Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 14 février 2012, 09-11.689, Inédit
Références
Cour de cassationchambre commerciale
Audience publique du mardi 14 février 2012
N° de pourvoi: 09-11689
Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Favre (président), président
SCP Boutet, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Nouvelles Frontières distribution (la société NFD) a conclu avec la société Chelmarne voyages (l'agent) un contrat d'agent de voyages exclusif ayant pour objet la représentation et la commercialisation des produits à l'enseigne Nouvelles Frontières dans une ville de Seine-et-Marne ; qu'après avoir mis en demeure la société NFD de respecter ses obligations contractuelles au titre de l'exclusivité consentie et considérant que cette dernière n'y avait pas satisfait, l'agent a dénoncé son contrat et déposé son enseigne, puis a fait assigner la société NFD en résolution du contrat et en dommages-intérêts ; que la société NFD a, reconventionnellement, demandé réparation du préjudice subi du fait de la rupture brutale et abusive du contrat et de la violation de la clause de non-concurrence qui y était stipulée ;
Sur le premier moyen :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que l'agent fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'il ne justifiait pas des conditions lui permettant de se prévaloir de l'exception d'inexécution, qu'il avait résilié unilatéralement, et à ses torts, le contrat et qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la résolution judiciaire, alors, selon le moyen :
1°/ que l'obligation de non-concurrence est inhérente à la concession d'une exclusivité territoriale ; qu'il en résulte que la création d'un site Internet marchand, même non spécialement destiné à démarcher la clientèle située sur le secteur concédé en exclusivité, constitue néanmoins une violation de l'obligation de non-concurrence en ce qu'elle permet à la clientèle de contracter directement avec le concédant mandant ; qu'en estimant qu'aucune violation de l'exclusivité concédée à la société Phebus voyages n'était établie dans la mesure où le site internet de la société Nouvelles Frontières n'était qu'un site passif, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que, dans un réseau de distribution, le concédant mandant doit s'abstenir de toute pratique ayant pour objet ou pour effet de détourner la clientèle de ses agents ; qu'en ne recherchant pas si, en créant un site marchand, même de ventes passives, la société Nouvelles Frontières n'avait pas manqué à son obligation de ne pas troubler l'exploitation de la société Phebus voyages à qui elle avait confié le soin de sa représentation sur un territoire, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1134, alinéa 3, et 1135 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé qu'aux termes de la clause d'exclusivité territoriale consentie à l'agent, la société NFD s'interdisait de créer tout autre point de vente ou succursale dans la ville désignée au contrat et que le site internet incriminé n'était pas orienté spécifiquement pour atteindre la clientèle de cette ville, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir qu'il n'était pas assimilable à l'implantation d'un point de vente dans le secteur protégé, a retenu à bon droit que ce site ne portait pas atteinte à l'exclusivité territoriale de l'agent ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant encore retenu que le site exploité par la société NFD constituait un outil de communication et d'information sur les produits des catalogues Nouvelles Frontières et constaté qu'à la date des faits, il bénéficiait aux agences dont la liste et les coordonnées complètes étaient mentionnées, la cour d'appel d'appel, qui a ainsi fait ressortir qu'un tel site ne troublait pas l'exploitation de l'agent, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que l'agent fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la société NFD une certaine somme au titre de la réparation globale de ses préjudices, alors, selon le moyen qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation qui interviendra du chef du premier ou du deuxième moyen de cassation entraînera le censure du chef de dispositif attaqué par le troisième moyen de cassation en l'état d'un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ;
