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Courrier hebdomadaire du CRISP

1984/20 (n° 1045-1046)

  • Pages : 68
  • Affiliation : État de collection : du n° 0 (1958) au dernier numéro paru.
  • DOI : 10.3917/cris.1045.0001
  • Éditeur : CRISP

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Pages 1 - 68

INTRODUCTION

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Le présent Courrier Hebdomadaire est consacré à l’analyse du mouvement Ecolo, formation politique constituée en tant que telle en mars 1980, et non à la constellation des associations qui, depuis plus d’une décennie, ont fait de l’“écologie” [1][1] Ecologie : étude des milieux où vivent et se reproduisent..., le centre et le fondement de leur réflexion et de leur action politiques. Dans cette introduction, sont rappelés quelques points de repères, quelques événements qui ont mené à l’éveil, dans une fraction non négligeable de la population, de la conscience écologique.

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C’est à la fin des années 60 qu’apparaissent les premières manifestations du rejet de la société industrielle et de la croissance à tout prix. C’est la contestation dans les milieux universitaires, d’une organisation fondée sur la centralisation et le productivisme, c’est la perception de l’ampleur du problème de la surpopulation et de la faim dans le monde, ce sont les préoccupations liées à une exploitation non mesurée des richesses naturelles et aux pollutions, ce sont les inquiétudes soulevées par la multiplication des centrales nucléaires, ce sont les réactions suscitées par les dégradations de l’environnement urbain, ce sont les appréhensions nées de la prolifération des arsenaux atomiques, etc.

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Au-delà de la prise de conscience individuelle, des associations se forment qui, chacune dans le champ qu’elle s’assigne, s’efforcent de mobiliser ceux qui ne sont pas encore des militants, d’approfondir la réflexion et d’encadrer l’action. Ainsi se multiplient les organisations qui, les unes, s’intéressent à la protection de la nature et de l’environnement, les autres, s’engagent en faveur du désarmement ou des énergies douces, ou encore se concentrent sur la défense d’un quartier, d’un village, d’une région. Cette organisation ne manque pas de laisser insatisfaits un certain nombre de membres de ces associations, en raison de son caractère parcellaire et de son absence de perspective politique. La globalité et la structuration politique constituent, à leurs yeux, les préalables d’une action efficace. D’autant que, en Belgique comme ailleurs, ni les partis politiques, ni les organisations sociales n’ont jamais réellement pris en compte la dimension “écologique” de la crise.

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C’est – schématiquement – à partir de cette analyse, après de nombreuses difficultés et de manière parfois inattendue, que vont apparaître les partis écologistes en Europe occidentale. Le cas de la Belgique présente une double particularité : la formation parallèle mais distincte des partis écologiques au Nord (Agalev) et au Sud (Ecolo) du pays d’une part, et, d’autre part, pour ce qui concerne la partie francophone du pays, la lente décantation au terme de laquelle le mouvement Ecolo a émergé et s’est affirmé comme l’unique représentant politique de la mouvance écologiste.

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L’objet de ce Courrier Hebdomadaire est volontairement circonscrit au mouvement Ecolo. Sa genèse et ses performances électorales, tout d’abord, seront décrites et analysées. L’attention sera ensuite portée sur sa morphologie, puis sur sa doctrine. Plusieurs pages seront également consacrées à l’“expérience liégeoise” et l’étude sera clôturée par quelques considérations générales.

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Une dernière précision. Les responsables d’Ecolo, suivant en cela leur politique de “maison de verre”, ont permis aux auteurs de cette étude de consulter sans restriction les dossiers de leur mouvement. Pareille attitude, assez exceptionnelle dans les usages des milieux politiques, économiques et sociaux, mérite d’être signalée.

1 - LA GENESE DU MOUVEMENT ECOLO

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Parti de la Meuse namuroise, le chemin emprunté pendant près de dix ans par les fondateurs du mouvement Ecolo jusqu’à sa création en mars 1980, a été pour le moins sinueux.

1 - L’expérience Démocratie nouvelle

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Aux élections législatives du 7 novembre 1971, le Rassemblement wallon (R.W.) effectue, avec 14 députés, son meilleur résultat électoral. Pierre Waucquez, alors président de la fédération de Namur du R.W. et premier suppléant sur la liste présentée au Sénat, devient sénateur coopté. Les statuts du parti interdisant le cumul entre un mandat parlementaire et une responsabilité au sein de l’appareil du parti, Pierre Waucquez démissionne de la présidence de la fédération d’arrondissement. Paul Lannoye est élu comme son successeur à une très large majorité. Cette désignation est cependant contestée par quelques militants qui, quelques mois plus tard, obtiennent, des instances supérieures du parti, l’annulation de cette élection.

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Considérant qu’il était ainsi porté atteinte à l’un des principes du parti, à savoir la rénovation des mœurs politiques, Pierre Waucquez décide, en solidarité avec Paul Lannoye, de quitter le Rassemblement wallon et de siéger comme sénateur indépendant. Avec quelques membres qui leur restent fidèles, ils fondent le mouvement Démocratie nouvelle (D.N.), auquel se joindront, peu à peu, des “non-R.W.”. Ce groupement, qui se veut un “mouvement de réflexion et d’action”, définit ses objectifs, en février 1973, dans le “Manifeste pour une démocratie nouvelle” [2][2] “Manifeste, pour une démocratie nouvelle” Namur, 1....

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Ce document revêt un intérêt non négligeable dans la mesure où y sont développés des thèmes qui permettent d’établir une filiation difficilement contestable entre l’écologie politique et la Démocratie nouvelle. Déjà dans le premier chapitre, le fédéralisme intégral est énoncé comme un principe fondamental. Il implique l’autonomie, l’autogestion, la fédération (c’est-à-dire l’association permanente de collectivités de même type, qui renoncent à une partie de leur pouvoir au profit de la collectivité plus étendue qui les réunit), le contrôle de la base (qui inclut la proposition de référendum d’initiative populaire).

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Dans le deuxième chapitre, consacré à un projet d’économie nouvelle, l’accent est mis sur une planification économique peu conforme au schémas traditionnels en ce sens qu’elle distingue parmi les biens d’une part, les biens fondamentaux et les biens d’épanouissement, auxquels la priorité est accordée, et, de l’autre, les biens superflus et les biens nocifs. L’objectif de la planification est le bien-être, concept dans lequel interviennent le niveau de vie, les conditions de vie et le milieu de vie.

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On trouve, dans “les principes de base de l’organisation de Démocratie nouvelle” (chapitre V), le souci d’éviter les délégations de pouvoir et de garder à chaque membre du mouvement son autonomie et son pouvoir de décision. Cette préoccupation sera également affirmée dans les statuts du mouvement Ecolo.

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Démocratie nouvelle constitue, lors des élections législatives du 10 mars 1974, une liste de cartel avec l’Union démocratique et progressiste (U.D.P.). Cette liste se présente dans la seule province de Namur où elle recueille 2,4 % des suffrages dans l’arrondissement de Namur et 1,10 % dans celui de Dinant-Philippeville.

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Démocratie nouvelle est donc un mouvement essentiellement namurois. Du reste, ses trois principaux animateurs – qui participeront de manière très active à la constitution définitive d’Ecolo en mars 1980 – sont namurois : Paul Lannoye, Georges Trussard et Gérard Lambert. Dans le courant de l’année 1974, Démocratie nouvelle va s’efforcer, non pas de s’implanter ailleurs, mais de nouer des contacts, suivant des convergences d’intérêts et d’actions, avec divers groupes de la province de Liège, avec, notamment, des mouvements anti-nucléaires, comme l’Association pour la protection contre les rayonnements ionisants (A.P.R.I.).

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Au cours de l’automne 1975, des membres de Démocratie nouvelle, de l’association AVES (société d’étude ornithologique) et d’autres mouvements se réunissent à Huy. Le projet de créer une section belge des Amis de la terre y est étudié.

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Il reste qu’à la suite du faible score électoral de mars 1974, ainsi que l’explique Pierre Waucquez, “il devient rapidement évident que Démocratie nouvelle, en tant que telle, n’atteindra pas ses objectifs” [3][3] Pierre Waucquez, correspondance personnelle, décembre.... Démocratie nouvelle subsiste néanmoins quelques temps encore. Elle est ainsi à l’origine de la constitution à Namur, lors des élections communales du 10 octobre 1976, de la liste Combat pour l’écologie et l’autogestion. C’est elle en effet qui, six mois avant le scrutin a lancé des invitations aux membres de sept sections namuroises de groupes ou associations ou de groupes namurois : le Mouvement chrétien pour la paix, la J.O.C., le Groupement politique des travailleurs chrétiens (G.P.T.C.), Namur 80, Amnesty International, Concertation namuroise et Hypothèse d’école.

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Combat pour l’écologie et l’autogestion regroupe des candidats issus de ces mouvements, mais se présentant à titre individuel. Le caractère conjoncturel de la liste n’est guère douteux. Elle est néanmoins intéressante en ce sens qu’elle traduit la volonté des membres de Démocratie nouvelle de susciter des regroupements et que, pour la première fois en Belgique, le terme “écologie” est repris dans la dénomination d’une liste électorale.

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Combat pour l’écologie et l’autogestion obtient 1,9 % des suffrages à Namur (aucun élu). Deux autres listes à préoccupation écologique se présentent ailleurs en Wallonie : la liste Vivre-Combat pour l’environnement à Mons, essentiellement “environnementaliste”, recueille 2,1 % des voix, tandis qu’à Charleroi, Blanche Neige et les sept nains, davantage libertaire et folklorique n’obtient que 0,4 % des suffrages.

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Au lendemain de ce scrutin, des représentants de ces trois listes se rencontrent. Mais, très vite, Combat pour l’écologie et l’autogestion se dissout.

2 - Les Amis de la terre

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Parallèlement aux combats électoraux, le projet de création d’une section belge des Amis de la terre prend une forme de plus en plus précise. Nous avons vu que plusieurs militants s’étaient réunis à cet effet à Huy à la fin de 1975. Participaient notamment à cette réunion Paul Lannoye et Jean Liénard, un montois qui entretenait des rapports réguliers avec la section française des Amis de la terre et qui se rend à Paris, où il rencontre l’écologiste Brice Lalonde, qui l’assure de son soutien. Une rencontre a également lieu à Bruxelles avec Pierre Samuel, président des Amis de la terre – France, et début 1976 avec le délégué américain de The Friends of Earth International [4][4] Cette association d’origine américaine, surtout préoccupée....

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L’ASBL Les Amis de la terre – Belgique est constituée le 12 mars 1976. Parmi les fondateurs, on retrouve quelques personnes qui, plus tard, joueront un rôle actif dans l’animation du mouvement Ecolo, comme Georges Trussart de Vedrin (actuellement sénateur) ou Roland Libois de Landenne-sur-Meuse. Dans le premier conseil d’administration figure Nicole Martin, épouse de Paul Lannoye.

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Les statuts de l’ASBL sont explicites quant au rôle fondamentalement politique que les Amis de la terre (A.T.) entendent jouer : “Les Amis de la terre forment une association dont l’objet est de traduire, dans la vie quotidienne et sur les terrains économiques, social et politique, les enseignements de l’écologie (…). Ils veulent s’efforcer, avec d’autres, de redresser une situation universellement compromise et, par l’action culturelle la plus vaste, de donner à la population des moyens de prendre conscience et de décider elle-même de son avenir

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Le Manifeste des Amis de la terre – Belgique, adopté à Namur en janvier 1977, porte de manière peu douteuse la marque des animateurs de Démocratie nouvelle et de Combat pour l’écologie et l’autogestion. L’écologie (appliquée à l’industrie, à l’énergie, à l’agriculture, à l’infrastructure, etc.), l’autogestion (à la fois politique, par la consultation des habitants, et économique, par une modification des modes de production) et le fédéralisme intégral (tout abandon de compétence au profit de la structure englobante est décidée par la structure englobée, et non l’inverse) constituent également des thèmes fondamentaux du Manifeste des Amis de la terre. De la même manière, ils formeront, plus tard, la charpente de la doctrine du mouvement Ecolo. Il n’est donc pas surprenant, dans ce contexte, qu’un des premiers dossiers publié par les Amis de la terre ait été consacré à la commune et que celui-ci propose deux innovations (les conseils de quartier et le référendum d’initiative populaire) qui apparaîtront comme les axes du programme Ecolo lors du scrutin communal d’octobre 1982.

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Assez rapidement, les groupes locaux des Amis de la terre se multiplient à travers la Wallonie. Celui de Liège, notamment, est formé en mars 1977, sous l’impulsion de José Daras, Théo Bruyère, Henri Hoffait et Raymond Yans que l’on retrouvera parmi les animateurs les plus actifs d’Ecolo-Liège. Le groupe local bruxellois sera constitué parmi les derniers en juin 1977.

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La structuration des Amis de la terre se fonde sur un double principe : l’autonomie des groupes locaux et la coordination nécessaire de leurs actions. Cette dualité sera à l’origine de divergences qui déboucheront sur une dissidence en octobre 1978.

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La création des Amis de la terre ne conduit cependant pas les militants écologistes à déserter les combats électoraux. Ils participent aux élections législatives du 17 avril 1977. A Bruxelles – où le groupe local des Amis de la terre n’est pas encore formé – est constituée la liste Ecolog conduite par Luc de Branbandere et André Missal. Elle totalise 0,99 % des suffrages. Dans le Sud du pays, des candidats sont présentés par Wallonie-Ecologie dans huit arrondissements : ils recueillent respectivement 2,29 % à Nivelles (liste Ecolog), 2,10 % à Namur, 1,68 % à Mons, 1,25 % à Soignies, 1,15 % à Thuin, 1,02 % à Dinant-Philippeville et 0,85 % à Huy-Waremme (listes Ecolo) et 0,26 % à Charleroi (Liste Ecologie-Wallonie).

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La constitution de ces listes répondait à un objectif strictement ponctuel. Dès le lendemain du scrutin, Wallonie-Ecologie disparaît et ce n’est que neuf mois plus tard, le 23 janvier 1978, au cours d’une réunion tenue à Namur, que la décision est prise de recréer Wallonie-Ecologie. On y convient que, dans chaque arrondissement, un groupe sera constitué et déléguera deux mandataires en vue de la formation d’un organe permanent. Ce dernier, qui est chargé de la coordination des divers groupes wallons, se voit confier, dans l’immédiat, la tâche d’élaborer un programme politique. Ce programme est adopté lors d’une réunion qui se tient à Liège le 18 août 1978. Très largement inspiré du Manifeste des Amis de la terre, il s’articule essentiellement autour du fédéralisme intégral, lui-même fondé sur l’autonomie des collectivités de base, l’autogestion des quartiers et villages, le contrôle permanent des responsables et le référendum d’initiative populaire. Les thèmes d’inspiration écologique apparaissent avec netteté : arrêt du programme nucléaire, promotion des énergies non polluantes et renouvelables, protection des espaces agricoles et forestiers, prise en charge individuelle comme fondement de la politique de santé, etc.

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Simultanément, la polémique qui couvait depuis plusieurs mois au sein des Amis de la terre, débouche sur l’affrontement. La rupture survient lors d’une assemblée générale des membres de l’ASBL en octobre 1978 à Tihange. Elle oppose un groupe majoritaire, qui opte pour une structuration fédérale du mouvement, à un groupe minoritaire, qualifié de libertaire et partisan pour sa part de l’indépendance totale des groupes locaux. Elle se concrétise par la fondation notamment par Luc de Brabandere du Réseau libre des Amis de la terre (R.L.A.T.), dénomination reprise de l’appellation de la fédération française des Amis de la terre. On y retrouve surtout des militants des groupes de Bruxelles, de Mons et de Huy. Sur ces divergences idéologiques se greffent des oppositions de personnes, oppositions qui réapparaîtront lors de plusieurs scrutins électoraux. Dans le groupe majoritaire figurent bon nombre de militants qui constitueront, dix-huit mois plus tard, le mouvement Ecolo.

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La scission intervenue influence en tous cas la confection des listes écologistes lors des élections législatives du 17 décembre 1978. A Bruxelles, deux listes sont constituées. La liste Ecopol, menée par Luc de Brabandere, et dans laquelle on retrouve, sur 33 candidats [5][5] parmi lesquels Pierre Van Roye, futur sénateur du mouvement..., 16 membres du R.L.A.T., obtient 3.623 voix, soit 0,47 %. La liste Ecolog est formée surtout de nutritionnistes, elle ne compte que quelques membres des Amis de la terre et ne reçoit pas davantage le soutien des Ecologistes wallons. Conduite par André Missal, elle recueille 7.483 voix, soit 1,01 %. Au total, 1,48 % des suffrages se portent sur les deux listes, ce qui représente un gain de 0,79 % par rapport aux élections législatives du 17 avril 1977.

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En Wallonie, les dissensions ont comme répercussion essentielle la diminution du nombre des arrondissements dans lesquels, Wallonie – Ecologie présente des candidats : 6 contre 8 lors des élections du 17 avril 1977. Là où une comparaison est possible avec les résultats du scrutin antérieur, on relève une progression assez nette des scores réalisés par les candidats écologistes.

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Ainsi dans l’arrondissement de Namur, Wallonie-Ecologie recueille 5.238 voix, soit 3,68 % (contre 2,10 % en 1977). Dans le canton de Namur, le seuil des 5 % est dépassé (5,21 %). Dans l’arrondissement de Dinant-Philippeville, le pourcentage atteint est de 1,96 % contre 1,02 % en 1977. Dans l’arrondissement de Nivelles, Wallonie-Ecologie recueille 2,79 % des voix (2,29 % en 1977). Dans l’arrondissement de Charleroi enfin, le score réalisé est de 1,08 % (contre 0,26 %). Dans les deux arrondissements où aucune liste écologiste ne s’était présentée en 1977 (Liège et Neufchâteau-Virton), Wallonie-Ecologie recueille respectivement 2,05 % et 2,79 % des suffrages.

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Il convient de souligner que, réuni le 10 novembre 1978 à Liège, le Conseil de fédération des Amis de la terre avait à l’unanimité décidé de ne soutenir aucun candidat. Georges Trussart, président des Amis de la terre à l’époque, avait d’ailleurs démissionné de cette fonction dans la perspective de sa candidature au scrutin du 17 décembre 1978.

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Les activités des “dissidents” du R.L.A.T. se poursuivent au-delà des élections. Ils déposent une plainte pour non-respect des statuts, plainte qui sera déboutée comme non fondée. Ils sollicitent d’autre part la reconnaissance du R.L.A.T. auprès des groupes étrangers, notamment lors d’une réunion des différentes sections nationales à Francfort. La décision est également prise de fonder une ASBL Les Amis de la terre – Bruxelles. La réaction des Amis de la terre prend la forme, malgré les réticences de certains, d’une action en justice contre l’éditeur responsable du bulletin du R.L.A.T. Finalement, en dépit de l’échec d’une tentative de conciliation du groupe régional de Liège, la plainte est retirée en mars 1979, suite vraisemblablement aux pressions extérieures (A.T. – France et A.T. – U.S.A.). La proximité des élections européennes a sans doute, elle aussi, contribué à l’apaisement Il reste que, pendant plusieurs années encore, la mouvance écologique restera parcourue par cette faille entre “libertaires” et “institutionnalistes”.

3 - Les élections européennes du 10 juin 1979

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En août 1977, à l’initiative des “burgersinitiativen” allemands, une réunion avait rassemblé à Cologne, des militants écologistes de divers pays européens (dont des Belges), en vue de définir les grandes lignes d’un programme commun.

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En février 1979, à Huy, une plate-forme élaborée en vue du scrutin européen est arrêtée, une Europe des régions autonomes en lieu et place de celle des Etats, une Europe des citoyens appuyée sur le contrôle des responsables et sur le référendum, une économie européenne “écologique” se substituant à l’Europe marchande et productiviste, des relations égalitaires avec le Tiers-Monde, l’arrêt de l’escalade dans l’armement nucléaire et le retrait des pays européens de l’Otan en constituent les axes essentiels.

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Au niveau du collège électoral francophone, si la rédaction d’un programme spécifique ne suscite aucune difficulté particulière, la confection d’une liste commune rencontre certains obstacles : l’existence de deux courants à Bruxelles et l’ordre de présentation des candidats. Le premier est surmonté sous l’impulsion des Amis de la terre ; le second, lié à la revendication de la première place par Luc de Brabandere, débouche sur la décision de ce dernier de ne pas se présenter n’obtenant pas satisfaction [6][6] En 1982, Luc de Brabandere ralliera les rangs du P.... Ce sont les candidats qui, finalement, établissent l’ordre des candidats : ils choisissent Paul Lannoye comme tête de liste. Parmi les dix-sept candidats (onze effectifs et six suppléants), figurent treize membres des Amis de la terre. Aucune liste dissidente, se réclamant de l’écologie, n’est déposée. A noter toutefois que dans la liste E-non, qui reprend dans son programme cerf tains thèmes écologiques, figurent deux membres du R.L.A.T. (Freddy Chabot de Huy et Monique Henrion de Namur).

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Dans le collège électoral francophone, la liste Europe-Ecologie recueille 107.833 voix, soit 5,1 % des suffrages. La percée écologiste est particulièrement spectaculaire dans le Namurois (arrondissement de Namur : 7,7 % ; canton de Namur : 10,1 %). La performance exceptionnelle réalisée dans le canton de Saint-Vith (22 %) est sans doute liée à la conjoncture politique propre à la région germanophone et à la présence, sur la liste d’Europe-Ecologie, de Josef Dries (4.374 voix de préférence) (conseiller provincial de la province de Liège, membre du PDB).

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Si les résultats obtenus ne permettent pas aux écologistes francophones d’être représentés à l’assemblée de Strasbourg, ils font d’eux le cinquième courant politique, en importance, dans la partie Sud du pays, devant le parti communiste. Ce sont eux qui, au surplus, parmi les différentes formations écologistes en Europe, réalisent le score le plus élevé, puisque les listes similaires, en Belgique néerlandophone, en France et en République fédérale d’Allemagne recueillent respectivement 2,3 %, 4,4 % et 3,2 %.

2 - LA CONSTITUTION ET L’IMPLANTATION DU MOUVEMENT ECOLO

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La performance réalisée lors du scrutin européen, le sentiment de bénéficier d’une véritable assise dans la population ainsi que le degré de maturation acquis par les groupes locaux de militants, conduisent les principaux animateurs du courant écologiste à franchir une nouvelle étape : la constitution d’une formation politique permanente et structurée.

1 - La fondation d’Ecolo

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En mars 1980, des militants écologistes se réunissent, le 8 à Opheylissem (Hélécine, province du Brabant) et le 23 à Huy. Au cours de ces deux assemblées, la décision est prise de créer un mouvement intitulé Ecolo, qui se veut “une structure permanente sur le mode autogestionnaire et fédéraliste, afin de poser la revendication écologique sur le plan politique en termes de gestion de société” [7][7] Ecolo, “Statuts du mouvement Ecolo”, 1981, p. 3..

41

Les statuts du mouvement sont adoptés. Son organisation et son fonctionnement s’articulent autour de trois principes : l’autogestion, l’autonomie et la fédération des groupes de base, ainsi que l’élection et le contrôle permanent des délégués.

42

A l’occasion d’une conférence de presse tenue le 22 avril 1980 à Bruxelles, Paul Lannoye, membre du secrétariat fédéral du mouvement, présente les axes du programme : la lutte contre le centralisme et la recherche d’une certaine autonomie économique, le respect des minorités et l’organisation de référendums d’initiative populaire. La filiation doctrinale est ininterrompue, depuis Démocratie nouvelle, Combat pour l’écologie et l’autogestion, les Amis de la terre, Wallonie-Ecologie et Europe-Ecologie.

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La constitution du mouvement est contestée par un certain nombre de personnes – notamment Luc de Brabandere, Freddy Chabot (de Huy) et Maurice André (de Visé) – qui, réunis à Bruxelles, dénoncent l’adoption, par le mouvement Ecolo, “d’une structure particratique qui permet à quelques carriéristes d’envisager la réalisation de leurs ambitions personnelles”. Afin d’empêcher ce qu’ils considèrent comme “une manipulation de l’opinion publique”, ces opposants se proposent de prendre part, eux aussi, aux prochaines consultations électorales, sous le sigle Ecolos. Les scrutins des 8 novembre 1981 et 10 octobre 1982 porteront effectivement, encore qu’à des degrés divers, la marque de cet antagonisme.

