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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Session ordinaire de 2008-2009

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 15 octobre 2008

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Alain Néri

1. Mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement

Article 10 (suite)

Amendements nos 94, 564 (sous-amendement), 565 (sous-amendement), 97, 98, 774, 942, 584, 443, 950, 99, 100, 778, 880, 889, 881, 949, 898, 101, 890, 102, 891, 979, rectifié, 479, 2060, 103, 105, 581, 582, 104 rectifié, 713, 1286, 575, 480, 656, 899, 658, 861, 884, 106, 566, 801, 659, 1711, 683 rectifié, 2058 

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État

M. Christian Jacob, rapporteur

Amendement no 2061  (sous-amendement)

M. François Brottes

M. Bertrand Pancher

M. Philippe Tourtelier

M. Marc Le Fur

M. Hervé Mariton

M. Antoine Herth

M. Christian Paul

M. Jean Dionis du Séjour

M. Yves Cochet

M. Serge Letchimy

M. Serge Grouard

M. Jean Gaubert

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État

Amendements nos 903, 209, 546, 893

Article 11

M. Claude Bodin

M. Daniel Fasquelle

M. Jean-Paul Bacquet

M. Olivier Jardé

M. Alain Gest

M. Serge Letchimy

M. Philippe Duron

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont

M. Yanick Paternotte

Mme Valérie Fourneyron

M. Alain Rodet

M. Bernard Lesterlin

M. Daniel Paul

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Alain Néri,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Mise en oeuvre
du Grenelle de l'environnement

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement (nos 955, 1133, 1125).

Article 10 (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 955 à l’article 10.

M. Philippe Tourtelier. Cet amendement n’est pas défendu.

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 94.

La parole est à M. Christian Jacob, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire.

M. Christian Jacob, rapporteur de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. L’amendement n° 94 tend à insérer, après l’alinéa 4, l’alinéa suivant : « La politique durable des transports donne la priorité en matière ferroviaire au réseau existant. Cette priorité s’appuie sur l’amélioration et la modernisation de la qualité de l’infrastructure ferroviaire existante ».

Cet amendement répond à une demande de M. Duron qui s’est engagé à le cosigner, et je propose qu’il figure comme cosignataire.

Plusieurs députés du groupe de l’Union pour un mouvement populaire. Oui !

M. le président. Sur l’amendement n° 94, je suis saisi d'un sous-amendement n° 564.

La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Le sous-amendement 564 tend à compléter ainsi l’alinéa 2 : « en particulier pour achever l’électrification des lignes existantes ». En effet, certaines lignes, comme celle de Paris-Amiens-Boulogne, ne sont qu’en partie électrifiées, ce qui impose des changements de train et fait perdre du temps.

M. Alain Gest. C’est indispensable.

M. le président. Je suis saisi d'un sous-amendement n° 565.

La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Le sous-amendement n° 565 tend à favoriser la modernisation et l’électrification des lignes nationales sans changement qui traversent plusieurs régions et dont le sort pourrait être remis en cause par le développement des trains express régionaux.

J’avais écrit à ce sujet au président de la SNCF, mais il m’avait renvoyé vers les régions. Or, les lignes traversant plusieurs régions, la question doit être traitée sur le plan national.

Au nom d’Alain Gest, de Jérôme Bignon, de Gilbert Mathon, d’Olivier Jardé et de beaucoup d’autres, je demande au ministre de réunir rapidement une table ronde avec tous les acteurs concernés afin de trouver très rapidement une solution à cet épineux problème.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux sous-amendements?

M. Christian Jacob, rapporteur. Une fois que le Gouvernement se sera exprimé sur ces légitimes sous-amendements, j’inviterai leurs signataires à les retirer.

M. Alain Gest. Qu’il s’exprime bien, surtout !

M. le président. La parole est M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État chargé des transports ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Je rendrai tout d’abord un avis favorable à l’amendement n° 94 présenté par le rapporteur.

M. Fasquelle a abordé, au travers de ses deux sous-amendements, un sujet dont nous avons souvent discuté ensemble. Le ministère a même déjà organisé, à sa demande, une table ronde autour de cette question.

Nous comprenons très bien les problèmes auxquels le Nord-Ouest de la France se trouve confronté, mais je souhaiterais tout de même que vous retiriez vos sous-amendements. N’y voyez pas là une réponse dilatoire. Au contraire, je m’engage, devant le ministre d’État, à ce que l’on réunisse très rapidement autour de l’État les différents partenaires qui pourraient participer à la modernisation de ces lignes.

M. Daniel Fasquelle. J’accepte de retirer ces sous-amendements.

(Les sous-amendements n° 564 et 565 sont retirés.)

(L'amendement n° 94 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 97.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Jacob, rapporteur. L’amendement 97 tend à ce que le réseau ferroviaire soit modernisé pour améliorer la qualité du transport de fret, en termes de fiabilité, de rapidité, de régularité et de souplesse. Dans cette perspective, les investissements de l’État seront concentrés sur certains axes prioritaires de circulation importante, où le fret doit bénéficier de sillons de qualité, en prenant notamment en compte les intérêts des chargeurs.

Cet amendement, longuement débattu en commission, a été largement approuvé.

(L'amendement n° 97, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 98.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Jacob, rapporteur. L’amendement 98 tend à remplacer, dans la première phrase de l’alinéa 5, « sera développé », par « et de transport combiné seront développés ».

(L'amendement n° 98, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 774 et 942.

La parole est à M. Philippe Tourtelier, pour soutenir l’amendement n° 774.

M. Philippe Tourtelier. L’amendement 774 tend à compléter ainsi la première phrase de l’alinéa 5 : « avec comme objectif le transfert de deux millions de camions d’ici 2020, soit 50 % du trafic et à terme l’intégralité ».

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet, pour soutenir l’amendement n° 942.

M. Yves Cochet. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 774 et 942, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 584.

La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire.

M. Jean-Louis Gagnaire. Il ne suffit pas de définir des axes ferroviaires pour le fret, encore faut-il assurer des interconnexions entre eux. Tel est le sens de l’amendement n° 584.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis défavorable. Outre que nous ne disposons pas des études qui nous permettraient de prendre une telle décision, nous atteignons là un niveau de précision qui ne relève pas de la loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

(L'amendement n° 584 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 443 rectifié.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard. Il convient de tenir compte des nuisances sonores.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Je souhaiterais que M. Michel Bouvard retire son amendement, qui est satisfait par l’article 36.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis.

M. Michel Bouvard. Je retire donc mon amendement.

(L’amendement n° 443 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 950 et 99, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Yanick Paternotte.

M. Yanick Paternotte. L’amendement 950 tend à insérer à la dernière phrase de l’alinéa 5, après « plates-formes », les mots « multimodales de fret classique ou à grande vitesse ». Un cofinancement public-privé serait ainsi possible – je pense en particulier aux plates-formes de Roissy-Carex et de Lyon-Carex.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. La commission a rendu un avis favorable à l’amendement suivant, le n° 99, que je retire à titre personnel au profit du n° 950, plus précis.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Sagesse.

(L'amendement n° 99 est retiré.)

(L'amendement n° 950 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 100.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Jacob, rapporteur. L’amendement 100 tend à ce qu’un audit fasse le point sur les autoroutes ferroviaires existantes avant toute extension du réseau. Cette proposition nous avait été soufflée par le président de la SNCF.

M. Michel Bouvard. C’est une bonne idée.

(L'amendement n° 100, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 778.

La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. L’amendement n° 778 tend à ce que l’État étudie la possibilité de mettre en place des prêts à long terme ou des garanties pour faciliter l’acquisition du matériel nécessaire par les opérateurs, et de soutenir par des dispositifs spécifiques les projets innovants comme les autoroutes de la mer, les autoroutes ferroviaires, les autoroutes fluviomaritimes ou le TGV aéro-ferroviaire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. J’avais émis un avis favorable à cet amendement qui pourrait cependant être rectifié. Je laisse au ministre le soin de faire une proposition.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Nous ne pouvons qu’être d’accord avec un tel amendement mais sa deuxième partie, après le terme « opérateurs », est satisfaite par l’alinéa 6 de l’article. Je propose à M. Duron de rectifier son amendement en retirant la deuxième partie.

M. le président. La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. J’accepte.

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet. Le rythme est bon, nous allons aussi vite que l’objet de notre étude ! Je m’interroge toutefois : alors que les mesures proposées sont parfois très générales – « l’État incitera, favorisera, etc. » –, il arrive que certaines soient très précises. L’on peut ainsi lire à l’alinéa 5 que l’adaptation des infrastructures fera l’objet d’un financement public complémentaire de 50 millions d’euros tout comme la création des plates-formes de fret.

Alors qu’en raison de l’article 40 nous n’avons pas le droit, en tant que parlementaires, de proposer un chiffre plus élevé, ne serait-ce que 51 millions d’euros, voilà que la somme de 50 millions d’euros est fixée dans une loi, qui plus est d’orientation, laquelle est votée pour vingt ans – sinon il ne s’agit plus d’une loi d’orientation. Certes, nous pourrions proposer par voie d’amendement une somme moins élevée, mais comme la mesure nous satisfait, nous aurions plutôt tendance à proposer une somme plus importante.

Ce qui me gêne, je le répète, c’est ce contraste entre l’affirmation de grands principes à l’article 9 et au début de l’article 10 du projet de loi et la fixation de chiffres précis, à l’alinéa 5 de l’article 10, comme un peu plus loin à l’alinéa 11 à propos du réseau fluvial, où est évoqué le chiffre de 4,5 milliards de tonnes-kilomètres par an. Ces chiffres apparaissent subitement sans que nous sachions d’où ils proviennent et surtout, je le répète, sans que les parlementaires que nous sommes aient le droit de contester aucun chiffre sur le plan financier. Pourquoi l’État nous impose-t-il 50 millions d’euros plutôt que 100 ?

Je déplore ce manque d’homogénéité du registre de la loi. Il s’agit présentement d’une loi d’orientation. Il y aura un Grenelle II qui proposera des mesures beaucoup plus détaillées et techniques. Je n’oublie pas non plus les éventuelles mesures fiscales dans la loi de finances initiale.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Cochet, ces chiffres sont repris, au mot près, des conclusions du Grenelle.

M. Daniel Paul. Vous ne les reprenez pas à tous les coups mais uniquement quand cela vous arrange !

(L'amendement n° 778, tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 880.

M. François Brottes. Il est défendu.

(L'amendement n° 880, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 889.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le secrétaire d'État, la rédaction des alinéas 6 et 7 montre bien vos intentions, puisque ces deux alinéas consacrent, s’il en était encore besoin, la concurrence dans le ferroviaire.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. La proximité, cela n’a rien à voir !

M. Daniel Paul. Si, puisque l’alinéa 7 prévoit qu’« une instance de régulation des activités ferroviaires favorisera la croissance globale des trafics transportés tout en veillant au développement sans discrimination de la concurrence sur le marché du transport ferroviaire de fret. » Dans la mesure où, hélas, une directive européenne impose le développement d’une telle concurrence, je ne vois pas l’utilité d’enfoncer le clou dans le projet de loi ! Cela montre bien votre intention de porter le fer là où cela fait mal !

Il en est de même de l’alinéa 6. Si, tout à l’heure, vous avez évoqué le port de Hambourg et la situation allemande, c’est que vous souhaitez que la SNCF délaisse les wagons isolés, se retire de plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de points sur lesquels elle a mené son activité durant des dizaines d’années et les abandonne à des opérateurs ferroviaires dits de proximité. Ce n’est pas ce que nous souhaitons, monsieur le ministre : nous voulons au contraire que la SNCF reconquière ces différents points parce que telle est sa vocation et qu’elle est conforme aux objectifs affichés par le Grenelle.

Je le répète : les alinéas 6 et 7 font preuve d’une grande cohérence en rappelant, de façon tout à fait inutile dans ce projet de loi puisqu’il existe déjà une directive européenne en la matière, le développement sans discrimination de la concurrence sur le marché du transport ferroviaire de fret. C’est ce que certains appelaient il y a quelques années « la concurrence libre et non faussée ».

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défavorable, parce que nous sommes, monsieur le député, dans un marché concurrentiel et qu’il appartient au conseil d'administration de la SNCF de définir la stratégie et les activités de l’entreprise et non à la loi de la guider dans ce sens.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Défavorable.

Sur le fond, monsieur Paul, nous souhaitons le développement du fret ferroviaire. Mais le mieux est l’ennemi du bien. Comme la SNCF ou les autres grands opérateurs privés sont incapables de faire du trafic de proximité, ce qui est le cas dans le monde entier, nous préférons, pour pallier cette faiblesse en France, un wagon marqué d’un autre sigle que SNCF à un camion marqué de ce même sigle !

Nous préférons donc des opérateurs de proximité permettant de développer le trafic ferroviaire à l’absence de trafic en raison de l’incapacité de la SNCF d’assurer un tel développement.

M. Yves Bur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Monsieur le ministre, la SNCF n’est pas non plus capable en ce moment de faire du fret de grande distance.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Si, il ne faut pas exagérer !

M. Noël Mamère. Il suffit de regarder les chiffres que, tous, nous avons déjà donnés pour constater que le fret ferroviaire a reculé par rapport au transport routier et que la SNCF est très en retard en la matière. Dois-je rappeler que la vitesse d’un train de marchandise est de 18 kilomètres heure ? Vous ne pouvez pas prétendre que nous sommes dans une situation de concurrence.

Nous savons tous que ce retrait de la SNCF sur les wagons isolés menace aujourd'hui 230 centres de tri,.

M. Germinal Peiro. Ils sont même fermés !

M. Noël Mamère. …ce qui est en contradiction non seulement avec le Grenelle de l’environnement mais également avec le développement des tout derniers événements en France, dans l’Union européenne et aux États-Unis, où on assiste au retour de l’État pour renflouer les banques. Et sur une question aussi cruciale que la lutte contre les effets de serre, notamment par le biais d’un redéploiement du transport, on retirerait à la SNCF certaines de ses prérogatives, alors qu’elle est, comme son nom l’indique, une société nationale !

Cette vieille idée, qui a conduit à l’obscénité de la situation actuelle, selon laquelle il convient d’introduire un renard libre dans un poulailler libre, doit être combattue.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Mamère, vous êtes complètement passéiste !

Aux États-Unis, il y a vingt ans, le trafic ferroviaire était en diminution. Si, aujourd'hui, aux États-Unis, au Canada et au Mexique, il est en plein développement, c’est, tout d’abord grâce au grand espace qu’a instauré l’ALENA – c’est ce que nous faisons avec l’Union européenne – et, ensuite, grâce aux opérateurs isolés qui ont repris ce trafic qui avait disparu et ont fait du fret le facteur dominant. Vous êtes complètement à côté de la plaque, monsieur Mamère. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur le secrétaire d'État, c’est votre argumentation qui est caricaturale. Nous pourrions vous citer des exemples de privatisations de services publics de chemins de fer qui ont conduit à une véritable catastrophe !

M. Yves Bur. C’est vous qui êtes caricatural !

M. André Chassaigne. Pourquoi les opérateurs de proximité réussiraient-il mieux que la SNCF, qui est un service public, alors que leur seul objectif sera évidemment de faire de l’argent grâce à leur activité ?

Mais le comble, c’est que ces opérateurs de proximité, pour concurrencer la SNCF ou pour pallier le retrait de la SNCF, seront financés par la SNCF elle-même !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. C’est faux !

M. André Chassaigne. Je vous citerai les propos de M. Guillaume Pepy qui, à la fin de son intervention du 19 mars 2008, annonce que « l’émergence d’opérateurs ferroviaires fret de proximité va être aidée par un fonds SCNF de 20 millions d’euros ouvert dès 2008 » – c’est la septième des dix actions immédiates annoncées. Alors que vous proclamez sans cesse ne pas vouloir fausser la concurrence, nous avons ici un exemple prouvant que vous ouvrez la porte au privé : non seulement la SNCF se retire mais, en plus, une partie de ses fonds propres, qu’elle a gagnés dans le cadre de son activité de service public, servira à abonder un fonds visant à installer le privé. C’est absolument scandaleux ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Yves Bur. Ce sera moins cher !

M. le président. La parole est à M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Chassaigne, c’est le vice-président communiste de la région Centre, M. Baudin, qui a demandé à la SNCF d’aider à la mise en place de l’opérateur de proximité ! Cette décision fait suite à sa demande. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. André Chassaigne. Il y a trois minutes, vous disiez que ce n’était pas vrai !

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Je ne suis pas membre du parti communiste, monsieur Bussereau, mais je crois pouvoir dire que, sur les bancs de la majorité, vous n’êtes pas non plus toujours d’accord. C’est la clinique qui se moque de la charité.

Vous avez évoqué les États-Unis. Or, comme M. Cochet l’a rappelé, si nous comparions le nombre de kilomètres de voies ferrées existant en France en 1921 et en 2008, nous verrions qu’aujourd'hui la France est devenue un véritable désert en la matière. La culture américaine du transport ferroviaire des pondéreux et des marchandises est bien plus ancienne que la nôtre. Dois-je vous rappeler les ouvrages de Jack Kerouak, qui relatent la situation de l’époque ? La France a abandonné ses lignes ferroviaires secondaires comme, du reste, elle a retiré dans les années cinquante les rails des tramways pour remplacer ceux-ci par les autobus et les voitures. Rappelons-nous ce que disait le président Pompidou : la ville doit s’adapter à la voiture. Nous sommes aujourd'hui dans une autre période. Si nous avions pris soin de maintenir notre maillage ferroviaire, qui était unique au monde, nous n’en serions pas là où nous en sommes aujourd'hui en matière de transport ferroviaire.

M. Michel Piron. Voilà l’histoire refaite par M. Mamère !

M. Noël Mamère. Il en est de même – nous y viendrons bientôt – pour toutes ces personnes qui ne peuvent pas s’acheter ou louer d’appartement en centre ville parce qu’elles n’en ont pas les moyens et qu’on a rejetées de ce fait jusqu’à 70 kilomètres. Elles sont aujourd'hui les otages de leurs voitures parce qu’il n’y a ni lignes secondaires ni transport public attractif. C’est sur un ensemble que nous devons nous battre.

(L'amendement n° 889 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 881.

La parole est à Mme Catherine Coutelle.

Mme Catherine Coutelle. Cet amendement vise à préciser le mode de financement des opérateurs à l’alinéa 6 de l’article 10 où, par trois fois, est employé le verbe « encourager » sans autre précision, si bien qu’on ne sait ni qui encourage ni à quelle hauteur !

C’est la raison pour laquelle l’amendement tend à prévoir que « le financement de ces opérateurs ne relèvera pas des collectivités territoriales » ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défavorable. Ce n’est pas à nous de décider si les collectivités financeront ou non ces opérateurs.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. La réponse du rapporteur est claire.

Je souhaite dès à présent revenir à la question du bruit, évoquée précédemment par Michel Bouvard et qui sera traitée à l’article 36. En effet, je ne suis pas certain que M. Bussereau sera encore dans l’hémicycle et je tiens à profiter de sa présence et de son attention.

Les riverains des voies de fret ferroviaire se posent des questions relatives au fait que le ministère et les bureaux d’études raisonnent sur un bruit moyen, ce qui est très grave. Calculer le bruit moyen revient à diviser le volume sonore par le nombre de minutes comprises dans une journée. On constate dès lors que le bruit moyen n’a pas beaucoup évolué.

Ce ne sera pas tout à fait l’avis des habitants d’un endroit pas très éloigné de chez Michel Bouvard,…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. La vallée de la Maurienne.

M. François Brottes. …où 185 trains de fret vont passer chaque jour à quelques centaines de mètres d’un village. Que pourront bien signifier, dans ce cas précis, les études qui indiqueront que le bruit moyen n’est pas très élevé ?