Mais attendu que les deux premiers moyens n'ayant pas été accueillis, le grief est sans objet ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour retenir la validité de la clause de non-concurrence et condamner l'agent à payer à la société NFD une certaine somme au titre de la réparation globale des préjudices causés pour partie par son non-respect, l'arrêt retient que cette clause, dont il a relevé les limitations dans le temps, dans l'espace et quant au secteur d'activité concerné, ne présente aucun caractère disproportionné dès lors qu'elle permet à l'agent d'exercer les mêmes activités dans toute autre ville attenante ou située aux alentours ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si la clause était proportionnée aux intérêts légitimes de la société NFD au regard de l'objet du contrat, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Chelmarne voyages à payer à la société Nouvelles Frontières distribution une somme de 20 000 euros au titre de la réparation globale de ses préjudices, l'arrêt RG n° 05/23981 rendu le 4 décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Nouvelles Frontières distribution aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Chelmarne voyages la somme de 2 000 euros et rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour la société Chelmarne voyages
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la SARL CHELMARNE VOYAGES ne justifiait pas des conditions lui permettant de se prévaloir de l'exception d'inexécution et avait résilié unilatéralement, et à ses torts, le contrat du 27 janvier 1999 et dit n'y avoir lieu de prononcer la résolution judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE la Société CHELMARNE VOYAGES (filiale du groupe CARPE VOYAGES) a conclu le 27 janvier 1999, avec la SA NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, filiale de la SA TOURAVENTURE, elle-même filiale de la SAS GROUPE NOUVELLES FRONTIÈRES, un contrat d'agent de voyage exclusif, ayant pour objet la présentation et la commercialisation des produits à l'enseigne « NOUVELLES FRONTIÈRES » sur le territoire de la Ville de CHELLES (Seine Saint Denis), la Société NOUVELLES FRONTIÈRES s'étant engagée à ne pas ouvrir d'autres points de vente à CHELLES ; que, courant 2002, TUI AG, premier Tour Opérateur européen et propriétaire de la marque TUI, a pris le contrôle de la SAS GROUPE NOUVELLES FRONTIÈRES ; qu'une autre filiale de la SA TOURAVENTURE, dénommée SAS TUI FRANCE, est en charge de la distribution sur le territoire français des seuls produits de la marque TUI ; que la distribution des produits figurant dans les différents catalogues NOUVELLES FRONTIÈRES est assurée exclusivement par NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, au travers d'un réseau de distribution constitué d'environ 150 agences et géré par cette société, un réseau dit de franchise sous enseigne NOUVELLES FRONTIÈRES, constitué en 2003, de 44 mandataires, dont CHELMARNE VOYAGES a fait partie jusqu'au 31 décembre 2003 ; que le contrat conclu le 27 janvier 1999 entre CHELMARNE VOYAGES et NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, d'une durée de quatre années, a été renouvelé par tacite reconduction le 28 janvier 2003 ; qu'en juin 2003, NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION a soumis à tous ses agents de voyage exclusifs un nouveau contrat précisant un certain nombre de clauses figurant dans les contrats précédemment établis, notamment celui de CHELMARNE VOYAGES, conclu le 27 janvier 1999 ; que tous les agents ont accepté de signer ce nouveau contrat, à l'exception de CHELMARNE VOYAGES (ainsi que les sociétés du même groupe, PHEBUS VOYAGES et CARPE VOYAGES, cette dernière société étant la holding du groupe) ; que, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 août 2003, confirmée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 3 novembre 2003, la Société CHELMARNE VOYAGES a mis en demeure la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION de respecter ses obligations contractuelles, reprochant à cette société une distribution multi-réseaux des produits NOUVELLES FRONTIÈRES et TUI FRANCE, et donc la remise en cause des contrats conclus avec ses agents exclusifs, de vouloir imposer à ses agents exclusifs une clause d'exclusivité limitée à la distribution des produits de la seule marque NOUVELLES