2 - Les élections législatives du 8 novembre 1981

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Ce scrutin constitue le premier test auquel participe le mouvement Ecolo en tant que formation politique structurée et permanente.

a - La confection des listes

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L’établissement des listes électorales a suscité bon nombre de difficultés dans les milieux écologistes. La quasi-unanimité observée lors du scrutin européen a fait place à la diversité.

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A Bruxelles, dès avant l’été, plusieurs tendances négocient la constitution d’une liste unique. Ce projet avorte, suite à l’opposition du mouvement Ecolo à la présence de Luc de Brabandere sur la liste qu’il cherche à mettre sur pied. Cette exclusive amène ce dernier à constituer, avec Paul Hainault notamment, une liste intitulée Ecolo-J, qui, d’une manière générale, souscrit aux propositions fondamentales du programme Ecolo, mais qui conteste le mode d’organisation du mouvement. Ecolo-J présente également des candidats dans les arrondissements de Charleroi, Namur et Huy-Waremme. Une troisième liste, Ecolo-Bxl regroupe des militants plus “activistes” récusant le légalisme des autres organisations. En font partie des “autonomes” qui, à Zeebrugge, avaient saccagé l’Andréa Smith, un navire chargé de déchets nucléaires, ou encore des membres du C.Q.F.D. (Cyclistes quotidiens follement dynamiques).

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Une quatrième liste est constituée sous l’appellation Ecolos. Son animateur, Maurice André, un ancien militaire de carrière lié à Francis Dossogne (président du Front de la Jeunesse) et candidat, lors du scrutin européen, sur la liste du Parti progressiste belge, s’était signalé par des lettres extrêmement musclées publiées dans le Moniteur de l’Indépendant, dans lesquelles il prenait des positions fermes en matière d’immigration. Son opposition aux autres tendances de la mouvance écologiste est exempte de toute ambiguïté : “la plupart des mouvements écologistes, déclare-t-il, ont été récupérés par des noyaux d’homosexuels et de lesbiennes”. Il s’en prend avec autant de virulence “au laxisme de (nos) dirigeants actuels, qui ressemblent curieusement à ceux qui dirigeaient Sodome et Gomorrhe” [8][8] “Du vert au vert-de-gris”, Le Soir, 26 octobre 198.... Ecolos cherche à déposer des listes dans la plupart des arrondissements de la partie francophone du pays. Dans les arrondissements de Liège, Verviers et Huy-Waremme, suite à une plainte d’Ecolo, les tribunaux lui interdisent l’usage de ce sigle, et les listes déposées n’ont pas de dénomination officielle (seul le numéro attribué permet de les identifier). Dans les arrondissements de Nivelles et de Louvain, la tentative se solde par un échec, faute de candidats. Ce n’est dès lors qu’à Bruxelles qu’une liste Ecolos est régulièrement déposée, réunissant contre elle l’unanimité des autres tendances qui la qualifient de liste d’extrême-droite.

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Seul le mouvement Ecolo présente des candidats dans tous les arrondissements, tant pour la province qu’à la Chambre et au Sénat.

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C’est au cours des mois précédant le 8 novembre qu’ont été élaborées les “90 propositions” [9][9] Ecolo, “90 propositions une autre manière de faire.... On y retrouve, énoncées volontairement semble-t-il sans ordre de priorité mais rassemblées en 12 chapitres, une liste de déclarations d’intention et de revendications ponctuelles, comme la fixation d’un prix plancher pour le rachat des vieux papiers ou l’instauration d’une appellation “biologique” légalement contrôlée pour les produits alimentaires, la réduction de la durée de travail à 32/34 heures par semaine ou le retrait de la Belgique de l’organisation militaire de l’OTAN. Cette approche parcellisée des problèmes économiques et sociaux, cette absence de hiérarchisation dans les propositions sont peu habituelles dans un programme électoral. On ne la retrouvera pas lors de la campagne en vue des élections communales d’octobre 1982, qui connaîtra une affirmation plus nette des priorités.

b - Les résultats

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Dans l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde, la liste Ecolo déposée pour la Chambre recueille, avec 21.190 voix, 2,48 % des suffrages, avec des pourcentages s’élevant à 4,11 % et 3,67 % dans les cantons de Saint-Gilles et d’Uccle. Elle obtient ainsi un élu, Olivier Deleuze, sur lequel se sont portés 1.471 votes nominatifs. Les autres listes à vocation écologiste réalisent un score global de 1,54 % 0,84 % pour Ecolo-J, 0,39 % pour Ecolos et 0,31 % pour Eco-Bxl.

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Au Sénat, où elle n’avait pas à affronter semblable concurrence, la liste Ecolo réalise une performance plus favorable : 4,10 % (contre 4,02 % pour l’ensemble des listes écologistes à la Chambre). Un siège de sénateur est obtenu : il va à Pierre Van Roye, qui recueille 2.317 voix de préférence.

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Dans le Brabant wallon (arrondissement de Nivelles), par rapport à Wallonie-Ecologie qui avait recueilli 2,79 % des suffrages lors des élections législatives du 17 décembre 1978, la progression est sensible 7,2 % des voix se portent sur la liste du mouvement Ecolo. C’est dans le canton relativement urbanisé de Wavre que le score le plus élevé est enregistré : 8,32 % (à comparer avec les 4,85 % obtenus dans le canton plus rural de Jodoigne). Au Sénat, le résultat est, ici aussi, légèrement supérieur à celui acquis pour la Chambre : 7,42 % (contre 3,08 % en 1978). A relever les 1.848 votes nominatifs recueillis par la candidate placée en tête de liste, Catherine Installé.

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Dans la province de Liège, le mouvement Ecolo recueille, globalement, 6,20 % des suffrages à la Chambre et 6,70 % au Sénat. Pour ce qui est de l’arrondissement de Liège, 23.279 voix, soit 6,71 %, se sont portées sur la liste Ecolo déposée à la Chambre. Les cantons où les meilleurs scores sont réalisés sont ceux de Liège (7,41 %) et d’Aywaille (7,52 %). Elle obtient un siège de député, qui échoit au candidat placé en tête de liste, José Daras (1.713 voix de préférence). Au Sénat, c’est un score légèrement supérieur qui est enregistré : 7,24 % (contre 2,31 % en 1978).

54

Dans l’arrondissement de Verviers, où Wallonie-Ecologie n’avait présenté aucun candidat en 1978, la liste Ecolo recueille 5,89 % à la Chambre. Ce pourcentage monte à 7,35 % dans le canton de Verviers alors qu’il tombe à 2,42 % dans le canton germanophone et plus rural de Saint-Vith. Au Sénat, le score réalisé est de 6,44 % et permet, grâce à l’apparentement, l’élection en tant que sénateur élu direct, d’Alphonse Royen (1.086 voix de préférence). En décembre 1982, il donnera sa démission pour raisons familiales et son siège sera attribué à Colette Saive-Boniver, députe suppléante.

55

Dans l’arrondissement électoral de Huy-Waremme, les pourcentages obtenus par la liste Ecolo sont sensiblement inférieurs à ceux enregistrés dans les autres arrondissements de la province : 4,86 % à la Chambre et 5,17 % au Sénat.

56

Le mouvement Ecolo recueille globalement, dans la province de Namur, 7,03 % des suffrages à la Chambre (contre 3,06 % en 1978 pour Wallonie-Ecologie) et 8,24 % au Sénat (contre 3,22 %). Pour ce qui concerne la Chambre, dans l’arrondissement de Namur, la liste Ecolo obtient 7,85 % des voix (contre 3,69 % en 1978), en dépit de la concurrence d’une liste Ecolo-J (1,42 %). Ce score s’élève même à 9,79 % dans le canton de Namur (contre 5,21 %), en raison sans doute de la présence en tête de la liste de Paul Lannoye, sur lequel se portent 1.899 votes nominatifs. Dans l’arrondissement de Dinant-Philippeville, le pourcentage obtenu est de 5,62 % ce qui traduit une progression de 3,66 % par rapport à 1978.

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Pour ce qui est du Sénat (arrondissement de Namur-Dinant-Philippeville), le score plus favorable tient vraisemblablement au fait que le mouvement Ecolo ne s’est vu opposer aucune liste à vocation écologiste. A noter les 2.573 voix de préférence recueillies par Georges Trussart, qui sera désigné comme sénateur coopté.

58

Dans la province du Luxembourg, le mouvement Ecolo recueille 6,09 % des suffrages à la Chambre et 6,26 % au Sénat. Pour la Chambre, dans l’arrondissement de Neufchâteau-Virton, le seul où Wallonie-Ecologie s’était présentée en 1978, la liste Ecolo obtient 5,56 % des voix, ce qui représente un gain de 3,58 % par rapport aux élections législatives précédentes. Dans l’arrondissement d’Arlon-Marche-Bastogne, le pourcentage acquis est légèrement supérieur : 6,50 %. On relèvera les 10,31 % enregistrés dans le canton d’Arlon. C’est le pourcentage le plus élevé observé dans un canton à l’occasion de ce scrutin.

59

Les résultats observés dans la province du Hainaut sont les plus faibles des provinces wallonnes : 4,89 % à la Chambre et 5,22 % au Sénat. Pour ce qui est de la Chambre, c’est dans l’arrondissement de Mons que le mouvement Ecolo réalise son score le plus élevé : 5,40 % avec une pointe de 6,77 % dans le canton de Mons. Viennent ensuite les arrondissements de Tournai-Ath-Mouscron, avec 5,15 % (8,16 % dans le canton de Mouscron), de Soignies, avec 4,97 %, de Thuin, avec 4,51 % et de Charleroi, avec 4,51 % des voix également (contre 1,08 % en 1978) A noter que, dans ce dernier arrondissement, la liste Ecolo-J conduite par Olivier Depoplimont et André Gauditiaubois a recueilli 0,67 % des voix.

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Au Sénat, les résultats enregistrés sont respectivement de 5,50 % dans l’arrondissement de Tournai-Ath-Mouscron, 5,34 % dans celui de Mons-Soignies et 4,97 % dans celui de Charleroi-Thuin. C’est dans cette circonscription que la liste Ecolo obtient un deuxième siège de sénateur élu direct. Il est attribué à la candidate tête de liste, Simone Jortay-Lemaire, sur laquelle se sont portés 1.622 votes nominatifs.

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Au total, ce sont six mandats de parlementaires qui sont attribués aux candidats présentés par le mouvement Ecolo : deux à la Chambre, qui reviennent à José Daras et Olivier Deleuze, et quatre au Sénat, qui sont exercés par Simone Jortay-Lemaire, Alphonse Royen (puis par Colette Saive-Boniver), Pierre Van Roye et Georges Trussart (sénateur coopté).

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Des élus écologistes pénètrent également dans les conseils provinciaux : 4 dans la province de Liège Benoit Dupret, Colette Braine, Théo Bruyère et Fabrice Lantair les trois derniers ayant été remplacés par Thierry Noël, Nadine Dourteet Madeleine Zinck), 3 dans la province de Namur (Daniel Fastrès, remplacé par Michel Hérode, Anne Houben et Gérald Van de Walle), 1 dans le Hainaut (Jean Weiland) et 1 dans la province du Luxembourg (Jean Louppe).

3 - Les élections communales du 10 octobre 1982

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Ce scrutin, en raison de sa périodicité fixe, ne surprend pas les responsables du mouvement Ecolo. La commune est, par ailleurs, le niveau de pouvoir que, dans leur action et dans leur réflexion, les écologistes privilégient. Au cours des mois qui précèdent la consultation, ils concentrent leurs activités sur l’implantation des groupes locaux et sur la mise au point de leur programme. L’analyse des résultats obtenus – là où une comparaison est possible avec des scrutins antérieurs – traduit une nouvelle progression de l’audience du mouvement Ecolo.

a - Le programme

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Dès le mois de mars 1982, une assemblée générale du mouvement est réunie à Namur. Un peu plus d’une centaine de militants y adoptent un programme [10][10] Ecolo, “Une autre manière de vivre sa commune, propositions... qui s’articule autour de trois priorités présentées comme non négociables, que ce soit avant ou après le scrutin du 10 octobre.

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Première priorité : l’instauration du référendum d’initiative populaire. Selon Henri Hoffait, alors responsable de la commission institutionnelle, cette procédure “doit permettre aux habitants d’une commune ou d’un quartier d’abroger une décision qui leur est gravement préjudiciable, et constitue un moyen d’orienter la politique communale vers des objectifs importants qui ne seraient pas pris en considération…” [11][11] Henri Hoffait, “Elargir la démocratie dans les communes”,....

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Deuxième priorité : la reconnaissance des quartiers et des villages, qui forment “l’écosystème de base” du citoyen. Cette proposition implique l’élection de conseils dotés de pouvoirs de décision, voire de gestion (sur certains équipements collectifs) ainsi que des moyens financiers suffisants pour les mettre en œuvre.

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La remise en cause du statut et du fonctionnement des intercommunales constitue le troisième impératif formulé par le mouvement Ecolo. Il ne s’agit pas, explique-t-on, de remettre en cause le principe de la collaboration entre les communes, mais bien “de pallier aux graves atteintes de la démocratie auxquelles l’institution intercommunale prête le flanc”. Deux reproches sont principalement formulés : d’une part, de nombreuses intercommunales sont devenues “l’occasion pour des groupes privés de manipuler la gestion publique à des fins spéculatives” et d’autre part, “bon nombre de communes en ont fait des moyens discrets de se faire financer par la population

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Le programme défini dans “Une autre manière de vivre sa commune” revêt donc un caractère essentiellement institutionnel. Dans bien des cas, il a été complété, au niveau régional ou local, par une série de propositions spécifiques à chacune des communes où une liste Ecolo est déposée, ce débat devant être centré sur “les problèmes concrets de gens à qui il appartient de gérer eux-mêmes leur quotidien”.

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A noter que la fission (ou défusion) des communes issues des opérations de fusions de 1976 ne figure pas dans le programme de 1982, alors qu’elle constituait la première des “90 propositions” élaborées en vue des élections législatives de novembre 1981 [12][12] Ecolo, “Pourquoi les écologistes font-ils de la politique”,....

b - L’établissement des listes

70

L’assemblée réunie en mars 1982 à Namur pour élaborer le programme s’est également prononcée sur la stratégie à mettre en œuvre et, plus particulièrement, sur l’éventualité d’alliance préélectorale. Elle a, à une très large majorité, affirmé son opposition à toute idée de cartel politique en vue de la constitution de liste de type intérêts communaux. Seules sont admises les listes de rassemblement avec des groupements locaux dont le programme s’apparente à celui d’Ecolo et comprend, en tous cas, les trois points prioritaires évoqués ci-dessus.

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Le Secrétariat fédéral rappelle cette position quelques semaines plus tard, après que des représentants du Parti socialiste aient annoncé la présence de membres d’Ecolo sur des listes apparentées au P.S., à Braine-le-Comte et à Walhain notamment [13][13] A Walhain, la constitution de la liste Vivre ensemble,... : “Sans contester à quiconque le droit de se déclarer écologiste, précisait le communiqué du Secrétariat fédéral, le mouvement Ecolo tient à faire savoir que les personnes qui se présenteraient avec cette étiquette sur des listes P.S. ou apparentées, n’ont en aucun cas la caution du mouvement et ne bénéficient en aucun cas de son soutien”. Plus généralement, la participation des membres d’Ecolo à des listes de rassemblement ne peut aboutir à la constitution “de cartels électoralistes en vue de renverser l’une ou l’autre majorité” ; les listes de rassemblement doivent avoir pour objectif de “changer profondément la politique communale, en mettant en place des mécanismes d’intervention directe et permanente

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Dans la région bruxelloise, les sections locales d’Ecolo ont repoussé diverses propositions qui leut ont été faites de participer à la constitution de listes d’inspiration progressiste, à Ixelles et à Schaerbeek notamment [14][14] Jacques van Solinge, “Les Ecolos réfractaires aux mariages.... A Ganshoren et à Bruxelles-ville, des pourparlers ont été entamés en vue d’attribuer une ou des place(s) à des représentants du parti écologiste flamand Agalev. Ils n’ont d’issue positive qu’à Ganshoren. A signaler qu’inversement des candidats Ecolo sont accueillis sur la liste Agalev à Overijse.

73

A Charleroi, le P.S.C. et le P.R.L. auraient pris l’initiative de former un front “anti-P.S.” et auraient, pour ce faire, approché diverses formations politiques, dont le Rassemblement wallon et Ecolo. Le R.W. a repoussé officiellement cette proposition. Quant à la section locale d’Ecolo, elle affirme n’avoir eu, à ce propos, aucun contact, même exploratoire, ce qui est démenti par les autres partis [15][15] “L’idée d’un cartel anti-P.S. a du plomb dans l’aile”,.... Le groupe local de Tournai a également écarté l’hypothèse d’un cartel des progressistes [16][16] “Ecolo et le rassemblement des progressistes”, La Cité,....

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Finalement, des candidats Ecolo figurent sur des listes de rassemblement dans 9 communes, dont Ottignies-Louvain-la-Neuve (où un candidat Ecolo s’est vu attribuer la troisième place sur la liste Vivre ensemble qui regroupe des militants R.W., M.A.P./G.P.T.C. et Ecolo), Gembloux (sur une liste Vivre autrement) et Soignies (où une liste de rassemblement réunit des candidats Ecolo, M.O.C./S.E.P., R.W. et R.P.W.).

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Reste la confection des listes. Le principe de base est que les parlementaires ne pourraient jouer les locomotives, conformément au programme politique et aux statuts du mouvement, qui prévoient tous deux l’interdiction des cumuls de mandats publics. Comme pour les élections législatives, c’est au groupe de base, le groupe local en l’occurrence, qu’est revenu le soin de choisir les candidats et de déterminer l’ordre de présentation.

c - Les résultats du scrutin

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La participation d’Ecolo aux élections communales du 10 octobre 1982 a confirmé, comme la consultation précédente, la progression de l’audience du mouvement dans l’électorat francophone. Ses candidats, présents dans 91 des communes de Bruxelles et de Wallonie (100 si on y ajoute la présence de candidats Ecolo sur des listes de rassemblement), y ont recueilli 103.346 voix (soit 7,1 % des suffrages) et 75 d’entre eux ont été élus.

77

Dans les 19 communes de l’agglomération bruxelloise, le mouvement Ecolo s’est vu attribuer 28 mandats de conseiller communal : 2 à Anderlecht (6,3 %), 1 à Auderghem (6,1 %), 2 à Bruxelles (5,7 %) ; 1 à Etterbeek (6,3 %), 2 à Forest (7,3 %), 1 à Ganshoren (6,6 %), 3 à Ixelles (7,5 %), 2 à Jette (6,2 %), 1 à Koekelberg (7,8 %), 2 à Molenbeek (6,3 %), 3 à Saint-Gilles (8,9 %), 2 à Schaerbeek (5,9 %), 2 à Uccle (6,7 %), 1 à Watermael-Boitsfort (6,7 %), 1 à Woluwe-Saint-Lambert (5,3 %) et 2 à Woluwe-Saint-Pierre (7,4 %). C’est donc à Saint-Gilles et à Koekelberg qu’Ecolo enregistre ses scores les plus élevés : 8,94 % et 7,85 %. A noter que le mouvement Ecolo n’a eu à affronter de liste écologiste concurrente qu’à Bruxelles-ville, où Eco-Bxl a recueilli 0,52 % des suffrages.

78

Une comparaison avec les résultats des élections législatives de 1981 n’est possible que dans deux communes qui constituent un canton électoral. A Saint-Gilles, Ecolo a recueilli 8,94 %, le 10 octobre 1982 (contre 4,11 %, le 8 novembre 1981). A Bruxelles-ville, ces taux sont respectivement de 5,75 % et de 3,40 %.

79

Dans le Brabant wallon, 6 candidats présentés par le mouvement Ecolo sont élus : 2 à Rixensart (9,4 % des voix), 1 à Braine l’Alleud (8,6 %), 1 à Chaumont-Gistoux (9,1 %), 1 à Court-Saint-Etienne (8,6 %) et 1 à Wavre (6,5 %). A Ottignies-Louvain-la-Neuve, le candidat Ecolo qui occupait la 3ème place sur la liste de rassemblement Vivre autrement, est élu.

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Dans la province de Liège, 23 candidats sont élus sur les listes déposées par le mouvement Ecolo : 2 à Esneux (12,91 % des voix, ce qui constitue le résultat le plus élevé obtenu par le mouvement), 6 à Liège (11,7 %), 4 à Verviers (11 %), 2 à Dison (10,5 %), 4 à Seraing (10,4 %), 1 à Comblain-au-Pont (10,4 %), 1 à Sprimont (8,2 %), 1 à Oupeye (7,3 %), 1 à Pépinster (7,1 %) et 1 à Herstal (6,8 %). A Huy, où le mouvement Ecolo ne présente aucun candidat, la liste Ecolo-J a recueilli 1,8 % des suffrages. Signalons qu’Ecolo soutenait 4 candidats sur la-liste Rassemblement hutois.

81

Par rapport aux élections législatives du 8 novembre 1981, on notera que, dans les trois communes constituant un canton électoral et où Ecolo avait déposé une liste, la progression enregistrée est variable : + 4,3 % à Dison, + 4,3 à Liège et + 0,2 % à Herstal.

82

Dans la province de Namur, Ecolo obtient 10 mandats dans cinq communes : 6 à Namur (12,3 % des voix), 1 à Fernelmont (9,2 %), 1 à Andenne (6,1 %), 1 à Ohey et 1 à Gembloux où le candidat Ecolo occupait la première place de la liste Vivre autrement, liste de rassemblement constituée par le mouvement Ecolo et par le Rassemblement wallon (7,4 %). A relever le résultat enregistré à Rochefort, commune qui correspond à un canton électoral : le mouvement Ecolo y obtient 4,5 % des suffrages, contre 7,0 % lors des élections législatives du 8 novembre 1981.

83

Dans la province du Hainaut, 9 candidats Ecolo sont élus : 3 à Mons (8,8 % des voix), 1 à Mouscron (6,3 %), 2 à La Louvière (6,1 %), 2 à Charleroi (6,0 %) et 1 à Tournai (5,3 %). Des comparaisons avec les résultats des élections législatives du 8 novembre 1981 sont possibles dans plusieurs communes qui correspondent à un canton électoral. Mentionnons à cet égard, les progrès enregistrés à Charleroi (6,0 % contre 4,5 %), à Mons (8,8 %, contre 6,8 %) et à La Louvière (6,1 % contre 4,6 %), ainsi que les reculs constatés à Mouscron (6,3 contre 8,2 %) et à Tournai (5,3 % contre 5,8 %).

d - La constitution des collèges échevinaux

84

L’arrivée significative de mandataires Ecolo dans les conseils communaux ne s’est pas traduite par une participation de même ampleur dans les coalitions majoritaires. Cette absence ne résulte pas d’un refus de principe, comme l’indiquent les divers cas de pourparlers auxquels les élus du mouvement ont été associés au lendemain du scrutin.

85

Ainsi, à Koekelberg, la tentative de constitution d’une coalition F.D.F. – P.S./S.P. – P.S.C. – Ecolo, contre le bourgmestre libéral sortant, Jacques Pivin, échoue en dernière minute. A Esneux, la défection in fine du bourgmestre P.S. sortant et d’un conseiller P.S. empêche la formation d’une coalition P.S.-V.A.-Ecolo. A Watermael-Boitsfort, la section locale d’Ecolo refuse de participer à l’élargissement de la majorité F.D.F.-P.S., opération à laquelle elle avait été conviée. L’élection du candidat Ecolo, le Dr. J. Flament, à la présidence du C.P.A.S. d’Ixelles, résulte d’une dispersion dans les votes de la majorité P.R.L.-P.S.C.

86

Le cas de Liège sur lequel nous reviendrons en détail dans la cinquième partie constitue donc l’exception.

4 - Les élections européennes du 17 juin 1984

87

Lors des premières élections européennes du 10 juin 1979, les écologistes francophones, non encore groupés dans un parti organisé, avaient déposé une liste Europe-Ecologie, qui recueillait 107.833 voix, soit 5,1 % du collège électoral francophone.

88

En 1984, c’est un mouvement structuré qui sollicité les suffrages des électeurs.

a - La préparation du scrutin

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Alors qu’il existait une coordination des partis verts et radicaux de plusieurs pays européens, Ecolo et Agalev, suite au malaise né de la cohabitation entre écologistes et radicaux, prennent l’initiative au début de l’année 1983 de reprendre la discussion avec les seuls partis écologistes.