Je souhaite savoir, monsieur le secrétaire d’État, quand sera menée une politique offensive de développement du fret ferroviaire – à laquelle nous sommes d’ailleurs plutôt favorables –, si nous serons en mesure de raisonner en termes de bruit réel, à savoir celui qui vous réveille la nuit, et non plus en termes de bruit moyen.

J’espère que mon intervention permettra aussi à nos collègues peu réceptifs à la notion de bruit moyen et donc partisans d’une approche de ces questions mieux adaptée à la réalité, de se montrer plus à l’écoute de nos propositions.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Votre intervention, monsieur Brottes, me rappelle des souvenirs d’enfance car, mes parents étant cheminots, j’habitais dans des immeubles de la SNCF, à proximité des voies, à l’époque où circulaient encore des locomotives à vapeur, plus bruyantes que les locomotives actuelles.

Vous soulevez, et avec raison, une vraie question que connaît bien M. Bouvard. On veut saturer la voie de la Maurienne pour parvenir, au moment où le tunnel Lyon-Turin sera ouvert, à avoir la plus grande fréquentation possible. Or, dans la vallée de la Maurienne, très étroite, la route, l’autoroute provoquent déjà des nuisances sonores. Nous souhaitons, j’ai déjà répondu en ce sens à M. Mamère, développer une autoroute ferroviaire – c’est dans le programme du Grenelle – entre la région parisienne et Tours, entre Bordeaux et l’Espagne…

Mme Catherine Coutelle. Parlez du Chasseneuil !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Et déjà les riverains de Poitiers, Mme Coutelle le sait bien avec le Chasseneuil, et c’est aussi le cas de Poitiers ville, d’Angoulême, qui se trouvent dans de petites vallées, nous avertissent que la réalisation de ce programme générera beaucoup de bruit.

Nous allons donc mener un important travail sur le matériel ferroviaire…

Mme Catherine Coutelle. Absolument !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. …car autant le matériel voyageurs a évolué avec, notamment, les TGV et les TER modernes, autant le matériel de fret a peu progressé, qu’il s’agisse des freinages, du bruit des attelages, des essieux. Aussi le ministre d’État a-t-il inscrit aux programmes de recherche du PREDIT, en particulier, tout un travail en collaboration avec l’industrie ferroviaire, afin que nous soyons à même de fabriquer, dans les années à venir, un matériel de fret qui ne soit pas bruyant, faute de quoi nous ne ferions que déplacer les nuisances sonores de la route vers le fer, quand bien même la pollution diminuerait. Vous avez donc raison de souligner l’importance du travail à réaliser en la matière.

M. François Brottes. Vous ne m’avez pas répondu sur la question du bruit moyen, monsieur le secrétaire d’État.

(L'amendement n° 881 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 949.

La parole est à M. Yanick Paternotte.

M. Yanick Paternotte. Il s’agit d’un excellent amendement,…

M. Yves Bur. C’est bien le cas !

M. Yanick Paternotte. …encore, monsieur Bur, que je n’en sois pas le seul signataire même si c’est moi qui l’ai rédigé. En effet, il est cohérent avec l’excellent amendement n° 208 de Claude Bodin, oublié avant l’apéritif, ce dont nous aurons du mal à nous remettre, même si nous allons, grâce au Gouvernement, tenter de le faire repasser.

L’amendement n° 949 vise à insérer, à la dernière phrase de l’alinéa 6, les mots : « , notamment en correspondance avec le mode aérien », après le mot « vitesse ». Il a été rédigé dans le même esprit que l’amendement présenté tout à l’heure par notre collègue Duron, et concerne tout ce qui est aéro-ferré.

La question du bruit moyen et du bruit émergent, monsieur Brottes, présente une vraie difficulté pour le report modal de l’avion vers le TGV la nuit. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai déposé plusieurs amendements visant à favoriser le financement de projets d’amélioration de l’environnement sonore des riverains. Je m’efforce par conséquent de garder une certaine cohérence dans la présentation de mes amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable.

(L'amendement n° 949 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 898.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Je vous propose, monsieur le président, de défendre en même temps l’amendement n° 890, qui est lié.

RFF a procédé à l’électrification de certaines lignes ferroviaires, on peut s’en réjouir. Toutefois, dans le cadre de la concurrence dont nous parlions avec M. le secrétaire d’État, des opérateurs font circuler des trains de fret tractés par des locomotives diesel.

M. Yves Bur. Comme par hasard !

M. Daniel Paul. La concurrence s’en trouve donc contrariée, ce qui aurait dû attirer l’attention de tous ceux qui souhaitent qu’elle soit libre et non faussée. L’effort fourni par RFF pour électrifier ces lignes est mis à mal par ce recours à des locomotives diesel qui ne devraient pas circuler sur les lignes en question.

Dans un premier temps, je pensais proposer un amendement interdisant purement et simplement le recours au diesel sur ces voies électrifiées : pas de diesel sous les caténaires ! Seulement, ce n’est pas si simple. En effet, la SNCF aussi peut être amenée, en cas de problème, à utiliser des locomotives diesel.

M. Yves Bur. Eh oui !

M. Daniel Paul. L’expérience n’en montre pas moins que les concurrents ont systématiquement recours au diesel alors que RFF a très largement installé l’électricité.

Le présent amendement vise donc à contourner la difficulté en prévoyant d’augmenter la redevance, le droit de péage, lorsqu’on utilise du diesel sur une ligne électrifiée pour le transport de fret. Il s’agit par conséquent d’insérer, après l’alinéa 6, l’alinéa suivant : « Uniquement pour les trains de fret ferroviaire, il est proposé de rendre plus attractive l’utilisation de l’électricité en supprimant la redevance de consommation électrique (RCE) – et non pas : « la redevance pour le transport de l’électricité » ; il convient donc de rectifier l’amendement –, [redevance] versée à Réseau ferré de France (RFF). »

Le reste n’a plus d’objet parce que l’augmentation de la redevance pour l’utilisation de locomotives au diesel compenserait la perte de recettes liée à la réduction, à la suppression même, de la redevance de consommation électrique.

Cet amendement est éminemment écologique, il pousse tous les opérateurs à se situer sur la même ligne en matière de concurrence. Cet amendement a été élaboré avec le concours de l’opérateur national de façon à pouvoir être présenté et, je l’espère, adopté.

J’ajoute, pour finir, que l’amendement est conforme à l’article 7 de la directive européenne n° 2001-14 qui, dans son point n° 5, précise : « La redevance d’utilisation de l’infrastructure peut être modifiée pour tenir compte du coût sur l’environnement de l’exploitation des trains. » Cette modification, en cas d’absence de niveau de tarification comparable pour les autres modes de transport, ne doit pas entraîner de changement du montant global des recettes perçues par RFF. Il s’agit donc de suggérer au Gouvernement de mettre en œuvre une politique tarifaire incitative pour la traction électrique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 898 tel qu’il vient d’être rectifié ?

M. Christian Jacob, rapporteur. La commission a adopté un amendement similaire qui précisait simplement que le recours à une traction non-électrique sur une ligne électrifiée donnait lieu à un supplément de péage. Ainsi, en quinze secondes, les choses sont dites. En revanche, je me tourne vers le Gouvernement car je crains que ce ne soit pas conforme au droit européen.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Une telle disposition contrevient en effet à la réglementation européenne. Donc avis défavorable du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

M. Daniel Paul. C’est délibérément que j’ai fait référence à l’article 7 de la directive 2001-14.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État. Ça va, on a compris…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Eh oui, j’avais bien compris !

M. Christian Jacob, rapporteur. Je pense que M. le secrétaire d’État connaît cette directive, monsieur Paul.

M. Daniel Paul. Certes. J’imagine que la SNCF aussi, la connaît. À partir du moment où il y a équilibre, qu’on ne change pas le montant global perçu par RFF, nous ne sommes pas en contradiction avec la directive.

(L'amendement n° 898 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 101.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Jacob, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable.

(L'amendement n° 101 est adopté.)

M. le président. Nous en venons à l’amendement n° 890, monsieur Paul.

M. Daniel Paul. Il a été défendu en même temps que l’amendement n° 898.

(L'amendement n° 890, repoussé par la commission et par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 102, 891 et 979 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 102 et 891 sont identiques.

L’amendement n° 891 a déjà été défendu par M. Daniel Paul. Qu’en est-il de l’amendement n° 102, monsieur le rapporteur ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, monsieur le rapporteur ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Je le retire à la demande du Gouvernement.

(L'amendement n° 102 est retiré.)

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Paul ?

M. Daniel Paul. Oui, monsieur le président.

(L'amendement n° 891, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite que vous nous expliquiez pour quelle raison tous ces amendements, y compris celui de la commission, ont été repoussés par le Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je vais vous l’expliquer.

M. Daniel Paul. Cette attitude est contradictoire avec l’invocation permanente du Grenelle, la volonté affichée de protéger l’environnement. En effet, en refusant ces amendements, vous allez favoriser le recours au diesel sous les caténaires.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Bien sûr que non !

M. le président. Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Si M. Paul était un peu au courant de la situation, il saurait que, faute de locomotives électriques sur le marché européen pendant plusieurs années, les opérateurs privés se sont vus contraints de recourir provisoirement à des locomotives diesel. Or, comme nous souhaitons la présence d’un maximum d’opérateurs pour développer le fret et atteindre notre objectif de report global, nous ne pouvons pas pendant plusieurs années empêcher la circulation des locomotives diesel, l’industrie européenne n’ayant pas encore fourni suffisamment de locomotives électriques.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l’amendement n° 979 rectifié.

M. Michel Bouvard. J’ai bien entendu les réponses de M. le secrétaire d’État. La situation est totalement insatisfaisante sur des itinéraires électrifiés, pour certains depuis de très nombreuses années.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Oui, mais nous manquons de locomotives électriques !

M. Michel Bouvard. J’ajoute qu’en zone de montagne, pour les trains longs de 700 mètres qui passent sous les Alpes, la traction est réalisée par trois locomotives. Utiliser pour cela du diesel revient à conforter les pollutions plutôt qu’à les réduire, ce qui reste incompréhensible pour la population locale.

Je comprends bien que le parc de locomotives électriques est insuffisant ; c’est pourquoi le présent amendement ne propose d’interdire l’autorisation de circuler sur une ligne électrifiée à tout train utilisant un mode de propulsion autre qu’électrique qu’à partir du 31 décembre 2009, ce qui laisse le temps aux opérateurs de se doter du parc qui convient.

M. Germinal Peiro. Ce n’est pas idiot, ça !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Mais non, monsieur Bouvard, c’est trop tôt !

M. Michel Bouvard. On ne peut pas ne rien faire en la matière.

En effet, le volume global de fret transporté par le rail ne progresse pas dans les Alpes. On espère que la situation changera lorsque seront achevés les travaux du tunnel du Mont Cenis. Un délai d’adaptation est certes nécessaire.

M. Germinal Peiro. Il faut voter cet amendement !

M. Michel Bouvard. Je suis prêt à accepter un sous-amendement du Gouvernement s’il estime que la date doit être repoussée ; reste que nous devons nous fixer comme objectif d’interdire la traction diesel sur les lignes électrifiées, et en particulier à l’intérieur du périmètre des plus grands parcs nationaux du pays.

M. Germinal Peiro. Très juste !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défavorable, à la lumière des explications du secrétaire d’État.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je redis à M. Bouvard, qui est un excellent connaisseur, que le parc, pour quelques années encore, ne permet pas ce qu’il propose, que les locomotives diesel actuelles n’ont rien à voir avec les locomotives diesel anciennes en termes de pollution, et que je préfère un train de fret tiré, provisoirement, par une locomotive diesel, à la circulation de plusieurs centaines de camions dans sa vallée.

Je crois que nous devons laisser un peu de temps au temps. Je comprends tout à fait l’esprit de votre amendement, monsieur Bouvard, mais je vous demande de le retirer, parce que, à court terme, il n’est pas favorable au report modal.

M. Michel Bouvard. Reportons le délai au 21 décembre 2015.

M. le président. La parole est à M. Philippe Tourtelier.

M. Philippe Tourtelier. La précision du délai lève votre objection, monsieur le secrétaire d’État. C’est un excellent amendement, que nous allons soutenir.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire.

M. Jean-Louis Gagnaire. La solution de facilité consiste à faire venir du matériel hors d’âge – et thermique –…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Non, pas obligatoirement. Ce n’est pas vrai.

M. Jean-Louis Gagnaire. Si, souvent. C’est une solution de facilité. Si l’on ne fixe pas une date butoir pour éliminer les tractions thermiques sur des réseaux électrifiés, cela sera sans fin. Il faut donc absolument marquer une limite.

L’acquisition de matériels électriques, surtout s’ils sont de forte puissance, n’est pas beaucoup plus onéreuse que celle de matériels thermiques. En outre, en exploitation, les coûts sont réduits.

Je précise que parfois, l’exploitant national ne donne pas l’exemple, notamment dans le trafic voyageurs. J’ai pu observer que des AGC bimodes fonctionnaient en thermique tout en étant sous caténaire. C’est un peu curieux.

La solution de facilité est la même pour tous. Je crois donc qu’il faut absolument que l’on s’impose la traction électrique, surtout quand, en forte pente, on a besoin de puissance.

M. le président. La parole est à M. Yanick Paternotte.

M. Yanick Paternotte. Je propose de rectifier l’excellent amendement de M. Bouvard : il est possible de manier la carotte et le bâton en repoussant la date au 31 décembre 2015. Peut-être pourrait-on ainsi parvenir à une solution de compromis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. J’aimerais bien, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous expliquiez pourquoi nous n’avons pas de capacité d’anticipation. L’observation de notre collègue Michel Bouvard est très significative : on n’est pas capable de fixer une date pour savoir quand on aura des locomotives électriques. Même si vous savez que, dans l’immédiat, nous n’en avons pas suffisamment, ce sera possible demain, éventuellement. Et l’on ne peut pas fixer une date pour savoir quand on va cesser d’utiliser les locomotives thermiques sur des lignes électrifiées ? Je ne comprends pas que l’on n’ait pas cette capacité d’anticipation.

Dans le même temps, on va désélectrifier des lignes, je pense en particulier à la ligne ferroviaire Millau-Neussargues. Et les régions achètent des TER destinés à rouler sur des voies qui ont besoin d’être régénérées parce qu’elles n’ont pas été entretenues.

Il y a là quelque chose que je ne comprends pas, je le répète. Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous expliquiez comment vous pensez anticiper, et si possible en nous donnant quelques dates, parce que, autrement, tout cela n’est que du vent et l’on peut voter n’importe quoi, ça ne veut plus rien dire.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur le président, nous n’allons pas passer la nuit sur cette question. L’Assemblée fera ce qu’elle souhaite. Simplement, si cet amendement est adopté, qu’en sera-t-il lorsqu’une ligne aura des problèmes techniques et que des travaux devront être entrepris ?

Autrement dit, d’un côté, vous voulez développer le fret ferroviaire et, de l’autre, vous ne laissez aucune souplesse aux exploitants. Il suffit qu’il y ait des accidents, des travaux, des problèmes de locomotives, et vous allez obliger l’exploitant, s’il n’a pas de locomotive électrique disponible,…

M. Germinal Peiro. Mais ce sont des cas exceptionnels !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Eh oui, des cas exceptionnels que vous allez devoir faire figurer dans la loi : la pluie, les accidents, le jour, la nuit…Enfin, il s’agit d’une loi d’orientation, je pense qu’il faut raison garder.

M. le président. Monsieur Bouvard, êtes-vous d’accord pour rectifier votre amendement en remplaçant la date : « 2009 » par la date : « 2015 » ?

M. Michel Bouvard. Oui.

M. le président. Votre amendement devient ainsi l’amendement n° 979 deuxième rectification.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Monsieur Bouvard, j’attire votre attention sur le fait suivant : je suis sur une ligne de chemin de fer dont une partie n’est pas électrifiée alors que l’autre l’est. Avec les locomotives bimodes, on lève les caténaires. Mais dans le passé, on était obligé de bloquer les trains et de procéder à des changements de trains.

Ne pourriez-vous pas retirer cet amendement et voir s’il n’est pas possible de travailler la question en affinant les choses pendant la navette ? Je pense que nous risquons de nous bloquer sur ce type d’amendement. Nous avons le temps, il n’y a pas de déclaration d’urgence.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Bouvard ?

M. Michel Bouvard. Nous pouvons adopter cet amendement, la date de 2009 ayant été remplacée par celle de 2015, et le Sénat fera les adaptations nécessaires.

Je précise que l’amendement propose d’imposer l’utilisation de matériel électrique quand c’est la totalité du parcours qui est électrifiée. Le problème posé par Christian Jacob ne se pose donc pas.

Quoi qu’il en soit, le Sénat pourra améliorer l’amendement. Je le maintiens.

(L'amendement n° 979 deuxième rectification est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 479.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi. De toute évidence, le Grenelle sonne le grand retour du ferroviaire, des transports en commun en site propre sous toutes leurs formes.

On revient depuis quelques années – et ce mouvement va être accentué avec ce texte – à ce qu’a fait la France dans les années 1925-1930, au siècle précédent. Nous avons, partout sur notre territoire, des traces du passé qui, au moment où toutes les collectivités ont besoin de maîtriser de l’espace et du foncier pour leurs projets de transports en commun en site propre, seraient très utiles.

Partout, le long des routes, vous voyez, sous les herbes folles, ici ou là, des vestiges de telle ou telle ligne fermée en 1934, en 1940, à la fin de la guerre, dans les années cinquante.

Je dis que la première précaution à prendre, dans le cadre de ce Grenelle, c’est d’interdire purement et simplement que ces lignes, qui restent encore disponibles en termes d’espace foncier, puissent être utilisées à un autre usage que la mise à disposition exclusive, soit de transports ferroviaires, soit de nouveaux transports en commun en site propre.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. Spontanément, j’y suis plutôt défavorable, parce que je le trouve trop encadrant. Il est vraiment bloquant. On interdit la revente, la transformation, le tronçonnement. On fige complètement les choses.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je comprends très bien la motivation de M. Estrosi. Mais je m’adresse à lui en tant que président de conseil général et maire d’une grande ville.

Quelle est l’erreur que l’on faisait jusqu’à présent ? On désaffectait trop rapidement des voies – ce que n’ont pas fait les Allemands –, alors que quinze ou vingt ans après, on avait plutôt envie de les rouvrir parce que la géographie et l’économie avaient changé.

Je pense par exemple, madame Labrette-Ménager, vous qui êtes députée de la Sarthe, à la ligne reliant Laval à Mayenne.

Mme Fabienne Labrette-Ménager. Tout à fait !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Près de Caen, madame Ameline, le problème s’est également posé, et il y a eu tout un débat juridique.

C’était la bêtise des vingt dernières années : on désaffectait, et on enlevait les rails.

Cela étant, monsieur Estrosi, dans certains cas, notamment en milieu rural, quand on voit bien que l’on ne pourra pas faire du transport en commun, par exemple entre deux villages, une communauté de communes, un pays, un département peuvent très bien avoir envie de faire un mode de cheminement doux, une piste cyclable par exemple.

La bonne idée, c’est de dire : attention, ne désaffectons pas trop tôt, n’insultons pas l’avenir. Aujourd’hui, les Allemands rouvrent beaucoup de lignes de fret qu’ils avaient fermées il y a vingt ans. Mais réserver ces lignes exclusivement aux transports en commun en site propre, cela pose une difficulté.

Peut-être serait-il possible, monsieur le député, au cours de la discussion, d’améliorer la rédaction de votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi. J’entends votre argument sur la ruralité, monsieur le secrétaire d’État, à condition que les choses soient encadrées. Mais la vraie difficulté, aujourd’hui, elle se pose en agglomération. Je crois que vous avez vous-même participé à l’inauguration de la réouverture d’une ligne entre Cannes et Grasse, qui avait été fermée il y a quarante ans. Si elle n’avait pas été préservée, il n’aurait pas été possible d’installer, avec l’aide du conseil régional, un TER entre Cannes et Grasse. Et des exemples comme celui-ci, on en trouve dans toute la France.

