Paris est imprenable, mais la bataille se veut symbole. Wallerand de Saint-Just, qui présentait son équipe ce mercredi, ne s’en cache pas : il ne fera pas tant campagne pour Paris que pour son parti, lequel se sent pousser des ailes depuis qu'un sondage l'a crédité de 8% des intentions de vote dans la capitale (1). Le vice-président du FN, Florian Philippot, présent lors de la conférence de presse ce mercredi, confirme : «Nous avons très clairement fait le choix de faire de Paris un enjeu national.» Avant d'ajouter : «Wallerand de Saint-Just est le troisième homme de cette campagne et ce troisième homme va troubler le jeu des soeurs jumelles.»

Paris, Wallerand de Saint-Just n’y réside pas. Il a «traîné [ses] guêtres pendant vingt ans en Picardie, dans la Somme» où il a été secrétaire départemental du FN, conseiller municipal et conseiller régional, habite aujourd’hui les Hauts-de-Seine. Il a un pied-à-terre à Paris, y paye donc la taxe d’habitation, mais ne figure pas sur les listes électorales. Autant dire qu'il voit sa campagne comme un tremplin, avec l’assurance d’une forte attention médiatique et de pouvoir faire entendre la voix d’un Front national qui n’en finit plus de se la jouer présentable.

Il compte d’ailleurs intégrer à sa liste des membres du Rassemblement bleu marine, version light du Front national, et «armée de réserve» constituée d’afficionados de Marine Le Pen. Wallerand de Saint-Just, 63 ans dont 27 ans de Front, avocat historique du parti et du père Le Pen, est un mariniste convaincu. Certains, dans le camp Gollnisch, le soupçonnent d’avoir voulu tuer le père quand il a vu le vent tourner vers la fille. «J’ai évolué, balaie-t-il, les époques changent, [Jean-Marie Le Pen] a été très important pour moi, mais il s’est mis en marge. Il faut perpétuellement avoir les mains dans le cambouis.»

Il refuse, pour autant, de condamner le père. Alors qu’on l’interroge sur l’électorat homosexuel à Paris, il rétorque : «"Sidaïque", ça n’était qu’un mot. Jean-Marie le Pen n’a aucun problème avec les homosexuels (…) Nous, on a des rapports avec eux comme avec les autres êtres humains. Un certain nombre pense d’ailleurs qu’avec nous, leur sécurité serait mieux assurée.» Désamorcer une question, réamorcer l’arme juste derrière : sous ses airs d'homme tranquille, assis sur une banquette de brasserie, Wallerand de Saint-Just est au taquet.

Son propre père, qui fut longtemps maire d’un village picard, donnait toujours au visage historique du FN sa signature. Nourri, dit-il, par l’importance du «devoir» et par un antigaullisme fort communiqués par des parents et grands-parents marqués par les deux guerres, Saint-Just ne s’est pas toujours intéressé à la politique – la «droite nationale n’existait pas, en 1968», dit-il.

«On était régulièrement attaqués par les bolchos»

Jeune homme, il débarque à Paris d’une Picardie où il n’a pas vraiment suivi Mai 68 ni la guerre d’Algérie — «il n’y avait pas la télé» — pour faire son droit à Assas, et, en 1972, prend part aux actions musclées du Gud, le Groupe union défense, tendance blousons noirs, ratonnades et négationnisme. «On était régulièrement attaqués par les bolchos, se justifie-t-il. Je n’ai adhéré à rien, je ne me souviens pas [que le Gud ait été] extrêmement structuré. On faisait des bagarres. De l’autre côté, les bolchos étaient très bien organisés . Circulez, y’a rien à voir… Lui est avant tout un militant catholique. En 1974, il participe à «la reprise de Saint-Nicolas-du-Chardonnay». Rejoint le mouvement Chrétienté et Solidarité de Bernard Antoine, dont les «liens étroits avec les chrétiens maronites (…) mis en danger par le Hezbollah, les Palestiniens, l’islam en général» le conduisent à plaider entre 1993 et 1996 devant la cour de justice libanaise pour Samir Geagea. Il plaide ensuite pour les Serbes à La Haye.

