu’elle ne provoquera pas une hausse massive de l’ensemble des loyers.
M. Benoist Apparu. M. Chassaigne n’est pas bolchevique, tout de même !
Mme Cécile Duflot, ministre. Je vous remercie de vos interventions respectives : c’est sans doute la preuve que c’est une loi d’équilibre, une loi juste, une loi moderne.
M. Benoist Apparu. Voilà Mme Duflot centriste maintenant !
M. Philippe Folliot. Pas encore.
Mme Cécile Duflot, ministre. Nous avons su trouver un point d’équilibre entre propriétaires et locataires, entre régulation et souplesse. Je le redis, monsieur Chassaigne, le loyer médian est forcément minoré par rapport au loyer moyen, puisqu’il s’agit d’un montant de loyer sur le stock. Par ailleurs, le plafonnement à 20 % est un plafonnement réel qui pourra, lui aussi, être diminué par le préfet dans les zones les plus tendues ou celles qui ont fait l’objet d’une augmentation de loyer très importante ces dernières années, comme l’Île-de-France et Paris.
En outre, le complément de loyer, ce n’est pas la porte ouverte à n’importe quoi. Il se justifiera pour des raisons spécifiques qui ne relèvent pas de logements classiques : une terrasse de cinquante mètres carrés avec jacuzzi, qui ne me paraît pas faire partie du parc habituel de logements, pourra faire l’objet d’un complément de loyer. Toutefois, ni le bon état du logement ni son ensoleillement, ni aucun autre critère relevant d’une situation classique ne pourront faire l’objet d’un complément de loyer. Du reste, le locataire pourra le dénoncer s’il estime qu’il ne correspond pas à la réalité.
Je ne pourrai pas répondre à toutes les interventions sur ce sujet parce que je l’ai déjà fait longuement et que vous avez eu la gentillesse de bien vouloir me faire confiance en première lecture, non sur ma bonne mine, mais du fait du texte.
Cela vaut aussi pour la garantie universelle des loyers. Là, nous touchons au sublime ! Vous avez cité la Confédération nationale du logement avec qui j’ai de nombreux échanges. Au moment du dépôt du projet de loi, elle s’était opposée à ce dispositif avec une certaine vigueur, considérant qu’il n’aboutirait qu’à maximiser la rente des propriétaires. Le changement de pied des uns et des autres peut éventuellement me faire sourire. Je demande seulement d’être attentif à la lettre du texte, pas davantage.
Le seul moment où vous m’avez déçue, monsieur Chassaigne, c’est quand vous avez émis l’idée, mais j’espère que ce n’était pas écrit de votre main, que la loi aurait été rédigée par je ne sais quel lobby. Les aventures de ces dernières semaines, les déclarations des uns et des autres auraient pourtant pu vous montrer que les lobbies en question ne s’étaient pas montrés absolument ravis de ce projet de loi. Nous avons voulu maintenir le dialogue avec tous les acteurs, qu’il s’agisse des professionnels, dans leur ensemble, ou des associations de locataires. Bien évidemment, il peut y avoir des divergences, mais je vous invite à relire nos débats : nous avons conservé l’intégralité des principes de la GUL que j’avais présentés devant vous en première lecture.
J’observe à ce propos que ce sont ceux-là mêmes qui nous reprochaient l’obligation et la substitution qui aujourd’hui regrettent avec le plus de force le fait que la caution ne soit pas supprimée. Je ne doute pas de la sincérité de l’évolution des positions, ce n’est pas mon genre, mais je vous le redis, monsieur Chassaigne : nous avons choisi un système automatique qui favorise les propriétaires solidaires qui font le choix de loger les plus fragiles en les faisant bénéficier d’une garantie qui porte sur l’intégralité du loyer.
La GUL est un dispositif universel, qui s’adresse à tous et toutes, un dispositif dont nous avons rendu possible la gratuité, un dispositif solidaire qui sera très utile car il sera automatique. Certains amendements visent à renforcer cette automaticité en faisant figurer la garantie dans le bail. Mais il faut bien voir qu’il s’agit d’un droit social nouveau. Il semblerait que certains ne croient pas, par les temps qui courent, que sa conquête soit possible. Or non seulement elle est possible mais elle est nécessaire, car les tâtonnements et l’accumulation de dispositifs qui ne fonctionnent pas ont un coût beaucoup plus important pour les finances publiques et pour notre société. Ce dispositif, quand il fonctionnera, sera quant à lui absolument efficace.
Monsieur Lurton, vous avez souligné que le travail que nous menions était louable mais vous avez exprimé des craintes. Ces craintes, je ne peux pas à cet instant toutes les lever, notamment celles qui portent sur l’existence et la mise en œuvre des observatoires des loyers. Toutefois, je tiens à vous rappeler que l’un des reproches adressés au pilotage des politiques de logement en France était l’impossibilité de disposer de données précises. Nous pourrons désormais disposer de telles informations, en nous fondant sur un modèle très intéressant qui fonctionne depuis de nombreuses années à la satisfaction de tous, je veux parler de l’Observatoire des loyers de l’agglomération parisienne, l’OLAP, qui associe propriétaires, collectivités locales, professionnels et associations de locataires. Ce travail sera mené sous l’égide d’un comité scientifique afin que les données soient parfaitement comparables sur l’ensemble du territoire français.
À M. Aubert, j’ai répondu par avance mais étant donné qu’il ne nous fait pas le plaisir d’être parmi nous, je ne poursuivrai pas davantage sur le parallèle à mon sens totalement erroné qu’il a établi entre marché de l’emploi et marché du logement.
M. Lionel Tardy. Il ne faut pas l’exciter !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Si c’est vous qui le dites ! (Sourires.)
Mme la présidente. J’appelle maintenant dans le texte de la commission les articles du projet de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.
Mme la présidente. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article. La parole est à M. Lionel Tardy.
M. Lionel Tardy. Cet article illustre parfaitement ce que j’indiquais dans la discussion générale : il alourdit considérablement la loi de juillet 1989. Si certains cadrages sont nécessaires, je doute qu’il soit indispensable de tout inscrire dans la loi de façon aussi détaillée. Les dispositions concernant l’état des lieux sont par exemple très lourdes alors que l’essentiel est dans la remise de ce document, le reste fonctionnant plutôt bien actuellement.
Quant à la liste des documents annexés, elle me paraît tout simplement disproportionnée. Sous prétexte d’informer, on ne doit pas assommer le locataire et le propriétaire. Certes, nous aimons beaucoup les détails législatifs, mais cela pose la question de l’information des parties : comment faire en sorte que chacun soit bien informé de ses droits et de ses devoirs ? Compte tenu de la complexité du dispositif, il y aura certaines lacunes, non par négligence mais simplement parce qu’il sera difficile aux bailleurs d’ingurgiter toutes ces obligations décourageantes.
Beaucoup d’améliorations ont été apportées en commission à cet article 1er. Toutefois, l’équilibre entre locataires et bailleurs n’est pas atteint, comme nous le montrerons dans la discussion des amendements. Des ajustements et des précisions doivent, à mon sens, encore être apportés sur cet article.
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri.
M. Dino Cinieri. Après avoir détricoté ce qui avait été voté par la précédente majorité, notamment la majoration du COS, et après avoir augmenté les impôts pesant sur le secteur du logement et sur les propriétaires, comme les droits de mutation, vous nous présentez en deuxième lecture ce projet de loi censé réduire la fracture résidentielle et rétablir une égalité d’accès au logement.
En réalité, vous n’avez pas cherché à augmenter la production de logements et le nombre de logements disponibles dans les zones tendues. Vous vous attaquez à l’une des conséquences de ces tensions, à savoir la hausse des prix des loyers, tout en ignorant délibérément ses causes. C’est regrettable car l’encadrement des loyers va induire la dégradation du parc existant et une diminution de l’offre, donner un coup d’arrêt à la construction et conduire à une sortie définitive des investisseurs institutionnels, qui ont déjà largement déserté les métropoles.
Pour les professionnels du bâtiment et du logement du département de la Loire, cher à mon ami Jean-Louis Gagnaire, le constat est sans appel : vos mesures et vos solutions ne sont envisagées qu’à travers le prisme de l’Île-de-France. La situation des zones tendues n’a rien à voir avec l’immense majorité du territoire français. Ainsi, dans mon département, nous sommes confrontés au problème non du montant des loyers ou de l’offre locative mais du manque d’acquéreurs solvables. Cette situation a engendré un effondrement des transactions : pour le prix d’un studio parisien, vous pouvez vous offrir une maison avec piscine, et vous n’aurez que l’embarras du choix.
Votre projet de loi donne un mauvais signal à tous les investisseurs et aux propriétaires qui ne comprennent pas les subtilités des zonages géographiques de vos mesures phares. Ce qu’ils retiennent, c’est l’encadrement des loyers, le nouvel impôt devant financer la garantie universelle des loyers et les nouvelles charges pour les propriétaires et copropriétaires.
Votre priorité est le logement locatif social. Mais malgré tous vos efforts, celui-ci ne pourra se substituer au parce locatif privé. En outre, je rappelle que la loi SRU impose aux collectivités locales de ne construire que des logements sociaux pour les prochaines années. Que va devenir la notion de mixité sociale ? Comment vont se loger les classes moyennes si le secteur privé ne prend pas le relais ?
La garantie universelle des loyers, autre pilier de votre dispositif de régulation des loyers, va être gérée par un nouvel établissement public administratif qui va employer vingt à quarante personnes. Encore une manifestation de votre fameux choc de simplification !
Ce texte sème la défiance chez les investisseurs et l’incertitude chez les professionnels du secteur du fait d’une instabilité juridique et fiscale qui étouffe l’initiative et la prise de risques en France. Nous le regrettons.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot.
M. Philippe Folliot. Cet article 1er est marqué par un déséquilibre, même si des efforts ont été faits pour essayer de corriger certains excès. Or, dans les relations entre bailleurs et locataires, la notion d’équilibre est fondamentale, car de l’équilibre naît la confiance et de la confiance naît la capacité d’investissement. Il faut sortir des logiques idéologiques selon lesquelles le propriétaire, par définition, ne serait pas quelqu’un de bien et exploiterait son locataire, paré bien sûr de toutes les vertus. En réalité, les choses sont beaucoup plus complexes. Le propriétaire bailleur privé peut être un petit artisan ayant travaillé et économisé pour acheter un appartement dont le loyer constitue un complément de retraite.
Vous poursuivez peut-être des buts louables mais pour les atteindre, vous instaurez des procédures extrêmement complexes et les retours que nous avons des professionnels de l’immobilier sur ce sujet sont contrastés, madame la ministre. Nous devons en tenir compte. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements visant à améliorer l’équilibre de ce texte.
J’ai passé une douzaine d’années de ma vie professionnelle dans le secteur du logement social, en tant que directeur d’une coopérative HLM. Je salue au passage Jean-Louis Dumont car nous avons beaucoup œuvré ensemble dans ce secteur. Nous savons toutes les difficultés que l’on peut rencontrer. Le secteur du logement a cette singularité de tenter d’appliquer des réponses globales à des situations très différenciées, comme vient de le souligner M. Cinieri. De la région parisienne aux monts de Lacaune que vous connaissez bien, madame la ministre, il y a des différences notables. Les tensions n’ont rien à voir d’une région à l’autre.
Mais je suis convaincu que vous allez écouter avec attention nos propositions et que vous donnerez un avis favorable à nos amendements de manière à corriger les déséquilibres qui caractérisent cet article.
M. Thierry Benoit. Cela ne fait pas de doute !
Mme la présidente. Nous en venons aux amendements.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 57 et 169, de suppression de l’article.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 57.
M. Jean-Marie Tetart. Dans le prolongement de la motion de rejet préalable et de nos interventions dans la discussion générale, nous proposons de supprimer l’article 1er. Celui-ci vise à améliorer les rapports entre locataires et propriétaires en corrigeant les abus observés. Mais nous craignons que ce faisant, il ne déséquilibre les choses en défaveur des bailleurs : l’absence de pénalités pour le locataire en cas de retard de paiement, la possibilité d’apporter un correctif à la surface louée sans limite dans le temps, le droit de corriger l’état de lieux vont rendre les bailleurs réticents.
M. Daniel Fasquelle. Oui, c’est aberrant !
M. Jean-Marie Tetart. Deuxième reproche : cet article complexifie inutilement la procédure de mise en location, depuis les documents types jusqu’à la multiplication de documents d’information, qui pourraient être établis dans un autre cadre. Pour ces raisons, nous craignons que les nécessaires correctifs à apporter pour lutter contre les abus ne conduisent finalement les bailleurs à freiner la mise en location.
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 169.
M. Dino Cinieri. L’article 1er modifie significativement la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, mais les dispositions qu’il contient sont disproportionnées face à des abus qui restent, fort heureusement, le fait d’une minorité. Une telle sévérité ne pourra qu’inquiéter les propriétaires et investisseurs et jeter le discrédit sur les professions de l’immobilier.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.
M. Daniel Goldberg, rapporteur de la commission des affaires économiques. Chers collègues, nous avons déjà largement débattu de ce texte, avec celles et ceux d’entre vous qui étaient présents en commission au mois de juin, puis en séance publique au mois de septembre, puis de nouveau en commission au mois de décembre. Dans la suite du débat, je me montrerai donc assez laconique à propos des amendements de suppression d’article. Mais à ce stade, je tiens à répondre précisément aux accusations de déséquilibre que vous avez été plusieurs à formuler, notamment les auteurs des présents amendements de suppression. C’est tout le contraire : avec le texte originel et les nombreuses améliorations qui y ont été apportées par voie d’amendements, résultats de nos débats en commission et en première lecture et même du travail mené au Sénat, nous sommes parvenus à un dispositif parfaitement équilibré.
En créant un bail type et un état des lieux type, comme cela a été longuement expliqué, nous allons rassurer le propriétaire, notamment celui qui loue sans entremise, sans passer par un agent immobilier, qui ne connaît pas forcément toute la réglementation. Il disposera ainsi d’un document qu’il pourra opposer au locataire. De la même manière, le locataire sera lui aussi protégé par un document officiel. Les deux, s’ils le souhaitent, pourront rajouter d’un commun accord au bail type comme à l’état des lieux type diverses clauses, en y apposant leurs signatures.