Je suis assez favorable au principe que vous me proposez, qui serait de préserver les lignes désaffectées en agglomération, non pas au sens administratif du terme mais au sens de l’INSEE, puisque les intercommunalités ne sont pas forcément organisées en communauté d’agglomération. Si vous en êtes d’accord, nous pourrions rectifier l’amendement en insérant, après le mot : « désaffectées », les mots : « en agglomération ».

M. le président. Cet amendement devient ainsi l’amendement n° 479 rectifié.

La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire.

M. Jean-Louis Gagnaire. Je crois que M. Estrosi a parfaitement raison d’attirer l’attention sur l’aliénation des emprises ferroviaires. Je citerai le cas de l’agglomération lyonnaise. Le conseil général du Rhône a longtemps hésité à requalifier en rocade une emprise ferroviaire, l’ancienne ligne des chemins de fer de l’Est lyonnais. Et heureusement, à une voix près, cela ne s’est pas fait. Cela a permis à la communauté urbaine de Lyon et au conseil général du Rhône d’utiliser cette ligne pour qu’un tramway puisse relier la gare de la Part-Dieu à l’aéroport Lyon – Saint-Exupéry.

Je crois donc que nous devons être extrêmement coercitifs en agglomération, parce qu’il y a eu trop d’abus. On sait très bien que la poussée du foncier est telle que l’on a tendance à utiliser ces emprises, et l’on ne peut pas se permettre d’aliéner des emprises ferroviaires si l’on veut faire passer des trains, des tram-trains ou des tramways.

On peut effectivement limiter cette disposition aux agglomérations.

S’agissant des emprises ferroviaires en zone rurale, d’autres utilisations sont possibles, je pense à l’aménagement de routes vertes. On démonte les rails, mais on n’aliène pas l’emprise. On peut toujours, le moment venu, poser de nouveau des rails. De toute façon, les voies trop anciennes doivent être déposées, régénérées, de telle sorte qu’il faut reprendre le travail à zéro. Mais l’essentiel est d’éviter l’aliénation des emprises. Nous connaissons des cas où des gares ont été vendues, rendant impossible le passage de futurs transports en commun.

Nous sommes donc plutôt favorables à cet amendement dans son principe, sous réserve de sa réécriture.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je propose une rédaction consistant, après le mot : « tronçonnement », à rédiger ainsi la fin de l’amendement : « des lignes ferroviaires désaffectées en zone agglomérée font l’objet d’un moratoire. Un décret d’application en fixera les modalités ».

Le moratoire permettrait de mettre au point, par décret, avec la commission des affaires économiques, les modalités.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. En zone urbaine, monsieur le secrétaire d’État ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. J’ai parlé de zone « agglomérée », parce que le terme est plus large que celui de zone urbaine.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Un certain nombre de collègues suggèrent une autre solution. Il s’agirait d’ajouter après les mots : « en site propre », les mots : « ou à l’aménagement de voies de circulation douce ».

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Ma rédaction est meilleure.

M. le président. La parole est à M. Germinal Peiro.

M. Germinal Peiro. Il faut retenir cette idée et ne pas la limiter aux agglomérations ou au secteur aggloméré. Les anciens tracés ferroviaires représentent une véritable richesse pour notre pays. Malheureusement, beaucoup ont été vendus.

En matière de développement rural, nous sommes à la recherche d’activités nouvelles et d’endroits pour les organiser. Si des transports en commun réutilisent les emprises, cela pourrait être également le cas pour des vélos-routes ou d’autres formes d’activités.

Il serait simple de déposer un sous-amendement à l’amendement de M. Estrosi, en le limitant à la première ligne : « En ce qui concerne les lignes ferroviaires, la revente, la transformation ou le tronçonnement des tracés des lignes ferroviaires désaffectées sont interdits. »

Nous devons préserver ce patrimoine. Nous avons assez fait de dégâts dans ce domaine.

M. le président. Je me permets de suggérer à M. le secrétaire d’État de nous faire parvenir par écrit le texte de son amendement, comme le prévoit l’alinéa 2 de l’article 98 du règlement.

La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Cet amendement est indispensable. L’évolution démographique des agglomérations le montre. lorsque le département comptait 600 000 habitants, l’agglomération de Clermont-Ferrand comptait environ 120 000, 130 000 habitants.

Aujourd’hui, le grand Clermont, c’est 350 000 habitants, et, demain, ce sera plus encore. Des lignes ont été abandonnées, mais elles peuvent refonctionner.

Nous avons mis en place les tramways, qui permettent la multimodalité. Il suffirait de remettre en circulation la ligne de Vertaizon-Billom, pour éviter que, chaque jour, n’entrent plus 12 000 véhicules dans l’agglomération clermontoise. Cela réglerait certains problèmes d’aménagement et améliorerait la qualité de vie des utilisateurs des transports.

M. le président. Je donne lecture de l’amendement n° 2060 du Gouvernement :

« En ce qui concerne les lignes ferroviaires désaffectées, la revente, la transformation ou le tronçonnement des lignes ferroviaires désaffectées feront l’objet d’un moratoire dans les zones agglomérées. »

Plusieurs députés du groupe GDR. C’est inacceptable !

M. le président. La parole est à M. Yves Fromion.

M. Yves Fromion. L’interdiction des cessions d’emprises interdit que l’on en fasse un quelconque usage, notamment touristique. Ce n’est pas RFF, propriétaire des assiettes, qui pourra accomplir des transformations à des fins touristiques ou autres.

Je crois qu’il ne faut pas confondre une vente faite à la puissance publique et une vente faite à des particuliers. J’ai fait acheter, dans mon département, une ancienne voie ferrée par le conseil général, qui en a fait une trouée verte, un grand espace de promenade. C’est différent du fait de laisser des propriétaires privés racheter des tronçons de lignes pour agrandir les chasses, en Sologne par exemple.

Il faut faire très attention à ce que nous allons faire. Si nous interdisons toute vente, toute cession à la puissance publique, les emprises seront gelées, car personne ne pourra rien y faire.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. L’amendement de M. Estrosi recèle incontestablement une bonne intention. Mais la rédaction laisse subsister quelques doutes. Je conçois que, lorsqu’on est élu d’une grande agglomération, on écrive : « exclusivement réservées aux futurs transports en commun… » ; car c’est une priorité.

Mais il n’y a pas que cela. D’autres activités peuvent être organisées. M. Mariton évoquait, avec raison, les circulations douces. M. Fromion vient de parler des activités touristiques. J’en connais dans un département qui m’est cher, et ce ne sont pas des transports en commun.

M. Germinal Peiro. Exactement !

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Lorsque nous votons un amendement, nous devons être prudents, afin d’éviter de nous enfermer, nous-mêmes dans ce qui sera ensuite une loi, opposable à tous.

L’idée du moratoire du Gouvernement est une bonne idée, que M. Estrosi pourrait accepter dans la mesure où cela permet de prendre en compte sa demande, qui est fondée, de l’adapter aux circonstances pour faire ici du tourisme, ailleurs de la circulation douce et des transports en commun, lorsque c’est nécessaire.

Je me rallie donc à l’amendement du Gouvernement, qui est une solution plus souple et plus acceptable par tous.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je vais citer un exemple, dont la presse locale s’est fait l’écho la semaine dernière. Un syndicat intercommunal – situé sur les arrondissements de Thiers et d’Ambert, au cœur de la circonscription que je représente – a réussi à obtenir de RFF un engagement pour acheter la ligne de chemin de fer désaffectée.

Cette ligne part de Courpière jusqu’à Ambert-Arlanc, voire jusqu’à La Chaise-Dieu – notre collègue Proriol connaît très bien ce dossier.

M. Estrosi connaît également ce dossier – nous en avions parlé ensemble –, qui s’appuie sur un pôle d’excellence rural –, lequel a, si je puis dire, deux pieds.

Le premier pied concerne le maintien d’une ligne touristique, qui fonctionne aujourd’hui sur un support associatif dans d’excellentes conditions et qui constitue un attrait touristique important pour notre région.

Le deuxième pied de ce pôle d’excellence rural – nous sommes complètement au cœur du débat – concerne le transport de copeaux de bois d’une scierie jusqu’à une papeterie, pour alimenter une chaudière à bois.

Si la décision d’interdire toute vente était prise, cela signifierait que ce projet élaboré par les collectivités locales, soutenu par le conseil général, le conseil régional d’Auvergne et par le parc naturel national Livradois-Forez, qui porte ce projet au niveau de l’ingénierie, ne verrait pas le jour. Nous serions dans l’impossibilité de signer la vente. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je ne dis pas cela dans un esprit polémique.

M. le président. Monsieur Chassaigne, nous vous avons compris.

À ce stade de la discussion, nous avançons non à la vitesse d’un TGV, mais celle à d’un omnibus. À cette cadence, nous passerons le week-end ici.

Je pense que l’Assemblée est suffisamment éclairée.

Je vais donc mettre successivement aux voix l’amendement n° 479 de M. Estrosi, qui me paraît plus large, puis l’amendement n° 2060 du Gouvernement.

M. Christian Estrosi. Mon amendement est effectivement plus large que celui du Gouvernement. En réalité, le Gouvernement a déposé un sous-amendement.

M. le président. Non : un amendement !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Je suis prêt à le transformer en sous-amendement.

M. le président. Monsieur Estrosi, maintenez-vous votre amendement ?

M. Christian Estrosi. La précision de M. Mariton n’était pas inintéressante.

M. le président. Monsieur Estrosi, je vous propose de retirer votre amendement et de réexaminer ce point au cours de la navette. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christian Estrosi. Nous discuterons au cours de la navette des précisions à apporter. Mais, pour l’heure, je préfère maintenir mon amendement, afin qu’il soit mis aux voix. Nous verrons au cours de la navette comment l’améliorer.

M. François Brottes. Monsieur le président, je demande, au nom du groupe socialiste, une brève suspension de séance, car nous souhaitons sous-amender les amendements en discussion.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Serge Poignant, pour un rappel au règlement.

M. Serge Poignant. Je voudrais rappeler à l’ensemble de nos collègues que nous sommes dans le cadre du Grenelle I et que nous discutons de la mise en œuvre de principes et d’orientations. Un Grenelle II suivra. Je ne dis pas que les questions particulières ne sont pas intéressantes mais, de grâce, tenons-nous en au Grenelle I et ne faisons pas, dans l’hémicycle, un travail de commission alors que les amendements dont il est question n’y ont pas été présentés, même pas au titre de l’article 88. Si nous poursuivons ainsi, nous nous égarerons complètement.

Pensez à l’image que nous donnons alors que nous discutons d’une loi majeure d’orientation. (Applaudissements sur les nombreux bancs du groupe UMP.)

M. le président. Pour la bonne compréhension du débat, je vais demander à M. Estrosi de nous donner lecture de son amendement n° 479 rectifié.

M. Christian Estrosi. J’ai rectifié mon amendement en prenant en compte les propositions de M. Mariton, qui me paraissent d’une grande sagesse.

M. Alain Gest. Estrosi, Mariton : même combat !

M. Christian Estrosi. Après l’alinéa 7, de l’article 10, insérer l’alinéa suivant :

« En ce qui concerne les lignes ferroviaires désaffectées en agglomération, la revente, la transformation ou le tronçonnement des tracés des lignes ferroviaires désaffectées sont interdits. Ces lignes seront réservées aux futurs transports en commun en site propre ou à l’aménagement de voies de circulation douce. »

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Très bien !

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement rectifié ?

M. Christian Jacob, rapporteur. La commission n’a pas examiné cet amendement. À titre personnel, je persiste à penser que l’on ne peut pas adopter cet amendement sans un travail préalable en commission, à la va-vite et en bloquant le débat. Il n’est pas déshonorant, monsieur le député, de retirer un amendement, de prendre le temps d’approfondir la question et de le représenter en séance dans de bonnes conditions ! Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Sagesse.

M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Estrosi ?

M. Christian Estrosi. Je le maintiens.

(L'amendement n° 479 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 2060 du Gouvernement…

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je le retire, monsieur le président.

(L'amendement n° 2060 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Sans vouloir polémiquer avec M. le ministre, je souhaite simplement apporter une information complémentaire.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Vous avez téléphoné au parti !

M. André Chassaigne. Assurément ! J’ai téléphoné à M. Bodin que vous avez mis en cause tout à l’heure en affirmant que c’est lui qui a demandé à la SNCF de prévoir 20 millions d’euros pour les opérateurs de proximité. Vous avez sans doute oublié la nature du dossier, monsieur le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Pas du tout !

M. André Chassaigne. En fait, il s’agit de tout autre chose et je tiens à rétablir la vérité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Il s’agissait, à la demande de l’État, d’une inscription de 30 millions d’euros dédiés au fret de proximité dans le contrat de plan État-région. La région Centre n’est donc pas favorable aux opérateurs de proximité.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Mais non !

M. André Chassaigne. Il s’agit donc d’un mensonge. M. Bodin m’a affirmé que les propos que vous aviez tenus, monsieur le ministre, étaient faux !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Vous n’y connaissez rien !

M. le président. Je suis saisi d'un amendement rédactionnel, n° 103, de la commission.

(L'amendement n° 103, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 105 et 581, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 105.

M. Christian Jacob, rapporteur. Je laisse le soin à M. Duron de le présenter.

M. le président. Vous avez la parole, monsieur Duron.

M. Philippe Duron. Je retire mon amendement n° 581 au profit de l’amendement n° 105.

(L'amendement n° 581 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. Il s’agit d’un amendement de précision qui vise à améliorer la compétitivité des ports et de leur desserte multimodale massifiée dans la concurrence internationale. L’efficacité des ports est liée à la qualité et à la rapidité des acheminements à destination et en provenance des ports. C’est une des conditions de leur réussite.

(L'amendement n° 105, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 582.

La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. Lors de la discussion sur la loi concernant les grands ports maritimes, nous avions été un certain nombre à demander l’organisation rapide d’un CIACT afin de mettre en œuvre les mesures favorisant l’attractivité et la modernisation des ports maritimes. Cela ne fut pas possible à l’époque, le Gouvernement souhaitant aboutir à un texte conforme. Nous pourrions aujourd’hui rattraper ce manquement et inscrire le principe d’un CIACT portuaire dans la loi.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis défavorable. La desserte multimodale est déjà prise en compte. De plus, nous ne pouvons donner une instruction au CIACT, qui est un comité interministériel. Seul le Gouvernement est autorisé à le faire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. M. Duron a tout à fait raison d’insister sur la nécessité d’une politique de coordination entre les différentes plateformes portuaires. Cela dit, vous le savez, le Gouvernement fixe les dates des réunions qu’il organise. Cela ne peut donc être inscrit dans la loi. En revanche, en parler dans le cadre du schéma national des infrastructures est une excellente idée.

Avis défavorable, donc.

(L'amendement n° 582 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement de cohérence, n° 104 rectifié, de la commission.

(L'amendement n° 104, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 713.

La parole est à M. Germinal Peiro.

M. Germinal Peiro. Orienter massivement le transport vers le transport fluvial ne doit pas nous exonérer de préserver les milieux aquatiques, continental et estuarien, en métropole ou outre-mer, compte tenu de leur fragilité. On a tendance à penser, à un moment où l’on essaie d’harmoniser les activités humaines avec la préservation de l’environnement, que le transport fluvial n’aurait pas d’impact sur l’environnement. Ce n’est pas le cas. Les estuaires sont souvent le refuge de poissons migrateurs :celui de la Gironde en accueille huit espèces. Si l’on y développe de façon massive le transport fluvial, l’impact sur l’environnement est inévitable. Il convient de préciser que cela doit se faire en respectant les milieux aquatiques.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis défavorable. Cet aspect est déjà pris en compte à l’article 9 concernant l’ensemble des milieux naturels. Plus on entre dans le détail, plus on risque d’omettre un certain nombre de points, l’exhaustivité étant impossible à atteindre.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Je soutiens bien évidemment l’amendement de notre collègue Germinal Peiro. Votre argumentation, monsieur le rapporteur, ne me semble pas pertinente. Je vous rappelle que l’estuaire de la Gironde est l’un des derniers estuaires encore protégés. Il a été très largement défiguré, notamment par l’extraction des graves ; les péniches bousculent la vie des frayères et détruisent les berges et les rivages de l’estuaire.

Les estuaires sont des écosystèmes extrêmement fragiles. Dois-je rappeler à notre ministre qui connaît bien l’estuaire de la Gironde l’existence de projets qui ressortent de temps en temps, comme le projet du pont du Verdon sur l’estuaire, qui devrait relier les deux rives. Si un pont est construit à cet endroit, ce sera la fin du bouchon vaseux. Or ce bouchon retient le cadmium relâché par l’usine SAFT, qui fabriquait des piles. Ce n’est donc pas cela, un milieu naturel au sens où nous l’entendons aujourd’hui. Souvenons-nous des bagarres qui ont eu lieu, dans cet hémicycle, autour de l’application de la directive Habitat ou Natura 2000. Souvenons-nous aussi de l’attitude du port de Bordeaux qui gère l’estuaire et qui a refusé de mettre en œuvre cette directive.

La proposition de Germinal Peiro va tout à fait dans le sens de la protection de l’estuaire de la Gironde. Je rappelle à M. le ministre des transports – qui, en tant qu’élu de la région le sait parfaitement –, que si le grand contournement a été mis en péril par le travail des associations et des habitants, c’est parce qu’il conduisait à une destruction pure et simple d’un des derniers estuaires protégé par la convention de Ramsar. Peu nombreux sont les estuaires qui bénéficient de cette protection. C’est la raison pour laquelle il faut l’inscrire dans la loi.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. La réponse du rapporteur était parfaitement adaptée, monsieur Peiro.

Monsieur Mamère, sur cet estuaire où j’habite et que je souhaite préserver, nous créons actuellement une aire maritime protégée, face au port du Verdon. Les règles de Natura 2000 s’y appliquent. Une protection maximale y est donc déjà assurée.

(L’amendement n° 713 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 1286.

La parole est à Mme Françoise Guégot.

Mme Françoise Guégot. Loin de moi l’idée de prolonger inutilement nos débats ; j’ai bien saisi la portée des grands axes du texte.

L’amendement tend simplement à insister sur l’absolue nécessité de développer des lignes dédiées au fret afin d’assurer le développement de nos ports. Il ne concerne pas spécifiquement l’axe Le Havre-Rouen-Paris, mais la situation des deux ports du Havre et de Rouen illustre parfaitement cette nécessité. La création de ces lignes doit donc faire l’objet d’un effort particulier afin de lever, notamment dans ces deux ports, les obstacles qui s’opposent au développement des activités existantes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défavorable, car l’amendement est satisfait par l’amendement n° 105, aux termes duquel les dessertes multimodales doivent être développées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Fourneyron.

Mme Valérie Fourneyron. Nous soutenons cet amendement. Nous avons effectivement pris un retard important en matière de fret ferroviaire autour des hinterlands portuaires. Sur l’axe de la Seine, en particulier, où les deux ports du Havre et de Rouen bénéficient d’importants investissements, nous devons renforcer les sillons ferroviaires, car les problèmes qui s’y posent concernent non seulement les voyageurs, mais aussi le fret.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. Monsieur le secrétaire d’État, je ne comprends pas pourquoi vous repoussez cet amendement.

M. Christian Jacob, rapporteur, et M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Il n’est pas repoussé, il est satisfait !

M. Daniel Paul. Tel qu’il est présenté, l’amendement tend à créer une ligne dédiée. Peut-être est-il pour le moins difficile de le faire entre Le Havre, Rouen et Paris du fait de la configuration du terrain : il y a embouteillage sur le sol, surtout à l’entrée de la région parisienne.