90

Ceux-ci se réunissent une première fois à Bruxelles les 26 et 27 mars et prennent la décision de constituer une Fédération écologiste européenne. Lors d’une seconde réunion, le 18 juin, huit pays étaient représentés : la France (les Verts et les Verts Parti Ecologiste), la Belgique (Ecolo et Agalev), la Grande-Bretagne (Ecology Party), l’Irlande (Comhaontas Glas), la Suède (Miljöpartiet), la République fédérale d’Allemagne (Die Griünen), les Pays-Bas (Europese Groenen) et l’Autriche (Alternative Liste Osterreich-A.L.O.).

91

Au printemps 1984, un congrès européen est organisé à Liège. Les Verts allemands y participent mais à titre d’invités seulement car un désaccord subsiste sur les relations à maintenir avec les mouvements alternatifs et radicaux. Une déclaration commune des Verts européens y est adoptée, ainsi qu’un engagement prévoyant que les élus représenteraient l’ensemble des signataires.

92

Parallèlement, le mouvement Ecolo prépare sa campagne. Une commission Europe est mise sur pied en février 1983. Au cours de multiples réunions, elle élabore un premier dossier, diverses fiches techniques puis un avant-projet de programme qui est soumis à diverses commissions et aux groupes régionaux.

93

Le 15 janvier 1984, une assemblée générale d’Ecolo adopte le programme [17][17] Pour plus de détails concernant ce programme, voir... et désigne, à la suite d’une procédure rigoureuse, les candidats du mouvement. Une trentaine de militants se sont présentés. Vingt-deux sont retenus. La liste, dénommée Ecolo, les Verts Européens, est menée par François Roelants, ancien secrétaire général d’Inter-Environnement wallonie, Jean-Pierre Hannequart et Michèle Corombelle.

b - Les résultats

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Le scrutin du 17 juin 1984 confirme à la fois les espoirs d’Ecolo et la progression de son audience dans l’électorat, puisqu’avec 220.704 voix (contre 107.833 en 1979) et 9,85 % des suffrages du collège électoral francophone (contre 5,1 %), le mouvement Ecolo obtient un siège de député au Parlement européen de Strasbourg, qui est attribué à François Roelants, et devient la quatrième formation politique tant en Wallonie que dans le collège francophone. Les élections européennes du 10 juin 1979 et le scrutin législatif du 8 novembre 1981 constituent les points de repères qui permettent d’apprécier la progression des écologistes.

95

La percée du mouvement Ecolo est particulièrement sensible dans la province du Hainaut (8,5 %) qui, il est vrai, apparaissait comme le point faible de l’implantation écologiste : le taux de 10 % est atteint ou dépassé dans les arrondissements de Charleroi, avec 10,0 %, et de Mons, avec 10,6 % (avec une pointe de 13,3 % dans le canton de Mons). A signaler également, dans l’ouest de la province, le score de 12,0 % réalisé dans le canton de Mouscron. En 1979, Europe-Ecologie avait recueilli 4,3 % dans l’arrondissement de Charleroi et 3,5 % dans celui de Mons. Lors des élections législatives de 1981, les pourcentages, dans ces mêmes circonscriptions avaient été 5,2 % et 5,4 %.

96

La progression d’Ecolo se confirme également dans le Brabant wallon, où il recueille 10,9 % des suffrages (contre 6,3 % en 1979 et 7,2 % en 1981). Son meilleur score est enregistré dans le canton de Wavre, avec 12,4 %.

97

La province de Namur dans laquelle traditionnellement le mouvement Ecolo réalisait ses meilleures performances apporte également aux écologistes une amélioration des résultats des scrutins précédents. Ils y recueillent 10,2 % des suffrages, contre 7,9 % en 1981 et 6,4 % en 1979. Les progrès les plus sensibles sont enregistrés à nouveau dans l’arrondissement de Namur (11,7 % contre, respectivement, 9,2 % et 7,7 %). Dans le canton de Namur, le taux atteint est de 14,2 %. A noter toutefois le recul enregistré par rapport aux élections de 1981 dans le canton de Rochefort (6,6 % contre 7,0 %).

98

Dans la province de Liège, la percée écologiste se confirme également, avec un pourcentage de 9,0 % (contre 6,2 % en 1981 et 5,9 % en 1979). Dans l’arrondissement de Liège, c’est dans les cantons de Seraing (10,6 %) et de Liège (10,1 %) que les meilleurs résultats sont enregistrés. Dans l’arrondissement de Verviers (10,0 %), les scores les plus élevés sont observés dans les cantons germanophones d’Eupen (15,4 %) et de Saint-Vith (11,8 %). La présence de Michèle Corombelle, de Lontzen, à la troisième place de la liste Ecolo, conjuguée à la spécificité de ces circonscriptions, explique largement ces résultats.

99

C’est en définitive, dans la province du Luxembourg que la progression d’Ecolo a été la moins sensible, tout au moins par rapport au scrutin du 8 novembre 1981. La part des suffrages qu’elle y recueille s’élève à 7,2 %, contre 6,1 % en 1981 et 3,9 % en 1979. Un recul est même enregistré dans deux cantons : Saint-Ode (2,8 %, contre 3,6 % en 1981) et Fauvillers (5,1 % contre 5,6 %). A signaler, en revanche, le score réalisé dans la canton de Messancy : 10,3 % contre 4,5 % en 1981 et 3,3 % en 1979

100

Dans la région bruxelloise (arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde) la progression est constante dans tous les cantons. Les résultats les plus favorables sont observés dans ceux de Saint-Gilles, avec 11,7 % (contre 5,8 % en 1981 et 4,5 % en 1979) et d’Ixelles, avec 9,9 % (contre 5,3 % en 1981 et 4,8 % en 1979).

101

Dans le collège électoral néerlandophone, Agalev recueille 246.879 voix, soit 7,08 %, et obtient, lui aussi un siège au Parlement européen.

102

Les résultats des écologistes belges francophones sont supérieurs à ceux recueillis, lors du même scrutin, par leurs homologues allemands (8,2 %, 7 sièges pour la liste Die Grünen, 0,3 % pour la liste concurrente Ökologisch demokratische Partei), français (3,4 %, aucun élu pour la liste Les Verts-Europe Ecologie ; rappelons que Brice Lalonde et certains écologistes se présentaient sur la liste Entente radicale écologiste, “ERE Européenne” qui obtient 3,32 % des suffrages) et luxembourgeois (Parti des Verts-alternatif 6,2 % aucun élu). Aux Pays-Bas, certains écologistes (Le Groene Partij Nederland) ont constitué une liste avec des candidats communistes, socialistes pacifistes et progressistes radicaux : ensemble, ils recueillent 5,6 % des voix et obtiennent 2 sièges de députés. La liste Europese Groenen, affiliée aux Verts européens, a obtenu 1,27 % des suffrages.

3 - MORPHOLOGIE DU MOUVEMENT ECOLO

103

A la fois parti et mouvement, Ecolo souffre et profite de cette dualité. Elle implique à la fois une structuration minimale, elle autorise les modes d’action les plus divers, elle contraint les responsables à un relatif anonymat. En cela, le mouvement Ecolo se singularise de la plupart des autres formations politiques, d’autant qu’il n’entretient aucune relation structurée avec les groupes de pression socio-professionnels et qu’il ne bénéficie d’aucun appui déclaré.

1 - Les structures du mouvement Ecolo

a - Généralités

104

Au premier abord, le principe d’une structuration peut paraître contraire à la philosophie du mouvement Ecolo. Les membres fondateurs qui ont rédigé les statuts d’Ecolo, en étaient conscients. Ils se sont refusés à mettre en place une structure interne qui soit en contradiction avec le modèle de société qu’ils défendent. Cette préoccupation se retrouve dans les principes d’organisation à savoir l’autonomie et la fédération des groupes de base, l’autogestion ainsi que l’élection et le contrôle permanent des délégués.

105

A cet égard, les délégations de pouvoirs sont extrêmement restreintes : elles n’existent guère qu’en ce qui concerne le Conseil fédéral, qui, il est vrai, constitue l’organe politique essentiel du mouvement, et le Secrétariat fédéral. Pour le reste, l’ensemble du mouvement fonctionne sans président, sans structure exécutive au sens strict, sans délégation de pouvoirs.

106

L’insistance est également mise sur l’indispensable autonomie de chaque groupe, de chaque organe. En témoigne la régularité avec laquelle ce principe réapparaît dans chacun des chapitres des statuts [18][18] Ecolo, “Statuts du mouvement Ecolo”, janvier 1983. Le principe de la hiérarchisation est absent de la structuration du mouvement : chaque groupe est autonome à son niveau, il décide souverainement de son mode de fonctionnement et des actions qu’il mène (art. 4.5.1.). Trois réserves toutefois doivent être mentionnées :

  1. Chaque groupe tient son existence de sa reconnaissance par une structure ou un organe géographiquement plus large (art. 4.2 et 4.3)

  2. Son activité doit être conforme avec les statuts et les objectifs généraux du mouvement (art. 4.5.1.).

  3. Il ne peut prendre de position publique sur un problème non débattu au sein du mouvement que si les circonstances politiques régionales la rendent indispensable et que s’il la prend en son nom, sans engager l’ensemble du mouvement (art. 4.5.2).

b - Le niveau local

107

A cet échelon, qui est celui de la commune, se constitue le groupe local [19][19] Le terme section n’est que très rarement utilisé.. Celui-ci ne peut être reconnu par le groupe régional – ou, à défaut, par le Conseil de fédération – que s’il remplit les deux conditions suivantes :

  • il est tenu de communiquer au secrétariat régional son règlement d’ordre intérieur.

  • il doit compter au moins cinq membres, sauf dérogation accordée par le groupe régional (art. 4.3).

108

Les membres du groupe local sont de deux types :

  • les membres effectifs qui acquièrent cette qualité soit parce qu’ils ont participé aux assemblées constitutives du mouvement et adhéré aux statuts, soit parce qu’ils ont été admis par deux tiers des membres du groupe local auquel ils se sont inscrits : cette admission ne peut intervenir qu’après un stage de trois mois en tant que membre sympathisant ;

  • les membres sympathisants qui adhèrent aux principes généraux du mouvement et sont admis, à la majorité simple, à participer aux activités du groupe (art. 2.2).

109

Deux éléments supplémentaires sont à relever :

  • l’admission en tant que membre effectif est soumise à une procédure peu habituelle : période probatoire, majorité qualifiée (art. 2.2.3 et 2.1) ;

  • la qualité de membre exclut toute appartenance à un autre parti politique ce qui traduit bien la nature de “parti” du mouvement Ecolo (art. 2.1).

c - Le niveau régional

110

A cet échelon, qui est celui de l’arrondissement électoral, correspond le groupe régional. Il est constitué non pas par les groupes locaux en tant que tel, mais par 20 membres effectifs au moins, après qu’aient été communiqués au Secrétariat fédéral, la liste des membres et le règlement d’ordre intérieur (art. 4.2.).

111

Le groupe régional doit être reconnu par le Conseil de fédération et non pas, comme on aurait pu s’y attendre, par l’Assemblée.

112

Il élit un secrétariat régional dont le nombre de membres et les modalités de fonctionnement sont déterminés librement par le groupe concerné (art. 4.6).

d - Le niveau fédéral

113

A cet échelon qui est celui de l’entité Bruxelles-Wallonie, on retrouve deux organes : l’Assemblée et le Conseil de fédération.

1° L’Assemblée

114

Elle est constituée par l’ensemble des membres du mouvement. L’assemblée ordinaire se réunit une fois par an au moins. L’assemblée extraordinaire se réunit à la demande, soit de 15 % des membres, soit de trois groupes régionaux soit encore du Conseil de fédération.

115

L’assemblée est l’organe souverain du mouvement : elle en définit les options fondamentales et les traduit en programme politique. Les décisions se prennent à la majorité des deux tiers, sauf s’il faut choisir entre deux solutions mutuellement exclusives, cas où la majorité simple suffit. Il n’existe pas de pondération géographique dans les votes ; toutefois, le nombre de voix attribuées à chaque groupe peut être limité à dix si cinq participants le demandent.

116

C’est l’Assemblée qui élit les membres du :

117

1) Secrétariat fédéral :

118

Le Secrétariat fédéral est composé de 9 membres élus par l’Assemblée. Le mandat est d’une durée d’un an et ne peut être renouvelé que deux fois consécutivement (art. 5.3.1 et 5.3.6). Il est difficile d’assimiler cet organe aux bureaux des autres partis politiques. Ainsi, statutairement, ses compétences apparaissent relativement restreintes puisqu’elles sont limitées :

  • au suivi des décisions des assemblées et du Conseil de fédération ;

  • au suivi journalier de la conjoncture politique : il peut, à cet égard, prendre toutes les initiatives et décisions urgentes ; dans ce cas, il est tenu d’en faire rapport au Conseil de fédération, qui juge du bien-fondé des positions adoptées ; une sanction est prévue dans l’exercice de cette tutelle, puisque le Conseil de fédération peut, à tout moment, retirer sa confiance à un ou plusieurs secrétaires fédéraux et désigner des remplaçants intérimaires (art. 5.3.3 et 5.3.2) ;

  • à la gestion administrative du mouvement au plan fédéral (trésorerie, convocations, coordination du travail des commissions).

119

La tutelle à laquelle est soumis le Secrétariat fédéral est encore renforcée par la présence obligatoire à ses réunions des élus nationaux (qui n’ont cependant que voix consultative) et facultative des délégués des différents groupes régionaux (art. 5.3.4). Comme les autres organes du mouvement, le Secrétariat fédéral est autonome sur le plan de son fonctionnement interne : il est même habilité à déléguer l’exercice de ses compétences à ses membres (art. 5.3.4). Il est secondé par un secrétariat permanent.

120

2) Comité d’arbitrage :

121

Il est composé de 5 membres élus pour deux ans par l’Assemblée. C’est à lui qu’incombe la mission de “gérer” les conflits internes du mouvement : il instruit, concilie et, le cas échéant, tranche sur la base des statuts. Par exemple, il lui appartient de statuer (en appel) sur les mesures d’exclusion des membres décidées à la majorité des deux tiers par le groupe régional. Seule l’Assemblée peut casser une décision du Comité d’arbitrage.

122

3) Collège des commissaires aux comptes.

2° Le Conseil de fédération (art. 5.2)

123

Il s’agit de l’une des structures essentielles du mouvement, et cela à un double titre :

  • il est l’organe politique du mouvement. Entre deux assemblées, c’est lui qui assume la responsabilité politique du mouvement. A ce titre, il s’exprime au nom du mouvement (sur base des options de l’assemblée), il organise les campagnes d’action, il règle l’organisation interne, pour les cas non prévus par les statuts ou par le règlement d’ordre intérieur.

  • il n’est statutairement soumis à aucun contrôle, si ce n’est à celui que chaque groupe exerce sur ses délégués. En revanche, c’est lui qui est chargé de la tutelle sur le Secrétariat fédéral. Ce dernier est d’ailleurs étroitement associé aux travaux du Conseil de fédération, puisque les secrétaires fédéraux peuvent intervenir dans l’établissement de son ordre du jour et assister – avec voix consultative – à ses réunions.

124

Le mode de désignation des membres du Conseil de fédération et les modalités de son fonctionnement se veulent la traduction de l’autonomie des groupes régionaux :

  • les membres du Conseil de fédération sont désignés par les groupes régionaux à raison de deux délégués par groupe ;

  • chaque groupe régional fixe souverainement la durée et l’étendue du mandat de ses délégués ;

  • son ordre du jour est établi à l’initiative des groupes régionaux ;

  • une minorité, dans un groupe régional, peut demander que deux de ses délégués soient entendus par le Conseil de fédération.

125

Comme les autres rouages, le Conseil de fédération est autonome sur le plan de son fonctionnement : dans la limite de ses compétences, il peut déléguer ses responsabilités à un ou plusieurs de ses membres.

126

Les réunions ordinaires du Conseil de fédération ont lieu une fois par mois, autant que possible à date fixe.

2 - Le fonctionnement du mouvement Ecolo

a - Le statut des responsables et des élus

127

Le mouvement Ecolo a érigé en principe inscrit dans ses statuts l’obligation des responsables de se soumettre au contrôle permanent des militants et des électeurs : “Etre élu à un poste quelconque signifie être investi d’une responsabilité dont on doit rendre compte, non d’un pouvoir arbitraire” [20][20] Statuts du mouvement Ecolo, art. 1.2.. Cette obligation incombe autant aux “cadres” du mouvement qu’aux élus à un mandat politique. Ces derniers sont notamment soumis “au contrôle des électeurs, par le biais de réunions publiques – une réunion au moins par an dans chaque arrondissement – et de permanences dans son arrondissement” [21][21] Règlement d’ordre intérieur, art. 6.2..

128

Au-delà des statuts, cette tutelle se manifeste également par la création de nombreuses commissions d’accompagnement chargées de conseiller et de seconder les élus dans leurs tâches [22][22] Voir infra, L’expérience liégeoise, la pratique du....

129

Ce contrôle est, le cas échéant, sanctionné d’une démission forcée si le groupe concerné (local, cantonal, régional ou assemblée) estime que l’élu en cause “ne satisfait pas, dans l’exercice de son mandat, aux engagements généraux et particuliers pris en vue de son élection” [23][23] Statuts du mouvement Ecolo, art. 7.4.. La décision de démission doit réunir au moins 75 % des voix. En pratique, aucune mesure de ce type n’a, jusqu’à présent, été prise.

130

Outre le contrôle auquel ils sont soumis, les élus et les responsables ont à respecter des règles d’incompatibilité particulièrement strictes : ainsi, le cumul est absolument interdit entre les mandats politiques de différents niveaux (conseiller communal, provincial ou régional, parlementaire national ou européen). D’autre part, il y a incompatibilité entre la fonction de secrétaire fédéral ou de membre du Conseil de fédération et un mandat de parlementaire ou de membre d’un Exécutif (y compris députation permanente ou collège échevinal). Le cumul est également interdit aux permanents.

131

Au surplus, l’élu “plein temps” ne peut exercer aucune autre activité lucrative durant son mandat, sauf dérogation accordée par son groupe régional. Le montant de l’indemnité qui dépasse 40.000 F par mois (index 1.1.81) doit du reste, en principe, être cédé au mouvement.

132

Cette volonté de disperser l’exercice des responsabilités se retrouve également dans la durée de certains mandats au sein du mouvement (de 6 mois à 1 an). Le caractère non renouvelable de certaines désignations accroît encore la rotation voulue.

133

Autre obligation de l’élu : il est tenu d’assister aux assemblées du mouvement, aux réunions du Conseil de fédération, à celles de son groupe régional ainsi que, rappelons-le, à un certain nombre de réunions publiques et de permanences. Il s’engage en outre “à s’abstenir de toute publicité autour de sa propre personne, en dehors de celle admise par son groupe ; celle-ci ne peut être de toutes façons ni tapageuse ni coûteuse” [24][24] Statuts du mouvement Ecolo, art. 7.4. (Devoirs des....

b - Les prises de positions

134

Statutairement, c’est l’Assemblée qui définit les options fondamentales du mouvement. C’est elle qui, notamment, a adopté les programmes pour les élections communales, législatives et européennes, défini la position en matière d’avortement, précisé la doctrine du “fédéralisme intégral”, etc.

135

Cette règle de principe appelle des précisions :

  • une vingtaine de commissions de travail, tantôt permanentes, tantôt ponctuelles, ont été mises sur pied en vue d’élaborer des propositions politiques. Les textes de base préparés par ces commissions – ou, en cas d’urgence, par des groupes de travail ad hoc – sont discutés dans les groupes régionaux et locaux (qui suggèrent d’éventuels amendements) et reviennent ensuite devant l’Assemblée ou la version finale est approuvée. Aux diverses commissions (agriculture, avortement, déchets, désarmement, eau, énergie, enseignement, Europe, information, institutions, etc) s’est ajouté, en 1983, le Centre d’étude et de formation en écologie, une ASBL implantée à Namur.

  • les options particulières à certaines communes, à certaines régions sont définies au niveau concerné par le groupe local ou le groupe régional. Ainsi, lors des élections communales du 10 octobre 1982, en plus de la plate-forme fédérale (“Une autre manière de vivre sa commune”) de nombreux groupes locaux ont élaboré des programmes spécifiques : “Verviers, une ville pour y vivre”, “Changer la vie, changer la ville” (Charleroi), “La voie pour Liège”, “Un quartier, une commune, une ville” (Bruxelles), etc.

  • entre deux assemblées, et pour les problèmes nationaux, c’est au Conseil de fédération qu’il revient de prendre position et de s’exprimer au nom du mouvement, sur la base des décisions et options de l’Assemblée. Il l’a fait à de très nombreuses occasions, de même que le Secrétariat fédéral pour les questions urgentes. C’est en se fondant sur cette attribution qu’en décembre 1982, en accord avec le Conseil de fédération et à partir des travaux de la commission socio-économique, le Secrétariat fédéral a approuvé et rendu public un document reprenant les conceptions d’Ecolo en matière de travail et d’emploi. Cette initiative a été contestée par certains groupes régionaux, pour le motif que la discussion interne n’aurait pas eu lieu. En réalité, a répondu le Secrétariat fédéral, toutes les orientations contenues dans le document avaient déjà été approuvées lors de l’adoption du programme pour les élections législatives du 8 novembre 1981. A plusieurs reprises le problème de l’habilitation à prendre position au nom du mouvement s’est posé. Le Secrétariat fédéral s’est saisi de la question en juin 1983 et a rappelé “que la liberté d’expression, à titre personnel, des militants Ecolo a toujours été et devra rester totale et sans restriction”. En revanche, les déclarations faites au nom du mouvement et qui l’engagent, sont réservées “aux membres du Secrétariat fédéral et, à l’intérieur de celui-ci, aux trois porte-parole ou à toute autre personne qui en a reçu délégation expresse, à l’occasion d’une manifestation particulière, du Secrétariat fédéral ou du Conseil de fédération” [25][25] Cf. Ecolo-Info, n° 24, 1er septembre 1983, p. 4.

  • les prises de positions du mouvement sont publiées dans Ecolo-Info, le périodique bimensuel d’Ecolo ou, pour les plus importantes d’entre elles, dans des brochures spécialisées. Ce fut le cas pour les programmes du mouvement lors des élections législatives de 1981 (79 pages), des élections communales de 1982 (40 pages), des élections européennes de 1984 (88 pages) ou encore des propositions en matière d’emploi (59 pages) ou dans le domaine de l’énergie (59 pages). Elles sont répercutées, par des conférences ou des communiqués de presse [26][26] Ceux-ci sont particulièrement nombreux. Pour la seule..., dans la plupart des médias. C’est évidemment dans L’Ecologiste, le mensuel des Amis de la terre (devenu depuis peu indépendant et qui a changé sa dénomination en Champ libre), qu’elles ont trouvé le meilleur écho. Par contre, le mouvement Ecolo s’est plaint à plusieurs reprises de la couverture restreinte que lui réserve la R.T.B.F. (“les centres régionaux de Mons et de Charleroi sont des trous noirs pour Ecolo”) [27][27] Gérard Lambert, “Rapport du représentant Ecolo au conseil....

c - Les finances

136

La spécificité d’Ecolo, par rapport aux autres formations politiques, est évidente sur ce plan, puisque, régulièrement, Ecolo-Info, le périodique du mouvement, publie les budgets du parti ainsi que les rapports des commissaires aux comptes. Toutefois, faute de données fiables relatives à la trésorerie des autres partis, aucune comparaison n’est possible.

137

Une brève analyse de la situation financière d’Ecolo amène à opérer une distinction entre le budget ordinaire et le budget extraordinaire, imposé par la participation aux élections.

1° Le budget ordinaire

138

Le dernier exercice pour lequel les comptes sont arrêtés, à savoir l’année 1983, est caractérisé par les mouvements suivants [28][28] En 1983, le mouvement Ecolo occupait : - à charge du...[29][29] Ce poste couvre la location et les charges locatives...[30][30] Dans les commentaires du budget, il est précisé que... :

139

A noter que le budget de l’exercice 1984 est en augmentation de 11 % pour les recettes comme pour les dépenses. Les entrées supplémentaires escomptées (plus de 800.000 FB) proviennent essentiellement d’un accroissement des postes indemnités parlementaires, subsides officiels et cotisations. Les charges nouvelles concernent principalement les frais de personnel et le périodique du mouvement.