FRONTIERES, excluant de ce fait les produits TUI FRANCE, de distribuer l'ensemble de ses produits sur son site Internet marchand (exclusivité territoriale non respectée) ; que la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION n'ayant pas répondu, ni fait droit à la mise en demeure, la Société CHELMARNE VOYAGES a dénoncé, le 10 décembre 2003, avec effet au 1er janvier 2004, le contrat qui la liait à la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, ce dont cette société a pris acte le 12 décembre 2003 ; que le 6 janvier 2004, Maître X..., Huissier de Justice à CHELLES, constatait que la Société CHELMARNE VOYAGES avait déposé l'enseigne NOUVELLES FRONTIÈRES et apposé une nouvelle enseigne au nom de THOMAS COOK VOYAGES, un autre prestataire de services touristiques avec lequel elle avait contracté ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que la SAS GROUPE NOUVELLES FRONTIÈRES (anciennement dénommée NOUVELLES FRONTIÈRES INTERNATIONAL SA) est la holding de la SA TOURAVENTURE (tour opérateur), qui détient les filiales suivantes : NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, dont l'activité est la distribution de prestations touristiques portant la marque « NOUVELLES FRONTIÈRES », la SOCIÉTÉ DE PARTICIPATION AÉRIENNES (radiée du Registre du Commerce et des Sociétés en 2004) spécialisée dans l'administration de transports aériens, et qui détenait à cette époque CORSAIR, NOUVELLES FRONTIÈRES HOTELLERIE, propriétaire de la marque PALADIEN HOTEL CLUB, enregistrée à l'Institut National de la Propriété Industrielle le 14 décembre 1999 sous le numéro national 99 830 163, TUI FRANCE dont l'activité est la distribution des produits de marque "TUI" ; que la marque « NOUVELLES FRONTIÈRES » n'a pas d'existence en tant qu'entité juridique ou personne morale ; que les premiers juges, après avoir rappelé les principales conditions du contrat souscrit entre les parties le 27 janvier 1999, et spécialement l'objet, à savoir la distribution des produits de la marque « NOUVELLES FRONTIÈRES », dans le cadre d'un "modèle intégré" consistant en des prestations touristiques et prestations diverses, notamment vente de titres de transport (billetterie des vols CORSAIR), visites guidées des sites touristiques … cette liste n'étant pas exhaustive, provenant d'accords passés avec les filiales de TOURAVENTURE, ainsi que la clause d'exclusivité territoriale, aux termes de laquelle la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION "s'interdit, pendant la durée du contrat, de créer dans la ville de Chelles aucun autre point de vente ou succursale, et de ne pas concéder ses représentations à aucun autre mandataire", soulignent qu'à la date de signature du contrat les produits concernés étaient ceux des "brochures NOUVELLES FRONTIÈRES", lesquelles comprenaient des prestations autres que celles propres au GROUPE NOUVELLES FRONTIÈRES en raison d'accords passés avec d'autres prestataires de services ou de compagnies aériennes autres que CORSAIR ; qu'ils indiquent ensuite que, dans le cadre de la prise de contrôle du Groupe NOUVELLES FRONTIÈRES par TUI AG, intervenue au cours de l'année 2002, TUI AG, propriétaire de la marque TUI, tour opérateur allemand, n'a pas concédé à la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION la distribution des produits de sa marque, qu'il résulte de la reprise du Groupe NOUVELLES FRONTIÈRES par TUI AG que les produits de marque TUI, positionnés sur le créneau moyen de gamme supérieur du 4 étoiles concurrençant l'offre de FRAM à KUONI, seront distribués par TUI FRANCE au travers de la plupart des réseaux de distribution, autres que ceux de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, que les produits de la marque NOUVELLES FRONTIÈRES, positionnés 3 étoiles - 3 étoiles +, ne seront pas distribués par d'autres agences tierces non dédiées à NOUVELLES FRONTIÈRES, en conséquence, les agents exclusifs (franchisés) resteraient les seuls à vendre des produits de la marque NOUVELLES FRONTIÈRES tels que figurant dans les brochures de cette dernière ; qu'à la suite de cette prise de contrôle, la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION a proposé en juin 2003, à tous ses agents exclusifs, au nombre de 44, de signer un nouveau contrat, que seules les Sociétés du groupe CARPE VOYAGES, dont CHELMARNE VOYAGES ellemême, ont