Mais je rappelle tout de même qu’il y a urgence : il faut donner un coup d’accélérateur au contournement fret de la région parisienne – là réside également la difficulté – afin que les ports du Havre et de Rouen soient le plus rapidement possible reliés non seulement au Nord de la France, mais aussi à l’Est et au-delà, car ils ont vocation à desservir le centre de l’Europe. Ainsi, Prague ou Budapest, que l’on mentionne souvent, sont situés dans leur hinterland.

En outre, parmi les grands desseins et les grands axes propres à une loi d’orientation, que nous évoquions tout à l’heure, il existe un autre projet : l’ouverture vers le centre et vers le sud de ces deux ports de la Basse-Seine. Nous y reviendrons.

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas mettre au moins à l’étude une desserte directe dédiée, étant donné l’importance croissante de ces deux ports ? Vous ne pouvez vous contenter de repousser cette demande !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Mais je ne la repousse pas !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Monsieur Paul, comme l’a dit le rapporteur, le sujet est déjà traité.

En outre, vous devriez savoir que tout cela était prévu par le projet de loi de réforme des ports, que vous avez malheureusement combattu. Du reste, dès cette année, la loi de finances prévoit que la desserte ferroviaire des ports fera l’objet d’efforts supplémentaires. En votant, comme la majorité, cette réforme portuaire, vous auriez vous-même contribué à voir votre demande satisfaite ! (Approbation sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

(L’amendement n° 1286 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 575.

La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Puisque nous réunissons des propositions de provenances diverses, l’amendement tend à traduire dans les faits, ou du moins dans la loi, une promesse du Président de la République. Celui-ci avait annoncé le lancement d’un grand plan d’investissement dans les liaisons fluviales qui devait retirer des routes un million de camions d’ici à 2020. De fait, comment libérer nos routes de ces tonnages si nous n’investissons pas dans les liaisons fluviales ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défavorable, car cet amendement est lui aussi satisfait par le texte de loi sur la réforme portuaire dont M. Besselat était rapporteur.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Même avis défavorable.

M. Jean Gaubert. Et les promesses du Président, elles ne comptent plus ?

(L’amendement n° 575 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 480.

La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi. La Méditerranée concentre 30 % du fret maritime mondial et 25 % du trafic d’hydrocarbures. Ces chiffres sont accablants, vous le savez, monsieur le ministre.

D’autre part, le 13 juillet dernier a vu la naissance de l’Union pour la Méditerranée, qui a inscrit le développement durable au cœur de ses priorités.

Je propose donc que les autoroutes de la mer que le Grenelle a prévu de mentionner dans le texte y soient liées à l’Union pour la Méditerranée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ? M. Christian Jacob, rapporteur. Favorable. Les autoroutes de la mer doivent être développées sur tous les littoraux, en particulier sur la façade méditerranéenne.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. Vous nous prenez vraiment pour des gogos ! (Rires.)

M. Philippe Boënnec. Eh oui ! (Même mouvement.)

M. Noël Mamère. L’on pouvait approuver la précédente proposition de M. Estrosi, qui a donné lieu à une longue discussion ; mais de là à raccrocher l’Union pour la Méditerranée à la question de la préservation des autoroutes de la mer ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe GDR.)

M. André Chassaigne. N’importe quoi !

M. Noël Mamère. Dois-je rappeler à M. Estrosi, dont je connais le dévouement envers le Président de la République, qui se présente comme le créateur de l’Union pour la Méditerranée, qu’une union suppose la libre circulation des personnes ? De ce point de vue, l’Union pour la Méditerranée n’a d’union que le nom !

Ne voyons-nous pas presque tous les jours, grâce à la télévision, arriver aux portes de l’Europe, exsangues, parfois proches de la mort, des personnes venues d’Afrique, de pays qui appartiennent aujourd’hui à l’Union pour la Méditerranée ? Est-ce cela l’Union pour la Méditerranée ? Et qu’a-t-elle à voir avec un projet qui résulte du Grenelle de l’environnement ? C’est totalement hors sujet !

Je comprends donc que le rapporteur et le ministre émettent un avis favorable sur un amendement qui n’a rien à voir avec le Grenelle : cela montre bien la duplicité dont le Gouvernement fait preuve quant à ce dernier !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Les propos de M. Mamère sont extrêmement graves.

Monsieur Mamère, lors du récent conseil informel réunissant à La Rochelle les ministres des transports, j’ai invité, avec l’accord du Premier ministre, mes homologues algérien, tunisien et marocain. Pourquoi ? Parce qu’un trafic considérable de poids lourds en provenance des pays du Maghreb arrive sur nos routes en passant par l’Espagne et l’Italie. Vous en retrouvez du reste parfois une partie à la hauteur de Bègles.

La proposition de M. Estrosi est donc parfaitement justifiée : il s’agit d’étendre les autoroutes de la mer, qui concernent la façade atlantique entre le Portugal, l’Espagne et la France, et la façade méditerranéenne entre la France, l’Italie et l’Espagne, à ces pays voisins et amis dont le trafic vient encombrer nos routes. Nous souhaitons ainsi libérer nos routes des camions. Cela n’a absolument rien à voir avec vos considérations politiciennes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Christian Estrosi.

M. Christian Estrosi. Faut-il rappeler, en complément aux propos du ministre, que toutes les autoroutes littorales, en France, mais aussi en Italie et en Espagne, sont aujourd’hui totalement saturées, à tel point que certains sont prêts à investir des milliards pour les élargir, les dédoubler, voire les tripler, et y attirer ainsi encore davantage les poids lourds ?

Les autoroutes de la mer permettent de voyager en passant par Rome, Civitavecchia, Gênes, Bilbao, Tanger, Barcelone, Marseille… Un porte-conteneurs de 350 mètres, qui transporte 9500 conteneurs, permet de supprimer 52 kilomètres d’autoroute !

M. Mamère se fourvoie donc totalement. Je remercie le ministre de ce qu’il a entrepris avec les ministres des transports de l’Union européenne, mais aussi de Méditerranée, notamment occidentale. La France doit se donner les moyens d’être le fer de lance de ce combat ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère, pour une intervention rapide. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Noël Mamère. Je ne peux me laisser accuser de tenir des propos politiciens ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.) Je n’ai fait qu’exprimer la réalité !

Je suis du reste heureux d’entendre la conclusion de M. Estrosi. Vous n’ignorez pas que la France préside l’Union européenne pour quelques mois encore. Or, entre l’Union européenne et les pays méditerranéens, il existe déjà des accords. Voilà pourquoi les chefs de gouvernement européens ont protesté dès que le Président de la République a annoncé la création de l’Union pour la Méditerranée.

Je répète – et je ne suis certainement pas le seul à le penser – que cela n’a rien à voir avec le Grenelle de l’environnement, et je propose un sous-amendement tendant à réécrire simplement l’amendement de M. Estrosi comme suit : « Les autoroutes de la mer, sur la façade méditerranéenne, veilleront à préserver le littoral méditerranéen. » Nul besoin d’Union pour la Méditerranée, nul besoin de lécher les bottes du Président de la République ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je n’accepterai que les sous-amendements qui me parviendront rédigés.

M. Patrick Ollier, président de la commission. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Je tiens à féliciter le Gouvernement de son brutal intérêt pour les autoroutes de la mer sur la façade méditerranéenne : l’unique expérimentation à ce jour, qui relie Civitavecchia et La Seyne-Brégaillon, est exclusivement cofinancée par l’Union européenne et la région PACA ! (Rires sur les bancs du groupe GDR.) Bravo pour cette soudaine clairvoyance !

(L’amendement n° 480 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 656.

La parole est à Mme Françoise Branget.

Mme Françoise Branget. Cet amendement tend à insérer, après l’alinéa 10 de l’article, l’alinéa suivant : « La desserte fluviale des ports maritimes devra être significativement accrue par un traitement efficace des flux de transports fluviaux, la mutualisation des coûts de manutention, la révision des pratiques fiscales pénalisantes et la réalisation d’infrastructures assurant l’interface entre voie d’eau et zones portuaires. »

En effet, dans les ports maritimes, la manutention du fret fluvial ne fait pas l’objet d’une égalité de traitement avec les autres modes de transport car elle est souvent facturée bateau par bateau. Les bateaux fluviaux subissent donc des délais d’attente beaucoup trop longs. Les systèmes de manutention sont souvent inadaptés et peu performants. Le traitement du fret fluvial ne correspond pas aux attentes des professionnels de la voie d’eau.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis favorable sous réserve de la suppression des mots : «, la révision des pratiques fiscales pénalisantes ». Cela relève en effet de la loi de finances.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je pensais que le rapporteur était d’accord avec moi pour bannir de la loi les rédactions qui ne sont pas normatives. Je propose donc de remplacer le potentiel « devra être » par l’indicatif à valeur impérative « sera ».

M. le président. Êtes-vous favorable à cette rectification, monsieur le rapporteur ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Oui, monsieur le président.

M. le président. M. le ministre également ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Oui.

(L'amendement n° 656, tel qu'il vient d'être rectifié, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 899.

La parole est à M. Daniel Paul.

M. Daniel Paul. M. Poignant indiquait que ce projet de loi fixait de grandes orientations et de grands principes. Eh bien, cet amendement invite à se pencher sur les orientations à adopter en matière de zones littorales. Il y a quelques dizaines d’années a été lancé un grand projet d’autoroute des estuaires, qui non seulement ne s’est pas limitée aux places portuaires mais s’est étendue au-delà de nos frontières : elle permet d’aller du pays basque espagnol jusqu’au Danemark, en desservant l’intégralité des estuaires et des places portuaires. Cette infrastructure se révèle insuffisante aujourd’hui et il est probablement nécessaire de mettre à l’étude un nouveau projet, en constituant une structure analogue à celle présidée pendant longtemps par le sénateur Oudin, de votre région, je crois, monsieur le ministre.

M. Jean-Claude Lenoir. De Vendée !

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Ce n’est pas tout à fait la même chose !

M. Daniel Paul. Vu d’ici, c’est la même région !

Il ne s’agirait sans doute pas d’autoroute ferroviaire en tant que telle mais d’un autre type d’infrastructure, qu’il nous faudrait soumettre à l’Union européenne. Imaginez une liaison ferroviaire allant d’Amsterdam à Bordeaux, en passant par Rotterdam, Anvers, Zeebrugge, Dunkerque, Le Havre, Caen, Rennes, Nantes. Voilà qui apporterait un complément à la fois au réseau ferroviaire national, centralisé sur Paris depuis sa création, et aux autoroutes de la mer, qui ne bénéficient pas des financements nécessaires à leur développement. La liaison entre Toulon et Civitavecchia, portée à bout de bras par l’Union européenne et la région PACA ainsi que par les finances personnelles de M. Dreyfus, montre quelles difficultés majeures il y a à pérenniser ce type de projet.

La liaison que nous proposons de mettre à l’étude dans cet amendement est en pleine cohérence avec les grandes orientations et les principes affichés dans ce texte.

(L'amendement n° 899, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 658.

La parole est à Mme Françoise Branget.

Mme Françoise Branget. Je propose de rédiger ainsi la première phrase de l’alinéa 11 : « Le réseau fluvial dit magistral, et en particulier celui à grand gabarit, fera l’objet d’un plan de restauration et de modernisation, dont le montant financier devra être clairement établi. ». Voilà qui répondra aux vœux de M. le rapporteur et emportera l’adhésion de M. Dumont.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Favorable.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques. Très favorable !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable.

(L'amendement n° 658 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 861.

M. Jean Dionis du Séjour. Je le retire, monsieur le président.

(L'amendement n° 861 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 884, 106, 566 et 801, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 566 et 801 sont identiques.

M. Christian Jacob, rapporteur. Et l’amendement n° 269 de M. Herth, monsieur le président ?

M. Antoine Herth. Si j’ai une qualité ce soir, c’est bien d’être discret !

M. le président. Cet amendement tombe du fait de l’adoption de l’amendement n° 658, qui rédige la première phrase de l’alinéa 11.

M. Philippe Martin. Quelle brillante intervention, monsieur Herth !

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, pour soutenir l’amendement n° 884.

M. Daniel Paul. En mettant en œuvre le projet de canal Seine-Nord, la France et l’Europe, ainsi que toutes les collectivités locales concernées, montrent qu’il est possible et même nécessaire de relancer la mise au grand gabarit de certaines liaisons et de les compléter. Certes, ce sont des projets lourds à financer et à mettre en œuvre dans la durée mais le développement d’une partie du trafic généré par les places portuaires et l’intensification de certains échanges passent par la mise en place de liaisons de cette nature.

La France a pris beaucoup de retard au fil des années. La liaison Seine-Nord est le premier chantier de ce type depuis plusieurs dizaines d’années. Nous proposons de mettre un terme à ces retards et de relancer des études qui contribueraient à développer sur notre territoire un réseau de voies fluviales interconnectées aussi dense qu’en Allemagne, en Belgique ou aux Pays-Bas.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 106.

M. Christian Jacob, rapporteur. Je propose à notre assemblée de voter en faveur de l’amendement n° 106, que la commission a adopté à une grande majorité, après un débat assez long. Sa rédaction me semble meilleure que celle des autres amendements en discussion commune.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Favorable à l’amendement n° 106.

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet. Traditionnellement, les Verts sont favorables aux liaisons fluviales. M. Dionis du Séjour a retiré son amendement concernant le canal Rhin-Rhône que M. Méhaignerie a qualifié un jour d’« éléphant blanc ». Il a été ministre de l’équipement et sait très bien de quoi il est question. N’en parlons plus ! Pour ce qui est du canal Seine-Nord, le gain est certain en termes de report modal : des millions de tonnes seront transférés sur ce mode de transport qui émet bien moins de gaz à effet de serre que les poids lourds. Cependant, on y perdra d’un autre côté puisqu’il y aura de grandes trouées. N’oublions pas que six grandes écluses sont prévues, dont trois mesurant trente mètres de haut, soit un immeuble de dix étages. Ce n’est pas rien en termes d’impact sur le paysage et sur la biodiversité. On cite toujours l’exemple des Pays-Bas et de la Belgique où les canaux sont très nombreux, mais ce sont des plats pays, comme aurait dit Jacques Brel. Le canal Seine-Nord, lui, sera percé dans des sites plus vallonnés. L’Oise a été évitée car il aurait été trop difficile d’y mettre le canal à grand gabarit. À Auvers-sur-Oise, il aurait ainsi fallu détruire les ponts anciens pour en construire de nouveaux. Le trajet retenu pour la construction du canal est meilleur que celui d’il y a dix ans mais son impact sur l’environnement n’est pas nul.

Par ailleurs, j’estime qu’il est dangereux d’indiquer dans le projet de loi que le canal permettra un report de trafic vers la voie d’eau de 4,5 milliards de tonnes-kilomètres par an. Comment être à ce point précis ? Comment avoir de telles certitudes ? Une loi d’orientation devrait se contenter d’évoquer la réalisation du canal et la mise en place d’interconnexions.

Nous avons consulté nos amis du Nord-Pas-de-Calais, de la Picardie et de l’Ile-de-France, nous sommes plutôt d’accord avec ce projet mais ne prétendez pas qu’il n’a pas d’impact écologique, notamment en matière de biodiversité. Ce que l’on gagne pour les émissions de gaz à effet de serre, on le perd de l’autre côté.

En outre, la réalisation du canal va demander quelques années de travaux et réclamer des prouesses du génie civil mais je ne suis pas sûr qu’en cette période de récession, nous parvenions à la mener à bien.

M. le président. La parole est à M. Laurent Hénart, pour soutenir l’amendement n° 801.

M. Laurent Hénart. J’interviens même si j’estime que l’amendement n° 106 de la commission satisfait d’autres amendements que nous avons déposés. J’aimerais en effet souligner, à la suite du rapporteur, l’intérêt d’une liaison entre le bassin de la Moselle et celui du Rhône, liaison sur laquelle porte cet amendement signé par plusieurs députés lorrains, dont Bertrand Pancher ici présent.

Le canal Seine-Nord-Europe est le premier grand chantier fluvial depuis longtemps. La liaison entre la mer du Nord et la Méditerranée, par la Moselle, le bassin rhénan et la Saône, est le grand projet suivant. Faire référence à ce projet dans le texte de loi, c’est respecter la parole donnée dans le cadre du Grenelle. C’est aussi un rappel des engagements que l’État a pris dans le cadre des contrats de projet État-région avec les régions Lorraine et Rhône-Alpes. Il paraît nécessaire de faire état de cette volonté politique mais aussi de montrer qu’un grand projet peut succéder à un autre, dans la continuité de notre politique fluviale.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Branget.

Mme Françoise Branget. Monsieur le ministre, je suis désolée de devoir intervenir mais je ne peux pas laisser passer certaines choses. Dès lors que l’on inscrit dans le texte, « les études nécessaires à la réalisation d’une liaison fluviale à grand gabarit entre les bassins du Rhône et de la Moselle », il faut aussi faire figurer les autres projets, qui sont tous nécessaires.

M. Cochet a versé dans la caricature en évoquant un éléphant blanc dont il ne faudrait plus parler à propos du canal Rhin-Rhône.

L’abandon du projet était une grave erreur politique, qui a pénalisé toute une région. (Approbation sur plusieurs bancs du groupe UMP.) C’est d’autant plus dommage que le financement des infrastructures était assuré par la rente du Rhône et que le report modal aurait été très facile.

M. Yanick Paternotte. C’est juste !

Mme Françoise Branget. Quand il était au Gouvernement, M. Goulard a mandaté une étude dont les conclusions, qui nous parviendront en fin d’année, détermineront si l’axe de la Moselle doit être préféré à celui du Rhin et du Doubs, mais il est souhaitable que la décision soit arrêtée sur la base d’arguments objectifs.

Je souhaiterais donc que l’alinéa 11 mentionne explicitement l’axe Rhin-Doubs-Rhône ou que cet alinéa soit entièrement supprimé.

M. le président. L’amendement n° 801 a-t-il été défendu, monsieur Hénart ?

M. Laurent Hénart. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Gérard Voisin, pour défendre l’amendement n° 566.

M. Gérard Voisin. Comme M. Hénart, dans son amendement n° 801, je propose, par l’amendement n° 566, de compléter l’alinéa 11 par la phrase suivante : « Le projet d’un nouveau canal à grand gabarit entre la Moselle et la Saône fera l’objet d’un débat public à l’horizon 2011. » En effet, l’abandon du canal Rhin-Rhône – Mme Branget l’a rappelé – a été, pour la vallée de la Saône et du Rhône, une catastrophe politique et économique.

Mme Françoise Branget. Et écologique !

M. Gérard Voisin. L’éléphant blanc a été tué par Mme Voynet. (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Il me semble important, comme l’ont proposé M. Hénart, M. Cherpion, M. Demange et les autres cosignataires de l’amendement n° 801, de conforter la dynamique de croissance du transport fluvial en poursuivant le maillage fluvial du territoire.

Des études sur la faisabilité de cette liaison ont été financées par les contrats de plan 2000-2006 des régions Lorraine et Rhône-Alpes. Quant au financement nécessaire à des études complémentaires, il est d’ores et déjà prévu dans le contrat de projets 2007-2013 de ces régions.

Étant donné ces perspectives, il est impératif que l’État confirme son engagement en faveur du projet Moselle-Saône en affichant, au cœur de ce projet de loi, un objectif de débat public pour 2011, comme cela était prévu à l’issue des débats du Grenelle de l’environnement.

M. le président. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Noël Mamère. M. Méhaignerie avait présenté autrefois le canal Rhin-Rhône comme un éléphant blanc. Ne serait-il pas intéressant de l’entendre expliquer aujourd’hui son avis à ses collègues de droite ? Pour avoir été ministre de l’équipement, il devrait savoir ce qu’il dit. Mais peut-être, en la circonstance, la fuite est-elle la meilleure conseillère.

Que la majorité relance l’idée de ce canal après le Grenelle de l’environnement ne fait que nous conforter dans l’idée qu’elle cherche en réalité à le détricoter.