140

En 1982, à l’occasion de l’attribution de la surtaxe de certaines émissions de timbres-postes aux bureaux d’études des partis [31][31] Le produit de cette surtaxe était en principe destiné..., le mouvement Ecolo a soulevé, sans guère trouver d’écho, la question du financement des formations politiques : en la matière, les écologistes considèrent que, pour autant que tout est fait dans la clarté, la subsidiation légale des partis constitue une garantie de fonctionnement démocratique des institutions.

2° Le budget extraordinaire

141

En plus des dépenses courantes, le mouvement Ecolo a eu à faire face, depuis sa création, aux frais entraînés par trois scrutins électoraux, en vue desquels des budgets extraordinaires ont été établis.

142

Pour les élections législatives du 8 novembre 1981, le total des dépenses effectuées au niveau fédéral s’est élevé à environ FB 2 millions.

143

Pour les élections européennes du 17 juin 1984, le budget suivant a été établi :

144

Le mouvement Ecolo escompte rembourser les prêts et les avances et couvrir le déficit par :

  • le remboursement par le Parlement européen des frais exposés à l’occasion de la campagne électorale (5 FB par vote) ;

  • les indemnités allouées au candidat écolo élu le 17 juin 1984.

145

A signaler en outre que le mouvement Ecolo a garanti, à concurrence de 2,5 millions de FB, l’emprunt contracté par les écologistes français en vue des élections européennes.

3 - L’électorat et le personnel politique d’Ecolo

146

Qui vote Ecolo ? Qui sont les membres du mouvement Ecolo ? Quels sont les traits majeurs de ceux qui, au titre de militant ou de responsable, l’animent ? S’agissant d’une formation de création récente qui n’est structurellement liée à aucune association socio-culturelle traditionnelle et qui entend occuper une place originale dans le champ politique belge, ces questions nous paraissent ne pas manquer d’intérêt.

a - L’électorat écologiste

147

Il est, d’une manière générale, extrêmement malaisé de dégager la typologie de l’électorat d’un parti politique. L’entreprise est plu difficile encore dans le cas d’Ecolo, compte tenu de ses spécificités. Néanmoins, diverses enquêtes réalisées ces dernières années permettent de dessiner les traits principaux de la fraction de l’électorat qui a porté ses suffrages sur les candidats présentés par le mouvement Ecolo.

148

La première donnée qui en ressort est la jeunesse de ces électeurs : selon une enquête effectuée par le Groupe de sociologie wallonne de l’U.C.L. en novembre 1981 [32][32] Voir à ce sujet, “Un homme sur quatre …” La Cité, Joseph... et qui, sur ce point, est confirmée par un sondage réalisé pour le journal Le Soir par l’INUSOP au début de 1983, près d’un tiers de l’électorat Ecolo a moins de 25 ans ; ce tiers représente d’ailleurs 13 % des électeurs de la classe d’âge 18-25 ans, ce qui fait du mouvement Ecolo la deuxième formation politique dans cette tranche d’âge, derrière le P.S.C. Inversement, moins de 7 % des électeurs âgés de plus de 50 ans accordent leurs suffrages aux candidats écologistes. Cette classe d’âge ne constitue pas un quart de l’électorat Ecolo, alors que pour les autres partis, le poids de ce groupe d’âge est nettement plus important [33][33] INUSOP : Institut interuniversitaire de sondage d’opinion....

149

Deuxième caractéristique essentielle : un niveau élevé de scolarisation, supérieur à celui des autres partis. D’après l’enquête déjà citée du journal Le Soir, 62 % de l’électorat écologiste possède un diplôme de l’enseignement secondaire et près de 15 %, un diplôme universitaire (pour des pourcentages correspondants, dans l’ensemble de la population, de 38,5 % et 8,6 %).

150

Pour ce qui est des professions exercées, les résultats des sondages divergent sur plus d’un point. Deux constantes s’en dégagent cependant : la percée écologiste est plus importante chez les employés et les fonctionnaires, elle est par contre quasi-nulle chez les agriculteurs.

151

Trois dernières constatations : les femmes sont plus nombreuses que les hommes dans l’électorat du mouvement Ecolo ; le niveau de revenus est légèrement supérieur à la moyenne (ce qui s’explique par le niveau de scolarisation et l’activité professionnelle exercée) ; il est, enfin, plus citadin que rural.

b - Le personnel politique du mouvement Ecolo

152

Même si aucune étude statistique n’a été réalisée sur les cadres et les militants du mouvement, il semble qu’aucune distinction significative ne doive être établie sur le plan de leur typologie entre eux et l’électorat écologiste. Nous avons compilé de multiples fiches signalétiques de militants faisant acte de candidature, des listings de candidats aux diverses élections, des portraits parus dans la presse. Les éléments suivants peuvent en être dégagés :

  1. Entre, d’une part, les élus et les cadres du mouvement Ecolo et, d’autre part, les militants “de base”, aucune différence marquante n’est à relever. Sans doute le nombre relativement restreint des membres (entre 1.000 et 1.500), ainsi que la rotation systématique dans les mandats, doivent-ils être pris en compte à cet égard. Il convient toutefois de souligner que plus on s’élève dans la hiérarchie du mouvement (membres du Conseil de fédération et du Secrétariat fédéral, responsables de commission, délégués de groupe régional, etc), moins la présence féminine est affirmée. En cela, le mouvement Ecolo ne se démarque guère des autres formations politiques.

  2. Si l’on procède à des classifications en fonction de l’âge, il en ressort que, sur plus de 300 personnes à propos desquelles le renseignement a pu être obtenu, la grande majorité (72 %) se situe dans la tranche 30-40 ans. A cet égard, le mouvement Ecolo apparaît comme un parti de jeunes.

  3. Pour ce qui est du niveau scolaire – et même si les données sont plus fragmentaires à ce propos – la plus grande part des militants actifs a dépassé le niveau de l’enseignement secondaire. Bon nombre d’entre eux sont titulaires d’un diplôme universitaire ou sont sortis d’une école supérieure.

  4. L’examen des activités professionnelles permet d’affiner cette constatation. Incontestablement, certaines professions bénéficient d’une sur-représentation : c’est le cas, plus particulièrement, des enseignants, de ceux qui sont occupés dans les secteurs médical et paramédical, socio-culturel, agricole et paraagricole. Beaucoup sont également des scientifiques (chimistes, physiciens, mathématiciens, etc) travaillant dans les universités et les centres de recherche. D’autres professions sont en revanche sous-représentées et, en particulier, les salariés manuels.

  5. Peu d’informations ont pu être recueillies sur l’expérience politique des militants du mouvement Ecolo. Il apparaît que, pour la plupart, ils ont un passé politique peu chargé, si ce n’est de multiples activités au sein de diverses associations de la mouvance écologique. Les liens que certains d’entre eux ont – ou ont eu – avec divers organismes du monde ouvrier chrétien, ont pu donner à penser que bon nombre de progressistes chrétiens ont cherché dans le mouvement Ecolo une structure d’accueil que d’autres avaient auparavant trouvée dans les partis communautaires. Même si aucune donnée chiffrée n’appuie ce sentiment, il n’est guère contesté à l’intérieur du mouvement. Signalons, à cet égard, une initiative visant à instaurer au sein d’Ecolo, une tendance laïque dénommée C.A.R.E. Centre d’action et de réflexion en Ecologie et destinée à contrebalancer la présence chrétienne. Cette entreprise n’a pratiquement trouvé aucun écho et est restée sans lendemain.

153

Il n’est généralement pas d’usage dans les morphologies que le CRISP consacre aux partis politiques ou aux organisations socio-professionnelles, de s’attarder sur la personnalité de leurs principaux responsables. Dans le cas d’Ecolo, cette démarche ne nous paraît pas inintéressante dans la mesure où l’itinéraire de bon nom de cadres du mouvement se démarque singulièrement de la carrière politique traditionnelle et confirme la spécificité d’Ecolo.

154

La trajectoire de Raymond Yans, premier échevin de la ville de Liège, est sans doute, à cet égard, davantage exceptionnelle qu’exemplaire. Né en 1948 de père flamand (décédé très tôt) et de mère wallonne, il se passionne très tôt pour l’Asie, le bouddhisme et le taoïsme. Après avoir décroché un régendat en langues germaniques, il séjourne quelques temps dans les Alpes françaises, puis en Ecosse près d’une lamaserie thibétaine. Il se rend ensuite au Japon dans un monastère Zen où il étudie les bases de cette philosophie. Il épouse une japonaise avec laquelle il rentre en Europe. A Liège, il participe à la création des Amis de la terre. Il retourne en Asie, il entre au service de l’Ambassade de Belgique à Djakarta, pour s’occuper des “boat peoples”. Rentré à Liège, il devient secrétaire documentaliste d’Ecolo-Liège. En octobre 1982, il est désigné tête de liste du mouvement Ecolo pour les élections communales pour mettre fin à une lutte de place.

155

Tout aussi étonnant est l’itinéraire d’Alphonse Royen, élu sénateur lors du scrutin législatif du 8 novembre 1981. Né en 1938, licencié en philologie classique de l’Université de Liège, il est pendant douze ans, professeur de grec et de latin à l’Institut St Michel de Verviers. Ensuite, pendant trois ans, il séjourne en Afrique comme enseignant dans le cadre de la coopération. Il rentre ensuite en Belgique où il devient d’abord éducateur social puis ouvrier des Eaux et Forêts, à 3/4 temps, pour se consacrer davantage à sa famille (6 enfants adoptés). Il démissionne de sa charge le 1er janvier 1982, pour des motifs familiaux, en accord avec son mouvement. “A la limite, je préférerais qu’on échoue politiquement, plutôt que de renoncer à être nous-mêmes. L’insertion politique doit permettre de mettre sur orbite une nébuleuse verte bien plus large, car notre mouvement doit être autant culturel que politique : il doit servir à éveiller les consciences, à transformer les mentalités”. Alphonse Royen avait toujours prévenu qu’il n’irait pas au terme de son mandat. “Le Sénat peut se passer de moi, pas ma famille

156

Le parcours d’Olivier Deleuze, député élu dans l’arrondissement de Bruxelles est également peu conformiste. Né en 1955 dans un milieu aisé, il décroche son diplôme d’ingénieur agronome à l’U.C.L. Objecteur de conscience (son grand-père était général), il effectue son service à Interenvironnement-Bruxelles dont il deviendra vice-président. Devenu membre des Amis de la terre, il participe à la création du “Réseau libre” qu’il quitte pour s’inscrire au mouvement Ecolo. Il travaille ensuite à l’A.R.A.U. (Atelier de recherche et d’actions urbaines) puis comme cadre spécial temporaire au C.O.T.A. (Collectif d’échanges pour les technologies appropriées dans le Tiers-monde), organisme mis à la disposition des O.N.G.

157

Simone Jortay-Lemaire, élue sénateur dans l’arrondissement de Charleroi-Thuin est née en 1929 dans une famille aisée (père lainier). Epouse d’un chef d’entreprise, conseillère conjugale, critique de théâtre, elle ouvre en 1962 à Verviers, le premier centre social pour immigrés. Peu après, déléguée auprès du juge de la jeunesse, elle organise un centre de guidance pour adolescents et toxicomanes. A 48 ans, elle entreprend et réussit des études de psycho-pédagogie à l’Université de Mons. Ses préoccupations sont principalement orientées vers les problèmes de contraception et d’I.V.G., et de formation permanente.

158

Pour moins spectaculaire qu’elle soit la carrière des autres responsables du mouvement Ecolo témoigne cependant que, dans la grande majorité des cas, peu de choses dans leur milieu ou dans leur formation, les promettait à une vie politique active.

4 - Les modes d’action

159

La spécificité du mouvement Ecolo en la matière est clairement résumée par Georges Dutry : “L’articulation étroite entre intervention institutionnelle et mobilisation sur le terrain constitue un axe de travail essentiel, l’un s’appuyant sur l’autre”. Elle repose largement sur la volonté d’Ecolo de garder sa nature de mouvement, malgré sa structuration en parti politique et sa participation au système institutionnel : “Une logique de mouvement, explique Georges Dutry, privilégie davantage l’approfondissement et les débats d’idées, la mobilisation et la formation de militants, l’action extra-institutionnelle, le travail à moyen terme sur les mentalités. Une logique de parti privilégie davantage les thèmesà la modeet les débats d’actualité, le recrutement de membres-relais del’appareil”, l’action dans le cadre et au rythme des institutions, les interventions pontuelles et tous azimuths. Formulée de manière provocante, la question est de savoir si, et comment, issu de la mouvance des associations écologiques, Ecolo va parvenir à se structurer en une formation politique fondamentalement différente d’une photocopie en réduction des partis politiques traditionnels” [34][34] Georges Dutry, “Après un an d’activités politiques :....

160

On trouve une illustration de cette volonté d’une autre stratégie dans les activités des élus Ecolo et plus particulièrement des parlementaires. D’une part, harcèlement des majorités par des interpellations répétées, dépôt de propositions de lois, de règlements et d’amendements, débats de procédure dans le rôle de “porc-épic” d’assemblée qu’ils s’assignent. D’autre part, des actions “non-institutionnelles” dont le caractère souvent symbolique n’est pas toujours dépourvu d’humour. Rappelons-en quelques-unes à titre d’exemple :

  • Octobre 1981 : croisière verte du “Wallonia” sur la Meuse, en réplique à celle du “Flandria” sur l’Escaut, à laquelle avaient participé, quelques jours plus tôt, des ministres C.V.P., des banquiers et des militaires de haut rang.

  • Décembre 1981 : “Joyeuse entrée” des élus Ecolo au Parlement.

  • Février 1982 : occupation de l’ambassade belge à Paris, en protestation contre la politique nucléaire des gouvernements français et belge.

  • Décembre 1981 : occupation des locaux de la Compagnie intercommunale bruxelloise des eaux et de la station de pompage de Tailfer, menacée par la centrale de Chooz.

  • Avril 1982 : jeûne entamé par les sénateurs Alphonse Royen et Georges Trussart, pour inciter le gouvernement à concrétiser la résolution contre la faim dans le monde, adoptée par le Sénat à leur initiative.

  • Janvier 1983 : distribution de pralines aux usagers du métro bruxellois, “invités à serrer leur ceinture” à l’instar des passagers de la Sabena, dont les tarifs au kilomètre sont inférieurs à ceux de la S.T. I.B.

  • Juin 1984 : proposition du conseiller communal ucclois Alain Thijs de débaptiser l’avenue Defré – où est implantée l’ambassade d’U.R.S.S. – et de lui donner le nom du dissident soviétique Andréï Sakharov.

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La non-violence caractérise toutes ses actions. Olivier Deleuze et François Roelants ont d’ailleurs condamné sévèrement l’attaque à la roquette par des écologistes français de la centrale nucléaire de Creys-Malville. “Il y a une contradiction flagrante entre l’écologie et la violence”, dit François Roelants. “(La violence) est une mauvaise arme”, souligne Olivier Deleuze qui ajoute toutefois : “n’y a-t-il pas aussi violence dans le fait de menacer une population entière qui n’a pas été consultée démocratiquement avec des tonnes de plutonium et de sodium fondu ?” [35][35] Jacques Poncin, “Les Belges : comprendre sans admettre”,...

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Notons que, sur la conception de l’action parlementaire, des nuances apparaissent en dépit d’une référence souvent affirmée aux méthodes du Parti radical italien. Olivier Deleuze : “Nous ne serons pas des parlementaires traditionnels. Les techniques d’agitation parlementaire du Parti radical italien nous plaisent. S’il organisait des cours d’agitation parlementaire, nous nous y inscririons” [36][36] Pierre Schoffers, “Les écologistes annoncent de l’agitation... José Daras : “La tactique des radicaux italiens fait merveille dans leur pays, mais je ne la crois pas exportable chez nous. Notre vie politique est suffisamment bloquée. Je nous imagine mal faire de l’obstruction en déposant des centaines d’amendements. Mieux vaut concentrer nos forces sur les propositions réalistes, pas utopiques du tout de notre programme” [37][37] Bénédicte Vaes, “Ecolo, un brin anar, géographe…”,....

5 - Les “relations extérieures” du mouvement Ecolo

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En dehors des liens privilégiés que le mouvement Ecolo entretient tout naturellement avec les Amis de la terre, les associations de la mouvance écologiste au sens large, les organisations s’occupant de coopération au développement etc. il se devait, en raison de sa nature de formation politique d’entrer en contact avec d’autres partis, belges et étrangers, ainsi qu’avec diverses organisations socio-professionnelles.

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C’est avec son homologue néerlandophone Agalev qu’Ecolo a, semble-t-il, les rapports les plus réguliers et les moins tendus. Généralement, un délégué d’Agalev assiste comme observateur aux réunions hebdomadaires du Secrétariat fédéral d’Ecolo, de même qu’un de ses représentants participe aux réunions du Stuurgroep d’Agalev. A l’occasion, des rencontres sont organisées entre ces deux instances. Un “Conseil général” Ecolo-Agalev a été mis sur pied, en vue d’harmoniser les points de vue. Il se compose de 10 membres de chaque parti, il n’a pas de pouvoir décisionnel et est en veilleuse.

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Les élus nationaux Ecolo constituent avec leurs confrères flamands des groupes parlementaires. Des réunions hebdomadaires ont lieu dans ce cadre. Celui du Sénat est présidé par Georges Trussart et celui de la Chambre par Ludo Dierickx. Enfin, des contacts réunissent régulièrement les écologistes francophones et néerlandophones de Bruxelles et du Brabant.

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Ces relations relativement étroites débouchent fréquemment sur des propositions de loi et des communiqués de presse commun.

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Du côté francophone, c’est avec le parti socialiste que le mouvement Ecolo a noué les contacts les plus suivis. Dès le lendemain des élections législatives du 8 novembre 1981, d’après Ecolo lui-même, des rencontres “régulières et relativement discrètes” ont été organisées, en particulier avec Jean-Maurice Dehousse et Philippe Moureaux [38][38] Cf. Ecolo-Infos, août 1982, n° 10, p. 4.. Lors de l’élection à la présidence du Conseil de la Communauté française, les élus Ecolo ont apporté leur soutien à la candidate du P.S., Irène Pétry. Ce soutien a été justifié par le fait que “le fédéralisme exige un minimum d’autonomie qui est garanti quand des représentants de l’opposition nationale sont placés à la tête des institutions régionales et communautaires. De plus, ajoute Ecolo, le P.S. s’est engagé à favoriser la participation des petits groupes politiques aux travaux en commission” [39][39] Cf. “Les appuis et les alliances d’Ecolo”, La Cité,.... Dans le même esprit, les parlementaires Ecolo ont soutenu, en décembre 1982, la candidature d’André Cools, élu à la présidence du Conseil régional wallon.

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Les écologistes ont toutefois tenu à marquer les limites qu’ils assignent à cette participation aux “majorités présidentielles”. “Le problème d’une majorité progressiste en Wallonie nous interpelle continuellement, explique José Daras en janvier 1982. (…) Nous ne souhaitons pas devenir le fourgon à bagages de l’Union de la Gauche wallone (…). Mais c’est dans certains combats, sur le terrain que la rencontre se fera, et alors, qui sait, peut-être demain une union des progressistes et des écologistes ?” [40][40] José Daras, “Ecologie et progressisme”, Tribune de....

169

En juillet 1982, une vingtaine de responsables d’Ecolo se sont réunis à Butgenbach pour élaborer un document “préparatoire à la spécificité et à la stratégie du mouvement Ecolo”. L’accent est mis dans ce texte sur le fait qu’il ne peut être question “de négociations globales sur la base d’un menu établi par le P.S. Il doit s’agir de discussions à la carte sur la base de propositions que nous amenons (…), discussions que nous ne devons pas craindre de rompre les premiers”. Il est important, précise encore ce document, “d’éviter la récupération de nos initiatives par les socialistes et leur utilisation dans la lutte que ceux-ci mènent contre nous sur le terrain (…). Dans tous nos rapports avec le P.S. et les autres partis de gauche, il doit être absolument clair que nous ne sommes pas et ne devons pas être perçus comme une petite composante environnementaliste d’un potentiel rassemblement des progressistes comme il y a une composante fédéraliste et une composante chrétienne” [41][41] Cf. Ecolo-Infos, août 1982, n° 10..

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Au fil des semaines, les réserves se sont faites de plus en plus nettes. En janvier 1983, la question a été évoquée au sein du Conseil fédéral qui a décidé de ne plus participer systématiquement à des réunions, de récuser les concertations qui portent sur les stratégies et de se borner aux discussions portant sur un ordre du jour précis, comme des propositions de lois ou de décret. Pour Paul Lannoye, le bilan des contacts avec le P.S. est négatif “dans la mesure où il joue double jeu et n’informe ses partenaires qu’en fonction de ses intérêts” [42][42] Cf. Ecolo-Infos, janvier 1983, p. 16..

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Les contacts avec les autres partis se sont réduits à la constitution de “groupes techniques” dans diverses assemblées. Au Conseil de la Communauté française, Ecolo s’est associé avec le F.D.F., le R.W. et le P.C.B. Au Conseil régional wallon, le groupe technique réunit des élus Ecolo, R.W. et communistes. Rejetant l’accusation d’un regroupement idéologique, le mouvement Ecolo a précisé que l’initiative répondait au souci de garantir la défense des minorités au sein des institutions et n’impliquait aucune contrainte de vote.

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Enfin, il faut noter qu’approchés par Gérard Deprez, président du P.S.C, lors de la création d’un groupe de réflexion P.S.C.-F.D.F. en avril 1983, les écologistes ont opposé une fin de non recevoir à cette invitation [43][43] Cf. “Courtisé de toutes parts, Ecolo choisira ses contacts....

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Dans les jours qui ont précédé les élections législatives du 10 novembre 1981 et dans la perspective de la formation d’une majorité progressiste en Wallonie, le front commun syndical lançait une invitation aux partis progressistes de Wallonie à prendre position sur la plate-forme de revendications commune aux deux syndicats. C’était l’“appel de Coronmeuse”, auquel ont répondu le Parti socialiste, le M.O.C. et ensuite le S.E.P., le Rassemblement wallon, le Rassemblement populaire wallon et le Parti communiste. Le mouvement Ecolo y a répondu de manière positive, tout en soulignant que, s’il partageait la plupart des préoccupations exprimées dans le manifeste du front commun syndical, il entendait que ses principales options socio-économiques soient également prises en compte, et notamment l’orientation de la politique industrielle vers le marché intérieur ; la mise en service public du crédit ; le partage du travail disponible et la promotion des choix individuels en matière de temps de travail ; l’indexation forfaitaire des salaires ; et la mise en place du fédéralisme intégral et l’instauration du référendum d’initiative populaire.

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Les discussions ont débouché à la mi-1982 sur la constitution de groupes de travail s’attachant à l’analyse de quatre rapports. Dans les débats sur les réformes institutionnelles, les représentants d’Ecolo étaient Henri Hoffait et Georges Trussart ; au sein du groupe de travail sur la politique industrielle, les délégués écologistes étaient Philippe Defeyt, Christian Pirali et Jean-Marie Verhertbruggen.

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Le Conseil de fédération d’Ecolo assignait à ses représentants une ligne de conduite très stricte : éviter qu’il y ait des sujets tabou et ne pas transiger sur les points essentiels du programme écologiste (en particulier le nucléaire et le partage des emplois et des revenus).

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Les négociations se sont poursuivies pendant plus de six mois et débouchèrent sur des assemblées plénières qui se tinrent, en janvier et février 1983. Ecolo émit rapidement des réserves, ne voulant pas s’enfermer dans la logique classique des programmes de partis. A ses yeux, les textes proposés étaient par trop globaux et péchaient par “l’omniprésence de l’intervention publique et de l’Etat

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En février 1983, le Conseil de fédération décida, par 12 voix pour, 0 contre et 6 abstentions de mettre un terme à la participation à la concertation en cours. “Tout en adhérant totalement à l’objectif qui vise à doter la Wallonie d’institutions démocratiques nouvelles lui donnant les pouvoirs et les moyens de mener sa propre politique, le mouvement Ecolo considère cependant que des divergences fondamentales existent quant aux orientations à donner à cette politique. Ecolo estime en conséquence que la poursuite d’une concertation de ce type est inutile si elle ne repose pas prioritairement sur des initiatives concrètes, visant à traduire dans les faits un certain nombre d’objectifs fondamentaux” [44][44] Ecolo, communiqué de presse, 14 février 1983..

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L’approche des élections sociales, les débats autour des mesures de restructuration de secteurs d’activités comme la sidérurgie ont contribué à la mise en veilleuse du groupe dit de Coronmeuse.