Ainsi, contrairement à l’argumentation que vous développez, l’article 1er, particulièrement grâce à ces deux dispositions, est très équilibré et permettra, ainsi que je l’ai expliqué au début de la discussion générale, de rassurer, de garantir la transparence et de faciliter non seulement des rapports équilibrés mais également une conciliation entre deux parties qui n’ont pas forcément d’intérêts divergents. L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. L’avis du Gouvernement est identique à celui du rapporteur. Je vous ai tous parfaitement entendus, et nous avons été ouverts à la discussion sur un certain nombre de sujets. Mais vous comprendrez qu’on ne puisse être ouvert à la discussion sur la suppression d’un article important, qui vise à pacifier les relations entre locataires et bailleurs.
M. Lionel Tardy. Cela va les complexifier au contraire !
Mme Cécile Duflot, ministre. Non, il ne les complexifiera pas. J’ai omis de vous le dire plus tôt, monsieur Tardy, mais le bail type et l’état des lieux type ne font absolument pas l’objet de remarques négatives de la part des professionnels. Ils préfèrent cela à une liste de clauses obligatoires. Ce dispositif permet à chacun de disposer, de manière très simple et sans exclure la possibilité d’ajouter des clauses supplémentaires, d’un bail qui sera accessible librement. Avis donc défavorable.
(Les amendements identiques nos 57 et 169 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Schmid, pour soutenir l’amendement no 16.
Mme Claudine Schmid. Cet amendement vise à modifier la durée que vous avez fixée pour établir la résidence principale. L’article 1er définit en effet une durée différente de celle mentionnée à l’article 4B du code général des impôts, lequel donne une définition précise du domicile, inspirée par la jurisprudence du Conseil d’État, notamment dans son arrêt du 20 février 1961, ainsi que par les critères retenus par l’OCDE. Cette durée établissant la résidence principale est de six mois. Le Bulletin officiel des finances publiques mentionne en outre que les incidences de cette définition se trouvent atténuées par le jeu des conventions fiscales internationales destinées à éviter les doubles impositions, la règle de droit international prévalant toujours sur le droit interne en vertu de l’article 55 de la Constitution et de la hiérarchie des normes. En conséquence, à des fins d’harmonisation, je vous recommande d’accepter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement avait déjà reçu un avis défavorable en première lecture. En matière fiscale, la durée n’est nullement fixée par la loi, l’article 4B du code général des impôts auquel vous faites référence ne faisant qu’exposer plusieurs critères – le lieu de vie, l’activité professionnelle ou les intérêts économiques – pour définir le lieu de séjour principal. Par ailleurs, le lieu de séjour principal n’est pas le lieu de résidence : ce sont deux notions différentes. La durée de six mois s’apparente ainsi davantage à une convention établie par l’administration fiscale et soumise au contrôle du juge : elle ne constitue pas un critère absolu en matière fiscale, comme le Conseil d’État l’a noté à plusieurs reprises. Votre proposition n’apparaît donc pas juridiquement fondée.
Par ailleurs, en matière de logement, la durée de huit mois n’est pas inédite : le code de la construction et de l’habitation dispose à plusieurs reprises que sont considérés comme des résidences principales, et non pas des lieux de séjour, les logements occupés au moins huit mois par an, ce délai conditionnant l’accès à un certain nombre de droits et de prestations sociales. Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
(L’amendement no 16, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 58 et 147.
La parole est à M. Guillaume Chevrollier, pour soutenir l’amendement no 58.
M. Guillaume Chevrollier. L’alinéa 12 de l’article 1er prévoit d’établir un contrat de location type par décret ; les alinéas 13 à 23 précisent les mentions obligatoires de ce contrat de location type. Un bail n’est pas un formulaire administratif : il s’agit d’un contrat entre le bailleur et le locataire portant des droits et des obligations. Imposer un bail type porterait donc atteinte à la liberté des contrats. En revanche, afin de sécuriser les locataires et de favoriser la transparence des relations entre bailleurs et locataires, il n’est pas inutile de prévoir que le bail comporte certaines mentions obligatoires. Pour autant, il n’est pas indispensable que ce soit la loi qui impose ces mentions obligatoires de manière exhaustive. Le recours au décret est suffisant et permet plus de souplesse. Cela va dans le sens du choc de simplification. Tel est le sens de cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 147.
M. Dino Cinieri. Cet amendement propose de favoriser la transparence des relations entre les bailleurs et les locataires en rendant certaines mentions obligatoires dans le bail, tout en maintenant la liberté des contrats.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Comme lors de nos précédents débats, la commission a émis un avis défavorable. Vous voulez supprimer le dispositif du bail type. Or je rappelle qu’il comporte obligatoirement diverses mentions qu’il est nécessaire de définir dans la loi, quitte à en préciser les modalités d’application dans un décret en Conseil d’État. Il n’en demeure pas moins important que la loi précise l’intérêt d’établir un bail type. Sinon, à quoi servirait le législateur ? Par vos amendements, ce n’est pas le contenu du bail type que vous remettez en question, mais l’intérêt même de faire un bail type. Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis. Nous en avons déjà longuement débattu en première lecture, et je le répète : le bail type est bien un acte de simplification puisqu’il sera accessible à tous. Il ne s’agira pas de collationner des clauses obligatoires, comme dans l’état actuel de la législation, mais de mettre à la disposition de tous les propriétaires un bail type immédiatement opérationnel et simple.
(Les amendements identiques nos 58 et 147 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour soutenir l’amendement no 59.
M. Daniel Fasquelle. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec celui qui vient d’être défendu. L’on constate, à travers vos propos, que vous en avez après les affreux propriétaires et les affreux agents immobiliers. Vous en avez encore fait la démonstration il y a quelques instants. Nous n’avons pas du tout la même approche : parmi ces propriétaires, certains touchent parfois une petite retraite. Ayant eu la chance d’acquérir un bien et de le louer, ils ont besoin d’être protégés en tant que propriétaires. Nous déplorons donc que l’article 1er déséquilibre profondément le rapport entre propriétaires et locataires au détriment de certains propriétaires, dont ceux que je viens d’évoquer.
Concernant les agents immobiliers, c’est à croire qu’ils sont vraiment affreux et qu’il faut les écarter à tout prix ! Tel est l’état d’esprit de cet article. C’est parfaitement inadmissible. Nous sommes évidemment hostiles à cet article qui introduira de la complexité en plus de ce déséquilibre, ainsi que l’a indiqué Jean-Marie Tetart. Pour toutes ces raisons, nous sommes hostiles à ses différents alinéas qui introduisent de la complexité et de la rigidité. Laissez un peu de liberté contractuelle, laissez un peu de souplesse, ne cherchez pas à tout régler par la loi !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Voir le monde tel que nous le pensons et non tel qu’il est réellement : c’est un défaut que nous avons tous. J’ai écouté Daniel Fasquelle reprocher à la commission et au Gouvernement d’avoir une vision très négative des propriétaires ou des agents immobiliers, mais c’est tout le contraire de ce que j’ai dit à la tribune tout à l’heure ! Il aurait fallu écouter plus précisément les mots que j’ai pu prononcer.
M. Daniel Fasquelle. Vous ne faites pas ce que vous dites ! Vous devriez vous écouter vous-même !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. J’ai dit en première lecture, au mois de septembre, dans ce même hémicycle, ce que j’avais déjà dit en commission et je l’ai répété depuis. Les nombreux échanges que j’ai pu avoir avec les représentants des propriétaires et des acteurs immobiliers en témoignent.
M. Daniel Fasquelle. C’est faux !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pour en venir au détail de votre amendement, vous voulez supprimer les alinéas 13 à 23 relatifs au contrat de location. Vous ne voulez donc pas que soient précisés dans le contrat de location : le nom, la dénomination et le domicile du bailleur, le nom et la dénomination du locataire, la date de prise d’effet et la durée du bail, la consistance et la destination de la surface habitable, la désignation des locaux, le montant du loyer, le loyer de référence, le montant du dernier loyer acquitté, la nature et le montant des travaux effectués dans le logement depuis la fin du dernier contrat de location ou le dernier renouvellement du bail… Mais tout cela protège le propriétaire, cher collègue ! Je connais votre rigueur intellectuelle : vous conviendrez forcément que la suppression de l’alinéa 22, si l’on suivait votre raisonnement, serait contraire aux intérêts des propriétaires !
M. Daniel Fasquelle. Il s’agit d’un amendement de cohérence ! Ne vous faites pas plus bête que vous ne l’êtes !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Enfin, supprimer l’alinéa 23 revient à supprimer le montant du dépôt de garantie, s’il est prévu : encore une fois, aller dans votre sens irait à l’encontre des intérêts des propriétaires. Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
M. Daniel Fasquelle. Vous ne m’avez absolument pas écouté !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. J’espère, monsieur le député, que le président Chassaigne vous a entendu : c’est reparti ! Selon vous, ces dispositions sont hostiles aux professionnels de l’immobilier, lesquels sont méprisés, etc… Je pense vraiment qu’il faut raison garder. Ainsi que le rapporteur vient de l’indiquer de manière très détaillée, ce texte est une loi de progrès, une loi qui améliore la transparence des relations. L’article 1er en fait partie, ces dispositions également. Je ne partage absolument pas ce que vous avez dit, cela va de soi. Je répète que le recours aux professionnels est une bonne chose : c’est pourquoi il faut qu’ils soient davantage formés et davantage contrôlés – le président de la FNAIM lui-même a dénoncé les « braconniers de l’immobilier » – afin qu’ils puissent travailler de manière extrêmement sereine, avec un niveau de rémunération correspondant aux prestations réellement effectuées. Voilà ma position ! Les abus doivent cesser, c’est tout le sens de l’article 1er. Je maintiens donc qu’il s’agit de dispositions équilibrées. Avis défavorable.
M. Jean-Marie Tetart. Daniel Fasquelle ne vous a pas dit le contraire !
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Fasquelle.
M. Daniel Fasquelle. Si votre texte est si formidable que cela, alors expliquez-moi pourquoi le Conseil d’analyse économique, rattaché au Premier ministre, a porté un jugement aussi sévère !
Concernant le point qui nous intéresse, je constate malheureusement qu’il existe un décalage considérable entre les discours que vous tenez à la tribune et le contenu de votre texte.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Certainement pas !
M. Daniel Fasquelle. Bien sûr que si ! La preuve que vous ne voulez vraiment pas nous écouter, c’est que l’amendement que j’ai défendu est un amendement de cohérence : j’ai simplement proposé que la liste des mentions obligatoires ne soit pas fixée dans la loi mais dans un décret. Ne cherchez donc pas à caricaturer systématiquement notre point de vue !
M. Martial Saddier. Nous sommes de bonne foi !
(L’amendement no 59 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 19.
M. Jean-Marie Tetart. Après les amendements de cohérence, je vous propose un amendement de bon sens. La liste des mentions devant figurer dans le contrat type prévoit notamment que le bailleur donne l’adresse précise de son domicile. Or il a la possibilité de désigner un mandataire, d’abord parce qu’il a confiance en son professionnalisme et sa capacité à trouver le bon équilibre dans le contrat, mais aussi pour maintenir une distance avec le locataire.
Tout à l’heure, Julien Aubert nous a conté cette histoire du locataire qui harcelait son propriétaire par téléphone. Il ne me semble donc pas gênant que le locataire n’ait que les coordonnées du mandataire, car le propriétaire peut vouloir se protéger d’un rapport qu’il ne veut pas forcément mais que la loi régit par ailleurs. Voilà pourquoi nous proposons, dans le cas où il y a un mandataire, que les coordonnées du bailleur ne soient pas mentionnées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est un vrai sujet que vous défendez, mon cher collègue, dont nous avons déjà débattu. Si je comprends votre argumentation, j’émettrai toutefois, comme en première lecture, un avis défavorable car même si un mandataire agit au nom du propriétaire, le contrat est signé entre ce dernier et le locataire. Si le locataire veut, même si cela ne doit pas être le cas dans la majorité des cas, mener une action en justice contre le propriétaire, il doit pouvoir le connaître. De la même manière, si le propriétaire veut mener une action en direction du locataire, il a par définition connaissance de son adresse.
On pourrait discuter du cas particulier que vient de citer M. Aubert s’il rejoignait l’hémicycle pour s’intéresser au débat… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Jean-Marie Tetart et M. Lionel Tardy. Ce n’est pas bien, de dire cela !
M. Daniel Fasquelle. Ce n’est pas correct !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Peut-être, mais il nous a interpellés tout à l’heure et il n’est plus là.
M. Daniel Fasquelle. On vous ressortira ce que vous venez de dire le moment venu !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pas de problème, monsieur Fasquelle !
M. Jean-Pierre Gorges. Et vos collègues, où sont-ils, monsieur le rapporteur ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ce n’est pas moi qui ai cité M. Aubert, c’est vous. Je dis juste que je pourrai lui donner des explications s’il revient parmi nous, ce qui me fera plaisir et me permettra d’échanger avec lui de manière tout à fait républicaine.
Le contrat est signé entre le locataire et le propriétaire. Même si le propriétaire fait appel à un mandataire, le locataire doit pouvoir connaître son adresse. Pour toutes ces raisons, je ne suis pas favorable à votre amendement, monsieur Tetart.
(L’amendement no 19, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 384.
M. André Chassaigne. Il s’agit du loyer de référence majoré. Dans le texte initial, il était d’ailleurs question de « loyer médian de référence majoré ». Les sénateurs ont modifié cette appellation pour parler de « loyer élevé ». Puis notre rapporteur a poursuivi cette évolution sémantique pour parvenir à « loyer de référence majoré », une expression pertinente qui explique bien de quoi il s’agit.
