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Écoutes de Sarkozy : étaient-elles nécessaires et proportionnées ?

Le Point.fr - Publié le - Modifié le

Des faits de "corruption" au trafic d'influence, comment l'affaire des écoutes a-t-elle rebondi ? Le secret professionnel existe-t-il encore ? Éclairage.

Nicolas Sarkozy, ici en juin 2012.
Nicolas Sarkozy, ici en juin 2012. © Thomas Samson/AFP
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Placer un ancien président sur écoute ? Rien d'anormal. Depuis que Nicolas Sarkozy a quitté l'Élysée, il est redevenu un justiciable comme les autres et n'est plus protégé par son immunité présidentielle. Mais il l'est, en revanche, par le secret professionnel... Car l'ancien avocat a renfilé la robe noire. Son bâtonnier a donc dû en être informé par le juge d'instruction, comme l'exige l'article 100-7 du Code de procédure pénale (CPP).

Écoutes non limitées dans la durée

L'affaire a commencé en avril 2013. Une information judiciaire est ouverte pour des faits de "corruption" datant de 2007. Les juges d'instruction soupçonnent un soutien financier de la Libye à la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Ils le placent sur écoute ainsi que deux de ses anciens ministres, Claude Guéant et Brice Hortefeux.

 
 
 

Selon les articles 81 et 100 du CPP, des écoutes peuvent être ordonnées "si la nécessité de l'information l'exige". Et elles doivent l'être sur la base d'éléments précis. "Il faut que les personnes mises en cause soient susceptibles d'avoir commis une infraction punie d'au moins deux ans soit comme auteurs soit comme complices, étant précisé que ces écoutes peuvent être mises en place soit pour vérifier la réalité de l'infraction visée soit pour l'écarter", rappelle l'ancien magistrat Jean-Claude Kross.

Cette mesure, qui prend dans le cadre de l'instruction la forme d'une commission rogatoire aux services enquêteurs, n'est pas susceptible de recours. Reste que, après sa mise en place, "le juge d'instruction a carte blanche pour écouter qui il veut, quand il veut et le temps qu'il veut. En effet, la loi française ne limite pas leur durée qui est de quatre mois renouvelable sans limites", précise l'avocat Christophe Ayela.

Nouveaux faits non couverts par la mesure

En l'occurrence, la surveillance aurait duré près d'un an, révèle le site du Monde... À cette occasion, les juges d'instruction découvrent que Nicolas Sarkozy utilise un autre portable dont l'abonnement aurait été souscrit sous un nom d'emprunt. Ils placent alors ce deuxième appareil sur écoute.

Ce qu'ils en récoltent ? Des conversations entre l'ancien président et son conseil, Thierry Herzog, qui aurait utilisé, lui aussi, un portable acquis sous un nom d'emprunt. La confidentialité des conversations entre l'avocat et son client, par nature à l'abri de toute oreille indiscrète, avait-elle des raisons de se surprotéger ? Selon nos confrères du Monde.fr, les deux hommes évoquaient la procédure en cours dans l'affaire Bettencourt et, plus particulièrement, la question cruciale de la saisie des agendas de Nicolas Sarkozy qui contiendraient des éléments décisifs sur... l'affaire Tapie.

Mais ce n'est pas tout. En tirant les fils, c'est un autre personnage qui sort du chapeau : le premier avocat général à la Cour de cassation Gilbert Azibert, soupçonné d'avoir renseigné l'ancien président sur l'évolution de la procédure de saisie de ses agendas, et ce, en échange d'une gratification professionnelle : Azibert aurait souhaité devenir conseiller d'État à Monaco.

En levant le voile sur ces faits nouveaux à propos desquels les premiers juges d'instruction n'étaient pas habilités à enquêter, les écoutes sont-elles encore légales ? "L'article 100 du CPP précise que l'écoute doit être motivée par la nécessité de l'instruction. Aller au-delà des raisons ayant justifié l'ouverture de l'information judiciaire, c'est agir hors la loi. Il faudra donc s'assurer que les juges ont stoppé toute écoute portant sur ces faits nouveaux, au risque de voir la procédure annulée", fait observer Me Ayela. Une faille procédurale n'est donc pas exclue entre le moment où les premiers juges ont eu connaissance de ces conversations et le moment où ils ont transmis le dossier au tout nouveau Parquet national financier (PNF).

Participation à une infraction

Le 26 février, une nouvelle information judiciaire confiée à deux juges financiers est ouverte, visant des faits constitutifs de deux infractions : la violation du secret de l'instruction et le trafic d'influence, qui consiste à demander à un fonctionnaire un avantage lié à sa fonction en contrepartie d'une rémunération ou d'un avantage particulier.