Entre-temps, François Mitterrand est devenu Président, a fait entrer – puis sortir – les communistes au gouvernement. De quoi raviver chez Wallerand de Saint-Just le dégoût des «bolchos» et du communisme, qu’il accuse d’être partiellement construit sur la persécution des chrétiens. «Marx n’a pas dit que des bêtises, mais le marxisme conduit les peuples à la souffrance la plus grande, affirme-t-il. Cette société idéale, avec cette idée de faire le bonheur des gens malgré eux, que l’on va remodeler les sociétés, n’existe pas. C’est une façon d’échapper à la réalité.» Il entre au FN «entre 1986 et 1987», alors que le parti commence à se dédiaboliser en attirant des personnalités présentables, comme l'universitaire Bruno Gollnisch. Saint-Just en devient rapidement le trésorier, intègre le bureau politique, et se présente sans succès en 1989 aux municipales parisiennes. Il se retire peu à peu du militantisme chrétien pour ne plus se consacrer qu’au Front national.

«Refaire de Paris la ville des classes populaires»

Wallerand de Saint-Just dit «beaucoup aime[r] Marine» ; vante son «pragmatisme», sa «décontraction». Vice-président du FN depuis 2007, il est de ses plus fidèles. «[Au Front National], on est d’une paranoïa extraordinaire. Il faut s’en débarrasser, regarder les choses en face, de façon détachée. [Marine Le Pen], aucun problème humain ne la choque, elle ne catalogue pas les gens en fonction de leur race ou de leur orientation sexuelle. Elle s’en fout, et elle a raison.»

Les méthodes sont celles de la tendance mariniste. «Il avait une image d'aristo, de tradition, mais l'histoire a montré que c'était quelqu'un de très ouvert (...) et d'un calme olympien quelle que soit la situation», dit de lui Louis Aliot, vice-président du FN et compagnon de Marine Le Pen. Alors que l’on discute du jeune âge du candidat frontiste à Villeneuve-sur-Lot, Wallerand de Saint-Just explique, fièrement, que son propre directeur de campagne à Paris a 22 ans (2).

Son credo, c’est aussi de fustiger les élites, «déconnectées» : «Anne Hidalgo est retraitée depuis l’âge de 50 ans (…) NKM ne fait rien», lance-t-il. Tellement déconnectées, les élites parisiennes, qu’elles auraient fait de Paris «une ville pour les privilégiés et les touristes». «Delanöe et Hidalgo ont voulu transformer la sociologie de Paris, affirme-t-il, C’est significatif : Delanöe n’est pas de gauche, il s’en fout.» Lui veut «refaire de Paris la ville des classes populaires, des classes moyennes et des familles». Et propose de revenir à une taxation des loyers identique à celle de l’après-guerre, en 1948. On lui objecte qu’il ne s’agit pas d’une prérogative municipale : «Il faudrait un gouvernement qui accepte de le faire», concède-t-il.

C’est Marine Le Pen qui lui a proposé de se lancer à Paris. Il sait qu’il perdra – mais pas plus que le FN n’y a déjà perdu jusqu’ici - malgré la marge de manœuvre qu’il croit avoir face à une «affiche NKM/Hidalgo qui ne [lui] convient pas». Qu’importe, il ne fait pas campagne pour gagner. Qu’importe aussi, si, sur ce coup, il est plus proche du père que de la fille.

 (1) Sondage Ifop-Fiducial réalisé via internet pour le Journal du dimanche du 31 août 2013. L'échantillon ne portait, néanmoins, que sur 881 personnes inscrites sur les listes électorales, représentatives des Parisiens et âgées de 18 ans minimum.