Madame la ministre, en commission, vous avez bien précisé que le loyer de référence majoré avait vocation à être un plafond et vous avez ajouté qu’il fallait éviter la tentation de s’aligner sur lui. C’est pourquoi je m’interroge vraiment sur l’utilité de le faire apparaître dans le contrat de location, sous forme d’information. En effet, lorsqu’on en est à rédiger le contrat de location, je pense que le preneur et le bailleur se sont mis d’accord sur un prix. En faisant apparaître dans le contrat de location le loyer de référence majoré, on risque de tirer vers le haut le montant du loyer : involontairement, on veut faire apparaître que le loyer pourrait être plus élevé. Il peut donc y avoir un effet pervers. Pour cette raison, je propose de supprimer du contrat de location l’information sur le loyer de référence majoré.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Monsieur Chassaigne, j’entends votre raisonnement mais je n’y adhère pas : je considère que si nous supprimons le loyer de référence majoré du bail type, le locataire ne disposera pas de cette information au moment de la signature du contrat de location. Or c’est à partir du loyer de référence majoré que s’engage ou non le dispositif de complément de loyer exceptionnel. Le candidat locataire ne suit pas nécessairement l’évolution des prix, notamment la fixation du loyer de référence. Faire figurer en toutes lettres dans le bail type le loyer de référence et le loyer de référence majoré constitue pour le locataire une information supplémentaire.
Si je m’adressais à un autre député, je lui demanderais de retirer cet amendement, ce que je n’ose pas faire avec vous, monsieur Chassaigne. (Sourires.) À défaut, j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur Chassaigne, je partage l’avis du rapporteur. En fait, je ne comprends pas votre proposition. L’information sur le loyer de référence majoré constitue pour le locataire un élément très positif, puisque cela lui permet de savoir quel loyer son bail ne doit pas dépasser. En vérité, je ne vous demande même pas de retirer votre amendement, d’abord parce que je vous connais, ensuite parce que je ne le comprends pas. Plus précisément, c’est parce que je vous connais que je ne comprends pas que vous souhaitiez supprimer cet élément d’information. Avis donc tout simplement défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Chassaigne, maintenez-vous votre amendement ?
M. André Chassaigne. Oui, madame la présidente.
(L’amendement no 384 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 427 rectifié et 549.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 427 rectifié.
Mme Isabelle Attard. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement no 549.
M. François de Rugy. Il s’agit d’un amendement de précision. Comme le locataire n’est pas toujours en situation de vérifier que la date de fin du précédent contrat remonte effectivement à plus de dix-huit mois, il nous paraît plus simple d’indiquer le montant du dernier loyer et de préciser sa date dans les informations qui lui sont communiquées lors de son entrée dans les lieux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission a émis un avis favorable parce que, comme vous l’avez dit, il peut être utile de connaître la date du dernier versement. Et, comme l’ont dit aussi nos collègues de l’opposition, une autre raison peut être un souci de transparence et d’équilibre, pour les locataires comme pour les propriétaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
(Les amendements identiques nos 427 rectifié et 549 sont adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 441.
Mme Isabelle Attard. Cet amendement vise à supprimer le dépôt de garantie, qui est une source majeure de conflits entre locataires et bailleurs.
Dans la crise sociale sans précédent que traverse notre pays, la précarité est malheureusement le seul indicateur qui progresse chaque mois. Dans ces conditions, il devient de plus en plus dur pour un locataire de régler, avant même d’accéder au logement, un mois de garantie en plus du premier mois de loyer. Alors que le dépôt de garantie est censé compenser l’éventuel préjudice constaté par un propriétaire à la résiliation du contrat de location, on constate régulièrement que c’est le locataire qui subit un préjudice important lorsque le propriétaire refuse de rembourser tout ou partie de cette somme.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Défavorable. Le projet de loi renforce les obligations relatives au dépôt de garantie, notamment s’agissant du cas que vous venez d’évoquer, c’est-à-dire les difficultés de restitution de ce dépôt à l’issue du départ du locataire. J’ajoute que le dépôt de garantie n’a pas pour objet de garantir le loyer mais les dommages causés dans l’appartement par le locataire. C’est donc dans le souci d’équilibre que je défends constamment que la commission est défavorable à cet amendement.
M. Philippe Folliot. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard.
Mme Isabelle Attard. Je précise que le dépôt de garantie n’a pas pour effet d’effacer la dette éventuelle du locataire, que celui-ci reste soumis au droit de la responsabilité civile et qu’il peut être poursuivi sans limite de montant.
(L’amendement no 441 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 446 et 550.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 446.
Mme Isabelle Attard. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement no 550.
M. François de Rugy. Défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Dans le souci de l’équilibre que nous recherchons, la commission a émis un avis défavorable. Les auteurs de ces amendements proposent que le contenu du bail puisse être contesté pendant six mois, ce qui me paraît exorbitant par rapport au juste équilibre des relations entre propriétaires et locataires.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. En la matière, le délai d’un mois me paraît suffisant. D’abord, c’est à l’expiration de ce délai qu’est mise en œuvre l’action en diminution de loyer. On ne peut pas imaginer qu’elle commence plus de six mois après la signature du bail. Ensuite, pendant ce délai d’un mois, il s’agit de vérifier l’exactitude de la surface du logement, des loyers de référence et du dernier loyer acquitté par le locataire. Ce sont des informations basiques qui seront disponibles avec la création du bail type, et le délai est donc suffisant. Je demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, avis défavorable.
Mme la présidente. Madame Attard, maintenez-vous votre amendement ?
Mme Isabelle Attard. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Et vous, Monsieur de Rugy ?
M. François de Rugy. Je le retire, madame la présidente.
(L’amendement no 550 est retiré.)
(L’amendement no 446 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 123.
M. Lionel Tardy. L’alinéa 28 prévoit que le locataire peut demander une modification du bail si certaines informations manquent dans la version initiale, par exemple la surface habitable. Or la formulation n’est pas claire. Le bailleur doit porter ces informations sur le bail. Mais cette rédaction peut laisser entendre que le bailleur doit modifier le bail de sa plume après signature des parties, ce qui, reconnaissez-le, pose problème. Une clarification est nécessaire. La seule façon de porter les informations à la connaissance du locataire, c’est qu’elles soient écrites noir sur blanc et donc de réaliser un avenant au bail, comme cela se fait habituellement. En commission, vous m’avez répondu que cela coulait de source, mais je ne le pense pas. Il y a dans cet article des précisions bien moins utiles que celle-ci.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Je sais le sérieux avec lequel vous examinez les textes, monsieur Tardy. Effectivement, nous avons déjà eu ce débat en commission. Je comprends votre sentiment, mais il est question ici des informations à faire figurer dans le bail. Si la loi précisait que l’on peut ne pas écrire les informations obligatoires tout de suite mais par voie d’avenant, il pourrait y avoir des dérives. Il ne faudrait pas donner le sentiment que le bailleur et le locataire peuvent s’exonérer l’un et l’autre de leurs obligations par un simple avenant. Même si j’entends bien vos remarques, écrire cela dans la loi entraînerait un certain nombre de déviances que je souhaite éviter.
M. Lionel Tardy. Je ne suis pas d’accord !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Je vous ai entendu dire que vous n’étiez pas d’accord, monsieur Tardy, mais la démonstration du rapporteur est pourtant lumineuse : il s’agit de mentions obligatoires. Si des mentions obligatoires peuvent être rajoutées par avenant, par définition elles ne sont plus obligatoires.
M. Lionel Tardy. Comment s’assurer que les deux parties auront procédé à des vérifications ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Il est donc nécessaire qu’elles figurent sur le bail dès l’origine. C’est pourquoi je maintiens l’avis que j’avais émis en commission et que je reste défavorable à votre amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.
M. Lionel Tardy. Nous sommes d’accord sur le fait que les mentions obligatoires doivent figurer sur le contrat dès l’origine mais l’alinéa 28 précise : en cas d’absence dans le contrat de location d’une des informations relatives à la surface habitable, aux loyers de référence, le locataire peut mettre en demeure le bailleur de porter ces informations au bail. Mais comment vérifie-t-on que les deux parties en ont pris connaissance et qu’il s’agit des bonnes valeurs ? C’est cela, le problème !
Mme Cécile Duflot, ministre. Le bail type !
M. Lionel Tardy. Certes, mais quand l’information manque ? Quand le document a été signé, vous proposez de le raturer, mais vous m’expliquerez comment il est possible de s’assurer que les deux parties disposent des bonnes informations et comment il est possible de le vérifier.
Nous sommes d’accord pour dire que ces informations seront rajoutées sur un bail qui a déjà été signé, puisqu’elles faisaient défaut. Unilatéralement, l’une des parties rajoutera donc l’information qui manquait sur le bail sans en informer l’autre. Je suis désolé mais cela s’appelle en bonne et due forme un avenant, c’est tout.
(L’amendement no 123 n’est pas adopté.)
M. Lionel Tardy. C’est du n’importe quoi !
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 457 et 46 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 457.
Mme Isabelle Attard. Il est retiré.
(L’amendement no 457 est retiré.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 46 rectifié.
M. Jean-Marie Tetart. Il paraît tout à fait normal qu’un locataire puisse contester la surface habitable qui a été indiquée dans le bail si elle n’est pas exacte. Il est également normal qu’il dispose d’un délai, et que l’on ne lui dise pas qu’il n’a que deux jours pour procéder à la vérification.
Néanmoins, l’article 3-1 dispose que si le locataire formule sa demande dans les six mois, la diminution de loyer sera rétroactive jusqu’au jour de la signature du bail ; si c’est plus tard, elle aura lieu à partir de la date où la demande a été faite, et cela, indéfiniment, pendant douze ans si le bail est de douze ans. Finalement, il est toujours possible de s’apercevoir au bout de dix ans que la chose louée ne correspond pas à ce que l’on a cru, la rétroactivité jouant seulement à partir de la date de la demande. En définitive, le bail est perpétuellement remis en cause.
Dans la mesure où vous nous avez convaincus tout à l’heure que le bail type doit mentionner la surface habitable, l’information qui a été donnée au locataire est donc très claire et il a signé le document la comprenant.
Au lieu de favoriser une instabilité permanente, pourquoi ne pas indiquer clairement dans le document type que la surface louée indiquée dans le document peut être contestée dans un délai de six mois, après quoi elle sera irrecevable ? Cela serait beaucoup plus simple, honnête et transparent, au lieu de nous entraîner dans une instabilité permanente !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons déjà échangé à ce propos. J’entends bien là aussi vos remarques, cher collègue Tetart. La contestation concerne une surface habitable de la chose louée inférieure de plus d’un vingtième à celle inscrite dans le contrat de location. Il est évident que la mention d’une surface figurera dans le bail type, mais la question est de savoir ce qui se passe si la surface qui y est inscrite est différente de plus d’un vingtième de la surface réelle du logement.
Tel qu’il est rédigé, l’article dispose qu’il est possible de contester cette information essentielle qu’est la surface de la chose louée pendant toute la durée du bail. On ne parle pas d’autres choses, d’autres mentions figurant dans le bail : il est question de la surface de la chose louée avec une différence de plus d’un vingtième.
Un amendement venant, si je me souviens bien, du groupe écologiste, qui a été adopté par notre commission en première lecture au mois de juillet, a posé un verrou supplémentaire…
M. Daniel Fasquelle. C’est le délai qui est verrouillé !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. …indiquant que si cette contestation de la surface louée ne se fait pas dès le début – comme vous l’avez d’ailleurs rappelé tout à l’heure, cher collègue – la correction éventuelle de loyer ne prendra effet qu’au moment où la demande est formulée.
M. Jean-Marie Tetart. J’ai bien compris !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Très bien. Je pense donc qu’avec les deux verrous proposés, ce dispositif est tout à fait acceptable. Je rappelle une fois encore que nous parlons de la surface de la chose louée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Pour le coup, monsieur Tetart, je ne suis pas d’accord avec vous.
Ce que vous dites serait fondé en cas de rétroactivité complète sur le bail mais non à partir du moment où cette rétroactivité n’est que d’un mois.
M. Jean-Marie Tetart. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Elle est fondée en outre sur un élément précis qui ne varie pas – il est rare que les logements rétrécissent ou grandissent pendant qu’ils sont loués.
M. Jean-Marie Tetart. Je n’ai jamais dit le contraire !
Mme Cécile Duflot, ministre. Le nombre de mètres carrés est assez stable.
En cas d’erreur, il semble normal qu’elle soit corrigée et qu’une rétroactivité soit possible pendant six mois. Nous avons accepté l’idée, et c’est logique, qu’elle ne soit pas possible pendant des années. Il n’est pas possible qu’un locataire qui se rendrait compte que son logement ne fait pas la taille dite dix ans après avoir signé le bail bénéficie d’une rétroactivité de dix ans – ce qui serait également valable dans l’autre sens. Le dispositif a donc deux verrous, comme l’a dit le rapporteur : une rétroactivité pendant les six premiers mois et aucune rétroactivité pendant la période qui suit.
Il est tout de même logique que cet élément immuable que sont les mètres carrés fasse l’objet, le cas échéant, d’un réajustement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.
M. Jean-Marie Tetart. J’avais bien compris ce que vous venez de me réexpliquer. Simplement, je ne comprends pas pourquoi vous tenez à faire compliqué lorsque l’on peut faire simple.
Je vous propose que le contrat type indique, en gros caractères et non pas après un astérisque, que la surface de la chose louée est vérifiable et contestable dans les six mois, et on n’en parle plus ! C’est très simple ! Je ne comprends pas un tel blocage sur des amendements de bon sens comme celui-ci.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. Tout en étant sensible aux arguments de Mme la ministre, il me semble qu’une telle inscription explicite et très visible dans le contrat type interpellera d’évidence le preneur. Le locataire qui lit cette information dispose tout de même de six mois pour prendre son mètre – de préférence, compte tenu des arguments que je viens d’entendre, sans le faire passer dans la machine à laver – et s’il est étalonné à peu près normalement, je ne vois pas très bien pourquoi il faudrait prolonger cette période d’incertitude dans l’attente d’une révélation qui tomberait de je ne sais où.