M. Jean-Louis Borloo, ministre d’État. Bien sûr, bien sûr… (Sourires.)

M. Noël Mamère. Si une erreur a été commise sur le plan économique et en matière de transports, il est certes facile d’attaquer Mme Voynet. Seulement, elle n’a jamais été défavorable à la liaison ferroviaire.

M. Yves Cochet. C’est juste !

M. Noël Mamère. Nous avions d’ailleurs défendu une liaison ferroviaire beaucoup moins coûteuse, qui aurait permis, comme nous le souhaitions, un transfert modal des camions vers les trains. Parmi les partenaires qui, comme EDF, étaient sollicités pour financer ce canal, certains éprouvaient de grandes réticences. Contrairement à ce qui vient d’être dit, je n’ai jamais constaté au cours de mes mandats que les projections visaient à une quelconque rentabilité – au contraire.

Il est facile aujourd’hui de demander le renforcement du fluvial. C’est d’ailleurs normal, dans le cadre de la lutte contre l’effet de serre. Mais le relief de nos régions n’a rien à voir avec celui d’un pays comme la Hollande. Il faut donc être très prudent dans le calcul des coûts, qui peuvent s’avérer pharaoniques, et dans l’étude des conséquences sur la biodiversité. Le résultat risque en effet de s’avérer contre-productif, voire de se transformer en une véritable catastrophe écologique. Ne passez donc pas d’un excès à l’autre !

Longtemps, en soutenant des politiques libérales, vous avez favorisé le transport routier, plus particulièrement celui des marchandises par les camions. Aujourd’hui, vous venez nous parler du tout fluvial. Méfiez-vous de ce genre de conversions, qui, quand elles ne s’appuient pas sur de bonnes raisons, peuvent s’avérer bien dangereuses.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements ?

M. Patrick Ollier, président de la commission. Auparavant, je me tourne vers M. Mamère et M. Cochet, car je veux rétablir une vérité. Le canal Rhin-Rhône est né d’un amendement déposé en 1994 sur une loi d’aménagement du territoire dont j’étais le rapporteur. À l’époque, M. Pasqua, qui était ministre, avait prévu son financement, par les contributions de la CNR et les efforts d’EDF. Il n’y avait aucun doute sur ce point.

Il se trouve qu’en 1998, devenue ministre de l’aménagement du territoire, Mme Voynet, pour des raisons certainement très nobles mais qui concernaient essentiellement le département où elle était élue, qui revêtaient peut-être aussi un caractère personnel, s’est opposée au projet. Elle a par conséquent fait abroger l’article de loi qui créait le canal Rhin-Rhône, au cours d’une discussion extrêmement violente qui s’est tenue dans cet hémicycle. Pour toute une région qui formait des espoirs en matière de développement économique et de création d’emplois, ce fut – je le confirme – une véritable catastrophe.

Il n’est plus question de cette décision, puisque nous sommes entrés dans une tout autre logique. Je suis de ceux qui considèrent qu’on ne fait pas assez pour le fluvial et les canaux, en France. À l’AFITF, je me bats pour qu’on développe encore plus ce secteur. La liaison Seine-Nord, c’est bien, mais ce n’est pas suffisant.

Voilà pourquoi je souhaite que l’Assemblée adopte l’amendement n° 106, qu’a présenté M. Jacob, et qu’elle rejette les autres amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Même avis que la commission.

M. le président. Je donne la parole est à M. Yves Cochet pour qu’il puisse répondre, s’il s’est senti visé personnellement, mais je lui demande d’être très bref. Nous n’avons pas le temps de nous lancer dans des recherches de paternité ! (Sourires.)

M. Yves Cochet. Je n’ai pas subi d’attaque personnelle, mais Mme Voynet, qui a été ministre pendant quatre ans, a été mise en cause. Or, si M. Ollier croit que c’est simplement à titre personnel qu’elle a proposé l’abandon du projet Rhin-Rhône, il se trompe.

Alors que toutes les associations qui se préoccupent de l’environnement sont favorables à la liaison fluviale, qu’on m’en cite une seule, parmi les grandes associations environnementales représentatives à l’échelon national ou international, qui défende le canal Rhin-Rhône ! Il y a tout de même des bêtises dont il faut savoir s’abstenir !

M. le président. Étant donné le rythme de notre discussion, mes chers collègues, nous n’avons certainement pas besoin d’installer des radars pour contrôler les excès de vitesse ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Mais nous allons passer aux votes.

Je mets aux voix l’amendement n° 884.

(L'amendement n° 884 n'est pas adopté.)

M. Laurent Hénart. Mon amendement est satisfait par celui de la commission.

M. Gérard Voisin. Le mien également.

(Les amendements nos 566 et 801 sont retirés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 106 de la commission.

M. Noël Mamère. Contre !

(L'amendement n° 106 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 659.

La parole est à Mme Françoise Branget.

Mme Françoise Branget. M. Voisin a indiqué que l’abandon du canal Rhin-Rhône avait été une catastrophe économique. C’était aussi une catastrophe écologique, car l’A36, qu’empruntaient 7 500 camions par jour, en 1997, quand la décision a été prise, en voit aujourd’hui passer le double. La vallée du Doubs est submergée par la pollution. Elle est en effet traversée par des trains de camions, qui s’étendent sans discontinuer de la frontière allemande, au-dessus de Belfort, jusqu’à Besançon. Je souhaite donc que les études en cours apportent les éléments de comparaison nécessaires, et qu’ils soient examinés avec objectivité.

Pour en venir à l’amendement n° 659, il est indispensable, si nous voulons moderniser notre réseau fluvial, d’adapter certaines infrastructures. Je propose donc que, sur les voies navigables de classe V et supérieures, les ponts à construire aient une hauteur suffisante pour le passage de convois poussés par des péniches transportant deux ou trois conteneurs.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis défavorable. Je suis d’accord sur le fond, mais cette disposition est à l’évidence de nature réglementaire.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je remercie Mme Branget de ses efforts et de son engagement en faveur du fluvial, qui correspond parfaitement à l’esprit du Grenelle de l’environnement. En l’espèce, l’amendement est effectivement de nature réglementaire. Mais nous allons étudier cette proposition, qui paraît tout à fait justifiée.

(L'amendement n° 659 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 1711.

La parole est M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. Au même titre que le réseau ferroviaire, le réseau fluvial magistral nécessite, nous le savons, une profonde régénération, dont VNF a fixé le coût à 100 millions d’euros par an.

De même, le réseau fluvial comporte de nombreux barrages vétustes – certains remontent au XIXe siècle – dont la rénovation est indispensable pour assurer la sécurité de la navigation.

L’article 40 nous interdisant d’inscrire les crédits nécessaires, nous nous bornons à demander un rapport du Gouvernement, qui permettra au Parlement de faire le point sur les efforts accomplis dans ces deux domaines.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis défavorable, car cet amendement est en partie satisfait par celui de Mme Branget que nous avons adopté. Pour le reste, l’étude demandée me paraît trop large ; il conviendrait qu’elle soit mieux ciblée.

(L’amendement n° 1711, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 683 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christian Jacob, rapporteur. Je laisse M. Duron le présenter.

M. Philippe Duron. Cet amendement très important tend à ce que l’État étudie l’opportunité de donner à Voies navigables de France la pleine propriété du domaine public fluvial attaché au réseau magistral. En le valorisant, VNF se procurerait les moyens d’entretenir son réseau. On a agi ainsi avec RFF, qui a reçu la propriété du réseau public ferroviaire, et pour les grands ports maritimes dans le cadre de la loi votée au printemps dernier. Pour des raisons que j’imagine, le ministère des finances est défavorable à ce qu’il en aille de même pour le réseau fluvial. La mesure serait pourtant intelligente sur le plan économique et permettrait de valoriser de nombreux espaces. On a fait une exception pour le réseau Lyon Confluence. Mais on pourrait imaginer qu’il en aille de même à Valenciennes ou dans d’autres villes parcourues par des canaux et qui apprécieraient de les valoriser dans un but logistique ou pour des activités économiques.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. La commission, qui a longuement auditionné, notamment, le président de VNF, a émis un avis favorable. Nous souhaitons que le Gouvernement nous fournisse, dans les six mois, une étude sur ce sujet, qui est de première importance pour une bonne gestion.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Avis favorable à l’amendement dans les termes exposés par le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. Je soutiens cet amendement. Les alinéas 11 et 12 traduisent une volonté forte de développer le trafic fluvial, et l’étude sur le transfert de propriété qu’appelle l’amendement sera la bienvenue.

Cela étant, le Gouvernement a précisé que les dispositions de l’alinéa relatif au développement portuaire concernaient les ports maritimes. Les ports fluviaux, qui sont passés sous silence dans le projet de loi, connaissent pourtant les mêmes problèmes en ce qui concerne l’articulation avec le transport ferroviaire, la réception et la manipulation des conteneurs. Je souhaiterais qu’au cours de la navette, on puisse améliorer la rédaction du texte pour en tenir compte.

(L'amendement n° 683 rectifié est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 2058 du Gouvernement.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Avec les partenaires du Grenelle de l’environnement, nous avons beaucoup discuté de la taxe sur les poids lourds. L’Allemagne a mis en place la LKW-Maut, l’Autriche de même ; la Suisse a depuis longtemps un système de vignette ; la Grande-Bretagne et les Pays-Bas préparent actuellement des dispositifs de même nature.

L’amendement n° 2 058 tend à substituer aux alinéas 13 et 14 un paragraphe VI qui précise :

« Une éco-redevance pourra être prélevée sur les poids lourds à compter de 2011 à raison du coût d’usage du réseau routier national métropolitain non concédé et des voies des collectivités territoriales susceptibles de subir un report de trafic. » Cela concerne par exemple des départements pour la voirie départementale ; ils seront dans ce cas les bénéficiaires.

« Cette éco-redevance aura notamment pour objet de financer les projets d’infrastructures de transport. À cet effet, le produit de cette taxation sera affecté chaque année à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France pour la part du réseau routier national. » Nous en avons débattu cet après-midi.

« Cette taxe sera répercutée par les transporteurs sur les bénéficiaires de la circulation des marchandises. Par ailleurs, l’État étudiera des mesures à destination des transporteurs permettant d’accompagner la mise en œuvre de la taxe et de prendre en compte son impact sur les entreprises. Par exception, des aménagements de la taxe, qu’ils soient tarifaires ou portant sur la définition du réseau taxable, seront prévus aux fins d’éviter un impact économique excessif sur les différents territoires au regard – je l’indique à M. Le Fur – des considérations d’éloignement de ces territoires de l’espace européen et de disponibilité des modes de transport alternatifs à la route. »

Cette mesure n’est pas nouvelle : elle figurait expressément parmi les engagements pris par le Président de la République devant l’ensemble des organisations professionnelles dès le printemps précédant l’élection présidentielle. D’autre part, s’agissant de la répercussion de cette charge, dans le cadre de la loi TEPA, au moment où le fuel atteignait des prix excessifs, vous avez adopté un amendement permettant de reporter en pied de facture les augmentations du coût du carburant : cela vaudra aussi dans ce cas. Certains ont souligné qu’il sera difficile de calculer la taxe sur un kilométrage réel. Nous travaillerons bien entendu avec la profession sur des dispositifs de forfaitisation. Le dialogue a commencé et nous avons trois ans pour le mener à bien. Aujourd’hui, nous vous demandons de voter le principe, mais les modalités seront votées en loi de finances initiale.

Les chargeurs accepteront-ils cette mesure ? Comme dans la loi TEPA, il est prévu une sanction pénale en cas de non-respect.

J’en profite pour vous indiquer les chantiers que nous avons déjà ouverts avec les organisations professionnelles pour que cette mesure n’entrave en rien leur compétitivité à l’échelle européenne. Un groupe de réflexion paritaire a été mis en place sur les temps de travail. Nous œuvrons aussi à l’harmonisation fiscale européenne. Ainsi, nous avons récemment ramené la taxe à l’essieu au minimum prévu au niveau européen, comme nous nous y étions engagés, ce qui représente une diminution de 70 millions. Dans le cadre de la présidence française, Mme Lagarde travaille au sein du Conseil Ecofin à une harmonisation des taux de TIPP, tout comme le ministre d’Etat dans le cadre de la révision de la directive « Énergie ». Nous avons mis en place un encadrement du cabotage : c’est à cette condition qu’au mois de juin, j’ai accepté, au nom de la France, le compromis du « paquet routier » ; plusieurs grands pays soutenaient d’ailleurs notre position.

Nous sommes également sensibles aux spécificités locales. Nous nous engageons donc à prendre toutes les dispositions permettant de mesurer l’impact économique de la taxe sur les différents territoires.

La présentation de cet amendement marque un moment important de notre débat. D’abord, il s’agit d’un engagement du Président de la République, que nous tenons. Ensuite, la mesure est l’un des points essentiels du Grenelle. Au niveau européen, nous discutons d’une nouvelle directive Eurovignette, qui nous donnera un cadre législatif plus souple permettant de mieux prendre en compte les problèmes de congestion, de franchissement des obstacles et de modulation des tarifs. Enfin, le dialogue est engagé depuis plusieurs mois avec les organisations professionnelles et les élus des régions qui se considèrent comme périphériques. D’ici la loi de finances et ensuite jusqu’en 2011, nous allons faire en sorte de trouver ensemble les modalités acceptables pour tous les interlocuteurs.

En mettant en place ce dispositif pour les camions, gardons-nous de répéter l’erreur des ingénieurs et des politiques qui, au XIXe siècle, choisirent pour les réseaux ferrés des écartements de voies, des systèmes de sécurité, et plus tard d’électrification différents. Nous n’allons donc pas équiper les camions de systèmes différents, mais assurer leur interopérabilité. Comme nous avons pu décider l’Europe à lancer le programme Galileo, nous pourrons vraisemblablement nous servir de ce système de GPS européen.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. La commission a longuement travaillé et son amendement, au terme d’un débat difficile, n’était pas, objectivement, le meilleur. Celui que présente le Gouvernement et qui correspond à un engagement du Président de la République répond aux inquiétudes de certains secteurs économiques et met en place une euro-redevance puisque l’interopérabilité sera assurée dans l’ensemble de l’Union européenne. Avec l’accord du président de la commission, je soutiens donc l’amendement du Gouvernement.

M. le président. Je suis saisi d'un sous-amendement n° 2061.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir fourni ces explications sur la méthode, la concertation, l’échéancier, à propos de ce sujet très complexe. Il était nécessaire de mettre en œuvre cette disposition dans la transparence et avec un maximum de pragmatisme. Nous ne le contestons pas.

Néanmoins, pourquoi avoir exclu du dispositif les réseaux concédés ? Le trafic, notamment international, y est important. En outre, si l’on en croit un rapport de la Cour des comptes, depuis la privatisation, les concessionnaires du réseau autoroutier s’en sont mis plein les poches, passez-moi l’expression. Les tarifs ont augmenté nettement, le personnel des péages a beaucoup diminué. Mais les caisses de l’État n’en ont pas profité du tout, et nous sommes à vos côtés quand il s’agit de les remplir, surtout pour une bonne cause comme les transports en commun.

C’est pourquoi, par le sous-amendement n° 2061, nous demandons que l’on n’exclue pas ce réseau, et que l’éco-redevance porte aussi sur les bénéfices actuels des sociétés concédées. Autrefois, ils entraient dans les caisses de l’Etat, ce n’est plus le cas. Il serait logique de profiter d’un retour à meilleure fortune au titre de l’intérêt général.

M. le président. Vous souhaitez vous exprimer le premier, monsieur le secrétaire d’État ?...

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Avec votre permission, monsieur le président, et celle du rapporteur, j’exposerai la position du Gouvernement, car il s’est lui-même posé la question évoquée par M. Brottes. Ce qui empêche, aujourd’hui – je le précise à dessein – d’adopter ce sous-amendement, c’est que la directive Eurovignette de 2006 fixe un plafond pour la perception de péages, qui est égal aux coûts de construction et d’exploitation. Or, avec le niveau actuel des péages, ce plafond est atteint. La Commission a proposé un nouveau projet de directive le 8 juillet dernier, et je l’inscrirai à l’ordre du jour du prochain Conseil européen pour obtenir un accord politique sur son principe. La directive pourra alors, je l’espère, être adoptée sous la présidence tchèque ou suédoise et nous disposerons du véhicule législatif européen nous permettant d’adopter un amendement de ce type. Pour l’heure, nous ne pouvions retenir cette hypothèse de bon sens, et je ne peux qu’être défavorable au sous-amendement.

M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Avis conforme à celui du Gouvernement.

M. le président. Avant d’engager le débat, mes chers collègues, je vous appelle à la raison. À ce rythme, nous pourrions bien passer ici le week-end. Et ne prenons pas le risque de revenir en deuxième semaine ! Il y a pour l’instant huit ou neuf inscrits, plus M. Brottes pour répondre au Gouvernement. Je vous propose de donner la parole à un orateur par groupe. (Murmures sur divers bancs.)

M. Serge Grouard. Nous avons passé des heures à examiner des points qui ne le méritaient pas. Sur un sujet de cette importance, nous voulons nous exprimer !

M. le président. C’est légitime. Mais je demanderai alors à chacun de limiter son intervention à deux minutes.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Monsieur le secrétaire d’État, si nous avions proposé de renationaliser les autoroutes concédées, notre amendement aurait sans doute été plus « eurocompatible » !

Toutefois, notre groupe prend acte des arguments que vous venez de développer, et du fait que, dès que les textes européens auront évolué, vous n’avez pas l’intention d’exclure les réseaux concédés du dispositif de l’éco-redevance… Mais votre mimique semble m’indiquer que je n’ai pas bien compris.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur Brottes, je n’ai fait aucune mimique et je vous confirme que le Gouvernement français se bat – je le fais en son nom puisque, jusqu’au 31 décembre, je préside le Conseil des ministres européen des transports – pour que soit adoptée une nouvelle directive Eurovignette qui nous apportera plus de souplesse.

En conséquence, et si vous le voulez bien, je vous remercie de retirer votre sous-amendement.

M. François Brottes. Pour soutenir la position du gouvernement français au sein du Conseil des ministres européen, je retire le sous-amendement n° 2061.

(Le sous-amendement n° 2061 est retiré.)

M. le président. Je vais maintenant donner la parole aux orateurs qui ont demandé à s’exprimer sur l’amendement du Gouvernement, pour deux minutes seulement, je le rappelle.

Nous entendrons d’abord M. Bertrand Pancher.

M. Bertrand Pancher. En commission, nous nous apprêtions à voter contre cet amendement, car il ne nous paraissait pas normal que l’éco-redevance soit compensée intégralement aux transporteurs. À quoi bon créer une taxe si c’est pour en annuler aussitôt les effets ?

Cependant, l’amendement du Gouvernement nous semble aller dans le bon sens, même si quelques questions demeurent en suspens. Le Grenelle a fait l’objet d’un compromis entre tous ceux qui y ont participé. Les grandes organisations concernées insistent pour que le projet de loi soit voté à l’unanimité et intégralement, comme un ensemble cohérent. Nous avons certes relevé une trentaine d’avancées significatives, mais un ou deux points de blocage persistent encore. L’éco-redevance en faisait partie, même si la mesure s’inspire à la fois d’un engagement du Président de la République et de la proposition n° 45 du Grenelle, ainsi rédigée : « Création d’une éco-redevance kilométrique pour les poids lourds sur les réseaux routiers non concédés, en 2010. » Pourtant, monsieur le secrétaire d’État, l’amendement du Gouvernement prévoit que l’« éco-redevance pourra être prélevée seulement à compter de 2011. Quelles explications pouvez-vous nous donner ? Selon vos arguments, nous maintiendrons ou pas nos amendements sur le sujet.

M. le président. Il faut conclure, monsieur Pancher.

M. Bertrand Pancher. Par ailleurs, dans quelle mesure et dans quelles conditions prévoyez-vous la répercussion de cette taxe par les transporteurs ?