4 - LA DOCTRINE ET LE PROGRAMME POLITIQUE DU MOUVEMENT ECOLO

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D’une manière générale, ceux qui, au sein du mouvement Ecolo, se sont attachés à approfondir et à systématiser la doctrine du mouvement, ne se revendiquent d’aucun des grands courants idéologiques qui marquent, aujourd’hui encore, la vie politique des grands pays industrialisés. Certaines références reviennent pourtant de manière itérative et, parmi les noms les plus cités, relevons ceux de Michel Bosquet (André Gorz), René Dumont, Denis de Rougemont, Ivan Illich et Alain Touraine.

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Quoi qu’il en soit, les axes fondamentaux de la doctrine élaborée au sein du mouvement Ecolo et dans les cercles qui lui sont proches, sont, sur le plan politique et institutionnel, le fédéralisme intégral et, dans le domaine économique et social, la synthèse Economie-Ecologie. La réflexion des écologistes s’est aussi portée sur les problèmes éthiques, les problèmes de santé, les questions de défense et de relations extérieures et les relations avec le Tiers-monde [45][45] L’approche analytique de la doctrine du mouvement Ecolo....

1 - Le fédéralisme intégral

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Pour Ecolo, la crise politique que connaît la Belgique résulte à la fois des institutions dont le pays est doté et des modes d’action politique que pratiquent les partis : “Nos institutions ne sont plus adéquates aux exigences d’une véritable démocratie. Déchirée entre les partisans de la Belgique unitaire et ceux de l’Etat wallon ou de l’Etat flamand, la réforme de l’Etat piétine et, dans tous les cas, ne prend nullement en compte la nécessité d’une réelle décentralisation politique et administrative. Remplacer un centralisme par un autre ne constitue pas une solution. (…) Les institutions sont mal adaptées à la vie des différentes collectivités. De multiples freins empêchent un fonctionnement démocratique harmonieux. Globalement, ces freins consistent dans l’éloignement des citoyens de la chose publique et l’impossibilité pour eux de peser réellement sur les décisions et les choix qui sont pris en leur nom, dans le manque d’autonomie des communes et des régions, et dans l’absence de contrôle effectif des élus” [46][46] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, brochure...

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A cet égard, la responsabilité des partis politiques apparaît fortement engagée, aux yeux des écologistes :

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Les partis politiques sont devenus au fil du temps des bureaucraties figées qui ne fonctionnent plus que pour elles-mêmes. La quasi-totalité de leur énergie est utilisée à leur propre conservation. L’action politique n’occupe plus la place qu’elle devrait légitimement avoir. L’opinion publique ne s’y trompe pas, qui marque de plus en plus son désaveu d’une classe politiquement discréditée”. [46][46] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, brochure...

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La réponse à la crise politique que propose le mouvement Ecolo est contenue dans un concept, le fédéralisme intégral. Déjà présent dans le programme de Démocratie nouvelle (1973) et dans le Manifeste des Amis de la terre (1977), il a constitué l’objet essentiel des débats des assemblées générales d’Ecolo à Marcinelle le 30 avril 1983 et à Namur le 10 septembre de la même année.

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Pour les écologistes, la société est faite d’un ensemble complexe et diversifié de groupes de toute nature et de toute dimension, la plupart préexistant à l’Etat et ayant, en tout état de cause, des droits supérieurs aux siens, et notamment celui à un maximum d’autonomie compatible avec la solidarité de l’ensemble. La société doit s’édifier principalement du bas vers le haut, à partir des communautés de vie quotidienne, grâce à des délégations de pouvoir successives. Aucune autorité supérieure n’a à intervenir dans la sphère d’action d’une autorité inférieure tant que celle-ci reste efficace, et tout abandon de compétence en faveur d’une collectivité englobante est décidée par la collectivité concernée et non l’inverse (principe de subsidiarité).

186

Cette conception du fédéralisme marque nettement, avec d’autres principes, comme la transparence, le contrôle des élus, la consultation, etc, l’organisation institutionnelle préconisée par Ecolo, qui s’édifie à partir de la communauté de base que sont les quartiers et les villages jusqu’au niveau le plus élevé, la fédération des régions d’Europe.

a - Le premier niveau est celui du quartier ou du village

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Le quartier – ou le village – constitue l’écosystème de base du citoyen. C’est l’échelon auquel les relations personnelles s’établissent, les solidarités se nouent et les libertés concrètes s’exercent. C’est dans cette entité, la plus proche du citoyen, que doivent être mis en place, pour les écologistes, les moyens de la participation. D’où la proposition d’élection de conseils de quartier, qui ont un pouvoir de décision et de gestion sur les matières qui concernent directement les habitants du quartier ou du village (aide aux associations locales, écoles maternelles, plans particuliers d’aménagement, certains équipements collectifs, les espaces verts, etc.).

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L’autonomie des quartiers et des villages doit pouvoir s’appuyer sur des moyens financiers qui leur sont propres, que ce soit par perception directe de certains impôts ou grâce à une dotation communale, calculée sur la base d’une clé de répartition objective, de manière à éviter les déséquilibres entre des quartiers et des villages de composition sociologique et de revenus très différents.

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C’est au pouvoir communal, avec l’aide de commissions représentatives (conseils de quartier par exemple) qu’il appartient de dessiner la carte des quartiers et des villages, en se fondant sur des critères géographiques, historiques et socio-économiques.

b - Le deuxième niveau est celui de la commune

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La commune, qui est une fédération de quartiers et de villages, a vu son rôle considérablement réduit et altéré par le centralisme étatique, par le comportement des partis politiques et des notables locaux, ainsi que par la création d’entités souvent trop vastes.

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Dans la doctrine du mouvement Ecolo, la commune est le niveau-pivot des compétences. Le pouvoir dit résiduaire lui appartient : c’est elle qui doit exercer toutes les compétences qui ne sont pas explicitement attribuées à un autre niveau et toutes les formes de tutelle doivent être abolies.

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Reconnaissant que, dans bien des cas, leur gestion s’avère défectueuse, les écologistes proposent diverses mesures à même d’apporter une solution à cette carence :

  • un accroissement du rôle du citoyen, par une information fondée sur la transparence et le libre accès aux documents administratifs, par un dialogue systématique entre le pouvoir et le citoyen, et, surtout, par l’instauration du référendum d’initiative populaire ; contrairement au référendum décidé par le pouvoir, qui dissimule, dans bien des cas, un plébiscite, le référendum d’initiative populaire doit “permettre aux habitants d’orienter la politique communale vers des objectifs qui ne seraient pas pris en considération et de mettre en échec toute décision qui lui serait préjudiciable” [47][47] L’échelon communal n’est évidemment pas le seul où... ;

  • la remise en cause du statut et du fonctionnement des intercommunales qui, souvent, constituent des instruments permettant aux groupes privés de s’emparer de services publics ou à certaines communes de se financer de manière discrète ; sans remettre en cause le principe même de la collaboration entre les communes, les militants écologistes préconisent le retrait des communes des intercommunales mixtes et le transfert de leurs compétences, selon le cas, à des régies communales, à des intercommunales pures démocratisées, voire à des services de la contrée ;

  • l’interdiction du cumul de fonctions ou de mandats politiques : compte tenu de la complexité croissante des dossiers et des matières traitées, de la nécessité de renouveler le personnel politique, de l’incompatibilité entre une fonction exécutive et un mandat au sein de l’assemblée délibérante chargée du contrôle de cet exécutif, compte tenu enfin des objectifs parfois contradictoires poursuivis par certaines assemblées, les écologistes interdisent l’exercice d’un mandat électif dans plus d’une assemblée délibérante de même que celui d’une fonction politique dans plus d’un organe exécutif. Ils recommandent également que les membres d’un organe exécutif ne puissent pas avoir voix délibérative dans une assemblée [48][48] Cf. à ce sujet, la proposition de loi déposée au Sénat....

c - Le troisième niveau est celui de la contrée

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Dans le schéma construit par Ecolo, la contrée – ou fédération de communes – est amenée à se substituer aux provinces, “institutions fort peu démocratiques et bureaucratiques à l’extrême (qui) en outre ne correspondent en rien aux réalités socio-économiques, historiques ou écologiques” [49][49] Ecolo, “Le fédéralisme”, document de travail, avril....

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Selon les écologistes, l’existence de mini-régions (ou “pays”) homogènes sur le plan socio-culturel et dotées d’un ou de plusieurs pôles d’activités économiques, s’affirme davantage chaque jour dans les faits. La contrée est aussi appelée à reprendre bon nombre de compétences exercées jusqu’ici par les intercommunales, en particulier les intercommunales de développement.

195

Le mouvement Ecolo propose, dans cette optique, à titre exemplatif (déterminé par référendum), la division de la Wallonie en 13 contrées : le Hainaut occidental, le Centre-Mons-Borinage, le Brabant wallon, l’Entre-Sambre-et-Meuse, le Namurois, la Région de Dinant, la Famenne et Ardenne-Est, l’Ardenne centrale, la Lorraine-Gaume, le Pays de Liège, la région de Verviers et, enfin, les Cantons de l’Est.

196

Les compétences principales de la contrée seraient ment économique, la valorisation des ressources naturelles eau, forêts, sous-sol), le tourisme, l’aménagement du terri gestion des déchets.

d - Le quatrième niveau est celui de la région

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La région – ou fédération de contrées – se caractérise par une homogénéité historique, géographique, culturelle, sociale et/ou économique, qui confère à la population qui y vit une cohésion autour d’un certain nombre de critères et qui donne à cette population le désir d’être reconnue comme dotée d’une personnalité propre. Aux yeux des écologistes, on peut difficilement contester le statut de région à la Flandre et à la Wallonie, même si l’appartenance d’une commune à l’une ou l’autre région doit être décidée démocratiquement par les populations elles-mêmes.

198

Quant à Bruxelles, la capitale devrait être érigée en région/contrée distincte tout autant de la Flande que de la Wallonie.

199

La région disposerait de la plupart des compétences actuellement du ressort des Régions et Communautés et de celles exercées par l’Etat (et qui ne seraient pas transférées à la fédération européenne) : enseignement supérieur et recherche, santé, lutte contre les nuisances, énergie, transport, crédit, politique étrangère (pour ce qui touche aux compétences régionales), agriculture, etc.

200

Reste le problème de la délimitation des régions (et des contrées). Pour le mouvement Ecolo, la solution aux litiges qu’elle soulève, passe par le libre choix des populations de leur appartenance à une contrée et donc à une région. En outre, un certain nombre de critères objectifs devraient être pris en considération :

  • des critères historiques et géographiques, pour autant que les faits de cette nature aient laissé des traces tangibles dans les mentalités ;

  • des critères culturels dont la manifestation la plus visible est évidemment la langue ;

  • des critères écologiques comme l’existence d’écosystème aussi différents que l’environnement urbain et l’environnement rural.

e - Le cinquième niveau est celui de l’Europe

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L’Europe des Régions – ou Fédération des Régions d’Europe – succède aux Etats-nations et reçoit “toutes les compétences que ces Etats se sont avérés structurellement incapables d’assumer, auxquelles il faut ajouter celles qui touchent aux problèmes dont l’ordre de grandeur est continentale” [50][50] Ecolo, “Le Fédéralisme”, document de travail, avril... : la défense, la monnaie, les grands axes de transport, l’harmonisation de certaines politiques nationales (les grands secteurs économiques, les normes de pollution, etc.).

202

La suppression de l’échelon national pose le problème de l’avenir des Etats. Pour ce qui est de la Belgique, dans l’optique du mouvement Ecolo, on peut concevoir que les Régions (flamande, wallonne et bruxelloise) choisissent de conserver un certain temps, les liens noués entre elles “dans le cadre assoupli de l’ancien Etat-Nation, devenu organe de concertation et de coordination privilégié” [51][51] Ibid. Pour les écologistes, à court terme, c’est-à-dire....

203

Interviewé à ce propos par La Libre Belgique, Paul Lannoye explique : “Nous (le mouvement Ecolo) n’avons aucune affection particulière pour la Belgique. Depuis 1830, il s’est créé un lien entre des régions différentes dans le cadre de la Belgique. Nous ne voulons pas nécessairement casser ce lien, mais il faut constater que les relations sont difficiles (…) le nationalisme flamand domine la situation …” [52][52] “Questions à Paul Lannoye”, La Libre Belgique, 30 avril....

204

Plus récemment, le mouvement Ecolo a proposé la conclusion d’un nouveau pacte des Belges qui implique : une révision de la Constitution, une adaptation de la structure interne des Régions, une répartition équilibrée des moyens de la reconversion économique entre les trois Régions, un statut des communes limitrophes de la frontière linguistique fondé sur le droit des gens et le respect des minorités. A cet égard, les écologistes proposent “quelques pistes pour la protection des minorités dans les communes à facilités, et notamment un exécutif proportionnel dans les communes à minorités importantes, le droit pour chaque communauté de financer des initiatives culturelles dans toutes les régions du pays, ainsi que la possibilité pour les mandataires d’utiliser la langue de leur choix lors des réunions du conseil communal et du collège échevinal” [53][53] “Ecolo face à l’escalade communautaire”, communiqué...

205

Au-delà de la Fédération des Régions d’Europe, la Fédération planétaire devra “assumer les grands problèmes de la biosphère (océans et forêts), la protection des espèces, le droit international et la protection des droits de l’homme, l’aide aux régions en difficultés (famines, catastrophes naturelles, etc)”

2 - La synthèse économie-écologie

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Le constat que dresse le mouvement Ecolo de la crise de la société industrielle peut être résumé de la manière suivante : “La machine économique tourne pour elle-même indépendamment des besoins réels. Cette crise prouve, si besoin en est, que l’on ne peut axer durablement l’économie sur les bases capitalistes et productivistes actuelles qui postulent :

  • une concentration de plus en plus forte des moyens de production (multinationales) ;

  • la destruction des équilibres écologiques, le gaspillage de l’espace, des ressources naturelles, des matières premières, de l’énergie, du travail ;

  • (…) la relégation des impératifs autres qu’économiques, notamment les impératifs culturels, sociaux et humains ;

  • un accroissement permanent des échanges, quelle que soit leur utilité, avec comme conséquence une soumission de plus en plus grande des économies locales à la compétitivité internationale ;

  • la priorité à la satisfaction des besoins solvables, réels ou non, voire artificiellement suscités par la publicité ; les besoins essentiels non solvables sont ignorés, ce qui entraîne l’existence d’un quart-monde au sein de nos sociétés avancées ;

  • l’aggravation accélérée des inégalités entre les continents, les régions, les catégories sociales”[54][54] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, brochure....

207

Comment faire face à cette crise ? Visiblement, les écologistes ne croient guère aux politiques mises en œuvre dans les divers pays industrialisés : “Depuis de nombreuses années, la politique menée par les gouvernements successifs, et cela quelles que soient les coalitions au pouvoir, a contribué à démontrer qu’en aucun cas les mesures considérées commeclassiquesne permettent de sortir de la crise structurelle que nous traversons : ni les techniques de dévaluation, de déflation interne, ni, à l’inverse, les tentatives de relance de la consommation n’ont abouti à des résultats tangibles, au contraire. Quant au souvetage coûteux et provisoire des emplois menacés dans les entreprises en péril, chacun s’accorde, avec le recul, à considérer qu’il ne constituait, tout bien réfléchi, qu’une gigantesque fuite en avant” [55][55] Ecolo, “L’Emploi : la réponse des écologistes”, Centre....

208

C’est une autre logique que le mouvement Ecolo entend développer. Pour lui, “la création d’emplois n’est pas et ne sera pas un but en soi”. Les écologistes remettent donc fondamentalement en cause la démarche du seul développement quantitatif de l’économie et inversent les priorités habituelles : “L’objectif ne peut être de mener unepolitique de l’emploiet de s’interroger subsidiairement sur l’utilité ou la qualité du travail mais bien de considérer le potentiel de travail humain comme une richesse qu’il s’agit de valoriser, non pour augmenter la valeur ajoutée monétarisée (le Produit national brut) mais bien pour accroître la valeur réelle, c’est-à-dire le bien-être général, le Bien-être national net. Dans une telle optique, l’activité humaine destinée soit à produire des biens inutiles ou nocifs, soit à réparer les dommages causés par des activités destructrices ne peut être stimulée. Ce n’est pas une politique de l’emploi qu’il faut bâtir mais bien une politique du travail utile répondant à l’objectif fondamental de croissance du bien-être et juste répartition de ce bien-être” [56][56] Ibid. p. 57..

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Le mouvement définit, dans cette optique, quelques grandes orientations, à court, moyen ou long terme :

a - L’orientation de la politique industrielle vers le marché intérieur

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Les écologistes contestent fortement le principe du développement nécessaire des exportations et des implications qu’il induit (réduction des coûts salariaux notamment). Ainsi que l’explique Paul Lannoye : “La course à l’exportation tous azimuts, tout en sacrifiant de nombreuses entreprises locales, conduit à des choix de production dans des secteurs où la concurrence mondiale est déjà intense. Ses principaux effets sont de rendre plus vulnérable encore notre économie face à la stratégie des multinationales et de multiplier les postes de travail éprouvants et sans signification pour ceux qui les occupent” [57][57] Paul Lannoye, “L’écologie contre le chômage”, Le Soir,.... Le recentrage vers le marché intérieur est donc impératif : “Il est urgent d’orienter les investissements privés et publics vers des secteurs qui, à long terme, peuvent assurer l’approvisionnement intérieur de nos régions, une moindre dépendance vis-à-vis de l’énergie et des matières premières importées, vers des produits de qualité, réparables et de longue durée, et une redistribution géographique de l’emploi” [58][58] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, document....

211

C’est dans le cadre de cette orientation que le mouvement Ecolo a défini sa position à propos des problèmes sidérurgiques : “La sidérurgie n’est pas et ne doit pas être un secteur d’avenir en Wallonie. Quels que soient les choix futurs de politique économique, l’évolution du marché sera défavorable et conduira à d’importantes réductions de capacités. A fortiori si, comme le veulent les écologistes, on favorise des activités industrielles moins énergétivores, moins dépendantes de matières premières extérieures et visant à accroître la longévité des produits. Par ailleurs, il est impérieux, pour rendre la Wallonie économiquement moins fragile, de diminuer le poids de la sidérurgie dans le tissu industriel. Partant de ce constat, il s’agit d’une part d’établir une sidérurgie structurellement rentable et d’autre part de programmer l’inévitable désengagement de manière douce, ce qui implique une reconversion et un accompagnement social simultané” [59][59] Ecolo, “Options du mouvement Ecolo en vue de résoudre....

b - Révision de la politique énergétique

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On connaît l’opposition irréductible des écologistes au programme nucléaire mis en œuvre par les producteurs belges d’électricité. “Leur choix, implicitement basé sur l’idéologie de la croissance, est inacceptable, à la fois pour des raisons écologiques, économiques et sociales : la production de déchets radioactifs qu’il faudrait pouvoir gérer pendant des milliers d’années pose un problème écologique d’une ampleur jusqu’ici inconnue ; la sécurité des installations nucléaires (réacteurs LWR et usines de retraitement) présente des lacunes indiscutables ; la chaîne nucléaire, plutôt que d’assurer notre autonomie, nous rend dépendant d’une technologie centralisatrice que les petits pays comme le nôtre ne peuvent maîtriser complètement, et des Etats producteurs d’uranium ou d’uranium enrichi ; le nucléaire dit pacifique favorise la prolifération des armes nucléaires ; tous les traités internationaux visant à empêcher cette prolifération se sont révélés inefficaces en la matière ; les investissements énormes exigés par le développement d’une filière nucléaire dont l’avenir est limité à 20 ou 30 ans, compromettent la recherche de solutions à long terme ; une société qui accepte la dispersion d’éléments aussi dangereux que le plutonium, s’oblige à recourir à un système super contrôlé incompatible avec l’exercice des libertés démocratiques” [60][60] Ecolo, “Energie, la réponse des écologistes”, juin....

213

C’est un revirement total de la politique menée jusqu’ici que le mouvement Ecolo propose : “A long terme, la seule voie qui soit physiquement, économiquement et politiquement acceptable, est la voie douce ; celle-ci présente trois caractéristiques essentielles : elle utilise l’énergie de manière efficiente (ou rationnelle), elle est basée essentiellement sur les énergies renouvelables et sur une consommation décentralisée (…). Les chiffres montrent que les possibilités de ces énergies (solaire, éolienne, hydraulique, etc) dans les différents pays d’Europe et notamment en Belgique, sont suffisantes pour couvrir tous nos besoins, à condition d’utiliser rationnellement l’énergie et de consentir les efforts financiers et de recherche indispensables pour permettre la mise en œuvre des technologies douces (…). Le problème politique qui se pose actuellement consiste d’une part à préparer cette mutation vers la voie douce et d’autre part à fournir au moindre coût (dans lequel il faut intégrer tous les éléments d’impact sur la société) les quantités d’énergie appropriée aux différents services nécessaires à notre bien-être. Il consiste :

  • à améliorer les rendements dans tous les secteurs, notamment dans la production d’électricité (à cet égard, la production combinée de chaleur et d’électricité doit être favorisée) ;

  • diminuer les besoins là ou cela améliore le bien-être général (notamment par un programme d’isolation systématique des logements) ;

  • à utiliser la forme d’énergie la mieux adaptée à l’usage envisagé, l’électricité ne devant être utilisée que lorsqu’elle est irremplaçable ;

  • à agir dans tous les secteurs de l’organisation sociale pour alléger les coûts énergétiques :

    1. dans les transports, priorité absolue au rail et à la traction électrique ;

    2. politique agricole basée sur le développement de l’agriculture biologique (mesures en faveur de la reconversion) et des circuits courts de consommation ;

    3. normes strictes en faveur d’un urbanisme et d’un aménagement du territoire peu énergivores (la dispersion de l’habitat est à proscrire) ;

    4. dans l’industrie allongement de la durée de vie des produits et recyclage :

    5. plus généralement, décentralisation des activités administratives, commerciales, industrielles et agricoles.

214

Parallèlement, un vigoureux effort d’industrialisation des techniques douces éprouvées (capteurs solaires, éoliennes, petite hydraulique, etc) et de recherche sur l’utilisation optimale des énergies renouvelables doit être entrepris” [61][61] Ibid. p. 47 et suivantes..

215

A court terme, le mouvement Ecolo propose, sur le plan politique, les mesures suivantes :

  1. la mise en place d’un vaste programme d’isolation des logements existants (avec prêts à taux réduits) ; l’adoption de normes d’isolation sévères pour les bâtiments neufs ; la suppression de la TVA sur les matériaux d’isolation et les systèmes de mise en œuvre d’énergies renouvelables ;

  2. l’arrêt du programme nucléaire et le démantèlement progressif des installations nucléaires en fonctionnement ; la suppression des intercommunales mixtes de distribution d’électricité ; l’adoption d’un tarif progressif pour l’électricité domestique, au-delà d’un certain seuil déterminé ; l’adoption d’un système tarifaire pour l’électricité industrielle, favorable à l’autoproduction combinée et reposant sur des contrats d’échange d’électricité entre les entreprises et les intercommunales de distribution ; l’achat par le réseau du surplus d’électricité produit par les petits producteurs ;

  3. la révision du contrat pétrolier ;

  4. la réorientation des crédits de recherche vers les énergies renouvelables.

c - Le partage du travail

216

Pour le mouvement Ecolo, le partage du travail n’est pas seulement une obligation de solidarité devant l’évolution du chômage. Il est également proposé comme une condition fondamentale de l’épanouissement social, culturel et familial. C’est donc de la conjonction d’une contrainte économique et d’un projet d’innovation sociale que résulte la proposition d’un partage des emplois. Concrètement, le partage du travail tel que préconisé par les écologistes implique : “une réduction importante, obligatoire et uniforme du temps de travail, de l’ordre de 15 %, soit 32 heures par semaine ou 1.500 heures par an ; le financement de l’opération de partage du temps de travail par : – une réduction du salaire brut de tous les travailleurs – une participation du budget de l’Etat, financée par les économies réalisées dans les allocations de chômage et un impôt de solidarité sur tous les revenus autres que salariaux – une participation des entreprises principalement par la transformation des gains de productivité en emplois ; l’embauche compensatoire obligatoire avec cependant des modalités plus souple pour les petites entreprises (moins de vingt travailleurs ; la suppression des cumuls” [62][62] Ecolo, “L’Emploi : la réponse des écologistes”, Centre....