refusé sans pour autant résilier le contrat les liant à la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION ; que la Société CHELMARNE VOYAGES persiste à soutenir que le contrat en date du 27 janvier 1999 lui confiait la représentation exclusive de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES, sans apporter l'élément susceptible de démentir l'organisation rappelée plus haut, et schématisée dans un organigramme reproduit dans le jugement, et auquel il convient de se référer ; que s'agissant de la distribution des produits du groupe TUI, la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION fait pertinemment remarquer que le contrat litigieux a été conclu le 27 janvier 1999, soit trois ans avant la prise de contrôle, en 2002, du GROUPE NOUVELLES FRONTIÈRES SAS par TUI AG, seule propriétaire de la marque TUI ; que l'article 29 du contrat conférait alors à la Société CHELMARNE VOYAGES "l'exclusivité de la représentation de NOUVELLES FRONTIÈRES", c'est-à-dire l'exclusivité de la distribution des produits figurant dans les brochures NOUVELLES FRONTIÈRES sur le territoire de la ville de CHELLES, et qu'il ne pouvait en être autrement puisque la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION avait pour seule activité la distribution des produits « NOUVELLES FRONTIERES » et n'a d'ailleurs, depuis, jamais assuré la distribution des produits TUI ; qu'en tout état de cause, seule TUI FRANCE, qui n'est pas une filiale de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, peut concéder la marque TUI, détenue par TUI AG ; que la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION ajoute, à propos de la confusion des marques qu'allègue la Société CHELMARNE VOYAGES, que le seul élément produit par l'appelante (conditions générales de vente du catalogue TUI saison automne/hiver 2003-2004 où apparaît à la première ligne, le nom de « NOUVELLES FRONTIERES » en lieu et place de TUI) résulte d'une "coquille", ainsi qu'il résulte du procès-verbal du Comité d'Entreprise du 28 août 2003 versé aux débats par la Société CHELMARNE VOYAGES elle-même ; que s'agissant de la distribution des produits CORSAIR, les premiers juges ont pertinemment relevé que : CORSAIR, compagnie aérienne indépendante de NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, reste maîtresse de la politique de distribution de ses produits ; que la vente de ses vols secs ou intégrés dans des prestations touristiques figure toujours dans les brochures NOUVELLES FRONTIÈRES ; que la nécessaire diversification à laquelle elle a procédé à partir d'avril 2002 avait pour objet d'améliorer son taux de remplissage pour la rentabilité de sa flotte afin de maintenir un niveau de prix concurrentiel sur son marché ; que les éléments versés aux débats, tant par la Société CHELMARNE VOYAGES que par la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION prouvent que cette société n'avait pas l'exclusivité de la billetterie de CORSAIR, et dès avant la conclusion du contrat litigieux ; que les premiers juges ont relevé qu'il en était de même pour NOUVELLES FRONTIÈRES HOTELLERIE, qui détient la marque PALADIEN, club hôtel, ainsi que pour chaque société autre que celles du GROUPE NOUVELLES FRONTIÈRES ayant passé des accords de distribution de leurs produits avec la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, et que cette politique avait également un effet positif certain sur les agents de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION qui, dès lors, pouvaient commercialiser une gamme de produits élargie à un coût abordable pour leurs clients ; qu'enfin, il n'est pas démontré que CARREFOUR soit en charge de la commercialisation des produits « NOUVELLES FRONTIÈRES » ; que seule une opération de promotion a été initiée par NOUVELLES FRONTIÈRES HOTELLIERIE avec CARREFOUR, et sous la marque de cette dernière société, uniquement sur deux hôtels, l'un en République Dominicaine, l'autre en Martinique, pour consolider le remplissage desdits hôtels, et que cette opération était également accessible au réseau des agents de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, aux mêmes conditions de vente ;