Depuis, les choses s'emballent. Le 4 mars, les policiers de l'Office central de la lutte contre la délinquance financière déboulent dans le bureau de Gilbert Azibert. Son domicile bordelais est aussi perquisitionné. Les deux résidences de Thierry Herzog sont visitées et ses deux téléphones portables saisis. "On ne peut saisir chez un avocat de pièces couvertes par le secret qu'à la condition qu'elles révèlent intrinsèquement que l'avocat aurait pu participer à une infraction. Le représentant du bâtonnier présent lors de la mesure peut s'opposer à la saisie d'une pièce et demander qu'elle soit mise sous scellés pour être transmise sans délai au juge des libertés et de la détention (JLD), lequel doit statuer dans les cinq jours de cette transmission." Par ailleurs, pour être exploités, "les disques durs et d'une manière générale tout objet matériel qui stocke des informations multiples doivent être transmis à des experts sous le contrôle du JLD, et ce, pour éviter une ingérence dans les données extérieures à l'affaire sur laquelle enquête le juge d'instruction", explique l'ancien bâtonnier de Paris Christian Charrière-Bournazel. Le bâtonnier de Paris Pierre-Olivier Sur a plaidé jeudi devant le JLD la restitution de ces deux téléphones portables. La décision du juge est attendue lundi.

Motifs "nécessaires et proportionnés"

Reste qu'avec de telles mesures le secret professionnel s'en trouve cruellement menacé. C'est ce que dénoncent les avocats, dont certains ont interpellé les pouvoirs publics "sur les atteintes graves et répétées" portées à ce "pilier des droits de la défense". Ainsi, souligne Me Charrière-Bournazel, "le secret professionnel est un devoir fondamental pour l'avocat, car il est le corollaire du droit de tout citoyen en démocratie de pouvoir se confier à un confident nécessaire qui ne le trahira pas. Il ne peut subir d'ingérence que pour des motifs nécessaires et proportionnés, exige la CEDH. Ici, ce qui est hors norme au sens littéral de cette expression, c'est le fait d'avoir écouté un avocat pendant un an sur des faits aussi anciens. La durée de cette mesure ne serait sans doute pas jugée par la cour de Strasbourg comme "nécessaire et proportionnée" si elle venait à être saisie", doute l'ancien bâtonnier.

De Snowden à Sarkozy, en passant par Bettencourt, les écoutes ont le vent en poupe, transparence de la vie politique oblige. "Cette banalisation des écoutes est très inquiétante. La transparence est devenue la vertu, et le secret le péché. Cela bouleverse tout !" s'emporte l'avocat Daniel Soulez-Larivière, membre du Club des juristes. "En outre, fait-il observer, l'hypocrisie qui consiste à dire j'écoute le client et pas son avocat est inadmissible ! Même si l'on ne retranscrit que les propos qui laissent soupçonner qu'il pourrait se rendre coupable d'une infraction, c'est comme si l'on collait un micro dans son cabinet et qu'on écoutait tous les conseils qu'il donne à son client. Bref, on renoue avec l'intégrisme judiciaire des années 90, ce qui me semble particulièrement dangereux."

S'il apparaît a posteriori qu'il n'existait aucun indice préalable d'infraction, la nullité de ces actes d'écoutes pourra être sollicitée. Mais le mal aura été fait, au détriment du secret professionnel.

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89 Commentaires

marjae le 11/03/2014 à 16:19  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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Le déclin de la France

Alors d'abord on s'occupe du sociétal, maintenant on tape sur Sarkozy,
38 ministres pourquoi faire ? Le président s'occupe de l'Ukraine, alors que ce n'est pas notre affaire et qu'il ne peut rien régler -il a besoin du gaz russe et il vend deux mistral à la Russie cash -
Qui va enfin s'occuper de la France, de ses dettes, de ses nombreux fonctionnaires, des reformes - pour le moment ce n'est que des gesticulations et je pense que monsieur Hollande veut absolument faire monter le Front National - il a peur de Sarkozy et veut affronter le F. N en 2017 -
qu'il se méfie, l'histoire ne se répétera peu être pas -
Qu'on laisse faire la justice et qu'on en parle moins, bien que d'après moi elle n'est pas indépendante du tout.

Alain Faux le 11/03/2014 à 14:07  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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En conclusion : ces écoutes sont peut êtres légales, peut être illégales

S'il apparaît a posteriori qu'il n'existait aucun indice préalable d'infraction, la nullité de ces actes d'écoutes pourra être sollicitée. Mais le mal aura été fait, au détriment du secret professionnel.
d'un autre côté, s'il apparaît a posteriori qu'il existait bien des indices préalables d'infraction, ces actes d'écoutes ne pourront pas être annulés. Mais le mal aura été fait, au détriment de la réputation des magistrats.
Tant qu'on ne sait pas ce qu'il y a dans le dossier...

bleuette le 11/03/2014 à 14:01  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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Disproportioné

Une honte de la part de ce gouvernement qui abuse de toutes les prérogatives pour tenter d'enfoncer au maximum l'homme dont ils ont peur qu’on ne reprenne les rênes de la France dans l'intérêt des Français et du Pays. Cela les priveraient de leur confort, de leurs vies de frasques mais Ô combien valorisantes pour eux, alors que le pays s'enfonce irrémédiablement. Pour cela, ils sont prêts à tout et il est triste de constater que Hollande n'a pris que les pratiques cyniques pour ne pas dire autre chose de pire, à son mentor Mitterrand. Souhaitons seulement le revers de la médaille pour lui. Triste président, triste gouvernement.