M. le président. La parole est à M. Philippe Tourtelier, pour deux minutes.

M. Philippe Tourtelier. Selon le projet de loi qui nous a été initialement soumis, l’éco-redevance a un double objectif.

Elle constitue d’abord une source de financement pour les nouvelles infrastructures après l’erreur fatale de la privatisation des autoroutes. Sur ce premier aspect, je pense que d’autres sources existent, mais je renvoie surtout la majorité à ses responsabilités. Elle peut nationaliser à nouveau les autoroutes : ce serait également une bonne solution.

La création d’une éco-redevance avait aussi initialement pour second objectif – il est moins affirmé dans l’amendement – de réduire l’impact environnemental des transport de marchandises. Or les poids lourds n’émettent que 6 % des gaz à effet de serre dégagés par l’ensemble des moyens de transport qui, eux-mêmes, ne participent que pour 30 % à la totalité des émissions. Sachant que l’amendement n° 2058 ne concerne que les poids lourds qui n’empruntent pas les autoroutes, je me demande si nous n’avons pas, en ce moment, une grosse discussion pour un « petit » sujet. Il est « petit » par le nombre de véhicules concernés, mais évidemment, si l’éco-redevance doit toucher le réseau concédé, cette remarque ne vaut plus.

Par ailleurs, en ce qui concerne l’aménagement du territoire, il faut se demander comment des territoires aussi différents que l’Alsace, région de transit, et la Bretagne, région périphérique, s’adapteront à la mesure. On peut comprendre que l’Alsace, voisine de l’Allemagne et de la Suisse, instaure une taxe pour se protéger, mais en Bretagne, les solutions alternatives de transport n’existent pas et les chargeurs – essentiellement les industries agro-alimentaires – sont fragiles. Ils ne pourront pas répercuter la taxe. Qui la fixera? Les régions auront-elles un droit de regard ? Quels seront les réseaux concernés ? De nombreuses incertitudes persistent. Quant aux régions, si elles adoptent des plans climat territoriaux, elles seront forcément vertueuses sur ce terrain.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Cette taxe est un sujet majeur puisqu’on en attend une recette de l’ordre d’un milliard d’euros et que nous devons décider de sa création dans des délais très brefs : je vous renvoie à l’article 60 du projet de loi de finances pour 2009.

Une inquiétude existait, monsieur le secrétaire d’État, et tout comme MM. Méhaignerie, Benoit ou Poignant, je m’en étais entretenu avec vous. Finalement, vous avez su concilier des options qui semblaient contradictoires. Évidemment, l’option environnementale a été prise. Quant à l’option « aménagement du territoire » : elle nous habite, nous, habitants de l’Ouest, en particulier, mais cela est vrai pour bien d’autres régions. Ainsi lorsque, sur un territoire, il n’y a aucune alternative à la route, ni canaux, ni chemin de fer, à l’évidence, la taxe sera inutile car elle n’encouragera le développement d’aucun mode de transport autre que routier. L’amendement n° 2058 résout le problème en prévoyant des exceptions « au regard des considérations de disponibilité des modes de transport alternatifs à la route. ». Une autre exception est d’ailleurs prévue, qui répond à l’une des questions que vient de poser Philippe Tourtelier, pour les régions éloignées des centres européens.

Les solutions proposées, on le comprendra, n’enthousiasment pas les transporteurs. Beaucoup de questions doivent encore être réglées, en particulier concernant les modalités de la répercussion sur le prix des produits transportés…

M. le président. Il faut conclure, monsieur Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il n’en demeure pas moins que l’amendement du Gouvernement réussit à concilier plusieurs objectifs et à valoriser l’aménagement du territoire.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Le dispositif proposé est assez astucieux, pour autant qu’il soit totalement conforme à la Constitution.

Je voudrais faire observer à M. Brottes, qui évoquait la contribution des sociétés autoroutières au financement de l’AFITF, que le projet de loi de finances pour 2009 propose une augmentation de 250 % de la redevance domaniale payée par les concessionnaires d’autoroutes. On peut voir dans cette modeste augmentation – de 170 à 598 millions d’euros – une réponse aux questions qu’il se pose.

Le Président de la République s’est engagé à ce que la fiscalité verte s’applique à niveau constant de prélèvements obligatoires. Puisque, avant d’en adopter le dispositif précis dans le PLF, nous nous apprêtons à voter le principe d’une taxe d’un milliard d’euros, le Gouvernement peut-il nous renseigner sur l’allègement d’un milliard de la fiscalité qui est prévu pour tenir l’engagement du Président de la République ?

M. le président. La parole est à M. Antoine Herth.

M. Antoine Herth. L’amendement du Gouvernement me semble mieux rédigé que son texte initial et me donne l’occasion de poser trois questions.

Monsieur Bussereau, vous avez évoqué les péages sans arrêt et les technologies eurocompatibles. Dans certains pays européens, comme l’Autriche, l’utilisation de ces matériels a donné lieu à l’installation de structures fixes sur le territoire ; elles ne sont pas d’un intérêt environnemental évident. Pouvez-vous nous rassurer à ce sujet ?

Ce projet de loi écrasera-t-il, comme le disait Yves Bur, la législation actuelle en supprimant l’expérimentation alsacienne et les dispositions législatives adoptées à l’initiative de notre collègue ?

Enfin, la dernière phrase du deuxième alinéa de l’amendement peut laisser penser qu’il existe une part de l’éco-redevance qui ne serait pas nationale. Est-il possible de préciser si une part régionale est prévue ? En tout cas, il faut donner une existence juridique à cette seconde part.

M. le président. La parole est à M. Christian Paul.

M. Christian Paul. L’erreur de la majorité, c’est d’avoir, il y a quelques années, privatisé les autoroutes …

M. Hervé Mariton. Non !

M. Pierre Méhaignerie. Si !

M. Christian Paul. Cette privatisation ne s’est même pas faite dans des conditions favorables à l’État. Au contraire, elle a plutôt eu lieu au profit des sociétés privées. Les modes de calcul des augmentations de péages sont d’ailleurs aujourd’hui régulièrement dénoncés par ceux qui analysent les comptes des sociétés gestionnaires des autoroutes. Ces dernières ont une imagination débordante pour augmenter les tarifs, et donc les profits, là où le trafic est le plus dense en maintenant une moyenne générale des tarifs conforme au souhait du Gouvernement. Tout cela est extrêmement subtil.

M. Hervé Mariton. Ces errements datent d’avant la privatisation !

M. Christian Paul. Je suis partisan de la nationalisation des autoroutes. Et comme M. Brottes, je veux que les sociétés d’autoroute payent l’éco-redevance.

Je refuse totalement la première phrase du troisième alinéa : « Cette taxe sera répercutée par les transporteurs sur les bénéficiaires de la circulation des marchandises », car on sait très bien qu’au bout du compte, ce sont les consommateurs qui paieront. La proposition du Grenelle…

M. le président. Monsieur Paul, je ne peux pas vous laisser poursuivre : chacun doit respecter les deux minutes qui lui sont imparties.

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Il s’agit d’un amendement important, et j’en profite pour rappeler que, contrairement à ce qu’a dit François Brottes, l’UDF s’est opposée à la privatisation des autoroutes.

M. François Brottes. M. de Robien s’y est opposé ? Cela m’étonnerait !

M. Jean Dionis du Séjour. Bien sûr, vous pouvez vérifier.

En tout cas, nous sommes très favorables à cette éco-redevance. Pour le moment, le dispositif fiscal se limite à la taxe à l’essieu et à la taxe professionnelle. La nouvelle contribution s’appliquera à l’ensemble des transporteurs, y compris aux transporteurs étrangers, et il était temps que ceux-ci soient également mis à contribution.

J’en viens à ma question, monsieur le secrétaire d’État. Le champ d’application de la redevance, limité au seul réseau non concédé, réduit considérablement son impact. De quelle nature est l’obstacle qui empêche l’élargissement de cette éco-taxe à l’ensemble du réseau autoroutier : est-il juridique, politique ? Nous souhaiterions que vous nous apportiez une réponse claire sur ce point.

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet. Monsieur le président, pourriez-vous me dire ce que deviendront les amendements que nous avons déposés aux alinéas 13 et 14 de l’article 10, notamment ceux qui proposaient des ajouts, si l’amendement du Gouvernement est adopté ?

M. le président. Ils tomberont tous, monsieur Cochet.

M. Yves Cochet. Dans ce cas, je vais déposer des sous-amendements.

M. le président. Il est trop tard pour le faire. Poursuivez, je vous prie.

M. Yves Cochet. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais savoir quelles sont exactement « les mesures à destination des transporteurs permettant d’accompagner la taxe » que l’État étudiera et quels territoires de France sont considérés comme éloignés de l’espace européen.

Plusieurs orateurs ont évoqué la Bretagne, dont on peut dire qu’elle est objectivement éloignée des centres européens – M. Le Fur a d’ailleurs évoqué l’itinéraire Brest-Berlin. Chaque région – on le voit très bien dans le film We feed the world – développe une spécialité : c’est ce que Ricardo appelait les avantages comparatifs. Ainsi les porcs et les poulets bretons ou les tomates d’Almeria sont exportées dans toute l’Union. Or Paul Krugman a démontré – et c’est d’ailleurs ce qui lui a valu de recevoir le prix Nobel d’économie – qu’il s’agissait d’une théorie totalement dépassée, économiquement et écologiquement.

M. le président. Je vous demande de ne pas dépasser votre temps de parole, monsieur Cochet. (Sourires.)

M. Yves Cochet. Quel que soit leur contenu, il est stupide que des camions relient Brest à Berlin, qu’ils soient taxés ou non, qu’ils empruntent des autoroutes privées ou le réseau non concédé. Ce n’est pas comme cela qu’il faut aménager le territoire de l’Europe…

M. le président. Merci, monsieur Cochet.

M. Yves Cochet. …et c’est contraire à l’esprit du Grenelle.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Monsieur le secrétaire d’État, que se passera-t-il dans une île, par exemple, où il n’y a pas d’alternative au transport routier, où aucun projet structurel n’est prévu pour le transport maritime – je pense à la liaison entre la Martinique et la Guadeloupe, mais c’est également vrai de la liaison ferroviaire entre Saint-Laurent et Cayenne – et où il n’y a aucune perspective de pouvoir bénéficier directement d’un transit ?

L’écotaxe sera-t-elle appliquée aux transporteurs qui travaillent sur une île ? C’est une question fondamentale car, au-delà de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, il faut prendre en compte l’aménagement du territoire et le développement économique. Vous prévoyez, dans la dernière phrase de votre amendement, la possibilité de rechercher un aménagement dans les cas où il n’existe pas de modes de transport alternatifs à la route, soit. Mais qui recherchera cet aménagement et selon quelles modalités ? J’aurais préféré que ce point soit très clair.

Encore une fois, aucun projet structurel important n’est mis en œuvre dans ces régions et on ne pourra pas appliquer une taxe à des personnes qui n’en bénéficieront pas.

M. le président. La parole est à M. Serge Grouard.

M. Serge Grouard. Il n’est pas besoin de mener une longue étude polémologique pour s’apercevoir que le sujet qui nous occupe est potentiellement conflictuel. (Sourires.) Je comprends donc que l’on cherche un équilibre, mais je ne pense pas qu’il soit encore atteint, et ce pour les raisons suivantes.

Premièrement, le deuxième alinéa de l’amendement dispose que l’éco-redevance « pourra être prélevée ». Je souhaite que l’on soit plus directif et que l’on écrive plutôt que la taxe « sera prélevée » ou « perçue », afin de respecter la proposition n° 45 du Grenelle de l’environnement.

Deuxièmement, cette taxe pourra être perçue « à compter de 2011 ». Admettons qu’elle doive figurer dans un prochain projet de loi de finances ; je rappelle tout de même qu’il était initialement prévu qu’elle s’applique dès 2010.

Troisièmement, on pourrait supprimer, dans le deuxième alinéa de l’amendement, les mots : « non concédé ».

M. Yves Cochet. Très juste !

M. Serge Grouard. Quatrièmement, « cette éco-redevance aura notamment pour objet de financer les projets d’infrastructures de transport ». Mais de quels projets s’agit-il ? Si ce sont des infrastructures routières, cela pose quelques problèmes.

Enfin, « cette taxe sera répercutée par les transporteurs sur les bénéficiaires de la circulation des marchandises. » Malgré ce jeu de taquin, nous avons tous compris qui supportera finalement la charge : a priori, il ne s’agit plus tout à fait du verdissement de la fiscalité que nous souhaitons.

M. Noël Mamère. Excellent, monsieur Grouard !

M. le président. La parole est à M. Jean Gaubert.

M. Jean Gaubert. Monsieur le président, j’interviens également au nom de mes collègues Corinne Erhel et Annick Le Loch, laquelle, en tant qu’élue de la pointe du Finistère, est très concernée par le sujet.

Tout d’abord, je voudrais faire remarquer que les routes sans péage se trouvent dans les péninsules, par exemple la Bretagne, ou dans les régions défavorisées, notamment le Massif Central, en partie parce que personne ne jugeait intéressant d’y faire des autoroutes à péage.

Ensuite, je rappelle qu’une partie très importante du bouclage de l’A 80 en Bretagne a été payée par la région et le département, ainsi que par des crédits européens. Ne l’oublions jamais, car nous ne souhaitons pas payer deux fois.

Par ailleurs, il est vrai que l’on pourrait privilégier le fret ferroviaire, mais imaginez l’odeur qu’auront les langoustines transportées par le train lorsqu’elles arriveront à Rungis (Sourires.) : certains produits frais ne supportent pas les ruptures de charge, et il faut tenir compte de ces problèmes.

Enfin, les autoroutes n’étant pas concernées par l’éco-redevance, la Bretagne paierait, selon les calculs qui ont été faits, environ 11 % du produit de cette taxe alors qu’elle ne représente que 5 % du fret.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Monsieur le président, je vais tenter de répondre brièvement aux questions qui m’ont été posées.

Monsieur Pancher, l’éco-redevance entrera en vigueur en 2011, et non en 2010, parce qu’elle doit être inscrite dans un projet de loi de finances et parce qu’il faudra lancer un appel d’offres, ce qui nécessite environ dix-huit mois. Nos amis allemands, qui ont d’ailleurs retenu une entreprise française, ont connu pas mal de difficultés dans la mise au point de leur dispositif. Élaborer un tel système à l’échelle d’un pays prend forcément du temps, et 2011 est un objectif qui ne pourra être atteint que si aucune erreur n’est commise et si nous ne rencontrons aucun problème pour l’appel d’offres ni aucune difficulté technique.

S’agissant des modalités de la répercussion, il nous faut trouver une solution astucieuse. Sans doute faut-il préférer au calcul au kilomètre un système de forfaitisation, de bloc d’itinéraire. Nous travaillerons sur ce point avec les élus et les transporteurs.

Monsieur Tourtelier, l’objectif de cette taxe est, bien entendu, de favoriser le report modal : c’est une mesure « Grenelle », avant d’être une ressource nouvelle. Par ailleurs, il ne s’agit pas d’un « petit » sujet Prenons l’exemple que M. Mamère a cité à plusieurs reprises : au nord de Bordeaux, le trafic poids lourds est beaucoup moins important sur l’A 10 que sur la nationale 10 parce que cette dernière est gratuite. On retrouve d’ailleurs le même phénomène sur la nationale 4, qui dessert l’Est de la France. En termes de volume de transport, ce n’est donc pas un petit sujet. Quant à la modulation, nous en parlerons évidemment avec les élus.

S’agissant des réseaux – je le dis parce que je suis président d’une assemblée départementale –, si un département propose que soient concernés quelques « cédés » à fort trafic, ou qui le deviennent en raison d’un effet report, comme cela s’est passé en Alsace entre les autoroutes des deux rives du Rhin, la ressource reviendra aux propriétaires de ce réseau, qu’ils entretiennent et dans lequel ils investissent.

Monsieur Le Fur, je partage entièrement vos propos concernant l’aménagement du territoire.

Monsieur Mariton, nous verrons, à la fin de l’examen du texte, quels sont les équilibres, mais je vous rappelle que le Grenelle, dans sa globalité, est à fiscalité constante.

Monsieur Herth, nous envisageons d’installer des péages sans arrêt. J’ai visité les réseaux autrichien et tchèque : ce sont de petits réseaux – moins de 800 kilomètres d’autoroute pour le second. Non seulement les portiques qui y sont installés ne sont pas du meilleur effet, mais ils sont moins efficaces que le système de type GPS retenu par les Allemands. Nous verrons ce que donnera l’appel d’offres, mais il est vrai que nous préférerions un système satellitaire, qui utiliserait le futur réseau européen Galileo, beaucoup plus précis que le GPS actuel.

S’agissant de la législation alsacienne, j’ai indiqué à M. Bur que nous nous efforcerions d’attendre que l’expérimentation ait été suffisamment longue avant une mise en œuvre générale. Il faudra que nous en tenions compte dans l’appel d’offres.

Par ailleurs, la répartition du produit de la taxe entre le national et le local n’est pas précisée dans l’amendement parce qu’il s’agit ici de définir des principes. Ce sont des modalités qui figureront dans la loi de finances initiale.

J’ai pris bonne note de la position défendue par M. Paul.

Monsieur Dionis du Séjour, l’obstacle qui empêche l’extension de cette taxe au réseau concédé tient au cadre de la directive « Eurovignette » de 2006. Peut-être pourrons-nous y réfléchir après la directive de 2009, si le Gouvernement et le Parlement le souhaitent, mais pour l’instant nous sommes dans un cadre juridique contraint.

Monsieur Cochet, les régions de France concernées seront désignées dans le cadre d’un dialogue. Au demeurant, elles ont été citées par plusieurs élus : on voit bien où se situent les problèmes liés à une situation périphérique ou à l’aménagement du territoire.

Par ailleurs, il est évident que le dispositif ne favorise pas le transport routier. Du reste, un Brest-Berlin n’intéresse personne. Un transporteur routier gagne de l’argent lorsqu’il effectue des livraisons rapides réfrigérées ou de la logistique. La longue distance ne l’intéresse pas, car elle implique des temps de conduite longs, des pauses, et elle nécessite d’avoir deux chauffeurs. Les modes de transport les plus pertinents pour ces longues distances sont évidemment le ferroviaire, le fluvial ou le maritime.

Monsieur Letchimy, le réseau ultramarin, qui exclut les problèmes de transit de par sa nature même, n’est évidemment pas concerné par cette taxe.

Pour ce qui est des questions de M. Grouard, j’ai déjà répondu sur le report à 2011, sur la limitation de la taxe au réseau non concédé et sur les types d’infrastructures de transport qui bénéficieront du produit. Quant à la décision de prélèvement, elle relève de la LFI.

Je terminerai en disant à M. Gaubert qu’il n’est pas question de payer deux fois. La Bretagne n’est d’ailleurs pas la seule à avoir payé : un grand nombre de départements l’ont fait afin d’accélérer la construction du réseau routier en dépit du manque de fonds provenant de l’État. Régions et départements se sont parfois associés pour prendre en charge en cofinancement jusqu’à 70 % du coût de construction de certaines infrastructures routières.

(L’amendement n° 2058 est adopté.)

M. le président. En conséquence, tous les amendements portant sur les alinéas 13 et 14 de l’article 10 tombent.

Je suis saisi d’un amendement n° 903.

M. Marc Le Fur. Défendu.

(L’amendement n° 903, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 209.

La parole est à M. Claude Bodin.

M. Claude Bodin. Les plus pénibles des nuisances sonores aériennes sont celles produites par les vols de nuit. Afin de réduire les impacts environnementaux du fret aérien, je propose de doubler la taxe affectée au financement de l’aide à l’insonorisation pour les vols de soirée effectués entre 18 heures et 22 heures et pour les vols de nuit effectués entre 22 heures et 6 heures.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Si la commission comprend l’intérêt de la mesure proposée, elle est défavorable à cet amendement, celui-ci relevant du domaine réglementaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Défavorable. Toutefois, je veux dire à M. Bodin que nous disposerons prochainement du projet de charte qui apportera peut-être des éléments nouveaux à ce débat.