217

Au demeurant, pour les écologistes, le partage du travail doit s’accompagner de la promotion des choix individuels en matière de temps de travail : “Le temps de travail ne doit pas seulement être un choix collectif (durée maximale du temps de travail) mais également individuel. Chaque travailleur qui le désire doit pouvoir adapter son temps de travail en fonction des circonstances (congé de paternité et/ou maternité, congé de maladie des enfants), recyclage professionnel, congé sabbatique, ou tout simplement parce qu’il désire se réaliser dans d’autres domaines que strictement professionnel (travail à temps réduit, travail occasionnel, etc). Des négociations sociales, par secteur et/ ou par entreprise définiront les modalités des réductions individuelles et volontaires du temps de travail ainsi que de l’embauche compensatoire” [63][63] Ecolo, “L’Emploi : la réponse des écologistes”, Centre...

218

Deux mesures concrètes sont proposées dans cette optique :

  1. l’adaptation de la législation sociale de manière à permettre les choix individuels en matière de temps de travail, notamment en mettant les travailleurs à temps partiel sur le même pied que les autres travailleurs pour l’indemnisation du chômage ;

  2. l’octroi, pour les périodes de congés sans solde ou sabbatiques, d’un revenu de remplacement calculé sur base d’une législation semblable à celle du chômage.

3 - Les questions de défense et de relations extérieures

219

L’hostilité des écologistes à l’armement nucléaire a largement contribué à l’audience de leur mouvement. Elle n’épuise cependant ni la doctrine ni les propositions d’Ecolo en matière de sécurité et de politique étrangère.

a - La défense

220

Pas plus que l’arsenal atomique jugé aussi dangereux qu’inefficace, les armements dits conventionnels ne paraissent justifiés pour les écologistes : “Pour les populations humaines qu’elles prétendent protéger, les défenses militaires se révèlent de plus en plus inefficaces, que ce soit en cas de conflits externes (invasions) ou en cas de conflits internes. Pour ce qui est des conflits externes, la politique de disuasion, loin de conduire au désarmement, aboutit au contraire à précipiter le monde dans une course aux armements dévoreuse de ressources humaines et matérielles, meurtrière dans le Tiers-Monde et finalement insécurisante pour tous.

221

D’autre part, la course aux armements permet actuellement d’envisager la destruction totale, non seulement de l’adversaire – qu’il soit civil ou militaire – mais encore la disparition de toute vie sur terre. La participation à la préparation d’un telsuicidede l’humanité doit être, sans hésitation, qualifiée d’attitude irresponsable. Le militarisme apparaît aujourd’hui comme une des pollutions les plus graves à laquelle les écologistes ne sauraient rester indifférents” [64][64] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre....

222

A partir de là, le mouvement Ecolo formule des propositions dans plusieurs directions :

  1. La Belgique doit refuser toute implantation d’euromissiles sur son territoire ainsi que le déploiement de la bombe à neutrons ;

  2. Il faut s’engager dans la voie de la dénucléarisation progressive de l’Europe et d’un véritable dialogue avec les pays de l’Est et l’U.R.S.S. ;

  3. En ce qui concerne les armements classiques, des procédures de désarmement et d’interdiction du commerce des armes doivent également être mises en place, notamment au travers d’une “Conférence permanente” sur le désarmement des forces conventionnelles en Europe” ;

  4. La Belgique doit mettre à l’étude un plan de reconversion en cinq ans des industries d’armement vers des productions socialement utiles avec maintien de l’emploi ;

  5. Le statut des objecteurs de conscience doit être revu, dans le sens d’une égalisation des temps de service civil et militaire.

223

Les écologistes ne nient pas pour autant l’existence de certains impératifs de défense. Mais, pour y répondre, ils préconisent un “processus de transarmement”, c’est-à-dire le passage progressif d’une défense militaire à une défense civile et populaire non-violente (D.C.P.N.V.). Cette DCPNV, dont les moyens sont encore limités (grève, boycott objection, désobéissance civile, non-collaboration, etc) est, selon Ecolo, l’outil le plus efficace pour la défense des structures sociales reconnues comme valables et le seul moyen capable de résoudre véritablement les conflits.

224

Les écologistes sont également conscients du fait que cette idée est encore loin d’être accréditée et qu’un vaste travail d’information et de sensibilisation soit être entrepris. Ils prônent à cet effet la création d’un “Institut européen de recherche sur la paix et sur la défense civile” ainsi que d’un “Bureau permanent de gestion non violente des conflits”, dont l’action devrait fournir des exemples de résolution des différends par le recours aux méthodes de l’action non-violente [65][65] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 8....

225

Ce “processus de transarmement” remet en cause l’appartenance de la Belgique à l’OTAN ou, plus précisément, à l’organisation militaire de l’OTAN, car le Traité de l’Atlantique Nord reste valable dans la mesure où il comporte une alliance défensive non nécessairement militaire : “La mise en place d’une défense civile et populaire non-violente ne peut s’imaginer que si la Belgique acquiert une autonomie réelle par rapport aux alliances militaires des blocs. Il serait en effet inconcevable que, dans l’état actuel de la question, les dirigeants de l’OTAN puissent accepter qu’un pays membre s’oriente vers d’autres formes de défense que purement militaire. Pourtant le Traité de l’Atlantique Nord ne fait qu’obliger les pays signataires à une solidarité en matière de défense. Dans la pratique et à cause de l’intoxication dont nous sommes victimes, seule la défense militaire est envisagée. La Belgique peut très bien respecter ses engagements tout en s’orientant vers la défense civile non-violente et le transarmement” [66][66] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre....

226

Le choix du transarmement suppose également que chaque pays européen, parallèlement à ce désengagement, réduise progressivement son budget militaire dont les dépenses sont les moins créatrices d’emploi, l’objectif final restant la rupture de la logique des blocs et le désarmement total, “même passant par des actes de désarmement unilatéral”.

b - L’Europe

227

Les élections européennes du 17 juin 1984 ont été l’occasion, pour le mouvement Ecolo, de préciser ses conceptions à propos de l’Europe : celles-ci ont été consignées dans une brochure intitulée “L’Europe des écologistes”, et qui contient en annexe une déclaration commune des Verts européens.

228

Cette plaquette-programme regroupe un certain nombre de réflexions et de propositions qui, dans bien des cas, constituent la transposition à l’échelon européen, d’une série de préoccupations et de solutions déjà formulées par Ecolo et qui ne peuvent être mises en œuvre qu’à un niveau “supra-régional”. Dans le schéma institutionnel élaboré par les écologistes, le niveau européen est en effet le cinquième niveau de décision, appelé à exercer certaines des compétences que les “Etats-Nations se sont avérés incapables d’assumer et celles qui touchent aux problèmes dont l’ordre de grandeur est continentale” [67][67] Voir supra p. 19..

229

Pour Ecolo, si l’idée d’Europe est proche, en ce sens que, depuis des siècles, les échanges culturels, économiques et sociaux, sont intenses entre les pays qui la composent, cette idée reste en même temps lointaine, dans la mesure où les Européens n’ont pas de prise sur les structures mises en place et les politiques mises en œuvre : “Alors que le fait régional s’affirme un peu partout sur notre continent, la Communauté européenne ne reconnaît que les Etats. Ceci va à l’encontre du fédéralisme intégral réclamé par Ecolo : à partir des quartiers, des villages, des contrées et des régions, il s’agit de construire, sur base du consentement volontaire des différentes entités, l’Europe des Régions ; l’Europe, enfin sans frontières, premier pas vers la fédération mondiale. (…) Il faut réduire progressivement l’importance des Etats-Nations, au profit d’une Europe des Régions. Les limites de ces Régions seront fixées démocratiquement, par la volonté des électeurs, à la différence de la plupart des territoires appelés aujourd’huirégionsdans la Communauté européenne. A ce stade, la représentation des citoyens ne se fera plus au niveau national mais régional (…) les compétences de la Communauté seront revues et le cas échéant étendues par un Traité de fédération européenne adopté par une conférence interrégionale” [68][68] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 9.

230

Dans l’immédiat, le mouvement Ecolo propose plus d’une centaine d’orientations et de mesures concrètes [69][69] Celles-ci sont articulées autour de 11 rubriques :.... Parmi les principales et/ ou les plus originales relevons :

  1. le dédoublement du Parlement européen actuel, en une Assemblée et un Sénat des régions, dont les membres seraient élus directement par les habitants des régions ; l’accord des parlementaires – qui auraient aussi le droit d’initiative – serait indispensable pour qu’une décision puisse entrer en vigueur au niveau européen ;

  2. l’instauration du référendum d’initiative populaire au niveau européen, sur les questions intéressant l’ensemble des populations européennes (l’implantation des missiles par exemple) ; de cette manière, la participation à la vie politique européenne ne se limitera plus à élire tous les cinq ans les membres du Parlement européen ;

  3. l’élargissement de la Communauté au continent tout entier ;

  4. la révision du Traité de Rome et notamment de son article 2, dans lequel les écologistes proposent de substituer à “l’expansion continue, l’éco-développement, c’est-à-dire un développement harmonieux, durable, respectueux des équilibres naturels et soucieux de l’épanouissement de chacun” [70][70] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 1... ;

  5. le rapprochement des systèmes fiscaux, notamment par l’instauration d’un précompte mobilier uniforme sur tout le territoire européen ;

  6. la création d’une monnaie commune (l’ECU) qui, tout en laissant aux Etats et aux Régions, l’autonomie la plus large de leurs choix économiques et sociaux, devrait permettre de réduire la dépendance de l’économie européenne vis-à-vis des Etats-Unis :

  7. l’élaboration d’un schéma européen d’aménagement du territoire qui incluerait l’inventaire, notamment, des problèmes transfrontaliers, des zones naturelles et paysagères, du patrimoine architectural à protéger ;

  8. l’abolition du système des quotas dans le FEDER (Fonds européen de développement régional), qui devrait intervenir de manière plus souple, en fonction des besoins réels et assurer également le développement de micro-projets ; il convient à cet effet d’ouvrier le FEDER aux représentants des Régions.

c - Le Tiers-monde

231

Le tableau que font les écologistes de l’état du Tiers-monde et des relations Nord-Sud est particulièrement pessimiste : “Un Tiers-Monde misérable, affamé et souffrant, représentant les deux-tiers de l’humanité, au Sud ; cinq blocs hétérogènes, au Nord, caractérisés par la richesse et le gaspillage, c’est là une situation de déséquilibre vis-à-vis de laquelle les écologistes entendent réagir” [71][71] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre.... Pour Ecolo, c’est surtout au niveau des échanges qu’une action doit être entreprise : “à l’heure actuelle, les échanges avec le Tiers-Monde servent surtout les intérêts des pays occidentaux ; ils leur donnent l’occasion de s’approvisionner en matières premières et d’écouler des produits manufacturés et des biens d’équipement” [72][72] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 8....

232

L’action proposée par Ecolo s’articule sur le plan politique autour de trois axes :

1° La réorientation de la coopération au développement

233

Pour les écologistes, la coopération au développement devrait exclusivement comprendre toutes les actions désintéressées en faveur des pays pauvres et en voie de développement visant à les aider dans leurs efforts vers un mieux être.

234

Il faut dès lors refuser toute forme de coopération qui serait centrée exclusivement sur une croissance exprimée en produit national brut qui ne signifie pas toujours ou pas du tout une amélioration du bien-être du plus grand nombre, et indique même souvent un net appauvrissement du patrimoine national et de la population, même si quelques privilégiés en bénéficient.

235

Les actes commerciaux, les prêts financiers, les assistances militaires, les protocoles politiques, voire même les subsides accordés aux associations d’obédience religieuse ou philosophique ne devraient pas ressortir au budget de la coopération au développement mais bien aux départements concernés, le commerce extérieur, les affaires étrangères, la défense, la culture, etc.

236

D’une manière générale, la coopération au développement – dont le budget devrait atteindre 1 % du produit national brut, conformément à l’engagement pris devant l’Assemblée générale des Nations-Unies – doit s’exercer exclusivement dans les domaines sociaux et éducatifs, agricoles et médico-sociaux et être orientée en priorité vers les campagnes où vivent 70 % de la population du Tiers-monde afin que “supportées judicieusement dans leurs efforts”, celles-ci soient en mesure d’assurer au plus vite leur autosuffisance alimentaire et sociale et leurs besoins fondamentaux [73][73] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre....

2° La révision des mécanismes des conventions de Lomé

237

En dépit de certains aspects positifs, ceux-ci ont abouti à renforcer la dépendance des pays en développement, notamment sur le plan agricole. Trois propositions sont formulées à ce niveau :

  • Il faut indexer le Stabex et le Sysmin pour éviter que les recettes tirées des exportations ne perdent une partie de leur valeur en terme de pouvoir d’achat.

  • Le projet est formulé de créer un fonds de reconversion et d’autonomie, pour diversifier les productions indigènes (en ayant comme priorité l’autosuffisance alimentaire) et pour diminuer les importations européennes de produits alimentaires superflus (de manière à consacrer les terres à l’alimentation locale et non aux exportations).

  • Des accords doivent être passés avec les gouvernements locaux en vue de s’assurer que la paysannerie locale profite effectivement des prix garantis et des distributions de produits [74][74] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 8....

3° La protection des droits de 1’homme et des peuples

238

Le mouvement Ecolo qualifie de “souvent hypocrite” l’attitude des pays occidentaux : ils passent sous silence les atteintes aux droits de l’homme, mais ne se privent pas d’intervenir dans la politique social et économique des pays en voie de développement en imposant des conditions à l’octroi de ses aides. Les écologistes recommandent dès lors l’abandon du principe diplomatique de non ingérence, de manière à mener une politique active de promotion et de défense des droits de l’homme et des peuples. Dans cette optique, les relations commerciales et les aides économiques négociées entre les pays industrialisés devraient être subordonnées aux garanties que ces derniers donneront en matière de respect des droits de l’Homme [75][75] Ibid., p. 84..

4 - Les problèmes de société

239

De nature très diverse, les matières évoquées dans cette rubrique constituent, aux yeux des écologistes, des enjeux de première importance car ils conditionnent eux aussi le type de développement que connaîtront demain les sociétés occidentales.

a - L’agriculture et l’alimentation

240

Pour Ecolo, l’industrialisation accélérée de l’agriculture n’a eu guère que des conséquences néfastes : dégradation de la qualité des produits, pollution du sol et des eaux, destruction des écosystèmes suite à la monoculture et à l’utilisation massive des engrais chimiques, surconsommation d’énergie pour les transformations et la conservation, endettement des agriculteurs, exploitation intensive des ressources du Tiers-monde, etc. Il s’agit donc de renverser la tendance et d’assurer au mieux l’autosuffisance des Régions, d’éviter les échanges inutiles, de restaurer l’équilibre des écosystèmes.

241

A cet effet, le mouvement Ecolo préconise les orientations suivantes en matière de politique agricole, que ce soit au niveau des Régions, des Etats ou de l’Europe :

1° L’encouragement à la reconversion à. l’agriculture biologique

242

A l’inverse de l’agriculture industrielle, l’agriculture biologique est respectueuse des sols, peu énergétivore, moins coûteuse, créatrice d’emploi. Elle garantit des produits sains et de qualité et sa pratique est parfaitement compatible avec l’exploitation d’entreprises agricoles de petite et moyenne dimension et les circuits courts de consommation. Il s’indique donc d’accorder des aides aux agriculteurs en proportion des surfaces et du cheptel élevé selon les méthodes de l’agriculture biologique, telles que définies dans un cahier des charges élaboré par une “commission de spécialistes”. Des conseillers en agriculture et en horticulture biologique seraient en outre mis à la disposition des candidats à la reconversion. D’autre part, une appellation contrôlée légale “biologique” serait instaurée.

2° Le contrôle de l’élevage industriel

243

Toutes les conditions auxquelles est subordonné l’élevage industriel (concentration d’animaux sur des espaces réduits, utilisation d’antibiotiques, importation coûteuse d’aliments pour bétail, sujétion des exploitants aux grands complexes agro-alimentaires), ont comme résultante la livraison aux consommateurs d’aliments frelatés et insipides contenant une part non négligeable de résidus dangereux (antibiotiques, hormones, etc).

244

Pour y remédier, le mouvement Ecolo propose, entre autres mesures :

  • l’instauration de nouvelles normes d’espace vital pour chaque animal au sein des bâtiments d’élevage industriel ;

  • l’interdiction d’utilisation d’antibiotiques à titre préventif dans les aliments pour bestiaux, ainsi que l’interdiction de la production et de l’utilisation d’hormones naturelles et de synthèse ;

  • l’incitation financière à la production d’aliments de qualité : les agriculteurs respectant certaines normes bénéficieraient de prix de soutien, la différence étant perçue par le biais d’une taxe sur les élevages industriels.

3° L’aide aux exploitations agricoles de petite dimension

245

Le mouvement de concentration qui se produit en agriculture depuis plus de vingt-cinq ans, risque de conduire à court terme à une inadaptation totale de la structure agricole aux nécessités du moment qui sont : l’amélioration de la qualité biologique des produits, le redressement de la balance commerciale alimentaire, la valorisation régionale des produits indigènes, le raccourcissement des circuits de production et de distribution.

b - L’aménagement du territoire et l’environnement

246

Selon l’analyse des écologistes, “l’espace est devenu un enjeu marchand : en milieu urbain comme dans les zones rurales, l’affectation du territoire est laissée aux caprices de la spéculation foncière et de la promotion immobilière. A tous les niveaux de la décision politique, la politique de l’aménagement du territoire présente des failles énormes, et se résume bien souvent à un étrange cocktail de vœux pieux et de compromissions” [76][76] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre...

247

Le mouvement Ecolo formule un certain nombre de recommandations qui devraient selon lui permettre aux citoyens de se réapproprier l’espace et d’en planifier l’aménagement :

1° Les principes généraux de l’aménagement du territoire

248

Dans la doctrine élaborée par les écologistes, l’enjeu de l’aménagement du territoire est le développement équilibré des régions et des villes, la valorisation des ressources naturelles et humaines, le respect des écosystèmes. La politique d’aménagement du territoire doit dès lors prendre appui sur une socialisation des richesses et des patrimoines, dans le but d’assurer une redistribution équitable, entre les personnes et entre les groupes, des fruits de l’effort collectif. Tout projet de valorisation devra prendre en compte les effets sur l’évolution de l’écosystème : à cet égard, la réalisation d’études d’impact, globales et significatives, constituerait, selon Ecolo, un premier pas dans la bonne direction. En outre, une information et une consultation officielles de la population devraient être organisées à l’occasion de tout projet.

2° La politique des travaux publics

249

Les écologistes considèrent que le bilan des grands travaux routiers et des grandes infrastructures réalisés ces dernières années est globalement négatif : “Les autoroutes pléthoriques et surdimensionnées stérilisent des milliers d’hectares de terres agricoles, fragmentent le tissu rural, promeuvent l’usage exclusif de la voiture individuelle et sont sources de nuisances en tous genres. (…) Les grandes infrastructures centralisées, portuaires par exemple, sont également écologiquement indéfendables (…). Le pays est déjà suréquipé en infrastructures routières et portuaires, il s’agit d’en rester là” [77][77] Ibid., p. 56.. Dans l’immédiat, le mouvement Ecolo demande le transfert partiel du budget du ministère des Travaux publics à celui des Communications et la régionalisation du département des Travaux publics.

3° La politique de l’eau et des cours d’eau

250

Aux yeux des écologistes, le morcellement du pouvoir en matière de gestion des ressources aquatiques est un facteur d’incohérence et de laxisme : celle-ci devrait être confiée à un seul organe administratif par bassin fluvial. Dans le cas de la Belgique, les agences de bassin qui auraient à la fois une compétence préventive et répressive (elles pourraient par exemple imposer aux industries de puiser l’eau en aval et de la rejeter en amont) seraient européennes [78][78] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 3.... Dans le même ordre d’idées, le mouvement Ecolo recommande l’arrêt des travaux de rectification, de curage à fond vif et de reprofilage des rivières ainsi que celui du bétonnage inconsidéré des berges des rivières et des fleuves. D’autres mesures sont encore préconisées comme l’interdiction de l’immersion des déchets en mer, la limitation de la pollution “thermique”, la réduction de l’exploitation des fonds marins, etc.

4° La politique de la forêt

251

Sur un plan économique, les conclusions que le mouvement Ecolo tire de son analyse sont les suivantes : la forêt wallonne couvre 80 % de la superficie boisée du pays et pourtant, seuls 27 % des emplois du secteur du bois sont en région wallonne ; telle un pays du Tiers-monde, largement exportatrice de bois brut, la Wallonie perd, au profit de la Flandre, la majeure partie du bénéfice qui pourrait résulter de sa transformation. Sur le plan écologique, Ecolo souhaite que soit enrayé l’“enrésinement” massif des forêts privées et domaniales, qui a de profondes conséquences néfastes : acidification des eaux de surface, appauvrissement de la qualité des sols, la disparition progressive de la faune et de la flore des sous-bois, la diminution des réserves hydriques du sous-sol, etc. Il recommande en conséquence le découragement systématique de l’“enrésinement” et la déclaration’“zones feuillues” d’une très large frange du patrimoine forestier.

5° La politique du tourisme vert

252

Les écologistes dénoncent une nouvelle forme de l’extension urbanistique : l’implantation anarchique des campings, villages de vacances, parcs résidentiels et chalets de week-end. Ils lui dénient le caractère de tourisme de masse et proposent de lui substituer un “tournisme réellement social, axé sur un habitat groupé, intégré aux villages, où la densité d’occupation de chaque unité urbanistique serait portée au maximum (pas de dispersion de l’habitat)” ainsi que le développement de formules adaptées au milieu rural, telles que le camping à la ferme, les chambres d’hôtes, les gîtes ruraux, etc [79][79] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre....

6° La lutte contre les nuisances

253

S’agissant d’une politique de gestion rationnelle de l’air, le mouvement Ecolo considère que les mesures les plus urgentes doivent être prises au niveau européen. C’est à cet échelon qu’il convient, au plus tôt : de définir les normes communes de qualité atmosphérique ; de fixer les normes d’émission pour les grandes installations industrielles ; d’entreprendre la lutte contre les pluies acides (notamment en imposant une limitation de la teneur en souffre du fuel-oil et du charbon utilisé) ; d’interdire le plomb dans l’essence et de promouvoir les automobiles “propres”, parallèlement à une action favorisant au maximum les transports publics [80][80] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 3.

c - Les technologies nouvelles

254

A leur égard, les écologistes entendent adopter “une attitude sereine et critique” : les enjeux sociaux et les contradictions qu’elles comportent empêchent tout manichéisme. A leurs yeux, l’innovation n’est pas une fin en soi. Elle ne se justifie qu’en fonction des résultats positifs qu’elle peut induire sur l’environnement, sur le mode de vie et sur le travail des êtres humains. C’est sur l’informatique (et ses prolongements) et les biotechnologies qu’Ecolo a concentré sa réflexion, avec la conviction que le niveau européen est celui auquel il convient d’aborder les problèmes posés.

255

En ce qui concerne les biotechnologies, sans négliger les dangers matériels et moraux que peuvent impliquer les manipulations génétiques des espèces vivantes, les écologistes se disent intéressés par certaines orientations possibles et notamment “celles qui permettent par exemple, le développement des sources d’énergies alternatives au départ de la biomasse, la production de bactéries spécifiques pour la dépollution des cours d’eau et l’élimination des déchets industriels, la conservation d’espèces végétales utiles, la fabrication de substituts aux engrais azotés, la valorisation de déchets agricoles pour la production de protéines alimentaires, ou encore une meilleure gestion du patrimoine forestier, notamment dans le Tiers-Monde” [81][81] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 7....

256

Pour le mouvement Ecolo, la recherche-développement en la matière doit s’intégrer dans des options politiques précises : “la refonte des structures agricoles, le contrôle des pollutions industrielles, l’établissement de rapports d’égalité entre pays riches et pays pauvres, la définition des objectifs d’une politique de santé” [82][82] Ibid. p. 72.. Diverses suggestions ont été formulées dans cette optique, et notamment : – la création d’un Bureau permanent d’évaluation technologique qui aurait entre autres tâches, celle d’évaluer tous les effets potentiels d’une nouvelle technologie sur l’homme, la société, le milieu ; – la signature d’une charte européenne par laquelle les Etats renonceraient à toute utilisation des nouvelles biotechnologies impliquant une menace pour la vie de l’homme et/ou les équilibres écologiques ; – l’établissement de normes réglementant les manipulations génétiques ; un réseau européen de banques de données concernant les biotechnologies ; l’octroi d’aides encourageant les recherches et innovations technologiques permettant un accroissement de l’autonomie locale et régionale en matière d’agriculture et d’énergie.