M. Jean-Marie Tetart. C’est du bon sens et de la bonne volonté !
Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy.
M. Lionel Tardy. Madame la ministre, dans cette affaire, on se mord la queue.
M. Philippe Folliot. Cela peut faire mal ! (Sourires)
M. Lionel Tardy. L’alinéa 30 est opératoire si la surface habitable a été inscrite sur le contrat. Il dispose qu’il est possible de contester « Lorsque la surface louée habitable de la chose louée est inférieure de plus d’un vingtième à celle exprimée dans le contrat de location… ». Mais l’alinéa 28, quant à lui, dispose que si la surface habitable ne figure pas dans le contrat, le bailleur devra l’y mettre de façon unilatérale sur son propre contrat puisqu’il n’y aura pas d’avenant. Comment le locataire pourra-t-il dès lors vérifier que la surface habitable de la chose louée est inférieure d’un vingtième à celle qui est exprimée dans le contrat ?
M. Jean-Marie Tetart. Vous vous entêtez pour des raisons de principe !
M. Lionel Tardy. Et qui vous dit que le locataire ne pourra pas quant à lui changer la surface habitable, puisque, de toute façon, aucun avenant n’aura été signé ? Votre système ne marche pas, ou seulement lorsque la surface habitable sera mentionnée sur le contrat de location. Dans le cas contraire et dans celui où les informations devront être portées sur le bail, ce dernier ne sera pas opposable.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. L’amendement 46 rectifié ne dispose pas qu’il faille faire figurer la surface habitable sur le contrat ou qu’il faille la contester pendant les six premiers mois. Il vise à compléter l’alinéa 30 et non à rajouter une information au contrat de bail.
J’entends bien que M. Tardy considère cette partie du texte comme bancale mais si nous insérons cet amendement 46 rectifié à la suite de l’alinéa 30, elle ne tiendra plus du tout d’un point de vue logique ! L’alinéa 30 précise en effet que la surface habitable de la chose louée peut être contestée, qu’à défaut d’accord entre les parties ou à défaut de réponse du bailleur dans un délai de deux mois à compter de la demande en diminution de loyer le juge peut être saisi, que la diminution de loyer acceptée par le bailleur prend effet à la date de signature du bail, et que si la demande en diminution du loyer par le locataire intervient plus de six mois à compter de la prise d’effet du bail, la diminution de loyer sera acceptée à partir de la date de la demande. Si vous ajoutez, avec l’amendement 46 rectifié, que la demande doit être formée dans les six mois de la prise d’effet du contrat de location, le dispositif ne tient plus du tout.
M. Jean-Marie Tetart. Un sous-amendement du Gouvernement est possible.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Enfin, monsieur Tardy, oui, la surface habitable de la chose louée doit figurer dans le bail, comme en disposent les alinéas 13 à 23 que vous contestiez tout à l’heure et que vous vouliez supprimer.
M. Lionel Tardy. Et si elle n’y figure pas ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. De plus, si elle n’y figure pas, il est obligatoire de l’y faire figurer comme nous l’avons répété tout à l’heure à propos de votre amendement précédent.
M. Lionel Tardy. Le contrat ayant déjà été signé, comment faites-vous ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Bien évidemment, je réponds en séance publique – vous savez que ce qui est dit ici favorise une bonne compréhension de la loi – que ce n’est pas l’une des deux parties qui corrigera l’une des mentions du bail sans l’avis de l’autre.
M. Lionel Tardy. Rendez possible un avenant !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. La validité du bail, en effet, pourra être contestée si l’une des mentions obligatoires manque. Dire qu’un avenant est en tant que tel nécessaire – vous parlerez sans doute beaucoup de l’aléa moral lors de la discussion de l’article 8 sur la garantie des loyers – encouragerait un aléa moral fort : s’il est de toute façon possible de corriger par voie d’avenant, autant ne pas inscrire dès le début dans le bail type et au moment de la signature un certain nombre de mentions obligatoires !
Je réitère donc l’expression de mon avis défavorable et celui de la commission sur cet amendement 46 rectifié.
M. Lionel Tardy. Les parties ne seront pas au courant.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Cécile Duflot, ministre. Je ne comprends pas en quoi ce dispositif vous pose un problème. Si, deux ans après avoir intégré son logement, le locataire qui a signé son bail vérifie, par exemple à l’occasion de l’installation de meubles, les dimensions de son logement et qu’il constate qu’elles ne sont pas conformes à son bail, en quoi serait-il logique de maintenir un loyer erroné ? C’est cela que je ne comprends pas.
J’entends bien que vous contestiez une rétroactivité sur deux ans, mais je ne comprends pas que vous contestiez la modification en elle-même. Si le locataire n’a pas vérifié les dimensions de son logement au bout de six mois, tant pis, dites-vous – alors que la taille est un élément objectif et immuable ?
Au final, je ne comprends donc pas votre amendement. Pourquoi empêcheriez-vous la rectification dès lors qu’il n’y a pas de rétroactivité, étant donné que l’on se fonde sur un élément certain : le nombre de mètres carrés du logement ? Je maintiens donc mon avis défavorable.
Si nous adoptions votre amendement, il y aurait une forme de prime à celui qui essayerait de « tenir » pendant six mois sur une dimension erronée pour pouvoir bénéficier d’un loyer majoré alors que cela n’aurait pas dû être le cas. Voilà.
M. Lionel Tardy. Vérifier au début, cela fait partie des obligations.
(L’amendement no 46 rectifié n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 383.
M. Michel Piron. Un amendement post-marxiste ! (Sourires)
M. André Chassaigne. J’espère, madame la ministre, que vous comprendrez cet amendement. En ce qui me concerne, je comprends votre raisonnement.
Je reviens un instant sur l’amendement 384. Le loyer de référence majoré comporte un risque, celui de tirer vers le haut les loyers les plus bas. Vous-même l’aviez d’ailleurs souligné en commission.
Mme Cécile Duflot, ministre. C’est pour cela que nous le bloquons.
M. André Chassaigne. Il peut y avoir une tentation. Mais je ne reviens pas là-dessus.
S’agissant de l’amendement 383, j’ai été très embêté parce que je me suis dit que Mme la ministre va encore répondre qu’elle ne comprend pas.
Je le résumerai par un proverbe dont je ne sais pas s’il est français ou anglais : celui qui commande la musique paie les pipeaux.
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Ça, c’est de la flûte !
M. Michel Piron. C’est en tout cas très anglo-saxon !
M. André Chassaigne. C’est au propriétaire qui fait appel à une agence pour organiser la visite des locaux et rédiger le bail de payer la totalité des frais.
Il n’y a pas de raison que le coût soit supporté à moitié par le locataire.
Il est vrai que la première partie de mon amendement est plus contestable, dans la mesure où la situation peut naître d’un différend sur l’état des lieux. Je veux bien en convenir. Mais, pour ce qui est des alinéas 54 et 55, à savoir le fait qu’une personne soit mandatée pour le propriétaire, il n’y a aucune raison que le locataire paie 50 % des frais. Tel est l’objet de cet amendement. J’espère, madame la ministre, que vous en avez compris la teneur, même si vous n’en partagez pas l’orientation.
M. Michel Piron. Et la musique !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Notre collègue Chassaigne fait pour ainsi dire les questions et les réponses !
Le texte a évolué entre sa présentation en Conseil des ministres, sa discussion en première lecture et son examen, en commission, en deuxième lecture. Un équilibre a été trouvé entre les besoins et les droits des locataires et ceux des propriétaires, notamment à travers l’adoption d’un amendement, présenté par le Gouvernement en commission dans le cadre de la deuxième lecture, qui vise à répondre à un certain nombre de préoccupations. Or, si l’on vous suivait en adoptant le présent amendement, on reviendrait, non seulement sur cet équilibre, mais aussi sur la loi de 1989, dans la version actuellement en vigueur, laquelle prévoit que, pour un certain nombre de démarches, les frais sont partagés entre locataire et propriétaire, notamment en ce qui concerne la rémunération des professionnels de l’immobilier.
Imputer au seul bailleur les frais résultant de la réalisation de l’état des lieux et de l’établissement du bail ne me semble pas aller dans la bonne direction, d’autant que ces deux documents engagent aussi bien le locataire que le propriétaire – je me tourne à cet instant vers nos collègues de l’opposition. À ce moment-là, le professionnel de l’immobilier qui aide à leur rédaction conseille d’une certaine façon les deux parties. À ce titre, il a droit à une rémunération dont le coût est partagé.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Je note que cette question a enflammé le débat depuis le début de l’examen de ce texte, mais d’une manière de plus en plus intense, puisque aucun amendement de cette nature n’avait été présenté en première lecture. En disant cela, je ne suis ni naïve ni fâchée. Mais ce sujet est suffisamment sensible pour ne pas mériter la caricature.
J’ai été accusée par M. Fasquelle d’être une sorcière – même s’il n’a pas employé ce mot –,…
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Il est vrai que M. Fasquelle est souvent excessif !
Mme Cécile Duflot, ministre. …de détester les agents immobiliers et de vouloir licencier je ne sais combien de salariés travaillant dans le secteur. Et voilà, monsieur le président Chassaigne, que vous me dites que la logique voudrait que les locataires ne paient aucun frais.
Je le dis et le répéterai autant que nécessaire : oui, il est anormal que les rémunérations des professionnels de l’immobilier aient augmenté comme elles l’ont fait. Ce n’est pas ce que prévoit la législation actuelle. À cet égard, il est intéressant d’étudier quel était l’esprit de la loi, sa rédaction et l’usage qui en a été fait. Demandez à n’importe qui à combien s’élèvent les frais d’agence pour la location d’un logement ; on vous répondra : un mois de loyer. Autrement dit, dans les zones les plus tendues, les honoraires ont augmenté de 40 % en moins de dix ans. Or il n’y a aucune corrélation avec les tâches accomplies, puisque d’autres professionnels qui ne sont pas en difficulté financière – les huissiers, par exemple – effectuent certaines d’entre elles, mais dans le cadre de tarifs administrés.
Le choix du Gouvernement en la matière est de faire cesser les abus, de réguler ces montants. Il faut également dire les choses telles qu’elles sont. En l’occurrence, il est normal qu’un certain nombre de prestations bénéficient aux locataires. De ce point de vue, il n’est d’ailleurs pas inutile que la rémunération du professionnel soit assumée conjointement, de façon à ce qu’il ait à cœur de défendre les intérêts des deux parties, c’est-à-dire de jouer son rôle d’intermédiaire. Ainsi, les professionnels de l’immobilier jouent un rôle utile à la fluidification des rapports entre propriétaires et locataires.
Le projet de loi a pour but de contenir les honoraires liés aux prestations qui bénéficient au locataire, et non à celles qui bénéficient au propriétaire. En outre, ces rémunérations seront plafonnées en fonction du nombre de mètres carrés et non du montant du loyer. Autrement dit, elles seront en rapport avec la prestation effectivement réalisée. C’est un bon argument de marketing que de dire que le locataire doit payer zéro euro, mais on sait bien que, quand on reçoit un service gratuit, on en est généralement l’objet plutôt que le bénéficiaire.
Pour que les relations soient équilibrées, il faut mettre fin aux abus, faire baisser les rémunérations qui sont devenues excessives du fait de leur corrélation aux loyers, mais aussi faire en sorte que les professionnels de l’immobilier servent les intérêts des deux parties. Voilà pourquoi je suis défavorable à votre amendement. C’est une position de fond : on peut considérer qu’il faut pencher totalement d’un côté – c’est la situation actuelle – ou totalement de l’autre ; je propose pour ma part, et c’est la perspective de la loi ALUR, un point d’équilibre.
Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Je voudrais d’abord reconnaître une petite erreur. Le proverbe exact, que quelqu’un m’a fait passer, est le suivant : « Qui paie les violons choisit la musique. » Ayant un anglais détestable, je ne le dirai pas dans cette langue. (Sourires.)
Je veux bien reconnaître aussi que, quand il y a une divergence sur l’état des lieux – c’est la première partie de mon amendement –, on peut concevoir que le coût engendré soit partagé de façon égale.
En revanche, je ne suis absolument pas convaincu par l’idée que, quand un propriétaire fait appel à un agent immobilier comme intermédiaire, le coût doive en être supporté à 50 % par lui et à 50 % par le locataire. Je trouve cela complètement injuste.
M. Jean-Pierre Gorges. Il a raison !
M. André Chassaigne. Ce faisant, on inverse d’une certaine manière la réalité des rapports entre le propriétaire et le locataire. Je sais bien que cette question est délicate et qu’il convient de préserver l’équilibre dont vous parliez, mais, intellectuellement et d’un point de vue éthique, je n’arrive pas à comprendre cette approche – peut-être suis-je d’ailleurs le seul –, même s’il est vrai qu’elle a cours. Je maintiens donc mon amendement pour le principe, ne serait-ce que pour sa deuxième partie. Ainsi, il y aura un vote sur ce sujet.
M. Jean-Pierre Gorges. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Cécile Duflot, ministre. Vous me permettrez, monsieur Chassaigne, de relever le dicton que vous venez de citer – je connais d’ailleurs davantage cette version que la précédente : « Qui paie les violons choisit la musique. » C’est une démonstration de l’intérêt du fait que les honoraires soient payés par les deux parties. En effet, s’il n’y a que le propriétaire qui paie les violons, c’est lui qui choisit la musique !
M. André Chassaigne. Mais c’est lui qui a choisi de prendre l’intermédiaire !
Mme Cécile Duflot, ministre. En conséquence, c’est lui qui a barre sur l’intégralité de l’élaboration des documents. Je pense qu’il est beaucoup plus sain que le professionnel, qui aura d’ailleurs des obligations en matière de formation à l’issue de l’adoption de la loi ALUR, soit redevable à l’égard des deux parties. Curieusement, votre formule démontre l’inverse de ce que vous voulez défendre.
(L’amendement no 383 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 148.