kroniker le 11/03/2014 à 13:44  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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Inquisition

L'affaire des écoutes se résume à de l'inquisition, si ce n'est de la dictature.
Accepteriez-vous, comme Maitre Herzog, de demander aux flics l'autorisation de prendre une douche (porte ouverte), de voir les flics perquisitionner la chambre de vos gosses (faits rapportes par Maitre Dupont-Moretti chez Bourdin ce jour à 8h30) ? Madame Taubira dit "quand il y a suspicion de... ". Cela s'appelle de la présomption de culpabilité. Je rappelle que l’eugénisme c'est justement éliminer... Au cas où. Quant au fait qu'elle n'ait pas été au courant c'est, ou un mensonge, ou une faute professionnelle. Décidément Sarkozy en aura fait ch... du monde ! Aujourd'hui il fait peur à Hollande... Mais aussi à ceux de droite qui veulent le "fauteuil" en 2017.

Sparte le 11/03/2014 à 12:01  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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@ jako 35

M. Sarkozy, ministre de l'intérieur, aurait, d'après vous, placé des gens sur écoute ? Curieux, jamais entendu parler de cette "affaire" là. Vous pensez bien que si cela avait été le cas, ses nombreux détracteurs ne se seraient pas privés de lui mettre cela aussi sur le dos... Une affaire de plus pour encore l'enfoncer ne les aurait pas gênée. Mais voyez vous nous n'avons jamais entendu parler de cela. Il ne faut pas renverser la situation. Aujourd'hui c'est M. Sarkozy qui est la victime d'écoutes décidées par le pouvoir en place.
M. Hollande a même dit à des députés socialistes : " M. Sarkozy, je le surveille, je sais exactement ce qu'il fait... " Après Mitterrand et ses pratiques cyniques, force est de constater que Hollande a bien retenu les leçons et n'a pris de son mentor que le mauvais côté.

jako35 le 11/03/2014 à 10:47  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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L'UMP n'a jamais écouté aux portes ? Ils s'affolent !

Quand M. Sarkozy était ministre de l'intérieur s'est-il gêné de placer des gens sur écoute ? Quand son ami M. Hortefeux était ministre de l'intérieur s'est-il gêné d'écouter certaines personnes (affaire Takkiedine). Quand M. Guéant, le grand conservateur du musée du ministère de l'intérieur était le premier flic de France s'est-il ému des écoutes téléphoniques cotre certains magistrats ? Les cris d'orfraie de la droite n'impressionnent personne. Pendant 10 ans, ils ont eu le loisir d'espionner à loisir les gêneurs. Allons messieurs de la droite un peu de pudeur... Vous feriez mieux d'avoir le courage de faire l'inventaire du quinquennat de N. Sarkozy qui a ruiné notre pays.

loulou41 le 11/03/2014 à 09:53  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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Les écoutes

La première chose à faire supprimer la politique de la justice les syndicats de gauche et de droite non rien à faire dans la justice, la justice doit être neutre et il ne doit y avoir aucun syndicat dans la justice et pourquoi un juge ne doit pas justifier ses actes il a tous les pouvoirs et en abuse parfois pas responsable est-ce normal ?

vivelavie le 11/03/2014 à 09:44  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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@Imago - Aucun système de communication n'est protégé

Aucun système de communication n'est protégé. Les moyen dit d'Interception Légale informatisés permettent d'écouter toute communication, fixe RTC, RNIS, mobile, SMS, MMS, IP, Mail quel que soit le contenu. La limite réside dans le nombre, et le fait que ces écoutes sont dite "légales". On peut écouter le demandeur et le demandé, déclencher l'enregistrement sur des mots (vocal, texte... ) clé pour limiter le volume stocké et surtout permettre une relecture humaine ciblée. Les suisses et les israéliens ont de bons produits, nous aussi, et les marges sont bien meilleures que pour tout autre produit Telecom.

JP le 11/03/2014 à 09:08  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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@ jcsback

Intéressant votre : "Vous accusez Hollande sans preuve et vous défendez un Sarkozy qui n'a pas l'air tout blanc quand on entend les écoutes de Buisson ou celles avec son avocat. " A vous lire, on peut parfaitement vous retourner le compliment concernant et les "preuves" de la culpabilité de Sarko mais "aussi" les preuves de l'innocence de Hollande. Rien ne prouve à ce terme que la justice n'ait pas agi d'elle même pour coincer celui qui voulait supprimer les juges d'instruction pourtant bien utiles dans ce genre d'affaires mais j'imagine que c'est un hasard. La méthode qu'emploie la droite pour défendre les dirigeants qui la volent depuis des années est un cas d'école qu'il faudrait étudier tant c'est troublant.

Petrus31 le 11/03/2014 à 08:51  Signaler un contenu abusif Signaler un contenu abusif

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Et pour ceux

Qui trouvent que faire des enquêtes 5 ou 6 ans après les faits est anormal, ils ont raison : l'affaire DSK etait déjà réglée aux USA 2 ans après le debut. En France, Chirac : plus de 15 ans, Tiberi toujours en cours...

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