ALORS QUE l'article 29 du contrat stipulait que « pendant toute la durée de la présente convention, le mandant garantit au correspondant l'exclusivité de représentation de NOUVELLES FRONTIÈRES auprès de sa clientèle dans la ville de Chelles » ; que, cette exclusivité ne comportant aucune restriction de quelque nature que ce soit, la Cour d'Appel a dénaturé ledit article en limitant son objet à « la distribution des produits figurant dans les brochures NOUVELLES FRONTIÈRES sur le territoire de la ville de Chelles » et a violé l'article 1134 du Code Civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la SARL CHELMARNE VOYAGES ne justifiait pas des conditions lui permettant de se prévaloir de l'exception d'inexécution et avait résilié unilatéralement, et à ses torts, le contrat du 27 janvier 1999 et dit n'y avoir lieu de prononcer la résolution judiciaire ;
AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'utilisation du site Internet de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES pour la vente de ses produits, le Tribunal indique à bon droit qu'elle n'est pas spécialement orientée pour atteindre les clients de la Société CHELMARNE VOYAGES à l'intérieur de sa zone d'exclusivité mais a pour objet de satisfaire des demandes non sollicitées, ventes passives sans démarchage ou prospection, sous quelque forme que ce soit, provenant de clients de divers horizons souhaitant utiliser ce procédé ; qu'à ce titre, elle ne porte pas atteinte à l'exclusivité territoriale de la Société CHELMARNE VOYAGES ;
ALORS D'UNE PART QUE l'obligation de non-concurrence est inhérente à la concession d'une exclusivité territoriale ; qu'il en résulte que la création d'un site Internet marchand, même non spécialement destiné à démarcher la clientèle située sur le secteur concédé en exclusivité, constitue néanmoins une violation de l'obligation de non-concurrence en ce qu'elle permet à la clientèle de contracter directement avec le concédant mandant ; qu'en estimant qu'aucune violation de l'exclusivité concédée à la Société CHELMARNE VOYAGES n'était établie dans la mesure où le site Internet de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES n'était qu'un site passif, la Cour d'Appel a violé l'article 1134 du Code Civil ;
ALORS D'AUTRE PART QUE, dans un réseau de distribution, le concédant mandant doit s'abstenir de toute pratique ayant pour objet ou pour effet de détourner la clientèle de ses agents ; qu'en ne recherchant pas si, en créant un site marchand, même de ventes passives, la Société NOUVELLES FRONTIÈRES n'avait pas manqué à son obligation de ne pas troubler l'exploitation de la Société CHELMARNE VOYAGES à qui elle avait confié le soin de sa représentation sur un territoire, la Cour d'Appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1134, alinéa 3, et 1135 du Code Civil.
TROISIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société CHELMARNE VOYAGES à payer à la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION une somme de 20.000 euros au titre de la réparation globale de ses préjudices ;
AUX MOTIFS QUE la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION rappelle ensuite que l'article 21 du contrat liant les parties prévoit que « à la fin de la présente convention pour quelque cause que ce soit, le mandataire s'interdit formellement d'exercer, directement ou indirectement en qualité notamment d'associé ou de gérant, une activité de mandataire, de transporteur ou d'agent de voyage et de s'intéresser sous une forme quelconque à des entreprises de cette nature susceptibles de concurrencer le mandant soussigné ; la présente interdiction est limitée à la zone territoriale concédée au mandataire et aura une durée de deux années , à compter de la cessation de la présente convention » ; que le fait d'avoir contracté, dès le début du mois de janvier 2004, avec la Société THOMAS COOK VOYAGES, son principal concurrent, est une violation délibérée de cette clause et justifie, compte tenu la mauvaise foi de la Société CHELMARNE VOYAGES qui, pour tenter d'échapper à ses obligations, a d'abord allégué des fautes imaginaires de son co-contractant, et soutient maintenant que la clause ne serait pas valable car insuffisamment limitée, que l'indemnité allouée par les premiers juges soit portée à 50.000 € ; que, contrairement à ce que soutient la Société CHELMARNE VOYAGES, la clause contractuelle de non-concurrence est parfaitement valable, dans la mesure où elle est limitée à la Ville de CHELLES et à un secteur d'activité précis ; que l'argumentation