(L’amendement n° 209 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 546.

La parole est à M. Joël Giraud.

M. Joël Giraud. Cet amendement est relatif à la problématique du bon usage du réseau ferroviaire existant, affecté actuellement de fréquents désordres, particulièrement préjudiciables aux transports express régionaux. Un récent audit sur l’état des infrastructures ferroviaires françaises a souligné que les investissements effectués avaient tendance à pérenniser les problèmes de ralentissement plutôt qu’à les résoudre. Il existe également des zones où, dès que la température dépasse 28 degrés, ce qui n’est pas rare dans le Sud de la France, il se produit des ralentissements à 40 kilomètres à l’heure sur des portions entières de réseau qui ne sont pas en longs rails soudés.

L’amendement n° 546 a donc pour objet de compléter l’article 10 par l’alinéa suivant :

« La politique durable des transports donne la priorité au bon usage du réseau existant. À cette fin, l’amélioration et la modernisation de la qualité de l’infrastructure ferroviaire existante fait l’objet d’une priorité d’investissement pour les cinq années à venir, dans le cadre d’un contrat pluriannuel entre l’État et Réseau ferré de France, et en application des contrats de projets entre l’État et les régions. »

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Jacob, rapporteur. Défavorable, cet amendement ayant été satisfait à l’alinéa 3.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Dominique Bussereau, secrétaire d’État. Même avis.

(L’amendement n° 546 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 893.

M. Daniel Paul. Défendu.

(L’amendement n° 893, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 10, amendé, est adopté.)

Article 11

M. le président. Mes chers collègues, nous allons entendre les orateurs inscrits sur l’article 11 et commencerons l’examen des amendements lors de la prochaine séance.

La parole est à M. Claude Bodin, premier orateur inscrit sur l’article.

M. Claude Bodin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, l’article 11 doit être l’occasion de mieux définir les conditions de développement durable de l’aéroport Roissy – Charles-de-Gaulle, lesquelles devront impérativement permettre de concilier la croissance du trafic aérien et le développement économique et urbain autour de l’aéroport avec l’amélioration de la qualité de vie des riverains.

Élu d’un département particulièrement exposé – pour ne pas dire sinistré – aux nuisances générées par cet aéroport, je suis très attentif aux dispositions du paragraphe II, relatif au transport aérien. Les aéroports parisiens font l’objet de mesures particulières en raison de l’importance de leur trafic et de la densité des populations survolées : Roissy–Charles-de-Gaulle est en effet le premier aéroport européen et le sixième mondial avec 550 000 mouvements annuels, et le deuxième en nombre avec 60 millions de passagers. Près de 2 millions de Franciliens sont survolés par les avions à moins de 3 000 mètres et plus de 600 000 le sont par des avions à moins de 1 000 mètres, dont 80 % de Valdoisiens, au mépris de leur bien-être et de leur qualité de vie.

À l’issue du Grenelle de l’environnement, deux projets ont donc été annoncés pour réduire les nuisances sonores en Île-de-France. Le premier consiste à relever les altitudes de 300 mètres pour l’ensemble des avions à l’arrivée sur la région parisienne ; le second concerne les procédures d’atterrissage en descente continue.

Parmi les dispositions du plan gouvernemental figure également l’augmentation des aides à l’insonorisation financée par la taxe sur les nuisances sonores aéroportuaires. Ainsi, depuis le 1er janvier 2008, il est appliqué une modulation du taux de la TNSA sur les vols effectués entre 18 heures et 22 heures, afin de mieux prendre en compte la gêne accrue occasionnée par les vols de soirée. La deuxième disposition consiste en un renforcement des pouvoirs de sanction de l’ACNUSA afin de lutter plus efficacement contre les infractions commises par les compagnies aériennes.

Ces mesures constituent une avancée importante en termes de réduction de l’impact sonore. Néanmoins, des revendications essentielles pour la qualité de vie des riverains de cet aéroport sont passées sous silence. Qu’en est-il, notamment, du couvre-feu nocturne réclamé depuis des années ? La présence d’aéroports au voisinage de nombreuses villes ou agglomérations se traduit en effet par des nuisances sonores insupportables pour les riverains, particulièrement la nuit.

Alors qu’Orly bénéficie d’un couvre-feu nocturne, Roissy–Charles-de-Gaulle détient la première place européenne pour le trafic de nuit : entre minuit et 5 heures, on dénombrait 20 369 mouvements en 2007, dont 11 158 pour le fret, et 61 393 mouvements entre 22 heures et 6 heures.

Le couvre-feu, c’est-à-dire la suppression des vols de nuit sur une période de huit heures consécutives, s’avère une nécessité environnementale et de santé publique. Les riverains de l’aéroport Roissy–Charles-de-Gaulle sont en effet à saturation de gêne sonore, une gêne à laquelle participe largement le fret aérien géré dans les infrastructures de cette plateforme aéroportuaire. Paris se situe au sixième rang mondial en 2007 avec 2,3 millions de tonnes de fret générant, comme les chiffres précédents le montrent, l’essentiel des vols de nuit.

Dans un récent rapport, la Cour des comptes indique clairement que « l’évolution du trafic fret contribue à la saturation des infrastructures d’ADP et surtout à l’augmentation des nuisances sonores associées aux vols nocturnes ». Quelles solutions préconisons-nous ? Le transfert de toute extension éventuelle du fret aérien sur la plateforme de Vatry doit être envisagé, voire encouragé. De plus, dans l’esprit des bonus-malus institués par le Gouvernement dans d’autres secteurs, il nous faudra, pour les vols en soirée et les vols de nuit, taxer davantage le fret aérien que le transport de voyageurs.

Face à l’explosion du trafic aérien, nous devons instaurer un plafonnement strict des mouvements en région parisienne : la fixation d’un plafond annuel intangible à 580 000 mouvements et 60 000 créneaux par an devrait inciter les compagnies aériennes à augmenter l’emport moyen, qui reste actuellement figé aux alentours de 105 voyageurs par avion à Roissy – un emport moyen de 150 permettrait de réduire d’un tiers le nombre de mouvements.

M. le président. Il faut vous préparer à conclure, monsieur Bodin.

M. Claude Bodin. Je m’y prépare, mais c’est un dossier important, monsieur le président.

Dans le rapport précédemment cité, la Cour des comptes fixe à 800 000 mouvements le seuil de saturation des pistes de Roissy. Elle met en évidence que ce seuil pourrait être atteint dans les vingt prochaines années en indiquant qu’il semble « réaliste de tabler sur l’atteinte de la fourchette basse de la saturation de Roissy aux environs de 2025 ».

M. le président. Il n’est plus temps de citer, il faut conclure.

M. Claude Bodin. 2025, mes chers collègues, c’est dans dix-sept ans. Or, dix-sept à vingt années, c’est le temps nécessaire à la construction d’un nouvel aéroport. Ne perdons pas de temps !

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, je serai très bref. Je veux simplement revenir sur un point que j’avais déjà soulevé lors des travaux en commission, celui du lien qu’il faut nécessairement établir entre le Grenelle de l’environnement et l’économie touristique, secteur d’activité majeur en France puisqu’il représente 6,5 % du produit intérieur brut. La France est la première destination au monde, et la troisième destination en valeur.

Or l’activité touristique implique un déplacement sur le lieu du séjour, un habitat, et à nouveau des déplacements dans des espaces sensibles. Il me semble donc que l’examen de ce projet de loi relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement doit s’accompagner d’une prise de conscience, à savoir qu’il est nécessaire de faciliter l’accès aux espaces touristiques autrement que par la voiture, en particulier par le train. Il convient également de prendre conscience de la nécessité d’un accès par train rapide, pour tenir compte du fait que, les séjours touristiques étant de plus en plus courts, le temps de trajet revêt une importance croissante. En ce qui concerne le séjour lui-même, nous devons avoir à l’esprit l’impérieuse nécessité de moderniser notre parc hôtelier et, pour ce qui est du transport et du logement, de répondre aux attentes nouvelles des touristes en matière de tourisme durable.

Plus que jamais, il conviendra de faire le lien entre le Grenelle de l’environnement, le volet habitat, le volet transport et l’économie touristique, qui constitue un atout plus précieux que jamais pour la France.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Après les aéroports, l’article 11 évoque les lignes à grande vitesse, dans la continuité du Grenelle de l’environnement qui donne la priorité aux voies ferrées. Il est ainsi indiqué que 2 000 kilomètres de lignes ferroviaires nouvelles à grande vitesse vont être construits d’ici à 2020, les lignes susceptibles d’être concernées étant mentionnées, mais sans que ces inscriptions soient priorisées. J’estime pour ma part qu’il convient d’indiquer les priorités s’appliquant à ces lignes. Par ailleurs, dans la mesure où je vais citer une ligne qui n’est pas inscrite, il faudra soit rallonger le kilométrage global, soit substituer la ligne dont je vais parler à une ligne figurant dans la liste actuelle.

Plusieurs raisons militent pour cette précision. Premièrement, les rédacteurs du projet de loi ont nommément cité, sur la base des 2 000 kilomètres de voies, un certain nombre de relations ferroviaires. Par souci de parallélisme des formes et pour répondre au soin apporté par le Gouvernement d’illustrer ces 2 000 kilomètres par des projets identifiés, il convient de justifier l’apport de 500 kilomètres supplémentaires pour une ligne à grande vitesse entre Paris et le Grand Centre Auvergne. Il s’agit d’une précision, d’une justification et d’un souci de parallélisme des formes.

Deuxièmement, les 500 kilomètres supplémentaires trouvent leur origine dans le programme complémentaire mentionné à l’alinéa suivant. Celui-ci précise expressément la relation qui nous intéresse et justifie la demande de nos collègues – tous les députés de la région Auvergne – à laquelle je m’associe évidemment. Il faut être clair en mentionnant celle-ci expressément comme s’inscrivant dans le doublement de la ligne Paris-Lyon.

La LGV Grand Centre Auvergne s’inscrit dans la désaturation de la ligne TGV Paris-Lyon, une ligne dont la saturation sera effective d’ici à dix ans. Nous nous situons dans le calendrier des douze ans du premier paquet. Les relations TGV mentionnées dans le premier paquet des 2 000 kilomètres présentent l’intérêt que tous ces projets estimés de façon séparée se trouveront sérieusement réduits le jour où une étude montrera clairement qu’ils débouchent sur un double goulet d’étranglement : la ligne Paris-Lyon actuelle et la gare de Lyon.

La LGV Grand Centre Auvergne qui doublerait la ligne Paris-Lyon et utiliserait la gare de Paris-Austerlitz comme tête de pont s'avère la condition nécessaire du succès de tous ces projets.

Par ailleurs, les études préfonctionnelles de l'interconnexion Sud de Paris sont en cours. Elles doivent déboucher sur un débat public envisagé en 2010. La fonction principale de ce projet Transline est de relier les lignes nouvelles radiales Atlantique, Sud-Est et Nord.

Considérant la saturation de la ligne Paris-Lyon et son doublement nécessaire, il convient que cette interconnexion Sud soit aussi reliée au futur doublement de la ligne Lyon-Paris, c'est-à-dire la LGV Grand Centre Auvergne. Ne pas démarrer dès à présent ce projet et ne pas l'inscrire dans le premier paquet, qui serait ainsi porté à 2 500 kilomètres, serait compromettre le succès du projet d'interconnexion Sud, car les tracés des deux infrastructures en Île-de-France sont dépendants l'un de l'autre.

Enfin, nous le savons, l'état actuel d'avancement des projets de lignes nouvelles à grande vitesse n'atteint pas les 1 000 kilomètres, et la nouvelle relation Paris-Lyon par Clermont-Ferrand sera d'une longueur d'environ 550 kilomètres.

Ce projet concerne également l'interconnexion Sud de la ligne à grande vitesse en Ile-de-France. Il est donc complémentaire et s'articule avec ce grand enjeu du Sud parisien.

Autre élément militant pour la clarté, il n’existe pas officiellement de liste donnant un ordre de priorité à ces projets. Mais la priorité déclarée du Gouvernement est la préservation de l'environnement. Parmi les critères retenus pour hiérarchiser les projets, le groupe de travail issu du Grenelle a identifié différents critères, relatifs à l'environnement, à l'équité sociale et territoriale et enfin à l'économie.

La ligne à grande vitesse reliant Clermont-Ferrand à Paris arrive en tête en termes environnementaux, puisqu’on estime à 12 millions le nombre de passagers aériens qu’elle pourrait attirer. Concernant les émissions de CO2, et en adoptant les taux de conversion de l'ADEME, on obtient un gain de 1,2 million de tonnes de CO2 pour un montant théorique de 2000 kilomètres de voies à réaliser. Cette LGV affiche donc à elle seule, selon les mêmes critères, un gain de 500 000 tonnes d'économie de CO2.

Concernant l'équité territoriale et donc la résorption de la fracture territoriale, la LGV Clermont-Ferrand-Paris concerne au moins quatre régions – Centre, Auvergne, Rhône-Alpes et Limousin – auxquelles il convient d'ajouter en interconnexion les Régions PACA, Languedoc-Roussillon, Bourgogne, Pays-de-la-Loire et les régions situées au nord de la capitale, dans leur relation avec les régions précitées.

L'inscription nominative du projet Clermont-Paris dans l'amendement portant substitution des 2 500 kilomètres aux 2 000 kilomètres initiaux répond à un souci de clarté et de respect des formes. Elle est conforme aux actions qu'entend engager l'État pour mettre en œuvre le Grenelle de l'environnement. Les performances, qu'elles soient absolues ou relatives, de la LGV Clermont-Ferrand-Paris illustrent d’ailleurs mieux que tout discours sa nécessaire inscription dans les 2 500 kilomètres.

Le Gouvernement manifesterait sa réelle détermination à remporter les défis de l'économie, du social et de l'écologie en acceptant cette proposition qui se conjuguerait avec le retour de l'État sur les grands dossiers d'aménagement du territoire, d’autant que l’ensemble des élus de la région Auvergne s’associent à ce projet. Monsieur le secrétaire d’État, il serait inconcevable que vous ne souteniez pas un ministre de votre gouvernement, auvergnat lui aussi, qui s’est associé à tous les élus pour faire avancer ce dossier !

M. Jean Proriol. Bravo !

M. le président. Merci, monsieur Baquet, pour cette intervention œcuménique.

La parole est à M. Olivier Jardé.

M. Olivier Jardé. La ligne TGV Paris-Lille a maintenant quinze ans. La croissance du trafic de 4 % par an témoigne de son réel succès et oblige parfois à supprimer les arrêts à Arras pour pouvoir faire circuler les rames en nombre suffisant.

La saturation de cette ligne étant prévisible à moyen terme, il faut l’anticiper. Une solution existe : la création d’une nouvelle ligne, comme celle qui vient d’être évoquée entre Paris et Clermont-Ferrand pour doubler le Paris-Lyon. Il s’agirait en l’occurrence de la ligne Paris-Amiens-Londres via la côte picarde, qui permettrait non seulement de désengorger la ligne du Nord mais également de gagner vingt minutes sur le trajet Paris-Londres. Cette nouvelle ligne contribuerait également au développement économique et à la création d’emplois dans la région, tout en préservant le cadre de vie selon des critères conformes au développement durable.

L’ensemble des élus de la Somme, Alain Gest, Jérôme Bignon, Gilbert Mathon et Maxime Gremetz, ainsi que les élus du Pas-de-Calais avec Daniel Fasquelle, ont déposé un amendement pour inscrire cette ligne sur le programme supplémentaire des 2 500 kilomètres dans une perspective à long terme.

Nous avons également déposé un amendement visant à la création d’un barreau entre Creil et Roissy, qui ne sont séparés que par sept kilomètres. Cela permettrait une interconnexion avec l’aéroport international et le réseau TGV.

Enfin, la ligne Paris-Amiens-Boulogne n’est électrifiée que jusqu’à Amiens, ce qui oblige à un changement de locomotive, lequel nécessite un arrêt de douze minutes. Douze minutes, ce n’est pas grand-chose, mais il existe un projet d’électrification de la ligne, quarante kilomètres au nord d’Amiens, qui obligerait à un deuxième changement de locomotive sur le trajet, soit vingt-quatre minutes d’arrêt au total, pour le coup rédhibitoires. Nous avons donc déposé un autre amendement demandant une électrification globale de la ligne.

L’ensemble de ces propositions s’inscrivent parfaitement dans le Grenelle de l’environnement. C’est pour cette raison que nous sommes persuadés que nous aurons l’accord de tous sur ce projet.

M. le président. La parole est à M. Alain Gest.

M. Alain Gest. L’article 11 est particulièrement satisfaisant dans la mesure où il met en avant le développement des lignes à grande vitesse. Cependant, les élus picards ont le sentiment d’être ramenés vingt ans en arrière. En effet, il y a vingt ans, en dépit d’une formidable union politique et de la volonté de treize élus, dont j’étais, qui avaient séquestré le préfet, le gouvernement de l’époque a choisi, comme disent les mauvaises langues, de relier Paris à Londres en passant par Mauroy et Delebarre, en d’autres termes via Lille et Dunkerque. Il nous semblait pourtant que la ligne la plus droite pour aller de Paris à Londres passait nécessairement par Amiens – toutes les cartes géographiques l’attestent – et nous avons, à l’époque, été fort déçus de cette décision.

Qu’en est-il aujourd’hui, dix-sept ans plus tard ? Amiens est une des très rares capitales régionales qui ne soit pas desservie par le TGV. L’actuelle ligne TGV est proche de la saturation, ce qui fait apparaître encore plus fantaisiste le projet d’un troisième aéroport international dans l’est de la Somme, censé être desservi par une ligne déjà saturée.

Tout le monde s’accorde sur la nécessité d’une seconde ligne. Le président de la SNCF, M. Pepy, que nous avons auditionné, affirme qu’elle doit être construite, et la presse régionale rapporte des déclarations identiques de la part des responsables de Réseau Ferré de France. Quant à vous, monsieur le secrétaire d’État, vous savez à quoi vous en tenir, puisque le projet fut étudié par un comité interministériel d’aménagement du territoire, à l’époque où vous étiez secrétaire d’État auprès de Gilles de Robien, au ministère de l’équipement.

Toutes ces raisons font qu’aujourd’hui nous ne comprenons pas que cette ligne ne soit pas dans la liste figurant dans le projet de loi. C’est sans doute un oubli.

M. Daniel Fasquelle. Que nous allons réparer !

M. Alain Gest. J’espère qu’il sera réparé par le vote de l’amendement qu’à l’initiative de Daniel Fasquelle, nous présentons avec nos collègues de Picardie pour que Paris soit reliée à Londres par Amiens et Calais et qu’à cette occasion quelques TGV puissent également desservir la côte picarde et la côte d’Opale.

M. le président. La parole est à M. Serge Letchimy.

M. Serge Letchimy. Monsieur le secrétaire d’État, Alain Gest vous a légitimement réclamé des infrastructures, je n’en ferai rien. On pourrait pourtant imaginer des améliorations considérables pour chaque pays d’outre-mer, où les déplacements sont compliqués. Il y aurait à faire avec les transports en commun en site propre, les TCSP, en Martinique et en Guadeloupe ou avec la liaison Saint-Laurent - Cayenne en Guyane. Cependant, il n’y a, à ma connaissance, aucun projet de cette nature pour l’outre-mer.

Bien que nos îles réclament une attention particulière en matière de transport de marchandises et de passagers, je ne déposerai pas d’amendement pour réclamer des équipements. Les collectivités et les contrats de plans sont là pour ça. Je souhaite simplement attirer votre attention sur la situation catastrophique créée par la LOTI en 1982, notamment lorsqu’il a fallu que le conseil général, pour choisir un délégataire de service public, règle la question des neuf cents transporteurs qu’étaient les « taxicos », nos taxis individuels.