M. Dino Cinieri. Cet amendement vise à responsabiliser les bailleurs en les incitant à effectuer systématiquement un état des lieux d’entrée, ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui. Lorsqu’il n’y a pas d’état des lieux d’entrée, le dépôt de garantie devrait être intégralement restitué au locataire. En effet, la législation française, à l’inverse de certaines législations étrangères, n’oblige pas le bailleur à effectuer des travaux de remise en état avant location. Il est donc injuste pour le locataire de considérer a priori que tout logement mis en location est en bon état.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement, dont nous avions déjà discuté en commission, se révélerait, s’il était adopté, très défavorable aux propriétaires, je tiens à vous le faire remarquer. En effet, il inciterait fortement les locataires à prétendre qu’il n’y a pas eu d’état des lieux d’entrée, de manière à se voir restituer en totalité le dépôt de garantie. Or l’état des lieux d’entrée est un document contractuel entre les deux parties. Un exemplaire est obligatoirement remis à chacun. Le locataire et le propriétaire en ont la garde pendant toute la durée du bail. Ce document permet de voir si, entre le moment de l’entrée dans les lieux et celui de la sortie, des dégradations importantes sont intervenues dans le logement, et d’utiliser le dépôt de garantie pour pallier ces désordres. Si l’on vous suivait et qu’un locataire perdait l’état des lieux ou arguait qu’il n’y en avait pas, ce serait très défavorable au propriétaire, lequel devrait restituer la totalité du dépôt de garantie. Pour ces raisons et, encore une fois, dans un souci d’équilibre, l’avis de la commission est défavorable.
(L’amendement no 148, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 17.
M. Jean-Marie Tetart. Vous avez prévu, dans cet article, des modalités très précises pour l’établissement de l’état des lieux. Vous avez même indiqué que l’on pouvait confier cette tâche à un professionnel, par exemple un huissier. On peut donc penser que cet état des lieux est établi avec toute la perspicacité et le sérieux nécessaires, avec les garanties que cela suppose.
Or vous proposez, par ailleurs, de donner dix jours au locataire pour revenir sur cet état des lieux au motif que l’on a oublié telle ou telle chose. C’est donc sa parole contre celle de l’autre partie – le bailleur –, puisqu’ils ont signé ensemble l’état des lieux, alors même que, pendant ce délai de dix jours, le locataire a l’entière responsabilité du local et peut y faire ce qu’il veut.
Vous créez donc, dès le début du bail, une relation quasi contentieuse entre le propriétaire et le locataire avec cette possibilité de remise en cause de l’état des lieux. Je remarque d’ailleurs que, pour l’état des lieux de sortie, vous n’accordez pas au bailleur la même facilité de remettre en cause le document s’il n’avait pas été suffisamment perspicace au moment de son établissement. Il y a là un nouveau déséquilibre entre propriétaire et locataire. J’ajoute que, si l’on vous suit et que l’état des lieux a été fait par un professionnel – selon un tarif dont vous avez fixé les modalités de partage entre propriétaires et locataires –, il faudrait que l’avenant donne lieu, lui aussi, à paiement. Or vous n’avez pas prévu les modalités de sa prise en charge financière. Comment répartirez-vous ces coûts ?
Pour toutes ces raisons, nous demandons que le premier jet d’un état des lieux soit le bon, tant pour l’entrée que pour la sortie, et qu’il n’y ait pas de délai permettant de le contester.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons déjà examiné cet amendement en première lecture. La commission a, cette fois encore, émis un avis défavorable.
Il s’agit, non pas d’une obligation, mais d’une possibilité.
M. Jean-Marie Tetart. Ben voyons !
M. Daniel Goldberg, rapporteur. L’alinéa 35 que vous proposez de supprimer est ainsi rédigé : « Le locataire peut demander au bailleur ou à son représentant de compléter l’état des lieux dans un délai de dix jours à compter de son établissement. Si cette demande est refusée, le locataire peut saisir la commission départementale de conciliation territorialement compétente. »
Je dois vous dire que, au cours des auditions qui ont été menées dans le cadre de l’examen de ce texte, l’ensemble des professionnels a reconnu que c’était là une pratique habituelle, bien entendu soumise à contrôle : si le locataire, dans les dix jours, a commis des désordres de son propre fait dans le logement, le propriétaire ne complétera pas l’état des lieux, puisqu’il s’agit d’un document cosigné par les deux parties. Cette pratique est régulièrement constatée sur le terrain ; elle recueille l’assentiment des professionnels. D’ailleurs, les délais permettant, non pas nécessairement de contester, mais d’ajouter un certain nombre d’éléments – tels une vitre dont on n’avait pas vu qu’elle était abîmée – et pour lesquels le propriétaire donne son accord, sont même parfois plus longs, puisqu’ils peuvent atteindre une quinzaine de jours. Nous nous sommes limités dans le texte à dix jours. Pour ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.
M. Jean-Marie Tetart. Dans ce cas, il n’est nul besoin de la loi pour dire que des personnes de bonne volonté peuvent toujours s’accorder sur un avenant ! Il n’est pas utile non plus de leur donner un délai pour le faire, puisqu’il s’agit d’une démarche entre personnes de bonne volonté. Je ne vois pas en quoi la loi peut régir de tels rapports.
M. Lionel Tardy. CQFD !
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. J’aurais aimé savoir ce qui a présidé au choix de ce délai dix jours. Ce temps excède celui d’un déménagement. Au-delà de trois jours, il me semble que l’on prend le risque de dégradations qui n’ont plus rien à voir avec l’emménagement. Je n’ai pas d’objection sur le reste, mais il me semble que ce délai est un peu long.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ce délai laisse au locataire, qui peut ne pas prendre tout de suite possession du logement, le temps de constater les défauts dont il ne se serait pas rendu compte au moment de la signature de l’état des lieux. Pourquoi fixer un délai ? Pour ne pas insécuriser l’état des lieux, qui pourrait, sans cela, être contesté pendant toute la durée du bail. Encore une fois, toutes les discussions que nous avons eues avec les professionnels ont monté que ce délai était acceptable.
(L’amendement no 17 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 163.
M. Dino Cinieri. La réalisation de l’état des lieux d’entrée et de sortie et la récupération du dépôt de garantie constituent deux des plus grandes sources de litiges traités par les associations de consommateurs dans le domaine du logement. Les locataires sont souvent mal informés quant à l’importance des états des lieux, et désarmés lors d’un litige concernant la récupération de leur dépôt de garantie suite à l’état des lieux de sortie.
Or, dans le parc privé, les locataires restent en moyenne cinq ans dans leur logement, parfois bien plus longtemps. Au bout de ce délai, l’état des lieux d’entrée a souvent été égaré. La remise d’une copie de l’état des lieux d’entrée en amont de la réalisation de l’état des lieux de sortie permettra donc aux locataires d’être parfaitement informés et de prévoir, le cas échéant, les réparations nécessaires.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Avis défavorable, car un tel amendement romprait l’équilibre que nous recherchons. Si nous adoptions votre point de vue, la conservation du document deviendrait de la seule responsabilité du propriétaire, le locataire étant délié de son obligation de le conserver pour pouvoir l’opposer au moment de la sortie des lieux. La réalisation de l’état des lieux est une responsabilité partagée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
(L’amendement no 163 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements rédactionnels nos 609, 582 et 610 de M. le rapporteur.
(Les amendements nos 609, 582, 610, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 282 et 508.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 282.
M. Jean-Marie Tetart. Cet amendement vise à supprimer le diagnostic obligatoire sur les installations de gaz, qui s’ajoute aux obligations sur les installations électriques. Ce diagnostic porte sur le point d’arrivée du gaz. Or la dangerosité du gaz tient plus aux défauts d’usage et d’entretien – notamment du tuyau d’alimentation de la cuisinière – qu’aux installations du bâtiment. Par ailleurs, la réalisation d’un tel diagnostic représente une dépense supplémentaire, et inutile.
Cet amendement prévoit également un décret en Conseil d’État pour fixer les modalités d’application du diagnostic électrique et prévoir ainsi un échelonnement dans le temps.
M. Lionel Tardy. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement no 508.
M. Jean-Louis Dumont. Quelques mots pour compléter l’explication donnée par M. Tetart sur la dangerosité du gaz. Le texte, en l’état, est redondant par rapport aux contraintes existantes. Au moment où l’on veut simplifier, il vaut mieux contrôler l’entretien annuel, qui fait l’objet de normes. Un amendement qui sera défendu ultérieurement porte sur les documents d’information donnés au locataire. Prenons garde à ce qu’une maladresse – involontaire – du texte n’entraîne une judiciarisation plus grande encore, les indications données aux futurs occupants pouvant apparaître non comme des informations, mais comme des éléments opposables.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Le sujet des risques liés à l’électricité et au gaz, porté par le président Brottes, nous a beaucoup occupés en commission au mois de juillet. La chose louée doit être conforme à des règles minimales de sécurité pour ce qui concerne l’électricité et le gaz, afin que l’intégrité physique des futurs locataires ne soit pas mise en danger.
Il ne s’agit pas de mettre à niveau les normes d’électricité ou de gaz, ou de savoir si le flexible est conforme. L’alinéa 43 impose aux bailleurs des conditions de sécurité minimales, fixées par décret, sur les conduites de gaz qui sont de leur responsabilité. Il arrive que des marchands de sommeil louent un bien dans lequel l’accès à l’électricité ou au gaz n’est pas sécurisé. Nous avons voulu avancer sur ce sujet.
Il ne sera pas nécessaire de refaire cet état des lieux minimal de sécurité pour le gaz et l’électricité à chaque changement de locataire, s’il intervient tous les six mois ou tous les ans. C’est ce que définira le décret. Le diagnostic portera sur un certain nombre de définitions minimales d’accès aux deux sources d’énergie et garantira au locataire que le lieu dans lequel il emménage est sûr.
Certes, 98 % des accidents liés au gaz ont lieu dans des installations intérieures, selon les statistiques du ministère de l’environnement. Dans la majorité des cas, ils sont dus à un défaut d’entretien ou à des comportements imprudents. Mais ils peuvent aussi être liés à la vétusté des installations, lesquelles relèvent de la seule responsabilité du propriétaire. C’est contre cette dernière que nous voulons lutter.
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Le Gouvernement recommande la sagesse.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. Si vous le permettez, je développerai aussi l’argumentaire en faveur de l’amendement no 102, qui a un autre objet mais se situe dans le même registre. Deux questions, bien différentes, sont posées. En premier lieu, certains logements proposés à la location ne sont pas conformes aux règles de sécurité, mais ces règles existent déjà et les dérives, par exemple celles des marchands de sommeil, sont condamnables. À quoi bon en rajouter ?
En revanche, on nous propose une sorte de déclaration sous forme de diagnostic supplémentaire : merci pour la simplification, et aussi pour les coûts ! Par l’amendement no 102, qui est presque un amendement de repli, je propose que le diagnostic ait simplement une valeur informative. À défaut, je crains qu’une telle disposition ne contribue à nourrir les bureaux de contrôles, avec des honoraires, et même à alimenter avec de nouveaux contentieux, comme c’est chaque fois le cas lorsque l’on complexifie les procédures, les cabinets d’avocats – ce qui n’était pas le but recherché.
Je le répète, les textes actuels suffisent pour condamner les gens qui mettent en location des logements non conformes aux normes de sécurité.
M. Philippe Folliot. Il a raison !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Tetart.
M. Jean-Marie Tetart. Pour lutter contre l’habitat indigne, il vaudrait mieux qu’un autre texte rende obligatoire un diagnostic sur les parties communes. À l’intérieur des appartements, l’installation se résume à un point d’entrée, qui conduit généralement à un seul équipement. Vérifier ce point d’entrée est très accessoire par rapport à l’ensemble des conduites présentes dans les parties communes.
M. Martial Saddier. Tout à fait.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je suis assez choqué par les arguments que j’ai entendus, d’un bord comme de l’autre. Nous avons voté un texte sur les détecteurs de fumée, proposé par l’ancienne majorité. Nul n’a dit, alors, qu’il s’agissait de complexifier, mais de sécuriser ! Nous avons voté un texte sur la mise en conformité des ascenseurs – et Dieu sait si nous sommes en retard sur ces sujets. Il s’agissait d’une nécessité, pas d’une complexité supplémentaire !
Monsieur Dumont, votre argumentation me choque également. Lorsque vous entrez dans un logement, qu’il soit loué par un organisme HLM ou par n’importe quel autre bailleur, vous prenez un risque majeur si le flexible est défaillant ou si la chaudière fuit sans que personne ne vous en ait averti. Vous devez, à votre entrée dans le logement, avoir toutes les garanties concernant l’absence de fuites de cette nature. Je vous assure qu’il existe des propriétaires, publics ou privés, qui s’exonèrent totalement de cette vérification de base.
M. Jean-Louis Dumont. Interdisez le gaz, pendant que vous y êtes !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Que vous taxiez cela de complexité, alors qu’il s’agit de sécurité, me choque beaucoup !
M. Michel Piron. C’est un procès d’intention !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont.
M. Jean-Louis Dumont. Je n’avais pas envisagé d’intervenir de nouveau, considérant que ce sujet technique était déjà encadré par des textes, des critères et des contraintes en nombre suffisant. En outre, il y va de la responsabilité des bailleurs, qu’ils soient privés ou sociaux. Nous parlons là des bailleurs qui sont dans la norme ; il va de soi que pour toute entrée dans un logement indigne ou dans un immeuble méritant presque la démolition, le maire – sans doute y en a-t-il dans cet hémicycle – connaît ses responsabilités et sait que la réglementation lui permet d’intervenir pour protéger la sécurité de ses concitoyens.
En l’espèce, nous nous sommes en train d’ajouter au dispositif une couche supplémentaire qui n’aura pour seul effet, comme le dit M. Piron, que d’augmenter les coûts. Comment imaginer que des flexibles puissent être laissés en l’état ? Les flexibles sont régulièrement contrôlés et doivent être changés, sans quoi il y a une erreur quelque part.
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Personne ne vérifie !