(2) Après notre entretien, c'est finalement Bernadette de la Bourdonnaye qui a été annoncée à ce poste. Elle sera également candidate dans le VIIe arrondissement. 

Kim HULLOT-GUIOT
Profession politique
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  • portraitSénatrice PS, la très sécuritaire fille des quartiers Nord, en tête de la primaire socialistes, tape avec constance sur le gouvernement en place. Par Olivier Bertrand
9 commentaires
dusaule
dusaule

"aucun problème avec les homosexuels (…) Nous, on a des rapports avec eux ....'


Quand on vous dit que le FN fait feu de tout bois!

markou
markou

 IL N´Y A PAS QUE PARIS EN FRANCE !

Dans un certain nombre de communes où il sera présent, le Front National sera en mesure de l’emporter en mars prochain. Dans ces cas, les élus du Front National, qui seront majoritaires, seront amenés à administrer ces municipalités.

Afin d’anticiper l’arrivée de ses élus dans ces municipalités, le Bureau Exécutif du Front National, réuni le 2 septembre dernier, a décidé de créer le Comité de Gestion et de Suivi des Administrations (CGSA). Cette nouvelle structure a été confiée à Steeve Briois , Secrétaire Général du FN. Il aura pour mission de constituer et de coordonner un réseau de cadres territoriaux (DGS, DGA, Directeur financiers…) amenés demain à compléter les équipes d’encadrement et d’administration déjà existantes de ces futures municipalités Front National.

La création de cette cellule atteste de la volonté du Front National de ne rien laisser au hasard, d’anticiper notre arrivée aux commandes dans certaines municipalités et d’y assurer une bonne gestion.

Par ailleurs, Nicolas Bay, Directeur de la campagne des élections municipales (communes de + de 3 500 habitants) et Secrétaire Général adjoint, vient d’analyser le profil des candidats investis à ce jour :

À l’issue de la Commission d’investiture du 6 septembre 2013, le FN a accordé l’investiture à 623 têtes de liste pour les élections municipales de mars 2014, dont 514 dans des communes comptant plus de 3500 habitants. 14% des candidats ont moins de 30 ans et 26% des candidats ont moins de 40 ans. 32% de ces têtes de liste investies sont des « primo-candidats » (n’ayant jamais été candidat titulaire ou tête de liste à une élection).

Dans les 39 villes françaises les plus importantes, comptant 100 000 habitants ou plus, le Front National est presque totalement en ordre de bataille puisque 33 têtes de listes ont déjà été désignées : Paris, Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Strasbourg, Montpellier, Bordeaux, Lille, Rennes, Reims, Le Havre, Saint-Etienne, Toulon, Grenoble, Dijon, Angers, Saint-Denis (La Réunion), Villeurbanne, Aix-en-Provence, Limoges, Brest, Nîmes, Clermont-Ferrand, Tours, Metz, Perpignan, Orléans, Boulogne-Billancourt, Mulhouse, Rouen, Caen et Nancy.

Enfin, on compte, parmi les candidats investis, de nombreuses personnes issues d’autres formations politiques : 49 candidats tête de liste sont des anciens militants, candidats ou élus locaux de l’UMP, UDF ou Modem ; 18 sont issus du MPF ou de Debout la République et 27 sont issus du PS, du PC ou du NPA.

klaxxophone
klaxxophone

non, mais il s'agit là d'une blague...........; Wallerand de Saint-Just, un gus qui respire le travail, la sueur, le labeur, la classe des opprimés, la classe moyenne !

Combien de temps faut il aux gens qui votent fn pour comprendre qu'avec ces élus, on revient vers l'ancien régime, ou l'on évince l'abolition des privilèges, ou le droit du pauvre est un mot creux ???

Ou les curés seront nos penseurs !

 

markou
markou

@klaxxophone 

Il y a + d´athées au FN que vous ne pouvez vous l´imaginer.

Il y a aussi + de 3500 musulmans qui votés FN  en 2012.