257

Pour ce qui est de l’informatique et des techniques connexes, “devenues l’objet d’enjeux économiques et stratégiques énormes”, les écologistes y décèlent des risques considérables : “concentration et centralisation accrue des pouvoirs, renforcement des contrôles, déshumanisation et parcellisation du travail, déplacement des rapports de force entre public et privé.” Une orientation radicalement différente est donc souhaitable. Le développement récent de la micro-informatique et de la télématique devrait la permettre : “Bans les années qui viennent, (ce développement) devrait permettre de décentraliser l’information et la décision, de la soustraire complètement aux contrôles politiques et autres, de développer les communications entre les individus, les groupes, les associations d’un bout à l’autre du monde, d’assurer une diffusion rapide et illimitée de toutes les informations utiles, etc. C’est un autre type de société, d’information et de pouvoir qui se dessine, à condition d’en faire le choix” [83][83] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 7....

258

Parmi les principales mesures proposées par le mouvement Ecolo dans ce domaine, relevons :

  • l’octroi d’incitants économiques aux petites unités de recherche, particulièrement en matière de logiciels ;

  • la mise en place de réseaux télématiques largement décentralisés, qui pourraient contribuer à la mise en œuvre des référendums et à l’exercice d’un réel contrôle des citoyens sur les institutions publiques ;

  • la transparence des systèmes informatiques internes dans l’entreprise, condition essentielle de la démocratie économique.

d - Les transports en commun

259

Le sujet occupe une place privilégiée tant dans la doctrine et les propositions politiques du mouvement Ecolo que dans son action quotidienne. Il s’en explique : “Les différentes formes de centralisation (politique, administrative, économique, culturelle, scolaire) et la logique productiviste qui impose aux marchandises des trajets extrêmements longs à tous les niveaux de production, ont fait que notre société est devenue particulièrement tributaire du transport. Cette activité, qui devrait normalement être liée à l’impossibilité réelle de produire un bien ou de prester un service sur place, est devenue un secteur économique à part entière, considéré isolément. Bien plus, les moyens de transports actuellement privilégiés sont les plus gaspilleurs d’énergie, d’espace et de moyens financiers. Non seulement le primat accordé à la voiture individuelle entraîne des aberrations écologiques mais en outre il contribue à accroître les coûts sociaux imputables à son usage” [84][84] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre....

260

Dans ce domaine également, c’est un revirement total de la politique menée jusqu’ici que réclament les écologistes. Un revirement par ailleurs démocratique puisque “la raison d’être du service public de transports en commun est d’offrir à tous les habitants qui doivent ou veulent y recourir, des possibilités normales de déplacement, sans pénalisation par rapport à ceux qui disposent d’autres moyens de déplacements individuels, coûteux et plus polluants” [85][85] Louise Gross, Michel Horenbeek, Jean-Michel Mary, Jean-François....

261

Deux objectifs sont définis : le premier à long et moyen terme, “la réduction globale du nombre de déplacements obligés (…) qui implique un réaménagement du territoire et du temps de travail, ainsi que de l’implantation des activités économiques” ; l’autre est à plus court terme : “l’objectif à court terme d’Ecolo est que les transports en commun assurent la majorité des déplacements quotidiens de l’ensemble de la population, en complémentarité avec le vélo et la marche à pied. Il faut permettre à ceux qui le désirent de faire l’énorme économie de leur auto (…)” [86][86] Olivier Bribosia, “Energie et transports : les vraies....

262

Les propositions suivantes s’inscrivent dans cette philosophie :

  1. L’électrification des principales voies ferrées dans un délai de cinq ans : le type de transport ferroviaire le plus économe en énergie est la traction électrique. L’ensemble de la consommation imputable aux transports en commun électriques ne représente que deux % de la consommation d’électricité. Cette part peut donc être augmentée sans problème, puisque la traction constitue un usage spécifique de l’électricité. Ce type de transport est également le moins polluant ;

  2. La promotion du transport ferroviaire par la réouverture des lignes désaffectées, par l’annulation du plan de restructuration de la S.N.C.B., par la réduction des tarifs des transports en commun, ainsi que par le transfert d’une part importante du budget des Travaux publics à celui des Communications ;

  3. Le soutien à l’utilisation du vélo par la suppression des taxes, la mise en œuvre d’un programme d’équipement en pistes cyclables et l’aménagement de couloirs réservés dans les centres urbains ;

  4. La limitation de l’utilisation de la voiture aux seuls besoins spécifiques ; ceux-ci ne justifient d’ailleurs pas forcément la possession et l’entretien d’une voiture individuelle : des mesures telles que l’usage plus fréquent du taxi, la location de voiture, l’utilisation à plusieurs de véhicules privés, “sont laissées à l’imagination des utilisateurs.

e - La santé

263

Le stress quotidien, les multiples agressions de la vie urbain les cadences de travail, les pollutions, autant de causes de déséquilibre physique et psychique, autant de causes de maladies et d’insatisfactions, elles-mêmes génératrices de troubles que, très souvent, la surconsommation de médicaments aggrave plutôt que tes fait disparaître. Une vraie politique de santé ne consiste pas à multiplier les infrastructures hospitalières de grande taille et les services médicaux en tout genre, mais surtout à empêcher la maladie et s’y attaquer avec des moyens correctement dimensionnés” [87][87] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre....

264

Pour le mouvement Ecolo, le système médical actuel qu’il soit public ou privé est fondamentalement inadapté : “La médecine officielle est marquée du sceau de la rentabilité qui inspire toute notre société. Il s’agit avant tout de réparer les dégâts, sans mettre en cause le mode de vie, de remettre en état lamachinehumaine sans chercher à comprendre – et à éviter – ce qui la détraque. Donner priorité au préventif plutôt qu’au curatif conduirait inévitablement à dénoncer notre système productiviste”. Les objectifs préconisés par les écologistes traduisent, dans le domaine de la santé également une volonté d’innovation : “sortir la médecine et la pharmacie du circuit commercial assurer une sécurité sociale plus proche du citoyen et plus responsabilisante, donner la priorité à la prévention dans son sens le plus large, légaliser les médecines douces et leur enseignement, offrir à chacun une éducation sanitaire complète et objective, promouvoir l’autonomie des patients et l’information scientifique, non commerciale, des professionnels” [88][88] Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 5...

265

Dans ce contexte, le mouvement Ecolo ne pouvait que remettre en cause l’Ordre des médecins. Il l’a fait dans un communiqué de presse daté du 1er septembre 1983 : “Depuis plus de dix ans, la question des objectifs et du mode de fonctionnement de l’Ordre des médecins est posée de façon publique. Le mouvement Ecolo considère l’Ordre des médecins comme une institution dont la structure même favorise la défense des intérêts corporatistes des médecins, au mépris, si besoin en est de la promotion d’une politique de soins de santé de qualité (…). L’Ordre des médecins veut perpétuer l’illusion que le corps médical est l’unique détenteur de l’ensemble des conditions de santé. Ainsi, l’Ordre occulte et réprime l’expérimentation de nouveaux types d’organisations médicales qui accordent à l’individu une plus grande responsabilité à l’égard de sa propre santé : maisons médicales, centres de santé intégrés, médecine de groupe, etc (…). Ecolo soutient ceux qui, praticiens ou non de l’art de guérir, luttent pour une réforme démocratique des fonctions aujourd’hui assurées par l’Ordre” [89][89] “Ecolo attaque l’Ordre des médecins”, La Libre Belgique,....

266

D’autre part, le mouvement Ecolo n’a pas réussi à adopter une attitude unanime en matière d’interruption volontaire de grossesse et chacun des membres a gardé le droit de défendre à titre personnel ses propres conceptions. C’est ainsi que, pendant qu’une minorité de membres optait pour une légalisation sous conditions de l’avortement, la majorité des militants se prononçaient pour une dépénalisation d’urgence et sans condition. Dans le communiqué qui faisait connaître cette position, le mouvement Ecolo a en outre demandé que “la loi reconnaisse l’avortement comme un acte médical et laisse au couple la liberté et la responsabilité et aux femmes toute leur maîtrise sur leur vie” [90][90] Communiqué de presse du mouvement Ecolo, 24 juin 1....

f - L’enseignement

267

Comme le système médical, le système scolaire se solde, aux yeux des écologistes, par un échec : “La crise de l’école est déjà ancienne mais ne semble pas trouver de solution. Quel que soit le système qui la dirige, le système de sélection qui conduit aux diplômes et qui prétend équiper l’élève pour le placer dans la pyramide de la main-d’œuvre, est remis en cause. (…) Malgré certains de ses objectifs plus égalitaires et moins dirigistes, l’enseignement dit rénové n’est pas parvenu à répondre à l’attente des Belges (…). Combien d’élèves, combien d’enseignants ne sont-ils pas frustrés par l’école, voire dégoûtés et même déprimés ? Si l’école n’était pas obligatoire, combien de désertions s’ajouteraient encore aux places vides sur les bancs des classes ? Et dans quelle mesure le maintien de l’emploi toujours mis en avant par les gens de gauche et les représentants des enseignants, ne devient-il pas l’unique élément en faveur de la formation de l’enfant ?” [91][91] Groupe local de Liège, “La voie pour Liège”, septembre....

268

Dans le domaine de l’enseignement, les écologistes ont mis en avant trois orientations principales :

  1. la restriction de l’obligation scolaire à la seule matinée : les après-midi seraient consacrés à des stages de formation ou de délassement créateur, assurés tant par des enseignants que par des animateurs spécialisés, par des parents ou encore par des professionnels qui viendraient initier directement les enfants à leurs métiers ; cette réforme permettrait d’éviter que l’école ne reproduise les divisions de notre société, par ses clivages, ses classifications et ses hiérarchies ;

  2. la participation de toute la communauté éducative (parents, élèves, corps enseignant, directions et pouvoirs organisateurs) à la gestion, à l’organisation de la discipline, à la définition des objectifs et des moyens pédagogiques :

  3. l’ouverture de l’université à l’éducation permanente, de manière à “accroître l’adéquation entre demande et offre d’emplois, à développer de nouveaux types d’emploi, à orienter ses recherches en fonction d’une plus grande diversité de demandeurs, à augmenter la technicité et l’efficacité d’actions et d’entreprises locales, de petite dimension, issues d’initiatives de collectivités ou d’individus isolés” [92][92] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre...

269

S’il s’est refusé à entrer dans le débat entre les différents réseaux d’enseignement, le mouvement Ecolo s’est déclaré “favorable à l’enseignement pluraliste” et même partisan du “maintien de la pluralité de l’enseignement”. Les écologistes considèrent d’ailleurs que le type d’enseignement qu’ils préconisent est “naturellement pluraliste”, dans la mesure où les activités recommandées impliquent la participation de personnes venant des horizons les plus divers.

g - La sécurité sociale

270

C’est au problème du financement de la sécurité sociale, “organisation de la solidarité entre les citoyens”, que le mouvement Ecolo a consacré la majeure partie de ses réflexions.

271

Selon lui, c’est le chômage qui est le principal responsable du déficit de la sécurité sociale, à la fois par son coût direct et par son influence sur la chute des recettes. La diminution du chômage est donc impérative et, à cet égard, les écologistes considèrent que la réduction du temps de travail disponible et une répartition plus équitable du travail disponible apparaissent comme des éléments essentiels de solidarité sociale. Mais il ne seront sans doute pas suffis sants : l’évolution technologique perceptible ou prévisible laisse supposer que les emplois sont appelés à se raréfier encore, Partant, un système qui base le calcul des cotisations sur le nombre d’emplois, aggravera forcément les problèmes financiers actuellement rencontrés par la sécurité sociale.

272

C’est pourquoi Ecolo, qui exclut toute privatisation, préconise un financement par l’impôt direct des secteurs soins de santé et allocations familiales, qui sont étrangers à l’exercice d’une activité professionnelle. Les cotisations calculées sur les salaires, qui continueront à alimenter les autres secteurs, devraient être uniformisées pour les trois grands régimes : salariés, fonctionnaires et indépendants (ceux-ci étant considérés comme les salariés de leur propre entreprise). Des réductions des cotisations patronales sont toutefois préconisées, dans un but de soutien de l’emploi, en faveur de certaines catégories de travailleurs dont les travailleurs manuels (à titre d’aide au secteur industriel “exposé”) ; les travailleurs des secteurs de l’artisanat et de la réparation ; les travailleurs organisés en coopérative de production ; les travailleurs des coopératives agricoles [93][93] Ecolo, “L’emploi : la réponse des écologistes”, avril....

273

En ce qui concerne les prestations, le mouvement Ecolo recommande, à moyen terme, “l’instauration d’un minimum social garanti à chacun pendant toute son existence, indépendamment du travail preste” [94][94] Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre.... Inversément, un service civil, expression d’une forme démocratique de solidarité, pourrait être envisagé. A plus brève échéance, des mesures sont proposées qui, dans un souci d’une plus grande équité (“l’écologie c’est le respect des équilibres”), tendent à réduire les écarts de revenus, et notamment par la mise en place progressive d’une pension unique à un niveau décent, avec possibilité de mise à la retraite progressive.

5 - L’EXPERIENCE LIEGEOISE

274

La participation des élus Ecolo à la gestion de la ville de Liège est exemplative à plus d’un titre. Elle constitue pour les écologistes la première expérience de la pratique du pouvoir à un échelon significatif et dans des conditions peu propices. Elle donne une indication supplémentaire de la place que le mouvement Ecolo entend occuper sur l’échiquier politique ainsi que du type d’alliance qu’en cas de réussite de la coalition, il est porté à privilégier. Elle marque une des limites auxquelles la tendance à la bipolarisation se heurte dans le sud du pays.

1 - Les forces en présence et la campagne électorale

275

Le scrutin communal du 10 octobre 1982 a été marqué à Liège, comme dans de nombreuses autres communes de Wallonie, par l’affrontement entre deux listes de coalition : le Rassemblement progressiste et socialiste wallon, R.P.S.W. (liste de cartel regroupant des candidats du P.S., du R.W. et du R.P.W.) et l’Union pour Liège, U.P.L. qui rassemblait des représentants du P.R.L. et du P.S.C.

276

Parmi les autres listes déposées, relevons, outre celle du mouvement Ecolo, le Parti communiste et le Rassemblement chrétien liégeois [95][95] Pour plus de détails concernant le scrutin communal....

a - Le mouvement Ecolo

277

Lors des élections législatives du 8 novembre 1981, le mouvement Ecolo avait recueilli dans le canton électoral de Liège, circonscription qui correspond à la commune, 7,41 % des suffrages. Cinquante et un sièges étant à pourvoir, il pouvait légitimement escompter être représenté au sein du prochain conseil communal d’autant que pour ce scrutin le droit de vote était abaissé à 18 ans.

278

Si la confection de la liste n’a pas été sans rencontrer certaines difficultés [96][96] C’est, en définitive, pour sortir d’une impasse, que..., la rédaction du programme ne paraît guère, quant à elle, avoir soulevé de réels problèmes. Comme tous les autres groupes locaux d’Ecolo celui de Liège, tout en étant lié par les propositions adoptées par le mouvement Ecolo au niveau fédéral [97][97] Ecolo, “Une autre manière de vivre sa commune, proposition..., a établi une plate-forme spécifique, contenue dans une brochure de 77 pages intitulée “La voie pour Liège”. Celle-ci débuté par une présentation générale d’Ecolo (“l’alternative politique”) et le rappel des trois priorités considérées comme non négociables : l’instauration du référendum d’initiative populaire, la reconnaissance des quartiers et la révision du rôle et du fonctionnement des intercommunales. Vient ensuite une brève description de la situation générale de la commune et de la gestion de la coalition précédente.

279

L’essentiel du programme du groupe Ecolo de Liège est consacré aux propostions pour les années à venir. Elles s’articulent autour de cinq axes : l’information des citoyens, les questions urbanistiques, le désengagement à l’égard du nucléaire et la politique de l’énergie, l’action sanitaire et sociale et la promotion des quartiers et de la vie associative.

280

Les problèmes financiers de la ville de Liège ne sont qu’effleurés. Les écologistes liégeois n’en avaient évalué ni la gravité ni les implications.

b - Le Rassemblement progressiste et socialiste wallon

281

Dans le prolongement de l’appel lancé par Guy Spitaels, le président du P.S., lors des élections législatives de 1981 et qui avait abouti à la présentation de candidats R.P.W. dont Jean Mottard sur les listes socialistes, des négociations se sont engagées entre les responsables du P.S., du R.P.W. et du R.W. Elles ont débouché sur la constitution d’une liste de cartel dénommée Rassemblement progressiste et socialiste wallon, R.P.S.W. Les contacts avec le Parti ouvrier chrétien, P.O.C., la Démocratie chrétienne, le Parti communiste et la Ligue révolutionnaire des travailleurs, L.R.T. furent sans lendemain.

282

La mise sur pied de cette liste s’explique également par les réticences croissantes de nombreux militants socialistes envers le partenaire libéral qui, au cours de la législature précédente, s’était transformé en Parti réformateur libéral, P.R.L. avec l’arrivée des dissidents du Rassemblement wallon de Liège (Jean Gol notamment). Cette transformation avait été ressentie par une large fraction de la section locale du P.S. comme une accentuation du poids néo-libéral, particulièrement sur le plan social.

283

La constitution du R.P.S.W. (42 candidats P.S., 5 R.W. et 3 R.P.W.) autorisait dans l’esprit de ses promoteurs, l’espoir d’une majorité absolue et donc le rejet des libéraux dans l’opposition. Signé en mai 1982, l’accord P.S.-R.W.-R.P.W. prévoyait la formation d’un groupe unique au sein du conseil communal, quels que soient les résultats du scrutin.

c - L’Union pour Liège

284

Le 7 juin 1982, un mois après la signature de l’accord formant le R.P.S.W. est signé l’accord de protocole constituant la liste Union pour Liège, U.P.L. Cette liste, traduction au niveau liégeois de la collaboration des deux partis de la coalition gouvernementale, regroupait des candidats présentés par le P.R.L. (27) et le P.S.C. (24). Au sein de la représentation libérale, le “courant Gol” était majoritaire et, en cas de succès, devait se voir attribuer le mayorat.

285

Soulignons que l’accord conclu n’imposait la constitution d’un groupe unique que dans le cas où l’U.P.L. obtenait la majorité au sein du conseil communal.

d - Les autres formations

286

Outre le P.C.B., l’U.D.R.T. et le T.P.O.-P.T.B., non spécifiques à Liège, est déposée la liste Rassemblement chrétien liégeois, animée par Paul Remouchamps qui avait démissionné du P.S.C. en réaction avec l’accord conclu avec le P.R.L.

287

Remarquons l’extrême dispersion des militants proches des organisations ouvrières chrétiennes qui figurent selon les cas sur les listes R.C.L., R.P.S.W., U.P.L. et Ecolo.

2 - Les résultats du scrutin et la formation du collège échevinal

288

La campagne électorale fut marquée dans le chef des deux listes de cartel par une agressivité verbale peu courante et par un recours intensif aux sondages et aux techniques publicitaires les plus diverses. Les autres formations ne purent que difficilement faire entendre leurs voix.

289

Le scrutin débouche sur les résultats suivants : sur les 51 sièges à pourvoir, 23 furent attribués au R.P.S.W., 21 à l’U.P.L., 6 au mouvement Ecolo (qui recueillait 11,66 % des voix) et 1 au P.C.B. Les élus écologistes furent Raymond Yans (975 voix de préférence), Henri Hoffait (132 voix), Théo Bruyère (280 voix), Brigitte Ernst de la Graete (333 voix), Olivier Bribosia (232 voix) et Claire Laloux (295 voix).

Résultats des élections communales de 1976 et 1982, et des élections législatives de 1981 pour le canton/commune de Liège
Sources : Jean Beaufays, Michel Hermans et Pierre Verjans, op. cit
290

Aucune liste n’obtenant la majorité absolue, la formation d’une coalition était nécessaire. Plusieurs types d’alliance étaient possibles y compris une coalition entre le R.P.S.W. et les libéraux puisque l’accord constitutif de l’U.P.L. n’excluait pas de manière absolue l’éventualité de négociation particulière avec le P.S. en cas d’échec de la liste de cartel. Il convient de rappeler à ce propos que l’accord de majorité signé en 1976 par le P.S. et par le Rassemblement libéral liégeois (R.L.L.) prévoyait des contacts privilégiés entre les deux partenaires après les élections communales de 1982.

291

Le soir même des élections, après le dépouillement, l’U.P.L. prit contact téléphoniquement avec les responsables d’Ecolo, et un rendez-vous fut fixé pour le lendemain. Ce même soir, une délégation du R.P.S.W. rencontra les dirigeants écologistes et, conformément à un engagement mutuel préalable aux élections, il fut décidé de se revoir le lundi. A noter que, de son côté, le P.R.L. chercha à s’entretenir avec le R.P.S.W. qui se borna à répondre que “rien ne pressait

292

Le lundi 11 octobre, deux équipes de négociateurs Ecolo furent constituées pour entamer les premières conversations avec le R.P.S.W. et l’U.P.L. Elles en rendirent compte le soir devant l’assemblée générale des militants du groupe local. Celle-ci, après s’être prononcée à une large majorité en faveur du principe de la participation au pouvoir, manifesta sa préférence pour la recherche d’un accord avec le R.P.S.W. et l’interruption des contacts avec l’U.P.L.

293

A partir du mardi, les discussions s’engagèrent en vue de la conclusion d’un “contrat de législature”. Ces tractations qui se poursuivirent pendant dix jours présentent une double originalité :

  • elles ont porté d’abord sur le contenu de l’accord, la répartition des responsabilités et des mandats n’intervenant que dans un deuxième temps. Il semble que la base en fut le programme Ecolo (Vivre sa commune et La voie pour Liège) et que les négociateurs Ecolo furent quelque peu surpris de la facilité avec laquelle leurs propositions furent acceptées ;

  • elles furent à deux reprises interrompues à la suite de l’obligation de la délégation écologiste d’en référer à l’assemblée des membres du groupe local. Ceux-ci se montrèrent particulièrement attentifs à trois points du projet d’accord : la nécessité d’un calendrier précis en ce qui concerne le désengagement nucléaire, la dépolitisation de l’administration et l’attribution des fonctions dans le futur collège échevinal.

294

L’accord politique cadre (21 pages) fut signé le 22 octobre. Il sera complété quelques semaines plus tard par un programme de gestion, plus détaillé (150 pages) et qui porte manifestement la griffe Ecolo. Ainsi que l’ont souligné plusieurs observateurs, “Ecolo a pesé de tout son poids lors de la négociation du programme (…) : la discussion portait sur des questions idéologiques et, sur le plan du discours, les Ecolos avaient une habilité indéniable” [98][98] Jean Beaufays, Michel Hermans et Pierre Verjans, op.....

295

Les points les plus significatifs du programme sont :

  1. sur le plan de l’information : la télédiffusion, sur le câble, des séances du conseil communal ;

  2. sur le plan de la participation : la possibilité de référendums d’initiative populaire, d’initiative échevinale ou proposés par les conseils de quartiers :

  3. sur le plan financier : l’Etat central doit respecter ses obligations et restaurer les conditions de l’autonomie communale, tandis que le collège est invité à “assumer les contraintes dues à la situation financière” ;

  4. sur le plan institutionnel : la reconnaissance des quartiers, la transparence des intercommunales et leur contrôle démocratique par les élus ;

  5. sur le plan de l’énergie : le désengagement du secteur nucléaire dans un délai maximum de cinq ans.

296

Restait l’attribution des compétences : sur onze mandats, le groupe Ecolo en obtint finalement trois qui furent confiés à Raymond Yans, premier échevin, échevin de l’urbanisme, de l’aménagement du territoire et des transports en commun, Brigitte Ernst de la Graete, échevin de la participation et des relations avec les quartiers, de la jeunesse et des sports et Théo Bruyère, échevin du logement et des bâtiments communaux.

3 - La pratique du pouvoir

297

Cinq cents jours de participation à la gestion communale constituent une période trop courte ne fut-ce que pour esquisser un premier bilan de la présence d’élus Ecolo au sein du collège échevinal de Liège. Tout au plus est-il permis de fournir quelques éléments qui ne préjugent en rien des résultats à partir d’une expérience dont la durée est normalement de six ans.