M. Jean-Louis Dumont. Ce n’est tout de même pas de la faute du propriétaire, si le locataire occupe son appartement depuis quinze ou vingt ans ! Ou alors, on s’immiscera dans la vie de l’occupant !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. C’est au changement de locataire que cela se passe ! Il n’y a pas de vérification régulière !
M. Jean-Louis Dumont. Et alors, que faire quand certains locataires occupent les lieux depuis dix, voire vingt ou vingt-cinq ans, au point d’avoir connu le DSQ, l’ANRU, des interventions et des rénovations ?
M. Lionel Tardy. Comment fait-on ?
M. Jean-Louis Dumont. Ira-t-on les contrôler tous les trente-cinq ou quarante ans ?
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Mais non !
M. Jean-Louis Dumont. Vous êtes en train de complexifier les choses.
M. Guillaume Chevrollier. Quel choc de simplification !
M. Jean-Louis Dumont. Compte tenu de ce qui existe et de la loi qui va être votée, l’avis de sagesse de Mme la ministre signifiait, me semblait-il, qu’il pourrait être procédé à des interventions réglementaires, et qu’il est inutile d’être redondant. Vous pouvez toujours continuer à multiplier les normes, voire à interdire le gaz, et pourquoi pas l’électricité aussi puisque certaines personnes s’électrocutent – c’est même parfois le cas de gens célèbres !
M. Martial Saddier. Il y a de l’eau dans le gaz de la majorité…
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. Je demande simplement de ne pas faire l’objet d’un procès d’intention : nous n’avons jamais été contre la sécurité !
Mme Audrey Linkenheld, rapporteure de la commission des affaires économiques. Ah ça, non !
M. Michel Piron. Ce n’est pas parce qu’en l’espèce, nous nous opposons à une mesure inutile, coûteuse et complexe que nous sommes contre la sécurité ! J’ajoute que s’agissant de ceux qui trichent, les fameux marchands de sommeil, le texte comporte heureusement des compléments – que nous voterons sans hésiter – aux mesures déjà prises sous la précédente législature, qui seront très utiles pour renforcer la pression exercée sur eux. De grâce, que l’on ne nous fasse donc pas un procès en laxisme face à l’insécurité, parce que nous disons simplement qu’on n’a pas besoin du diagnostic proposé ; ce n’est pas du tout le sujet !
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot.
M. Philippe Folliot. On peut toujours utiliser une bombe nucléaire pour tuer une mouche ! C’est là tout le problème. Pour résoudre le problème des comportements de délinquants – j’ose ce terme – des marchands de sommeil qui louent sciemment des logements insalubres, nous allons imposer une contrainte à tout le monde. J’insiste particulièrement sur les conséquences qui affecteront l’ensemble des bailleurs sociaux, lesquels éprouvent souvent des difficultés à parvenir à un équilibre, ne serait-ce que financier. Dans ces conditions, il est regrettable d’ajouter une charge supplémentaire, surtout si elle correspond à des éléments de protection quasi superfétatoires. Cela ne signifie pas, monsieur Brottes, que nous sommes contre les garanties de sécurité, mais je ne connais pas un seul bailleur social qui s’amuserait à prendre le moindre risque en la matière. Les bailleurs sociaux de notre pays sont des professionnels exemplaires qui sont très attentifs à la sécurité, mais aussi aux charges qu’ils font peser sur leurs locataires.
Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy.
M. François de Rugy. Je n’avais pas prévu d’intervenir sur ces deux amendements identiques, mais je souhaite ajouter un argument au débat. Chacun s’accorde sur l’idée qu’il faut proposer des logements sûrs et faire progresser le niveau de sécurité. Cela étant dit, je constate qu’il existe depuis de nombreuses années une tendance à montrer du doigt les installations au gaz, et à vouloir renforcer l’idée pourtant fausse selon laquelle les appartements équipés au gaz, qu’il s’agisse de la cuisson ou du chauffage, sont dangereux. Nous avons déjà vu des copropriétés tenter de couper les installations au gaz existantes, et des propriétaires faires signer des baux dans lesquels est stipulée l’interdiction, pourtant illégale, d’installer des éléments de cuisson au gaz. Il existe aussi d’autres moyens détournés : interdire le stockage d’une bouteille de gaz dans les parties communes telles que les caves, par exemple.
Tout cela est particulièrement fâcheux, non seulement parce que le gaz est indûment désigné, alors que cette énergie a toute sa place dans les logements, mais aussi parce que c’est faux ! Chacun sait en effet que les accidents, départs de feu et incendies graves, voire mortels, sont beaucoup plus souvent liés aux installations électriques !
M. Benoist Apparu. Voire nucléaires ! (Sourires.)
M. François de Rugy. Il ne viendrait pourtant à l’idée de personne de vouloir couper l’électricité dans tous les appartements à cause des risques qu’elle présente, ou à cause des problèmes constatés dans des installations vétustes ! Or cet argument, même s’il n’est pas explicite, sous-tend un nombre croissant de mesures visant à entraver le maintien par les propriétaires ou par des locataires d’installations au gaz dans leurs appartements.
J’ajoute que chacun sait combien l’entretien annuel des chaudières à gaz est superflu : on voit chaque année des individus qui font payer des contrats d’entretien et prélèvent plus de cent euros pour passer cinq minutes munis d’une balayette à nettoyer l’entrée d’air !
M. Lionel Tardy. C’est comme les extincteurs : même chose !
M. François de Rugy. Or, c’est le lobby de l’électricité qui est derrière cette situation, car il veut restreindre encore davantage l’usage du gaz, alors qu’il l’a déjà été dans le secteur du logement.
M. Benoist Apparu. Ce n’est pas moi qui ai parlé de lobby !
M. François de Rugy. N’oublions donc pas cet argument : s’il est tacite, il inspire bel et bien un certain nombre de mesures qui, à force de se cumuler, finissent par contribuer à la perte de diversité des modes d’approvisionnement en énergie des locataires.
M. Jean-Louis Dumont. Bien, et si nous parlions des ascenseurs ?
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Jamais je n’aurais imaginé que M. de Rugy puisse développer cet argument, mais après tout pourquoi pas…
M. Benoist Apparu. Oui, il n’est pas mal en effet !
M. François de Rugy. Je ne l’avais pas prévu, mais c’est d’expérience !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je comprends bien que nous sommes là dans un débat où chacun doit surenchérir un peu dans les arguments – et parfois moi le premier. Quel est donc le sujet ? Nous ne parlons que du moment où le locataire d’un appartement change. Quiconque prend un appartement en location est en droit de savoir s’il risque de « prendre du jus » en mettant les doigts dans une prise mal installée, où en essayant de placer une ampoule alors que les fils ont été laissés nus et sans douille.
M. Jean-Louis Dumont. C’est de la responsabilité du locataire qui part !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je parle de l’électricité, car elle peut faire très mal, mais elle a un avantage sur le gaz : grâce aux fusibles, tout court-circuit fait disjoncter le système et l’électricité s’arrête. Ce n’est pas le cas pour le gaz !
Mme Frédérique Massat. En effet, ça ne disjoncte pas ; ça explose !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Je suis élu local depuis une trentaine d’années, (« C’est trop ! » sur les bancs du groupe UMP) – oui, je vais arrêter. Chacun peut donner des leçons ; quant à moi, je connais à peu près ces sujets. J’ai constaté que, dans le privé comme dans le public, tout va parfois très vite : lorsque l’opérateur vient brancher le gaz, personne n’a vérifié si le flexible était en bon état et si la cuisinière n’avait pas de fuite. Aucun court-circuit ne peut le signaler !
M. Lionel Tardy. Personne ne regarde cela !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Si une petite fuite existe, pas encore tout à fait sensible au départ, cela peut s’avérer extrêmement dangereux ! J’ai donc proposé que l’on vérifie d’emblée, en début de location, qu’aucune fuite n’existe, de même que l’on vérifie si les douilles sont présentes et que les prises sont bien installées de manière à éviter les courts-circuits. C’est tout ce dont nous parlons ! Voilà pourquoi, sur proposition de M. le rapporteur, nous pourrions renvoyer cela à un décret pour éviter de bâtir… une usine à gaz. En tout état de cause, ne me dites pas que ce n’est pas le b.a.-ba, pour quiconque entre dans un logement, de disposer de ces éléments !
M. Philippe Folliot. C’est de la responsabilité du propriétaire !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. On ne demande rien d’autre ; n’exagérons donc pas.
M. Lionel Tardy et M. Jean-Marie Tetart. C’est dans l’état des lieux !
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. L’état des lieux ne concerne pas le gaz ! Ne dites pas n’importe quoi ! Quand on fait l’état des lieux d’entrée, on n’est pas encore abonné au gaz.
M. Michel Piron. Quel dossier explosif !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Cécile Duflot, ministre. Je prends comme une forme d’hommage le plaisir visiblement partagé par tous les députés ici présents à prolonger les débats sur la loi ALUR. Cet amendement a déjà été discuté en première lecture et en commission ; voici qu’il donne de nouveau ce soir lieu à un débat explosif.
M. Benoist Apparu. Le terme est mal choisi !
Mme Cécile Duflot, ministre. Puisque l’ambiance semblait se tendre, je profite de l’occasion pour adresser un clin d’œil au rapporteur pour avis, M. Philippe Bies, qui fête ses cinquante ans ce soir, et qui vit donc ce basculement de génération au cœur d’un vaste débat sur les flexibles de gaz.
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. C’est aussi le cas de Mme Massat !
Mme Cécile Duflot, ministre. Oui, je salue Mme Massat, dont c’est aussi l’anniversaire, et je promets à M. Brottes de lui offrir un flexible à durée de vie semi-illimitée, si j’en crois ce qui est désormais possible. (Sourires.)
M. Philippe Folliot. Et une bouteille de champagne, avec beaucoup de gaz !
Mme Cécile Duflot, ministre. Reprenons posément. La question de la sécurité dans les logements me préoccupe beaucoup. M. Brottes a évoqué à juste titre les détecteurs avertisseurs de fumée. Dans tous les pays où le taux d’installation a dépassé 90 %, le nombre de décès et de blessés graves a été divisé par deux, en particulier chez les enfants, qui ont de moindres capacités pulmonaires. Certaines avancées en matière de sécurité sauvent donc effectivement des vies. J’en profite d’ailleurs pour indiquer que si la date d’obligation d’installation des détecteurs est fixée au 1er janvier 2015, il est de très bonne politique de les installer avant.
Ma réflexion sur ce débat a abouti à mon avis de sagesse. Cela étant, monsieur Brottes, si j’étais défavorable à votre amendement en commission, c’est parce que je crois qu’il convient d’être prudent et de responsabiliser les acteurs. Quoi que l’on fasse lors de la mise à l’habitation d’un logement, la détérioration d’un flexible peut se produire. Il faut donc absolument responsabiliser les locataires s’agissant d’un dispositif qui s’use et qui peut se débrancher ou mal fonctionner, sachant que les accidents en la matière sont pour l’essentiel liés à de mauvais usages – je pense aux intoxications au monoxyde de carbone –, voire à des actes volontaires.
D’autre part, il s’agit d’une trappe à contentieux : comment, en effet, justifier que le flexible était ou non en bon état et bien branché ? Les choses sont d’autant plus compliquées que le dispositif est mobile, ce qui n’est pas le cas d’une prise électrique.
Telles sont donc mes réserves sur ce sujet. Je partage votre objectif en matière de sécurité et, pour avoir eu à vivre une explosion dramatique due au gaz dans un immeuble de logements sociaux à Reims, je sais combien les dégâts que peut provoquer le gaz sont réels, de même que les incendies liés à des courts-circuits électriques peuvent être également dévastateurs. Il m’apparaît donc que la préoccupation de la sécurité est essentielle, d’où l’avis de sagesse du Gouvernement, mais je ne crois pas qu’en inscrivant cette obligation dans la loi, nous avancerions résolument dans le sens de davantage de sécurité. Nous y parviendrons bien mieux en responsabilisant et en informant les locataires et les propriétaires.
M. Philippe Folliot. Très bien !
(Les amendements identiques nos 282 et 508 sont adoptés et l’amendement no 124 tombe.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 102, 186 et 197.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 102.
M. Jean-Marie Tetart. Mon collègue Dumont m’a laissé présenter les amendements identiques tout juste adoptés, je lui laisse présenter ceux-ci.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Dumont, pour soutenir l’amendement no 186.
M. Jean-Louis Dumont. Il porte sur la valeur informative du dossier de diagnostic technique auprès du locataire. En effet, les alinéas 39 à 46, qui définissent le contenu de ce dossier, parlent de diagnostic, d’état de l’installation, mais une seule fois d’information, à l’alinéa 45, pour dire que le diagnostic de performance énergétique n’a qu’une valeur informative. Cela signifie a contrario que les éléments évoqués dans les autres alinéas, dont la valeur informative n’est pas explicitement inscrite dans la loi, sont susceptibles d’être utilisés à charge contre le bailleur. Or, si j’ai bien compris, les éléments que je viens d’évoquer n’ont qu’une valeur informative. Il faut alors l’inscrire dans la loi. C’est pourquoi nous proposons de rédiger l’alinéa 45 comme suit : « Le dossier de diagnostic technique fourni par le bailleur a une valeur informative auprès du locataire ». Il importe de le préciser.
Par ailleurs, nous venons de parler de sécurité et d’autres éléments comme les ascenseurs. Lorsqu’un locataire entre aujourd’hui dans un logement conforme aux normes exigées par la réglementation et la loi, le bailleur ne procède pas simplement à une remise de clé ! Il est soumis à l’obligation d’expliquer comment on utilise le logement. À l’époque de la VMC mécanique, certains locataires fermaient toutes les aérations, car elles envoyaient de l’air froid en raison de l’arrivée d’air extérieur. Les locataires, quel que soit le bailleur, privé ou social, qui utilisent des appareils de chauffage autonomes ou multiplient les séchages de linge s’ils ont des bébés, connaissent parfois une vie difficile.