Cette loi a d’autre part abouti, avec la mise en place des communautés de commune et des communautés urbaines, à une superposition d’autorités administratives. Or, si l’on veut organiser efficacement nos transports, de manière à pouvoir instaurer une intermodalité entre le maritime et le terrestre et à combiner au mieux le TCSP et le transport routier quand plusieurs communes sont concernées, il est indispensable de réformer la LOTI pour n’avoir plus qu’une seule autorité. Ce n’est qu’à partir de là que l’on pourra organiser une politique des transports digne de ce nom.

On nous avait promis une ordonnance en février 2007, mais le délai est dépassé depuis le mois d’août dernier. Il est donc important que vous preniez acte de mon amendement, lorsque je vous le présenterai demain.

La LOTI a également dilué les responsabilités en matière d’organisation des transports maritimes, et nous nous trouvons dans la situation absurde où une région bordée par la mer ne peut développer son transport public maritime, pas plus qu’elle ne peut développer son transport public terrestre parce que, là encore, entre la région et le département, nul ne sait où est l’autorité juridiquement fiable en la matière.

Une seconde réforme est donc nécessaire. C’est l’objet de ma demande. Il faut en effet aller jusqu’au bout pour nous permettre d’organiser un réseau de transports cohérent tant au plan terrestre qu’au plan maritime.

M. le président. La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron. Le TGV rapproche et intègre les territoires dans l’espace européen ; vous l’encouragez et on ne peut que se joindre à ce vœu du Gouvernement. Vous voulez réduire l’avion à son domaine de pertinence. Vous cherchez à réduire les émissions de gaz à effet de serre liés aux transports individuels. Tout cela va dans le sens du Grenelle.

À la lecture de l’alinéa 10 de l’article 11, on se prend cependant à faire l’inventaire des territoires qui vont bénéficier de la création de lignes nouvelles de TGV. Il en est quelques-uns qui ne s’y trouvent pas, les Normandies sont de ceux-là.

Nos deux régions ont connu, il y a une trentaine d’années, une situation privilégiée, notamment grâce à l’arrivée d’une nouvelle technologie, le turbotrain. Mais cette technologie n’a pas évolué et est maintenant dépassée ! Aujourd’hui, les Normandies s’éloignent de Paris ; chaque année, les trains sont plus en retard, chaque année, le mécontentement augmente. Pourtant ces territoires sont proches de Paris ; ils ont vocation à s’intégrer à l’Île-de-France.

Le dixième alinéa de l’article 11 n’est donc pas satisfaisant. Il est absolument impératif de mieux relier ces deux régions, non seulement à l’Île-de-France, mais aussi au réseau européen de lignes à grande vitesse. C’est pourquoi, avec l’ensemble des parlementaires de Basse-Normandie, mais aussi avec des parlementaires de Haute-Normandie qui déposeront un amendement similaire, nous vous appelons à réagir. Nous ne voulons pas être les mal-aimés du transport ferroviaire, les délaissés de l’effort de l’État en ce domaine.

Cette situation est si absurde qu’aujourd’hui une compagnie aérienne régionale s’apprête à ouvrir de nouveau une ligne Cherbourg-Caen - Paris-Orly – il y avait quinze ans qu’une telle ligne n’existait plus ! Le réseau ferroviaire est si obsolète et si congestionné, le matériel a tellement vieilli qu’aujourd’hui l’aérien retrouve une pertinence dans ce territoire si proche de l’Île-de-France : c’est quand même un paradoxe !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont.

Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont. L’article 11 s’inscrit dans une logique de rééquilibrage des modes de transport utilisés par les voyageurs en faveur du transport ferroviaire, ce dont nous nous réjouissons évidemment. Toutefois, la liste des 2 000 km de lignes nouvelles annoncées à l’alinéa 10 doit nécessairement être amendée par l’inscription, dès cet alinéa, du barreau TGV Limoges-Poitiers, qui ne pourrait décemment être renvoyé à un programme complémentaire ultérieur.

Cette inscription est une évidence pour de nombreuses raisons.

Évidence, d’abord, dans la cohérence globale de ce projet.

Évidence, aussi, car il s’agit d’une impérieuse nécessité pour un bassin de vie d’un million d’habitants actuellement totalement exclu de la grande vitesse ferroviaire et pour lequel cette infrastructure jouera un rôle déterminant en termes d’intégration au réseau européen.

Évidence, encore, car à l’issue d’un débat public d’une exceptionnelle qualité, un vaste consensus s’est dégagé autour de ce projet, tant chez les élus politiques de tous bords que chez les acteurs socio-professionnels, dans le monde associatif et plus largement dans les populations concernées.

Évidence, toujours, au regard du consensus sur le tour de table financier qui a permis un financement par l’État, RFF, la SNCF et les collectivités territoriales de l’intégralité des études, qui à ce jour avancent bon train, si je puis me permettre ce jeu de mots. Je salue d’ailleurs l’enthousiasme et la diligence des responsables techniques de RFF. Les discussions engagées sur les diverses participations à la réalisation même de l’axe Limoges-Poitiers ne posent pas de problèmes a priori, certaines collectivités ayant d’ores et déjà délibéré à ce sujet.

Évidence, surtout, au regard des enjeux environnementaux qui font l’objet de ce texte. En effet, en mettant Limoges à deux heures de la capitale, cette infrastructure rendra les déplacements ferroviaires particulièrement attrayants, alors qu’à ce jour, utiliser le Téoz relève du sacerdoce, tant en termes de temps – 3 heures 10 à 3 heures 20, sans compter les retards récurrents – qu’en termes de confort, lire ou travailler relevant de l’exercice impossible. La situation est si mauvaise que nombre de voyageurs se rabattent, bon gré mal gré, sur la voiture, voire pour les plus privilégiés sur l’avion.

Évidence, enfin, car cette ligne ne manquera pas de servir de catalyseur pour les transports ferroviaires régionaux, qui joueront alors pleinement leur rôle de rabattement.

Monsieur le secrétaire d’État, l’amendement gouvernemental que vous avez déposé va dans ce sens et il est parfaitement dans l’esprit de celui que j’ai déposé avec plusieurs de mes collègues, notamment Mme Boulestin, M. Rodet, Mme Coutelle et M. Claeys. Je me permets de le saluer chaleureusement et de vous en remercier.

M. le président. La parole est à M. Yanick Paternotte.

M. Yanick Paternotte. L’article 11 aborde le réseau de lignes à grande vitesse, le transport aérien, l’insertion des aéroports, les nuisances sonores et atmosphériques aux abords des aéroports.

S’agissant du fret ferré, vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, je milite activement pour le développement du réseau de lignes à grande vitesse et pour la création d'un réseau européen de fret sur ces lignes : le réseau « Eurocarex », labellisé par la Commission européenne et figurant dans les conclusions du Grenelle de l'environnement.

En termes de réseaux à grande vitesse, deux projets me semblent stratégiques pour l'avenir.

D’une part, l'interconnexion Ouest de la région parisienne, constituant, à terme, une rocade à grande vitesse en Île-de-France – MM. Duron et Bouvard ont repris cette idée dans le document de l’association TDIE. Cette infrastructure permettrait d'éviter la saturation prévisible de l'interconnexion déjà présente à l’Est, qui joint Roissy à Marne-la-Vallée et à Massy ; elle offrirait à terme une rocade ferrée de troisième génération à la région capitale en connectant Roissy, Cergy-Pontoise, Saint-Quentin-en-Yvelines et Massy.

D’autre part, la liaison Lille-Lyon par Saint-Quentin, Reims, Châlons-en-Champagne et Vatry. C’est une liaison stratégique d'ambition européenne, et je suis convaincu que le réseau TGV de demain doit épouser les mêmes logiques d'aménagement du territoire que celles du réseau autoroutier. Ce projet Lille-Lyon par Reims s’inscrit dans un axe majeur des échanges Nord-Sud européens. Il permettrait, à l'horizon 2020, de connecter l'aéroport de Vatry au réseau européen.

La réalisation d'une première tranche fonctionnelle avec le barreau Reims-Vatry permettrait de mettre en réseau l’aéroport de Roissy avec celui de Vatry et de permettre la croissance du fret aérien à Vatry. Je sais que c’était là l’une de vos propositions ; je ne doute donc pas que votre ministère porte toute l’attention requise à la mise à l’étude de cette tranche.

Ces deux projets méritent d'être retenus : c'est le sens de deux amendements que j’ai déposés.

S’agissant de l’aérien, nous savons qu’il représente 4 % des émissions de gaz à effet de serre, mais que l’Union européenne prévoit un doublement du trafic à l’horizon 2020. Cette perspective est confirmée par la vente d’avions commerciaux, qui a explosé ces dernières années ; depuis cinq ans, 3 000 à 4 000 avions neufs ont été commandés dans le monde entier.

Plusieurs amendements proposent d’inscrire les volumes de protection environnementaux dans la loi. Je sais bien que c’est très contesté, mais je crois qu’il faudrait enfin définir les couloirs aériens et les approches. Aboutir à un ciel unique européen ne suffit pas.

Nous nous fixons pour objectif non pas de limiter mais de faire baisser le bruit aux abords des aéroports ; notre excellent collègue Claude Bodin a abordé tout à l’heure les thèmes des vols de nuit et du fret.

Si nous avons conscience qu’un couvre-feu total de Roissy–Charles-de-Gaulle ne peut pas aboutir à court terme, une telle mesure reste néanmoins notre objectif à long terme, un objectif qui ne pourra être atteint que dans le cadre d’une harmonisation européenne. En attendant, des progrès immédiats peuvent être réalisés : la descente lisse, c’est bien, mais avant 2011, c’est mieux, comme ce sera le cas à Orly dès 2009 ! Supprimer les vols de groupe acoustique 2 et 3 entre 20 heures et 6 heures du matin, c’est possible : cela concerne énormément de vieux coucous, et cela nous permettrait de mieux dormir ! Le couvre-feu du doublé sud fait consensus, on peut le phaser entre minuit, voire 23 heures, et 5 heures du matin, là où les vols sont en décroissance la nuit ces dernières années, comme le confirme la direction générale de l’aviation civile. Enfin, et surtout, il faudrait appliquer un couvre-feu sur l’aéroport du Bourget comme sur celui d’Orly, aux mêmes horaires et aux horaires blocs aéronautiques.

Gérer, c’est prévoir : un doublement du trafic à l’horizon 2020 doit, malgré tout, remettre d’actualité le principe du troisième aéroport, comme l’a également indiqué Claude Bodin.

Bien sûr, dans cet esprit, Vatry peut jouer un rôle d’appui de Roissy, mais il faut alors qu’un TGV relie les deux aéroports ! C’est seulement en mettant les aéroports en réseau par la grande vitesse que nous arriverons à reporter une partie du transport commercial de fret et de voyageurs de l’aviation vers le train. C’est aussi comme cela que, demain, le réseau TGV européen et le réseau Carex permettront un report modal efficace.

Sans aménagement du territoire par les lignes à grande vitesse, le développement aéroportuaire ne sera ni durable, ni gérable.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Fourneyron.

Mme Valérie Fourneyron. Favoriser pour les voyageurs l’utilisation du rail aux dépens de la route ou de l’avion, nous y sommes tous favorables. Investir massivement dans les réseaux ferroviaires, voilà une idée que nous partageons tous, sur ces bancs et au sein de nos collectivités territoriales ! Je suis donc très heureuse de vous confirmer que, comme l’a déjà dit Philippe Duron, la Normandie vous soutient sans réserve dans cette démarche – et je vous confirme qu’elle compte bien s’inscrire dans vos plans.

Car, c’est vrai, nous vous proposerons, par nos amendements, de compléter votre carte de France des investissements, avec des traits de feutre gras vers nos régions qui semblaient oubliées jusqu’ici – vous n’êtes pas tout seul, monsieur Gest !

Nos régions normandes méritent d’être connectées par un réseau efficace et performant. À cela, il y a deux raisons majeures. La première a déjà été évoquée à propos du fret : la Normandie compte deux grands ports, mais on retrouve les conteneurs massivement sur la route ; les sillons ferroviaires sont insuffisants pour que le fret n’utilise pas le réseau routier, même si des efforts importants ont été faits pour le fluvial : nous en sommes tous d’accord.

Quant au transport de voyageurs, la ligne Le Havre-Rouen-Paris, qui transporte tout de même 3 500 personnes par jour, est très insuffisante. Le trajet de Rouen à Paris prenait une heure il y a dix ans, une heure et quart aujourd’hui, dans le meilleur des cas – et même une heure trois quarts ce matin, encore une fois ! Chacun peut donc témoigner que cette ligne n’est pas à la hauteur des ambitions que nous nourrissons pour ce territoire.

La ligne compte en effet deux goulets d’étranglement majeurs : le Mantois où les trains venant de Normandie ralentissent systématiquement, d’abord : il est nécessaire de doubler les sillons et donc d’en réserver certains aux lignes normandes ; mais aussi la gare de l’agglomération rouennaise. Les quais y sont en nombre insuffisant, trop courts et encaissés. Nous y avons déjà beaucoup travaillé et beaucoup investi mais, à l’heure actuelle, il n’est pas question d’y faire du multimodal et d’accueillir à la fois le fret et les voyageurs.

Vous le savez, monsieur le secrétaire d’État : les collectivités ont déjà beaucoup investi, et la région Haute-Normandie investira encore plus de 90 millions d’euros pour le chemin de fer dans le contrat de projets. Il nous semble toutefois que l’ascenseur est un peu timide vers notre territoire, et j’espère que nos amendements pourront être pris en compte afin d’améliorer enfin la situation du rail en Haute-Normandie, pour le fret comme pour les voyageurs. C’est en tout cas l’engagement qu’a pris M. Jean-Louis Borloo publiquement, il y a quelques jours, dans notre capitale ; j’espère qu’il sera tenu.

M. le président. La parole est à M. Alain Rodet.

M. Alain Rodet. Quelques mots sur l’article 11 et en particulier son alinéa 10. Comme Mme Pérol-Dumont l’a indiqué il y a un instant, le barreau Poitiers-Limoges, partie intégrante de la liaison Sud Europe Atlantique, est un projet qui nous tient à cœur. Ce projet a beaucoup progressé au cours des trois ou quatre dernières années puisque nous en sommes actuellement aux phases d’étude. Nous devrions connaître, dès l’été prochain, le tracé ainsi que les points d’arrivée à Poitiers et à Limoges, et d’après les responsables techniques de Réseau ferré de France, la DUP pourrait être prise dès le début de l’année 2011.

Cet état d’avancement nous permet de revendiquer – et je sais, monsieur le secrétaire d’État, que vous êtes sensible à cette demande puisque vous avez déposé également un amendement au nom du Gouvernement – la remontée de la ligne Poitiers-Limoges de l’alinéa 11 à l’alinéa 10.

C’est important pour nous, bien sûr, mais également pour tout le grand Sud-Ouest et la façade atlantique. Jusqu’à ce jour, le grand quart sud-ouest de la France et la façade atlantique étaient, en matière de liaisons à grande vitesse, désavantagés par rapport à ce que les historiens et les géographes appellent la Lotharingie. Mais je sais que vous avez pris une large part dans ce montage de la liaison Sud Europe Atlantique. Les deux réunions qui se sont tenues, sous votre présidence, à Bordeaux fin juillet et fin septembre, avec le préfet coordonnateur, le préfet d’Aquitaine, montrent bien que, grâce à ce projet, une donnée jusqu’à présent insuffisamment appréciée est enfin prise en compte : je veux parler de l’ouverture du grand Sud-Ouest sur la péninsule ibérique. Le fait que l’Espagne et le Portugal aient complètement intégré l’Union européenne nous oblige aujourd’hui à un effort d’investissement important en matière de grande vitesse.

Ce projet présente un intérêt économique indéniable, mais il est également tout à fait « Grenello-compatible ».

M. le président. La parole est à M. Bernard Lesterlin.

M. Bernard Lesterlin. Nombre de grandes infrastructures ferroviaires ont une vocation économique et d’aménagement du territoire supranationale. Certaines s’inscrivent d’ailleurs dans des projets clairement identifiés comme européens, je prendrai l’exemple du Kiev-Lisbonne, dont une section majeure traversera notre pays de part en part – le barreau Est-Ouest mentionné à l’alinéa 11 y participe d’ailleurs. Or nulle part l’Europe n’apparaît dans cet article 11. Chaque pays recherche son propre mode de financement des infrastructures de transport qui concernent son territoire, nous venons de le voir pour les routes.

L’élargissement ayant pratiquement abouti, n’est-il pas temps pour l’Union de recycler une partie des fonds structurels et du fonds de cohésion en faveur d’une contribution européenne aux infrastructures qui, par leur nature, sont de dimension européenne ? Est-ce aux seuls usagers de payer les infrastructures ferroviaires ? Si tel n’est pas le cas, on ne voit pas pourquoi le contribuable français devrait être seul à financer ce qui contribuera aussi largement au développement économique de la Slovaquie et du Portugal.

L’Europe en tant que telle doit s’interroger sur les grandes infrastructures qui sont à son échelle. N’est-ce pas à la présidence française d’introduire cette question au Conseil européen ? Je verse cette réflexion au débat à l’attention de M. le secrétaire d’État, afin de connaître les intentions de la France à cet égard.

M. le président. La parole est à M. Daniel Paul, dernier orateur inscrit sur l’article.

M. Daniel Paul. L’unité Le Havre-Rouen constitue, si on y ajoute le port de Paris qui se situe au bout de la chaîne, le premier ensemble portuaire français. Mme Fourneyron vient de le déplorer : on mettait moins de temps il y a cinquante ans qu’aujourd’hui pour aller de Paris au Havre ou du Havre à Paris. Je vous invite à imaginer la carte de France en prenant en compte non plus les distances mais le temps nécessaire pour les parcourir entre Paris et Marseille, Paris et Bordeaux, Paris et Nantes, Paris et Brest. Vous constaterez avec surprise qu’en changeant d’unité, la carte de France n’a plus du tout la même forme.

Certes, la différence avec le temps que l’on mettait il y a cinquante ans à parcourir la distance Le Havre-Paris n’est souvent pas énorme, dix, quinze ou vingt minutes, mais c’est quelquefois plus, beaucoup plus même, tout simplement parce qu’à l’absence de ligne à grande vitesse s’ajoute un entretien insuffisant des voies et la vétusté des rames. Sans compter les difficultés que les voyageurs rencontrent à l’approche de Paris – Mme Fourneyron a parlé du Mantois – dues au fait qu’à Saint-Lazare débouchent deux régions peuplées, la Basse-Normandie et la Haute-Normandie, plus un trafic de banlieue assez dense.

Le Havre et Rouen s’éloignent donc de la capitale au fur et à mesure que d’autres villes, portuaires ou non, s’en rapprochent.

Monsieur le secrétaire d’État, il est impossible que cette liaison ne figure pas dans la liste de vos priorités. Nous ne vous demandons pas un TGV. Ce que nous voulons, c’est tout simplement qu’au XXIe siècle, au moment où d’autres se rapprochent à grande vitesse, nous ne nous éloignions plus et que la ligne soit sécurisée. Nous voulons simplement être sûrs d’arriver à l’heure. Cela dit, si nous pouvons gagner du temps sur la liaison, tant mieux.

L’autre souhait des habitants des deux agglomérations du Havre et de Rouen, c’est une liaison directe avec les aéroports de Roissy et d’Orly. Compte tenu de la distance, la question de la présence des aéroports en Normandie se pose en effet. Nul doute qu’une liaison sécurisée sur la région parisienne constituerait la meilleure solution pour permettre aux Normands d’être rapprochés non seulement de la capitale, mais également des aéroports de la capitale.

M. le président. Nous avons fini d’entendre les orateurs inscrits sur l’article 11.

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Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, jeudi 16 octobre 2008, à neuf heures trente :

Suite du projet de loi relatif à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 16 octobre 2008, à une heure vingt-cinq.)