de la Société CHELMARNE VOYAGES selon laquelle la clause aurait dû être limitée à la seule clientèle de la Société NOUVELLE FRONTIÈRES est dépourvue de sérieux, vu le caractère volatile d'une clientèle de manière générale, et la liberté du client de changer de Tour Opérateur selon les offres qui lui sont faites ; que les premiers juges ont pertinemment souligné que cette clause permettait à la Société CHELMARNE VOYAGES d'exercer les mêmes activités dans n'importe quelle autre ville attenante ou aux alentours de la Ville de CHELLES, ce qu'elle n'a pas fait ; qu'elle ne présente donc aucun caractère disproportionné susceptible de justifier son annulation ; que la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION est ainsi bien fondée à réclamer une indemnité en réparation du préjudice que lui a causé la violation de cette clause ; que s'agissant du préjudice causé à la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION par la rupture brutale du contrat, les premiers juges ont relevé à bon droit que la notoriété du Groupe NOUVELLES FRONTIÈRES, la facilité d'obtenir des brochures dans n'importe quelle agence du Groupe, les nombreuses informations très complètes à disposition de toute personne sur le site Internet du Groupe NOUVELLES FRONTIÈRES permettent à toute personne de réserver immédiatement dans n'importe quelle agence du Groupe ou en ligne sur son site Internet, n'importe quel produit, ainsi que voyage, séjour, hôtel, location de voiture, billet d'avion ; que dès lors, la fermeture de l'agence de CHELLES n'est pas prépondérante pour une personne souhaitant voyager avec « NOUVELLES FRONTIERES » ; que la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION était parfaitement consciente qu'elle pouvait, si besoin était, prendre toutes dispositions pour diriger la partie de sa clientèle de la Ville de CHELLES qui lui restait fidèle sur toute autre agence qu'elle jugerait utile ; qu'il est possible que Monsieur Y..., en ouvrant une agence « THOMAS COOK VOYAGES », ait pu capter une partie de la clientèle, pour autant que cette agence ait été en mesure de proposer le même type de produits à un coût similaire, en raison du non respect de la clause de non-concurrence évoqué plus haut ; qu'il n'en demeure pas moins que c'est à tort que le Tribunal a rejeté purement et simplement la demande d'indemnité faite à ce titre aux motifs que, même dans le cas où la Société CHELMARNE VOYAGES n'aurait pas résilié son contrat avec la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, rien ne prouve qu'elle aurait réalisé le même chiffre d'affaires que l'année précédente, car une agence de voyages, quelle qu'elle soit, n'est pas en mesure de déterminer à l'avance si la nouvelle offre catalogue sera en adéquation avec la demande des clients ; qu'en effet, tant la brusque rupture du contrat, la disparition d'un point de vente n'étant pas anodine, spécialement à cette période de l'année, que le non respect de la clause de non-concurrence par la Société CHELMARNE VOYAGES ont nécessairement causé un préjudice à la Société NOUVELLE FRONTIÈRES DISTRIBUTION ; que la Cour dispose des éléments permettant d'en fixer la réparation globalement à 20.000 € ;
ALORS D'UNE PART QUE la clause de concurrence doit être limitée dans le temps et dans l'espace et être indispensable à la protection des intérêts légitimes du créancier ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était pourtant expressément invitée (conclusions p. 37), si la clause de non-concurrence litigieuse était indispensable à la protection des intérêts légitimes de la Société NOUVELLES FRONTIÈRES DISTRIBUTION, et après avoir cependant constaté que, du fait de la notoriété du groupe, de la facilité pour obtenir des brochures et de l'exhaustivité de son site Internet permettant la conclusion de contrats, toute personne pouvait acheter des produits NOUVELLES FRONTIÈRES sans difficulté, la Cour d'Appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du Code Civil ;
ALORS D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE QU' en application de l'article 624 du Code de Procédure Civile, la cassation qui interviendra du chef du premier ou du deuxième moyen de cassation entraînera le censure du chef de dispositif attaqué par le troisième moyen de cassation en l'état d'un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.