Il faut y aller et le voir, et pour ce faire entrer dans le logement. Il faut que le bailleur puisse faire entrer des gens. Je regrette, mais ce ne sont pas les services sociaux qui entrent, c’est l’agent de proximité qui est à même de visiter le logement et de donner des conseils. Il faut aujourd’hui faire de la pédagogie et donner des informations. Fournir un dossier d’analyse technique au futur locataire, quel que soit le statut du bailleur, vise non seulement à informer et attirer l’attention mais aussi à faire en sorte que l’on utilise le logement, ses énergies, ses fluides et ses technologies au mieux de l’intérêt de l’occupant et de sa famille.
Je vous assure, mes chers collègues, qu’il s’agit d’un point très important. Cela ne se fera pas en multipliant, dans un texte de loi, des indications comme celles que l’on a vues tout à l’heure, mais en soumettant le bailleur à un certain nombre d’obligations qui mettront progressivement l’ensemble du parc immobilier aux normes de sécurité.
Enfin, à propos des ascenseurs, on a en effet fixé des obligations de mise aux normes, avec raison. Mais s’est-on préoccupé des technologies utilisées ? De la formation des ascensoristes ? Du nombre d’intervenants formés ? Voilà que l’on est obligé de reculer la date limite d’application de la norme.
M. Lionel Tardy. Cela sera bâclé !
M. Philippe Folliot. Et coûtera une fortune !
M. Jean-Louis Dumont. On peut ici chanter la norme, exiger des dates et des rapidités, mais à quoi bon si l’intendance ne suit pas ? Quant aux bailleurs, ils ont des obligations et y faire face suppose des budgets, donc des ressources. Il doit exister une compatibilité entre le coût du loyer du logement, la solvabilité de celui qui l’occupe et la solvabilité du bailleur au regard de toutes les obligations.
M. Benoist Apparu. Tout est bon pour demander de l’argent pour le logement HLM ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron, pour soutenir l’amendement no 197.
M. Michel Piron. J’ajouterai simplement à la plaidoirie de M. Dumont que la valeur informative de ces indications répond aussi à l’exigence d’être compris par les locataires. C’est une excellente chose mais n’en faisons pas une source de contentieux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable à ces trois amendements. Le diagnostic technique comporte plusieurs items. Le premier est le diagnostic de performance énergétique, nous en avons longuement débattu à l’occasion d’amendements présentés par des collègues de plusieurs bancs visant à rendre le DPE opposable. Nous avons réaffirmé que le DPE n’était pas un document opposable mais un document à caractère informatif, en raison de son manque de fiabilité. Mais le diagnostic technique prévoit d’autres points, en particulier le risque d’exposition au plomb et la liste A de l’état d’amiante, afin d’éviter au locataire des coûts très importants, ainsi qu’un état minimum des installations électriques, en termes non de conformité aux normes actuelles mais de sécurité. Sur ces trois points importants pour la santé et la sécurité des locataires, il est nécessaire que le propriétaire s’engage au-delà de la seule information. Le dossier technique ne peut donc être informatif à ce propos, d’où l’avis défavorable de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Piron.
M. Michel Piron. Je fais simplement remarquer que le refus de ces amendements contredit le vote des précédents, qu’il s’agissait simplement de confirmer afin d’assurer la continuité de nos votes.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Pas du tout !
(Les amendements identiques nos 102, 186 et 197 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 125.
M. Lionel Tardy. J’ai argumenté en commission en faveur de la modification de la durée des travaux ne pouvant donner lieu à indemnisation. Subitement, au Sénat, ladite durée est passée du simple au double, de vingt-et-un à quarante-et-un jours. Or, comme chacun sait, certains travaux demandent du temps en raison de leur nature même ou de la difficulté de faire appel à des artisans, qui est courante dans les zones tendues comme Paris. J’ai proposé de couper la poire en deux en fixant la durée à un mois, plus simple à calculer, ce qui n’est pas négligeable. Mon amendement proposait « trente jours » et vous m’aviez répondu, monsieur le rapporteur, qu’une telle durée n’est pas plus facile à calculer que les autres.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. C’est vrai !
M. Lionel Tardy. Cette fois-ci, mon amendement indique clairement une durée d’un mois. J’imagine que ce qui était un défaut à vos yeux ne l’est plus aujourd’hui et vous propose donc d’adopter mon amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. J’entends bien, cher collègue, votre argumentation. Vous avez rappelé le débat que nous avons eu. Néanmoins, le texte propose actuellement trois semaines, ce qui correspond exactement à vingt-et-un jours. Or un mois peut correspondre à vingt-huit, trente ou trente-et-un jours. Dans l’intérêt de l’intelligibilité de la loi, mieux vaut s’en tenir à trois semaines qui, quels que soient le mois et l’année, durent vingt-et-un jours. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
(L’amendement no 125 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 459.
Mme Isabelle Attard. Cet amendement, comme l’amendement no 441, vise à supprimer le dépôt de garantie qui tend à créer une présomption de faute du locataire, tout en précisant qu’il est bien évidemment maintenu dans le cadre des locations meublées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons déjà débattu du dépôt de garantie tout à l’heure. L’avis est toujours défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.
(L’amendement no 459 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements, nos 60, 165, 75 et 199, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 60 et 165 sont identiques.
La parole est à M. Jean-Claude Mathis, pour soutenir l’amendement no 60.
M. Jean-Claude Mathis. Chacun ici se rappelle que l’alinéa 52 a été introduit à l’Assemblée nationale par un amendement en séance publique. Il insérait dans le bail une clause prévoyant des pénalités pour retard de paiement de loyer et de charges. Il s’agit sans doute de la seule disposition adoptée par la majorité au bénéfice des propriétaires. La commission des affaires économiques du Sénat a ensuite adopté une nouvelle rédaction de l’alinéa, sans en changer l’esprit, basée sur un amendement du rapporteur considérant qu’une telle disposition est cohérente avec le souci d’équilibre des rapports entre bailleurs et locataires. Cet alinéa a été supprimé en séance publique par un amendement du groupe RDSE malgré l’avis défavorable de la commission et la position de sagesse du Gouvernement. À défaut de rétablir la version adoptée à l’Assemblée nationale, cet amendement propose de reprendre le texte adopté en commission au Sénat.
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 165.
M. Dino Cinieri. Je serai bref, car l’essentiel a été dit. L’amendement vise à insérer dans le bail une clause prévoyant des pénalités pour retard de paiement de loyer et de charges.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Mathis, pour soutenir l’amendement no 75.
M. Jean-Claude Mathis. Défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot, pour soutenir l’amendement no 199.
M. Philippe Folliot. L’amendement vise à restaurer l’un des éléments d’équilibre du texte. Je disais tout à l’heure que le texte est déséquilibré, il y a là l’occasion d’y remédier. L’amendement vise à insérer dans le bail une clause contractuelle visant à pénaliser le retard de paiement de loyers et de charges.
Ces pénalités de retard doivent en revanche être encadrées et calculées proportionnellement aux sommes dues. Bien définies par la loi, elles ont l’avantage de dissuader le locataire de mauvaise foi de payer son loyer avec retard. Elles contribuent à limiter les risques de dérapage dans le paiement des loyers et concourent ainsi au bon équilibre des rapports locatifs, mais aussi de la future garantie universelle des loyers prévue à l’article 8 du présent projet.
Cet amendement fixe un taux raisonnable, de 5 % maximum, et ne prévoit pas que les pénalités soient portées à un taux supérieur des sommes dues au titre du loyer du dernier mois si celui-ci n’a pas été intégralement versé à compter de la fin du contrat de bail. Le retard dans le paiement des loyers peut être très préjudiciable au bailleur, notamment lorsqu’il a souscrit un emprunt pour financer l’acquisition du bien loué et que l’encaissement du loyer en assure le remboursement. Le montant des clauses pénales peut être réduit par le juge s’il le considère manifestement disproportionné ; de telles clauses ne lèsent donc pas les locataires de bonne foi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 60, 165, 75 et 199 ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Nous avons déjà débattu ici même de la question des pénalités pour retard de loyer, et j’avais proposé une rédaction très proche de celle de l’un des amendements qui nous sont soumis. Néanmoins, comme cela a été dit, le débat a évolué au Sénat. J’ai entendu les remarques des uns et des autres, effectuées dans le cadre d’une concertation aussi large que possible, et notamment, en vue d’une CMP qui pourrait être conclusive, la position exprimée par les sénateurs en séance publique. Comme je l’ai dit en commission au mois de décembre, de mon point de vue, la meilleure solution consisterait à maintenir le statu quo quant à la rédaction actuelle de la loi de 1989 – ce qui diffère des propositions formulées par ces amendements, qui visent à revenir à la rédaction adoptée par notre assemblée. Comme la commission l’a fait aujourd’hui même, j’émets donc un avis défavorable à ces amendements.
M. Philippe Folliot. Oh, quel dommage !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.
M. Philippe Folliot. Oh, non !
(Les amendements identiques nos 60 et 165 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 75 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 199 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 61 et 167.
La parole est à M. Jean-Marie Tetart, pour soutenir l’amendement no 61.
M. Alain Marc. L’alinéa 54 du présent article encadre la rémunération des intermédiaires. La totalité des frais serait prise en charge par le bailleur, sauf la réalisation de l’état des lieux et la rédaction de bail. Pour ces deux actes, la prise en charge serait partagée entre le bailleur et le locataire. Alors que le texte initial prévoyait un partage « à parts égales », la commission des affaires économiques a précisé que la part du locataire devait être, d’une part, inférieure à celle du bailleur et, d’autre part, plafonnée par décret. Cette modification renforce le déséquilibre entre locataire et bailleur.
Par ailleurs, ces dispositions remettent en cause le modèle économique de la profession de l’immobilier et le principe de liberté des prix. Un tel déséquilibre des honoraires entre locataire et bailleur se fera inévitablement au détriment du locataire, le professionnel étant en effet plus « engagé » envers le propriétaire qu’envers le locataire. Par ailleurs, diviser les prestations fournies par les professionnels de l’immobilier méconnaît l’activité de ces derniers. En effet, leur activité doit s’entendre comme une prestation de service globale et être donc rémunérée de manière globale. Enfin, en plafonnant les honoraires correspondant à la réalisation de l’état des lieux et la rédaction de bail, le Gouvernement menace l’activité des professionnels de l’immobilier et, par conséquent, un grand nombre d’emplois.
Cet amendement vise donc à maintenir la rémunération d’une prestation globale et, afin d’assurer l’équilibre entre bailleur et locataire, à prévoir expressément que cette rémunération est partagée à parts égales entre le bailleur et le locataire.
Mme la présidente. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 167.
M. Dino Cinieri. L’essentiel a été dit par M. Marc, mais je voudrais insister sur le fait que cette modification accentue le déséquilibre entre locataire et bailleur et remet en cause le modèle économique de la profession de l’immobilier et le principe de liberté des prix. En effet, leur activité doit s’entendre comme une prestation de service globale et être donc rémunérée de manière globale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements nos 61 et 167. En effet, l’alinéa 54 de l’article 1er résulte du travail de consolidation du texte que nous avons accompli en lien avec les professionnels ; il a été encore amélioré par un amendement du Gouvernement lors de la deuxième lecture, en décembre, et constitue un équilibre qui risque d’être compromis si nous adoptions les amendements proposés. Même si la discussion doit se poursuivre quant au montant fixé par décret de la part imputable au locataire, celle-ci ne saurait, en tout état de cause, dépasser celle imputable au propriétaire. Allant dans le sens de ce que disait tout à l’heure notre collègue Chassaigne, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.
(Les amendements identiques nos 61 et 167 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 469.
Mme Isabelle Attard. L’amendement no 469 vise, comme l’avait proposé M. Chassaigne, à supprimer le partage des frais d’agence entre propriétaire et locataire. En effet, l’agent n’est mandaté que par le propriétaire, l’effet relatif de contrat interdisant de faire peser une dette sur un tiers à ce mandat. L’effet relatif du contrat en matière immobilière a été rappelé récemment par la Cour de cassation.
Je rappelle que lors de l’établissement d’un état des lieux d’entrée ou de sortie, il est évident que l’agent immobilier est un représentant exclusif du propriétaire. Si celui-ci décide de déléguer ses responsabilités à un tiers, il lui revient d’en supporter intégralement les frais.
M. André Chassaigne. Exactement !
Mme Isabelle Attard. En raisonnant par l’absurde, on n’imaginerait pas un instant que le locataire fasse, lors de son départ, payer la moitié d’une facture de nettoyage au propriétaire.
M. André Chassaigne. Excellent !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement no 469. Nous ne sommes plus dans le cadre, qui était précédemment celui de nos travaux, d’un mandat exclusif donné par le propriétaire au professionnel de l’immobilier : suite à l’avancée réalisée en deuxième lecture en commission, rendue possible par les travaux préparatoires que j’ai évoqués il y a quelques instants, un agent immobilier pourra, pour certaines missions très précises, représenter les deux parties pour l’écriture du bail et de l’état des lieux. Votre amendement ne s’inscrit pas du tout dans cette logique, et entre d’ailleurs en contradiction avec la loi de 1989 en sa rédaction actuelle. Dans le souci d’équilibre qui nous anime depuis le début de cette séance, je maintiens l’avis défavorable de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis, madame la présidente. Je maintiens ce que j’ai dit précédemment au président Chassaigne : il y a des amendements de posture, et je peux le comprendre ; mais il ne faut pas perdre de vue que certains services bénéficient au locataire. S’ils ne sont pas payés, soit ils n’ont pas lieu – dans ce cas, on sort une partie de l’activité locative du recours au professionnel –, soit ils sont faits dans l’intérêt exclusif du propriétaire.
Je suis donc opposée aux amendements présentés par l’UMP, visant à partager à 50 % tous les frais, quels qu’ils soient. Pour moi, le plus juste est que les locataires financent – à hauteur d’un montant plafonné qui conduira à une division des frais au moins par deux, dans les zones les plus chères – des frais qui leur bénéficient directement. Il ne s’agit pas d’une solution s’appliquant à l’ensemble des honoraires – qu’il faudrait soit couper en deux, soit imputer entièrement à l’une des parties –, mais bien d’une solution résultant de l’identification, mission par mission, desdits honoraires, afin de permettre que ceux-ci soient facturés à leur juste prix à ceux qui en bénéficient, et à eux seuls.