298

- La désignation d’échevins écologistes s’est tout d’abord traduite par une nouvelle structuration du groupe local et plus particulièrement par la mise sur pied d’une structure politique intermédiaire (S.P.I.) Cette dernière, composée de sept membres élus par le groupe local et renouvelable par moitié tous les six mois, remplit une double mission de contrôle et de liaison entre les élus et l’assemblée générale de la section locale qui, pour sa part, se réunit une fois par mois. En outre, chacun des trois échevinats confié à un élu Ecolo est placé sous la tutelle d’une commission d’études composée de militants écologistes. Par ailleurs, une commission d’accompagnement mixte (R.P.S.W. + Ecolo) a été instituée pour chacun des échevinats. Cette structuration qui peut paraître lourde, correspond dans l’ensemble à la doctrine écologiste, dont l’un des points essentiels, sur le plan politique, est le contrôle permanent des élus et des responsables.

299

- La collaboration entre les deux partenaires de la majorité paraît avoir traversé quelques phases difficiles. L’éclat donné à certains incidents (votes opposés au sein du conseil, menaces de démission, prises de position frondeuses de quelques porte-parole) semble être davantage le reflet d’une différence de styles, d’un apprentissage pas toujours aisé de la concertation et du caractère nouveau de l’alliance que d’une méfiance de principe entre les deux partenaires. En revanche, les heurts apparaissent plus profonds avec les représentants socialistes de la périphérie liégeoise, notamment au sein des intercommunales où ils sont souvent majoritaires. Aucune difficulté particulière n’affecte, selon les échevins écologistes, les relations avec l’administration communale, en dépit de ses liens traditionnels avec les appareils politiques.

300

- En ce qui concerne la mise en œuvre du programme de gestion, il n’est guère douteux que des retards certains ont été enregistrés. Plusieurs facteurs doivent, à cet égard, être pris en considération :

  1. les difficultés financières de la ville, aggravées par les conséquences de la secousse sysmique qui a touché l’agglomération, le 8 novembre 1983, ont indéniablement amené au resserrement de la marge de manœuvre de la nouvelle coalition, à des restrictions et à des rééchelonnements, d’autant que le mouvement Ecolo s’est opposé à tout licenciement ;

  2. les interventions des autorités de tutelle, notamment sur le plan budgétaire et sur le plan urbanistique dont l’impact avait sans doute insuffisamment été évalué ;

  3. la lourdeur de certaines procédures : la multiplicité des études, des consultations et des concertations préalables ont surpris de leur aveu même, les responsables d’Ecolo : les tirbulations du projet de règlement sur le référendum, qui fait l’objet de discussions prolongées, sont exemplaires à cet égard ;

  4. le poids des habitudes et des pratiques politiques : la difficile mise en place des conseils de quartier illustre à cet égard les divergences de conception entre les socialistes plus traditionnalistes, partisans du maintien des limites des anciennes communes – et qui correspondent à la structuration de la section du P.S. local – et des écologistes plus “innovateurs” qui entendent ne prendre en considération que le vécu et la volonté des habitants.

  5. l’appréciation incorrecte des possibilités d’action : ainsi, pour ce qui est du désengagement du secteur nucléaire, Ecolo ne dispose que d’un seul représentant au sein de la Société coopérative liégeoise d’électricité, Socolié dont la ville de Liège est un des coopérateur aux côtés de l’Etat belge, de la Province de Liège, de la commune de Seraing et de l’Association liégeoise d’électricité. Socolié participe à concurrence de 39,99 % dans le capital de la S.P.E. (société publique de production d’électricité) qui participe dans l’indivision nucléaire Doel/Tihange.

    L’isolement du délégué écologiste, la timidité de l’appui apporté par les partenaires socialistes ainsi que les statuts des sociétés concernées et les conventions conclues, ne permettent guère d’attendre la mise en œuvre du programme de gestion avant 1987.

301

Il reste que bon nombre d’orientations ont été tracées et que diverses réalisations concrètes sont acquises. Parmi celles-ci relevons :

  1. la “boutique urbaine” ouverte en octobre 1983 par l’échevinat de la participation et qui poursuit un triple objectif : l’information des habitants, le service à la population et l’outil de la participation ;

  2. la reconnaissance du rôle et la consultation des associations (comités de locataires et comités de quartiers) ;

  3. la mise en place d’une politique urbanistique moins ambitieuse qui s’est traduite par le blocage ou l’abandon de projets “destructeurs” ainsi que par l’adoption de plusieurs programmes de rénovation.

302

Le rythme plus lent que prévu, de réalisation du programme de gestion, de même la multiplication d’obstacles imprévus, ne vont pas sans susciter, chez certains, des réactions de lassitude ou d’irritation. Celles-ci ne paraissent toutefois pas de nature à mettre en cause la poursuite de l’“expérience liégeoise”.

CONCLUSIONS

303

Au terme de ce Courrier, il importe de mieux cerner la spécificité du mouvement Ecolo et de s’interroger sur son devenir.

304

1. Parmi les principaux traits qui fondent la particularité d’Ecolo, la coexistence parfois conflictuelle, au sein d’une même structure, d’un parti et d’un mouvement est sans doute la plus frappante. Si, dans le chef de nombreux membres et sympathisants, on semble vouloir privilégier les débats d’idées, l’action extra-institutionnelle, le travail à moyen terme sur les mentalités, la plupart des responsables Ecolo, en revanche, n’entendent pas pour autant négliger l’activité politique pure, au travers des scrutins électoraux, des contacts avec les autres partis, du travail parlementaire. La méfiance quasi ontologique à l’égard de l’exercice du pouvoir et les réticences à s’engager dans la gestion marquent incontestablement le mouvement Ecolo, pour lequel la participation au pouvoir n’apparaît pas comme une vocation première.

305

Autre caractéristique du mouvement Ecolo : il n’est pas l’expression d’une résurgence périodique d’un courant permanent de l’histoire politique du pays, comme le sont ou ont pu l’être d’autres formations politiques. Il ne prend appui sur aucune des idéologies classiques, sur aucun groupe sociologique circonscrit et, a fortiori, sur aucun groupe de pression organisé (organisation syndicale, mouvement corporatiste, association socio-culturelle, etc).

306

L’organisation et le fonctionnement du mouvement Ecolo font également apparaître un certain nombre de règles et de pratiques qui lui sont propres : transparence, interdiction des cumuls à l’intérieur et à l’extérieur, rotation systématique des responsables, contrôle permanent des élus, autonomie des groupes locaux, multiplication des assemblées générales, etc.

307

Enfin, en dépit des résistances d’Ecolo à toute localisation sur l’échiquier politique et de sa volonté d’être situé “ailleurs”, il est permis de le définir comme l’expression d’une certaine sensibilité de gauche. Mais il s’agirait alors d’une gauche “antijacobine”, qui, jusqu’à présent, ne s’était jamais manifestée de manière structurée en Belgique. Cette gauche s’affirmerait comme résolument autogestionnaire, tiers-mondiste, non-productiviste et hostile à toute forme de nationalisme. Il reste que le mouvement Ecolo a constamment souligné l’inadéquation des propositions de la gauche traditionnelle et son refus de se soumettre à toute pratique, à toute stratégie qui limiterait son autonomie.

308

2. L’analyse des scrutins successifs montre une progression constante de l’audience du mouvement Ecolo dans l’électorat. Il est trop tôt cependant pour affirmer qu’il a pris place de manière stable et durable dans l’espace politique belge. Un élément apparaît toutefois établi : en tant que parti politique, Ecolo a réussi malgré certains soubresauts à devenir l’expression unique de l’écologie politique.

309

Toutefois si l’émergence des thèmes écologiques a favorisé le développement et le succès du mouvement, la prise en compte, même partielle, de ces mêmes thèmes par d’autres partis peut constituer pour Ecolo un risque de plafonnement, voire d’effritement. Cela dépendra de la capacité des autres formations d’intégrer en profondeur les préoccupations et les aspirations écologiques de la population et de les traduire concrètement. A cet égard, la comparaison avec l’évolution des partis fédéralistes francophones peut apporter certaines indications. Notamment, il n’est pas interdit d’établir un parallèle entre la perte d’audience de ces partis et l’affirmation régionaliste des autres formations, affirmation débouchant sur la réforme des institutions.

310

L’autre écueil pourrait être la confrontation entre la participation éventuelle au pouvoir et la méfiance qu’elle inspire à de nombreux écologistes. Cette suspicion, ainsi que la lourdeur `des procédures internes qui en résultent, se concilient difficilement avec un exercice efficace des responsabilités politiques. L’expérience liégeoise est trop neuve encore pour que l’on sache si le mouvement Ecolo a assumé cette contradiction. Il apparaît que les tensions qui ont pu, ici ou là, traduire cette ambiguïté, ont été jusqu’ici contenues.

Notes

[1]

Ecologie : étude des milieux où vivent et se reproduisent les êtres vivants, ainsi que des rapports de ces êtres vivants avec le milieux.

[2]

“Manifeste, pour une démocratie nouvelle” Namur, 1973.

[3]

Pierre Waucquez, correspondance personnelle, décembre 1983.

[4]

Cette association d’origine américaine, surtout préoccupée par les problèmes nucléaires est à la base de la création des diverses sections européennes des Amis de la terre. L’approbation du responsable pour l’Europe de The Friends of Earth International, ainsi que celle des autres sections européennes sont requises lorsqu’une section nouvellement créée sollicite sa reconnaissance au niveau international.

[5]

parmi lesquels Pierre Van Roye, futur sénateur du mouvement Ecolo en 1981.

[6]

En 1982, Luc de Brabandere ralliera les rangs du P.S.C.

[7]

Ecolo, “Statuts du mouvement Ecolo”, 1981, p. 3.

[8]

“Du vert au vert-de-gris”, Le Soir, 26 octobre 1981.

[9]

Ecolo, “90 propositions une autre manière de faire de la politique”, novembre 1981.

[10]

Ecolo, “Une autre manière de vivre sa commune, propositions des écologistes”, octobre 1982.

[11]

Henri Hoffait, “Elargir la démocratie dans les communes”, tribune libre, Le Soir, 11 mars 1982.

[12]

Ecolo, “Pourquoi les écologistes font-ils de la politique”, feuille électorale, novembre 1981.

[13]

A Walhain, la constitution de la liste Vivre ensemble, regroupant des candidats du P.S., du R.P.W., du M.O.C. et d’Ecolo, des délégués syndicaux ainsi que d’indépendants avait été annoncée. Cf. à ce propos “Le mouvement Vivre ensemble dépose un projet de programme à Walhain”, La Cité, 29 mai 1982.

[14]

Jacques van Solinge, “Les Ecolos réfractaires aux mariages préélectoraux”, Le Soir, 14 août 1982.

[15]

“L’idée d’un cartel anti-P.S. a du plomb dans l’aile”, La Cité, 10 juin 1982.

[16]

“Ecolo et le rassemblement des progressistes”, La Cité, 24 mars 1982.

[17]

Pour plus de détails concernant ce programme, voir infra : Doctrine du mouvement, Les questions de défense et de relations extérieures, L’Europe.

[18]

Ecolo, “Statuts du mouvement Ecolo”, janvier 1983

[19]

Le terme section n’est que très rarement utilisé.

[20]

Statuts du mouvement Ecolo, art. 1.2.

[21]

Règlement d’ordre intérieur, art. 6.2.

[22]

Voir infra, L’expérience liégeoise, la pratique du pouvoir.

[23]

Statuts du mouvement Ecolo, art. 7.4.

[24]

Statuts du mouvement Ecolo, art. 7.4. (Devoirs des candidats).

[25]

Cf. Ecolo-Info, n° 24, 1er septembre 1983, p. 4

[26]

Ceux-ci sont particulièrement nombreux. Pour la seule année 1982, on en a compté pas moins de 86.

[27]

Gérard Lambert, “Rapport du représentant Ecolo au conseil d’administration de la R.T.B.F.”, Ecolo-Info, n° 17, 22 février 1983, p. 10.

[28]

En 1983, le mouvement Ecolo occupait : - à charge du Parlement : 3 permanents à plein temps, 1 permanent à mi-temps, 1 secrétaire parlementaire à plein temps et 3 secrétaires parlementaires à mi-temps ; - à charge de son budget : 1 secrétaire parlementaire mi-temps. En 1984, s’ajoutent 2 permanents à mi-temps à charge du mouvement.

[29]

Ce poste couvre la location et les charges locatives des immeubles occupés à Bruxelles et à Namur. Les frais afférents aux locaux de Liège, Verviers et Charleroi sont partiellement à charge des groupes régionaux.

[30]

Dans les commentaires du budget, il est précisé que le fonds social est une réserve constituée en cas de “fermeture d’entreprise”, qui pourrait résulter soit de la dissolution du mouvement soit de l’absence d’élus nationaux, auxquels cas il est nécessaire de payer des indemnités aux permanents.

[31]

Le produit de cette surtaxe était en principe destiné à “des œuvres à caractère patriotique, culturel ou philanthropique”. Le mouvement Ecolo a considéré que l’objectif de la réglementation avait été détourné et a versé les 120.000 FB qui lui avaient été adressés, au Centre national de la coopération au développement. Cf. à ce sujet, La Libre Belgique des 24 et 27 août 1982 ainsi que les communiqués de presse Ecolo du 23 août et du 6 septembre 1982.

[32]

Voir à ce sujet, “Un homme sur quatre …” La Cité, Joseph Schoonbroodt, 7 et 8 novembre 1980.

[33]

INUSOP : Institut interuniversitaire de sondage d’opinion publique. Radioscopie de l’Electorat écologiste, Ecolo-Infos, n° 25, 20 septembre 1983.

[34]

Georges Dutry, “Après un an d’activités politiques : Ecolo demain ?”, Ecolo-Infos, mars 1983, n° spécial.

[35]

Jacques Poncin, “Les Belges : comprendre sans admettre”, Le Soir, 20 janvier 1982.

[36]

Pierre Schoffers, “Les écologistes annoncent de l’agitation parlementaire”, La Cité, 25 novembre 1981

[37]

Bénédicte Vaes, “Ecolo, un brin anar, géographe…”, Le Soir, 24 novembre 1981.

[38]

Cf. Ecolo-Infos, août 1982, n° 10, p. 4.

[39]

Cf. “Les appuis et les alliances d’Ecolo”, La Cité, 23 décembre 1981.

[40]

José Daras, “Ecologie et progressisme”, Tribune de progrès, La Wallonie, 22 janvier 1982.

[41]

Cf. Ecolo-Infos, août 1982, n° 10.

[42]

Cf. Ecolo-Infos, janvier 1983, p. 16.

[43]

Cf. “Courtisé de toutes parts, Ecolo choisira ses contacts à la carte”, La Cité, 2 mai 1983.

[44]

Ecolo, communiqué de presse, 14 février 1983.

[45]

L’approche analytique de la doctrine du mouvement Ecolo peut paraître arbitraire, voire mutilante, à ceux qui considèrent que la réponse des écologistes à la crise de la société occidentale est globale et ne se prête pas à la systématisation. Semblable démarche est pourtant la seule opérationnelle.

[46]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, brochure électorale, novembre 1981.

[47]

L’échelon communal n’est évidemment pas le seul où la procédure du référendum doit, dans l’optique du mouvement Ecolo, trouver à s’appliquer. Que ce soit au niveau du quartier, de la contrée, de la région ou encore au niveau européen, le référendum doit également permettre aux citoyens de contrôler leurs élus et d’influencer les décisions qui les concernent. Une proposition de loi visant à institutionnaliser le référendum d’initiative populaire a été déposée par les sénateurs Ecolo.

[48]

Cf. à ce sujet, la proposition de loi déposée au Sénat et portant des mesures propres à interdire le cumul de fonctions ou mandats politiques.

[49]

Ecolo, “Le fédéralisme”, document de travail, avril 1983.

[50]

Ecolo, “Le Fédéralisme”, document de travail, avril 1983.

[51]

Ibid. Pour les écologistes, à court terme, c’est-à-dire en attendant la constitution de l’Europe des Régions, l’Etat belge comme fédération des trois Régions, conserve un certain nombre de compétences déléguées par les Régions, compétences qu’il est appelé à perdre au bénéfice soit de la fédération européenne, soit des Régions si elles le souhaitent.

[52]

“Questions à Paul Lannoye”, La Libre Belgique, 30 avril 1983.

[53]

“Ecolo face à l’escalade communautaire”, communiqué de presse, 9 février 1984.

[54]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, brochure électorale, novembre 1981.

[55]

Ecolo, “L’Emploi : la réponse des écologistes”, Centre d’études et de formation en écologie, ASBL, Namur, avril 1983, p. 23.

[56]

Ibid. p. 57.

[57]

Paul Lannoye, “L’écologie contre le chômage”, Le Soir, 24 février 1983

[58]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, document électoral, novembre 1981, p. 24.

[59]

Ecolo, “Options du mouvement Ecolo en vue de résoudre le problème de la sidérurgie wallonne”, communiqué de presse, juin 1983.

[60]

Ecolo, “Energie, la réponse des écologistes”, juin 1982, p. 50.

[61]

Ibid. p. 47 et suivantes.

[62]

Ecolo, “L’Emploi : la réponse des écologistes”, Centre d’études et de formation en écologie, ASBL, Namur, avril 1983, p. 27. A noter que le mouvement Ecolo propose de remplacer l’indexation proportionnelle aux revenus par une indexation forfaitaire. Ce système devrait permettre à la fois une hausse des bas salaires, la réduction progressive de l’éventail des revenus et une meilleure compensation de la réduction du pouvoir d’achat supportée par les salaires les plus faibles en raison du plan de partage du travail.

[63]

Ecolo, “L’Emploi : la réponse des écologistes”, Centre d’études et de formation en écologie, ASBL, Namur, avril 1983, p. 29.

[64]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 69.

[65]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 80.

[66]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 71.

[67]

Voir supra p. 19.

[68]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 9.

[69]

Celles-ci sont articulées autour de 11 rubriques : une Europe des Régions proche des habitants, une économie écologique, le partage du travail et des revenus, une agriculture diversifiée et de qualité, une politique européenne de l’environnement, une alternative énergétique douce, une décommercialisation de la médecine, un aménagement intégré du territoire, une politique des transports, des nouvelles technologies au service de l’humanité, ainsi que des relations justes et équilibrées avec le reste du monde.

[70]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 16.

[71]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 73.

[72]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 82.

[73]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 73.

[74]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 83.

[75]

Ibid., p. 84.

[76]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981. p. 59

[77]

Ibid., p. 56.

[78]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 38.

[79]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 58.

[80]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 39

[81]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 71.

[82]

Ibid. p. 72.

[83]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 73.

[84]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 65.

[85]

Louise Gross, Michel Horenbeek, Jean-Michel Mary, Jean-François Vaes, “Transports publics : problèmes techniques ou politiques ?”, Le Soir, Tribune libre, 19 juillet 1983.

[86]

Olivier Bribosia, “Energie et transports : les vraies priorités”, Le Soir, Tribune libre, 23 novembre 1982.

[87]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 35.

[88]

Ecolo, “L’Europe des écologistes”, juin 1984, p. 57.

[89]

“Ecolo attaque l’Ordre des médecins”, La Libre Belgique, 1er septembre 1983.

[90]

Communiqué de presse du mouvement Ecolo, 24 juin 1982.

[91]

Groupe local de Liège, “La voie pour Liège”, septembre 1982, p. 45.

[92]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 48.

[93]

Ecolo, “L’emploi : la réponse des écologistes”, avril 1983, p. 34. Voir également Philippe Defeyt et Perre Reman, “Les partis politiques face à la réforme de la sécurité sociale”, Courrier Hebdomadaire du CRISP, n° 1041-1042 du 25 mai 1984

[94]

Ecolo, “90 propositions des écologistes”, novembre 1981, p. 33.

[95]

Pour plus de détails concernant le scrutin communal du 10 octobre 1982 à Liège, le lecteur se reportera notamment à l’étude de Jean Beaufays, Michel Hermans et Pierre Verjans, “Les élections communales à Liège : cartels, polarisation et les écologistes au pouvoir”, Res Publica, “Politiek Jaarboek 1982 Année politique”, nouvelle série, n° 7, 1983, vol. XXV, n° 2-3, pp. 391 et suivantes.

[96]

C’est, en définitive, pour sortir d’une impasse, que Raymond Yans fut placé en tête de liste.

[97]

Ecolo, “Une autre manière de vivre sa commune, proposition des écologistes”, octobre 1982

[98]

Jean Beaufays, Michel Hermans et Pierre Verjans, op. cit., p. 413.

Plan de l'article

  1. INTRODUCTION
  2. 1 - LA GENESE DU MOUVEMENT ECOLO
    1. 1 - L’expérience Démocratie nouvelle
    2. 2 - Les Amis de la terre
    3. 3 - Les élections européennes du 10 juin 1979
  3. 2 - LA CONSTITUTION ET L’IMPLANTATION DU MOUVEMENT ECOLO
    1. 1 - La fondation d’Ecolo
    2. 2 - Les élections législatives du 8 novembre 1981
      1. a - La confection des listes
      2. b - Les résultats
    3. 3 - Les élections communales du 10 octobre 1982
      1. a - Le programme
      2. b - L’établissement des listes
      3. c - Les résultats du scrutin
      4. d - La constitution des collèges échevinaux
    4. 4 - Les élections européennes du 17 juin 1984
      1. a - La préparation du scrutin
      2. b - Les résultats
  4. 3 - MORPHOLOGIE DU MOUVEMENT ECOLO
    1. 1 - Les structures du mouvement Ecolo
      1. a - Généralités
      2. b - Le niveau local
      3. c - Le niveau régional
      4. d - Le niveau fédéral
        1. 1° L’Assemblée
        2. 2° Le Conseil de fédération (art. 5.2)
    2. 2 - Le fonctionnement du mouvement Ecolo
      1. a - Le statut des responsables et des élus
      2. b - Les prises de positions
      3. c - Les finances
        1. 1° Le budget ordinaire
        2. 2° Le budget extraordinaire
    3. 3 - L’électorat et le personnel politique d’Ecolo
      1. a - L’électorat écologiste
      2. b - Le personnel politique du mouvement Ecolo
    4. 4 - Les modes d’action
    5. 5 - Les “relations extérieures” du mouvement Ecolo
  5. 4 - LA DOCTRINE ET LE PROGRAMME POLITIQUE DU MOUVEMENT ECOLO
    1. 1 - Le fédéralisme intégral
      1. a - Le premier niveau est celui du quartier ou du village
      2. b - Le deuxième niveau est celui de la commune
      3. c - Le troisième niveau est celui de la contrée
      4. d - Le quatrième niveau est celui de la région
      5. e - Le cinquième niveau est celui de l’Europe
    2. 2 - La synthèse économie-écologie
      1. a - L’orientation de la politique industrielle vers le marché intérieur
      2. b - Révision de la politique énergétique
      3. c - Le partage du travail
    3. 3 - Les questions de défense et de relations extérieures
      1. a - La défense
      2. b - L’Europe
      3. c - Le Tiers-monde
        1. 1° La réorientation de la coopération au développement
        2. 2° La révision des mécanismes des conventions de Lomé
        3. 3° La protection des droits de 1’homme et des peuples
    4. 4 - Les problèmes de société
      1. a - L’agriculture et l’alimentation
        1. 1° L’encouragement à la reconversion à. l’agriculture biologique
        2. 2° Le contrôle de l’élevage industriel
        3. 3° L’aide aux exploitations agricoles de petite dimension
      2. b - L’aménagement du territoire et l’environnement
        1. 1° Les principes généraux de l’aménagement du territoire
        2. 2° La politique des travaux publics
        3. 3° La politique de l’eau et des cours d’eau
        4. 4° La politique de la forêt
        5. 5° La politique du tourisme vert
        6. 6° La lutte contre les nuisances
      3. c - Les technologies nouvelles
      4. d - Les transports en commun
      5. e - La santé
      6. f - L’enseignement
      7. g - La sécurité sociale
  6. 5 - L’EXPERIENCE LIEGEOISE
    1. 1 - Les forces en présence et la campagne électorale
      1. a - Le mouvement Ecolo
      2. b - Le Rassemblement progressiste et socialiste wallon
      3. c - L’Union pour Liège
      4. d - Les autres formations
    2. 2 - Les résultats du scrutin et la formation du collège échevinal
    3. 3 - La pratique du pouvoir
  7. CONCLUSIONS

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