(L’amendement no 469 n’est pas adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot, pour soutenir l’amendement no 201.
M. Philippe Folliot. Le projet de loi remplace l’article 5 de la loi modifiée du 6 juillet 1989, en mettant à la charge exclusive du bailleur la rémunération du mandataire qui prête son concours à l’entremise ou à la négociation d’une mise en location, à l’exception de frais limitativement indiqués, partagés à parts égales entre le bailleur et le locataire, dans la limite d’un montant maximal à charge du locataire.
Deux postes de dépenses sont visés : la réalisation de l’état des lieux et la rédaction du bail. Ceci ne rend toutefois pas compte d’autres dépenses précises, faciles à identifier, qu’il serait injuste de laisser à la seule charge du bailleur. Il en va ainsi de la visite des lieux par le candidat locataire, pour laquelle le mandataire est souvent mobilisé de manière très répétitive. Il en va aussi de l’instruction du dossier du candidat locataire – comprenant notamment la vérification des éléments transmis et la demande de pièces complémentaires – à laquelle il est équitable que le candidat locataire – s’il est retenu, bien sûr – apporte sa contribution financière.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. L’alinéa 55 de l’article 1er du texte issu des travaux de la commission me paraît parfaitement répondre à vos préoccupations, monsieur Folliot. Il dispose en effet que « les honoraires des personnes mandatées pour effectuer la visite du preneur, constituer son dossier, réaliser un état des lieux et rédiger un bail sont partagés entre le bailleur et le preneur (… ) » Votre amendement est donc satisfait, et le sera encore davantage lorsque nous aurons adopté un certain nombre d’amendements de réorganisation que je vais présenter dans quelques instants. Cela étant, le texte de la commission est clair, et mes amendements ne modifieront en rien sa philosophie – à l’exception d’un seul, portant sur les huissiers. Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement, cher collègue.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
Mme la présidente. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Folliot ?
M. Philippe Folliot. Sur la base des explications judicieuses et tout à fait éclairantes de M. le rapporteur (Rires et exclamations), je retire l’amendement no 201.
(L’amendement no 201 est retiré.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 647 rectifié.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.
(L’amendement no 647 rectifié est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 648.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Coordination.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.
(L’amendement no 648 est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 611.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Rédactionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.
(L’amendement no 611 est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 649.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. J’avais annoncé cet amendement il y a quelques instants. Il s’agit, quand l’état des lieux est réalisé par un tiers mandaté distinct de celui effectuant les autres prestations – en particulier un huissier –, de partager entre le propriétaire et le locataire la charge des honoraires revenant à ce tiers, afin que ce règlement ne puisse être utilisé pour financer d’autres choses, par exemple la constitution du dossier. Cette évolution faisait l’objet d’une demande de la part des professionnels.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.
(L’amendement no 649 est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 650.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement vise à ce que les alinéas relatifs aux honoraires de location figurent dans le contrat de bail plutôt que dans le mandat de location, afin d’améliorer l’information des différentes parties, notamment des locataires.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Favorable.
(L’amendement no 650 est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement no 126.
M. Lionel Tardy. Avec votre permission, je présenterai conjointement les amendements nos 126 et 127, madame la présidente.
Mme la présidente. Je vous en prie, cher collègue.
M. Lionel Tardy. En cohérence avec les amendements que je vais défendre à l’article 3, je m’oppose à la transmission de données par les professionnels de l’immobilier dans le but de fixer un loyer médian, donc d’encadrer les loyers. On impose aux professionnels de l’immobilier une mission qui n’est pas la leur, qui va probablement être source de complexité et de paperasserie, et qui conduira à l’encadrement des loyers, donc à faire peser une contrainte sur leur marché, ce qui contribuera à l’affaiblir ; des sanctions sont même prévues. Je propose donc que la transmission soit facultative, comme c’est le cas pour toute personne intéressée, sans que cela donne lieu à des sanctions. Un observatoire fait de l’observation, pas de la collecte forcée de données.
J’ajoute, pour ce qui est de mon amendement no 127, que le mécanisme de transmission risque de donner lieu à un enchevêtrement byzantin. Les informations peuvent être transmises par l’intermédiaire d’un organisme tiers, est-il dit – mais de qui parle-t-on ? Cela n’est pas précisé. L’organisme tiers transmet les informations collectées à l’association nationale d’information sur le logement, est-il également précisé – mais pourquoi ? Face à ces questions sans réponse, les amendements nos 126 et 127 ont donc pour but assumé de restreindre le dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. M. Tardy nous dit être en cohérence avec ce qu’il va défendre à l’article 3. Il en va de même pour moi, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable aux amendements nos 126 et 127, visant à ce que les professionnels ne soient pas obligés de communiquer aux observatoires les données relatives aux loyers.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Même avis.
(Les amendements nos 126 et 127, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements, nos 614 et 615, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour les soutenir.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ils sont rédactionnels.
(Les amendements nos 614 et 615, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 478 et 551.
La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 478.
Mme Isabelle Attard. Il est défendu.
Mme la présidente. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement no 551.
M. François de Rugy. Il s’agit simplement de proposer que le paiement du loyer s’effectue non pas en début de terme mais à terme échu, afin d’alléger la trésorerie des locataires au moment de leur entrée dans les lieux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Toujours dans un souci d’équilibre entre locataire et propriétaire, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements, car le risque d’aléa moral est important en termes de loyer impayé. Hormis quelques prestations très particulières, on paie avant de consommer ou d’avoir accès à un certain nombre de services plutôt qu’après.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.
(Les amendements identiques nos 478 et 551 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 616 à 618, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour les soutenir.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ils sont rédactionnels.
(Les amendements nos 616, 617 et 618, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 665.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Cet amendement rétablit le formalisme et les délais qui encadrent la mise en œuvre de la clause résolutoire pour défaut d’assurance tel que prévu par les textes en vigueur.
(L’amendement no 665, accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence les amendements nos 315, 666, 667, 15, 520 et 18 tombent.)
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements, nos 619 à 622 et 624, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Daniel Goldberg, rapporteur, pour les soutenir.
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ils sont rédactionnels, madame la présidente.
(Les amendements nos 619, 620, 621, 622 et 624, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements, nos 483, 484 et 500, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire, pour les soutenir.
M. Jean-Louis Gagnaire. Je me suis beaucoup intéressé à la question de la colocation. Le texte était à l’origine muet sur le sujet et il a été considérablement enrichi par le débat au Sénat et à l’Assemblée.
Je fais partie de ceux qui ont été sensibilisés aux problèmes que rencontrent les colocataires, en particulier les jeunes étudiants, pour payer leurs charges. Ces derniers sont en effet souvent très mobiles et doivent s’acquitter à la fois du loyer et des charges. Le changement fréquent de colocataires, notamment du fait d’un départ à l’étranger, crée de vraies difficultés tant pour les propriétaires que pour les colocataires qui restent dans le logement, car il faut honorer les impôts, la taxe d’habitation et les taxes inhérentes au logement occupé.
Le texte issu du Sénat prévoit la possibilité d’une provision et d’un paiement par douzième. Je souhaiterais pour ma part que cette solution soit privilégiée et que les charges, notamment les impôts, soient donc, par défaut, payées en fin d’année. Il faut favoriser ce système de mensualisation, qui correspond davantage au mode de vie actuel des jeunes, lesquels changent très souvent de logement. Tel est l’objet des amendements nos 483 et 484.
Quant à l’amendement no 500, il concerne la durée d’effet de la solidarité d’un des colocataires, dont la garantie est souvent assurée par les parents. Des progrès ont été faits pour limiter cette solidarité dans le temps. J’ai eu l’occasion de rencontrer des garants qui, étant parents de trois enfants qui faisaient des études et qui changeaient souvent de logement et de ville universitaire, supportaient la charge de sept garanties… La garantie peut ainsi représenter une véritable épée de Damoclès au-dessus de la tête des parents.
Dans ces conditions, le fait de ramener d’un an à six mois la durée d’effet de la solidarité d’un colocataire quittant un logement constituerait ainsi un véritable progrès, d’autant que celle-ci n’a plus lieu d’être dès lors qu’un nouveau colocataire occupe les lieux. Il s’agit donc de coller à la réalité du marché d’aujourd’hui, et de s’adapter notamment aux contraintes des jeunes étudiants, qui sont obligés, du fait du montant des loyers et de la difficulté à se loger dans certaines grandes villes, de passer par la colocation. Ce mode d’habitat est d’ailleurs développé également au sein des cités universitaires par les CROUS, les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires.
Il conviendrait également de simplifier le système de cautionnement,…
M. Michel Piron. C’est vrai !
M. Jean-Louis Gagnaire. …mais cela relève peut-être du niveau réglementaire. Il n’y a pas lieu de faire recopier des pages entières sur le cautionnement à des personnes qui ne comprennent même plus à la fin ce qu’ils recopient, alors que lorsqu’on achète un logement, il suffit d’inscrire la date et d’apposer sa signature précédée de la mention « lu et approuvé » en bas de l’acte.
M. Michel Piron. C’est du bon sens !
M. Jean-Louis Gagnaire. Il faut vraiment simplifier cette procédure et faire en sorte de relâcher la pression qui pèse sur les garants.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 483, 484 et 500 ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. S’agissant des amendements nos 483 et 484, qui visent l’un et l’autre à généraliser l’application du forfait charges en le substituant dans les colocations au système de récupération, j’en comprends la logique mais ils comportent une difficulté : il faudrait imposer au propriétaire le choix d’un mode de paiement des charges plutôt qu’un autre en fonction de la demande des locataires. Cela pourrait par ailleurs constituer une source de difficultés à l’occasion du départ de l’un des colocataires et de son remplacement. Que se passe-t-il alors si le choix des colocataires change ?
Il me paraît plus simple de laisser le bailleur décider, toujours dans le souci de maintenir l’équilibre recherché entre les parties. À cet égard, la formule qui figure dans le texte actuel, « soit… soit… », me paraît plus équilibrée que les deux amendements que vous nous proposez. La commission a donc émis un avis défavorable sur les amendements nos 483 et 484, ce qui, cher collègue Jean-Louis Gagnaire, n’enlève rien à votre engagement sur la question de la colocation, engagement qui a fortement contribué à enrichir le texte.
Quant à l’amendement no 500, qui vise à diminuer la durée pendant laquelle un colocataire est solidaire des autres colocataires une fois qu’il est sorti du bail, en la faisant passer d’un an à six mois, il a reçu un avis favorable de la commission.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le député, s’agissant de l’amendement no 500, le Gouvernement y est favorable, car il assouplit le régime de colocation, et donc le favorise. Comme vous le savez, l’un des objectifs de la loi ALUR est de formaliser une pratique qui existe en fait mais qui n’est pas prévue dans les dispositions issues de la loi de 1989. J’y insiste, en particulier à l’adresse de ceux qui ont brandi tout à l’heure ce texte de loi : il s’agit d’un acte de simplification, car c’est à cause de cette absence de cadre juridique que la colocation est aujourd’hui très complexe.
En revanche, je vous demande de retirer les amendements nos 483 et 484, monsieur Gagnaire ; à défaut, le Gouvernement y donnera un avis défavorable. En effet, il ne me paraît pas opportun d’imposer l’application du forfait de charges, qui doit rester une option. Dans un certain nombre de cas, notamment lorsque les colocations ont vocation à durer, il convient de garder la possibilité de disposer des charges réelles, comme pour l’ensemble des baux.
Mme la présidente. Monsieur Gagnaire, les amendements nos 483 et 484 sont-ils maintenus ?
M. Jean-Louis Gagnaire. Non, je les retire, madame la présidente.
(Les amendements nos 483 et 484 sont retirés.)
(L’amendement no 500, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement no 479.
Mme Isabelle Attard. Le présent amendement est dans le même esprit que ceux que mon collègue Jean-Louis Gagnaire a défendus à l’instant. Madame la ministre, les contrats de colocation se développent énormément, non seulement pour les étudiants, mais aussi pour les travailleurs pauvres, malheureusement. Afin de faciliter cette évolution tout en limitant les risques de contentieux, nous proposons de supprimer le dépôt de garantie.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Goldberg, rapporteur. Ainsi que je l’ai indiqué tout à l’heure, le dépôt de garantie prévu par le contrat de location a pour objet de garantir l’exécution de ses obligations par le locataire. L’avis de la commission est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Martial Saddier.
M. Martial Saddier. N’ayant pas pris la parole ce soir,…
M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Vous nous manquiez !
M. Martial Saddier. …je voulais profiter de la discussion sur le dernier amendement à l’article 1er pour souligner, en ma qualité de whip, porte-parole de l’opposition au sein de la commission du développement durable, l’assiduité et la qualité du travail d’un jeune collègue qui s’appelle Julien Aubert et qui a été mis en cause tout à l’heure de manière assez maladroite. Ce dernier est en effet très présent en commission et fortement engagé sur des thématiques comme la transition énergétique et l’énergie.
Trois ou quatre textes étant examinés à la fois en séance et en commission, et qui plus est par des commissions différentes, il est absolument impossible pour un seul député de suivre tous les travaux de l’Assemblée. On ne peut être à la fois en groupe d’étude, en commission et en séance. Je tenais, par égard pour mon collègue Julien Aubert,…
Mme Audrey Linkenheld, rapporteure. Qu’il ne fallait pas irriter tout à l’heure !
M. Philippe Bies. Là, il est en commission !
M. Martial Saddier. …à ce que cette remarque figure au compte rendu des débats de ce soir, publié au Journal officiel.
(L’amendement no 479 n’est pas adopté.)
(L’article 1er, amendé, est adopté.)
Mme la présidente. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Mme la présidente. Prochaine séance, demain, à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Suite de la deuxième lecture du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové.
La séance est levée.
(La séance est levée, le mercredi 15 janvier 2014, à zéro heure cinquante-huit.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Nicolas Véron